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Tardiglaciaire en Europe

Le Tardiglaciaire en Europe est la pĂ©riode qui sĂ©pare le dernier maximum glaciaire, qui s'achève il y a environ 19 000 ans, du dĂ©but de l'Holocène, il y a 11 700 ans, et durant laquelle se produit une remontĂ©e irrĂ©gulière des tempĂ©ratures, entrecoupĂ©e par des rechutes. Le Tardiglaciaire prend fin quand le rĂ©chauffement climatique devient durable, ce qui correspond au dĂ©but de l'Holocène, pĂ©riode actuelle caractĂ©risĂ©e par un climat tempĂ©rĂ©.

De droite à gauche : maximum glaciaire ; terres basses émergées au milieu du Tardiglaciaire ; submersion du Dogger Bank vers

Changements géologiques

Un bloc erratique abandonné par le recul des glaciers, gmina de Krzyżanowice en Pologne, photographié en 2021.

La fonte des glaciers a pour conséquence une élévation générale du niveau des mers et de vastes zones auparavant à sec sont inondées par la mer, surtout dans les terres autour de ce qui constituera la mer du Nord (Pays-Bas, Danemark et Suède actuels) : le lac Ancylus se transforme en mer Baltique, la Manche se crée séparant les îles Britanniques du continent européen, la vaste île du Dogger Bank (originellement de la taille de la Sardaigne) est submergée.

La dĂ©glaciation commence vers 19 000 ans avant le prĂ©sent (AP). L'Écosse et l'Irlande connaissent plusieurs phases d'avancĂ©e et de recul des glaciers jusqu'au dernier refroidissement du Dryas rĂ©cent avant leur disparition complète[1].

Depuis -13000, la mer Noire Ă©tait un lac gĂ©ant d'eau douce qui lentement s'assĂ©chait jusqu'Ă  ĂŞtre Ă  100 m au-dessous du niveau de la MĂ©diterranĂ©e (un peu comme la mer Morte ou le lac Assal). Lorsqu'en l'an 7150 av. J.-C. la MĂ©diterranĂ©e dĂ©borda le seuil du dĂ©troit du Bosphore, l'eau salĂ©e se dĂ©versa Ă  travers le dĂ©troit et, selon un modèle thĂ©orique, submergea plus de 100 000 km² du plateau continental en deux ans ; ce modèle catastrophiste, oĂą W. Ryan and W. Pitman voient l'origine du rĂ©cit biblique du DĂ©luge, est cependant contestĂ© et plusieurs auteurs prĂ©fèrent dĂ©crire un dĂ©versement progressif en plusieurs Ă©tapes[2].

Sur le reste des côtes européennes les conséquences sont moins désastreuses du fait que les côtes étaient plus abruptes : seuls quelques kilomètres de terres sont perdus, hormis les terres basses de la côte atlantique française et la côte italienne de la mer Adriatique. Vers 7000 av. J.-C., il était toujours possible de rejoindre l'Angleterre à sec, mais vers 6500 av. J.-C. tous les passages terrestres furent définitivement coupés.

Environnement naturel et humain

Le mégacéros, grâce au recul des glaciers, remonte vers le nord jusqu'aux îles Britanniques avant de disparaître vers 7000 av. J.-C. Illustration de F. Doflein et R. Hesse, 1910.

Pendant la dernière période glaciaire, entre la calotte glaciaire subarctique et les Alpes, la plus grande partie de l'Europe est couverte par la toundra, plus humide dans l'ouest du continent, plus steppique dans la partie orientale, pratiquement dépourvue d'arbres sauf quelques forêts-galeries et bosquets isolés de saules, pins et bouleaux. Les troupeaux de grands herbivores adaptés au froid, mammouth, rhinocéros laineux, renne, procurent une nourriture abondante aux tribus de chasseurs-cueilleurs. Le sud de l'Europe est moins froid mais les animaux de montagne comme le bouquetin et le chamois se nourrissent à une altitude plus basse qu'aujourd'hui. Avec le réchauffement, la végétation se diversifie avec l'apparition de noisetiers et aulnes suivis par l'orme, le tilleul, le charme et le chêne[3].

Le renne fait un bref retour dans le sud-ouest de la Grande-Bretagne entre 17 800 et 17 200 avant le prĂ©sent, apparemment sans prĂ©sence de chasseurs humains, avant de disparaitre de la rĂ©gion[1]. Certaines espèces s'Ă©teignent dĂ©finitivement comme le mammouth et le rhinocĂ©ros laineux. Ils sont remplacĂ©s par les cerfs communs, les cochons sauvages, les chevreuils, les aurochs et les Ă©lans, venus de l'Europe mĂ©ridionale. Le cheval sauvage, commun en Europe pendant l'Ă©poque glaciaire avec les sous-espèces Equus caballus gallicus et Equus caballus latipes, fournissait un gibier abondant aux humains et il est souvent reprĂ©sentĂ© dans l'art rupestre. Contrairement Ă  ce qu'on a cru, il ne disparaĂ®t pas complètement au Tardiglaciaire mais on ne le rencontre que sur de rares sites comme Chalain (Jura) vers 3050 av. J.-C.[4].

