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Equus caballus gallicus

Equus gallicus

Equus caballus gallicus (le « cheval de Gaule Â») est une sous-espèce prĂ©historique d’Equus caballus (le cheval) ayant vĂ©cu au PalĂ©olithique supĂ©rieur. Il apparaĂ®t Ă  l'Aurignacien en raison de changements climatiques, pour arpenter le territoire de l'actuelle France au Gravettien et jusqu'Ă  la fin du SolutrĂ©en. Ses fossiles, datĂ©s de 40 000 ans jusqu'Ă  15 000 ans environ avant notre ère, sont proches de ceux d’Equus caballus germanicus (le cheval germanique) et pourraient ne pas correspondre Ă  une sous-espèce valide. DĂ©crit pour la première fois par François Prat en 1968, il est haut d'environ 1,40 m et se distingue de Equus caballus germanicus essentiellement par sa denture et sa taille lĂ©gèrement plus rĂ©duite.

Statut de validité

Entre les spécialistes il n'y a pas de consensus au sujet de la validité de la sous-espèce Equus caballus gallicus. D’après les découvertes paléontologiques sur de nombreux sites du territoire français actuel, comme ceux de Solutré, de Camiac et de La Quina, François Prat postule qu’Equus caballus gallicus a progressivement remplacé Equus caballus germanicus et que les deux sous-espèces sont distinctes. Au contraire, Véra Eisenmann, chercheuse du CNRS et du MNHN, postule que les spécimens attribués à Equus caballus gallicus ne présentent pas une variation suffisamment distincte de la sous-espèce Equus caballus germanicus[1]. Il est tout de même admis qu’Equus caballus arcelini, une sous-espèce elle bien différenciée, a bien remplacé les populations constituées par les spécimens traditionnellement attribués à l'ensemble Equus caballus germanicus et Equus caballus gallicus.

DĂ©couverte et taxonomie

La dĂ©couverte de cette sous-espèce fait suite Ă  l'examen des ossements de chevaux trouvĂ©s Ă  SolutrĂ©, et rĂ©cupĂ©rĂ©s par Jean Combier. Remarquant des diffĂ©rences de morphologie associĂ©es Ă  diffĂ©rentes datations (ce qui suggère diffĂ©rentes espèces ou sous-espèces parmi ces fossiles), François Prat et ce dernier postulent l'existence de deux types de chevaux diffĂ©renciĂ©s sur ce site : Equus caballus gallicus et Equus caballus arcelini[2]. Le nom choisi fait rĂ©fĂ©rence au territoire qu’Equus caballus gallicus a occupĂ©, la Gaule. Parce qu'il forme la majoritĂ© des fossiles retrouvĂ©s Ă  SolutrĂ©, c'est gĂ©nĂ©ralement Ă  Equus caballus gallicus que se rĂ©fère le nom, encore très courant, de « cheval de SolutrĂ© Â»[3]. Il est considĂ©rĂ© comme une sous-espèce. L'histoire Ă©volutive des ÉquidĂ©s restant sujette Ă  controverses, il arrive (rarement) qu'il soit considĂ©rĂ© comme une espèce du genre Equus, nommĂ©e Equus gallicus[Note 1].

Tous les prĂ©historiens et palĂ©ontologues ne reconnaissent pas l'existence de ce taxon[4]. Vera Eisenmann postule que Equus caballus germanicus peut prĂ©senter des variations de taille et de denture, et donc qu’Equus caballus gallicus n'a jamais existĂ©[4]. Selon elle, Equus caballus arcelini aurait succĂ©dĂ© directement Ă  Equus caballus germanicus 15 000 ans avant notre ère, avec des changements morphologiques beaucoup plus visibles[5] - [6].

Description

Peinture rupestre représentant quatre têtes de chevaux de profil.
Les chevaux de la grotte Chauvet, peints pendant l'Aurignacien (31 000 AP), sont peut-ĂŞtre des Equus caballus gallicus.

Histoire Ă©volutive

D'après une théorie émise par N. Spassov et N. Iliev en 1997, il semblerait que « coupé de la population-mère d’Europe du Nord et Centrale par des barrières climatiques, Equus (caballus) germanicus ait évolué en gallicus puis en arcelini à l’Ouest de l’Europe », tandis que les chevaux d'Europe de l’Est et du Sud-Est ont connu une évolution différente[7]. Le passage d’Equus caballus germanicus à gallicus semble assez progressif d'après Vera Eisenmann, ce passage accompagnant les modifications du biotope. Du fait que les chevaux se nourrissent de plus en plus de graminées, leur dentition se modifie[8].