Animaux de la faune post-glaciaire et humains, peinture rupestre de la grotte d'El Cogul (Catalogne).

Les changements climatiques rapides du Tardiglaciaire europĂ©en sont souvent vus comme une des causes des bouleversements culturels survenus dans les sociĂ©tĂ©s de chasseurs autour de 14 000 ans avant le prĂ©sent[5]. Le MagdalĂ©nien est remplacĂ© par trois cultures rĂ©gionales dont les aires se recoupent en partie : Azilien en Europe de l'ouest, Épigravettien en Europe mĂ©diterranĂ©enne, culture Federmesser dans la plaine d'Europe du Nord. Les grandes lames de pierre taillĂ©e sont remplacĂ©es par une industrie microlithique faite de petits Ă©clats faciles Ă  tailler et Ă  remplacer, montĂ©s sur un manche de bois qui remplace les outils antĂ©rieurs en os[6]. La disparition des grands troupeaux de rennes entraĂ®ne l'abandon des grandes chasses collectives de la pĂ©riode glaciaire au profit de pratiques de chasse, notamment au cerf, plus dispersĂ©es et individualisĂ©es[7]. Selon Jacques Pelegrin, ce changement explique aussi le passage d'une industrie de grandes lames Ă  une technique microlithique : les projectiles tirĂ©s dans des chasses individuelles en terrain boisĂ© ont beaucoup plus de chances de se perdre, d'oĂą l'importance de rĂ©duire leur coĂ»t de fabrication[8]. Dans la rĂ©gion pyrĂ©nĂ©o-cantabrique pour laquelle la documentation fossile est abondante, le cerf remplace le renne comme principal animal consommĂ©; la proportion de bouquetin reste Ă  peu près constante d'une pĂ©riode Ă  l'autre tandis que des gibiers de climat tempĂ©rĂ©, chevreuil et sanglier, apparaissent ; le lapin est largement consommĂ© en Catalogne. Ces changements alimentaires se produisent dans des communautĂ©s de tradition magdalĂ©nienne avant l'adoption du modèle azilien[9]. Le propulseur, difficile Ă  utiliser en terrain boisĂ©, est abandonnĂ© au profit de l'arc[9].

L'art préhistorique avait atteint son apogée au Magdalénien, tant dans l'art mobilier que dans l'art pariétal[10] ; il connaît une apparente éclipse durant l'Épipaléolithique avec l'abandon des grottes profondes remplacées par des lieux de culte en plein air ; l'art mobilier n'est plus représenté à l'Azilien que par des motifs géométriques élémentaires[11]. Cependant, deux foyers d'art rupestre apparaissent et se prolongent jusqu'au début du Néolithique : l'art du Levant espagnol, de caractère narratif avec des scènes de chasse et de combat, montre des humains stylisés et des animaux de la faune post-glaciaire (cerf, aurochs, bouquetin) ; celui de Scandinavie, dans le Finnmark, illustre des espèces de climat froid désormais caractéristiques de l'Europe subarctique (renne, élan, ours, baleine, phoque[12]).

Références

  1. Paul Pettitt & Mark White, p. 426.
  2. Valentina Yanko-Hombach, Allan S. Gilbert, Nicolae Panin & Pavel M. Dolukhanov, The Black Sea Flood Question: Changes in Coastline, Climate, and Human Settlement, Springer, Netherlands, 2007
  3. Marcel Otte in Histoire de l'humanité, t. 1, p. 518.
  4. Véra Eisenmann, “L’évolution des Équidés”, Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 41 | 2010 DOI https://doi.org/10.4000/emscat.1542
  5. A. Chevallier, 2016, p. 16-17.
  6. Marcel Otte in Histoire de l'humanité, t. 1, p. 532-541.
  7. A. Chevallier, 2016, p. 17.
  8. J.P. Fagnart, p. 116.
  9. A. Chevallier, 2016, p. 27.
  10. Hans Georg Bandi in Histoire de l'humanité, t. 1, p. 579-582.
  11. Marcel Otte in Histoire de l'humanité, t. 1, p. 540.
  12. Hans Georg Bandi in Histoire de l'humanité, t. 1, p. 582-586.

Bibliographie

Articles connexes

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