Apparence et caractéristiques du squelette

Equus caballus gallicus est dĂ©crit pour la première fois par François Prat en 1968. De taille infĂ©rieure Ă  celle d’Equus caballus germanicus (soit 1,40 m en moyenne), il prĂ©sente une morphologie diffĂ©rente, avec des caractères caballins mieux affirmĂ©s sur sa denture[9] - [10] - [11]. Il est aussi plus lĂ©ger que ce dernier, dotĂ© de sabots larges et d'une tĂŞte courte et volumineuse pourvue de dents robustes, reposant sur une encolure courte et large. En se basant sur les peintures pariĂ©tales et les chevaux primitifs comme le Przewalski, les spĂ©cialistes lui attribuent une robe bai dun ou bai pangarĂ© (pelage brun-jaune clair, crins et extrĂ©mitĂ©s noirs, dĂ©coloration du dessous)[3].

Époque

Equus caballus gallicus apparaît après la première moitié du Würm III[3]. Il est indissociable de l'Aurignacien et du Gravettien[2]. Il perdure jusqu'au Solutréen puis au Magdalénien[12]. Entre -35 000 et -22 000 B.P., le climat de la France actuelle est froid ou tempéré. On trouve alors de vastes zones où poussent des herbes, propices aux troupeaux de chevaux. Il est ensuite possible qu'une nouvelle espèce ou sous-espèce mieux adaptée aux contraintes climatiques[Note 2] ait succédé à Equus caballus gallicus dans le Sud-ouest français, à la fin du Würm IV, mais cette question reste discutée[3].

Biotope et Ă©thologie

Equus caballus gallicus vit de préférence dans les « milieux de steppes sèches à composées » comportant peu de plantes hygrophiles[2], au climat froid et sec, où l'herbe abonde. Grégaire, il se rassemble en vastes troupeaux et affectionne les terrains vastes et découverts, ce qui lui permet de se mouvoir rapidement pour chercher des prairies où il peut se nourrir. Il supporte une grande amplitude thermique, de même que le climat tempéré[3].

Lieux de présence

Equus caballus gallicus est frĂ©quent dans le Sud-ouest de l'actuelle France, particulièrement l'Aquitaine, le PĂ©rigord et le Quercy[13]. Ses restes sont identifiĂ©s sur diffĂ©rents sites prĂ©historiques, notamment Camiac (en Gironde, 35 000 ans avant notre ère[14]) et Jaurens (en Corrèze, 30 000 ans avant notre ère)[2] - [15]. Cette sous-espèce succède gĂ©nĂ©ralement Ă  Equus caballus germanicus, puis est elle-mĂŞme remplacĂ©e par Equus caballus arcelini, associĂ©e au MagdalĂ©nien.

Solutré

Photo de paysage représentant une roche surplombant une vallée verdoyante.
La roche de Solutré, près de laquelle ont été découverts des restes d’Equus caballus gallicus.

Solutré est le premier site où les ossements de cette sous-espèce ont été identifiés. Il semblerait qu'Equus caballus gallicus soit apparu dans la région durant la seconde moitié du Würm III, comme successeur d’Equus caballus germanicus qui l'arpentait depuis le Würm II[3] - [16]. Les chevaux passaient vraisemblablement souvent à proximité du rocher de Solutré durant leurs migrations saisonnières, hivernant dans les vallées du Rhône et de la Saône pour remonter sur des plateaux à l'Ouest avec le retour de la chaleur. Les groupes humains du Paléolithique profitaient du passage de nombreux troupeaux pour abattre des animaux[13].

Ardennes

En 1985, Jean-Pierre Penisson synthĂ©tise des travaux Ă  propos des nombreux restes de chevaux prĂ©historiques retrouvĂ©s dans la rĂ©gion ardennaise. Ainsi, durant le WĂĽrm II, Equus caballus gallicus s'Ă©tablit dans la rĂ©gion de Dommery. Selon le laboratoire de gĂ©ologie du quaternaire et prĂ©histoire de l’UniversitĂ© Bordeaux-I, ce cheval pourraient ĂŞtre Ă  l’origine de la race actuelle de l'Ardennais[17]. De leur cĂ´tĂ©, les chercheurs belges remarquent qu'Ă  la mĂŞme Ă©poque, Equus caballus germanicus est progressivement supplantĂ© par Equus caballus gallicus, qui devient un gibier très prisĂ© par l’être humain dès la fin du PalĂ©olithique supĂ©rieur. Durant l'Holocène, le cheval se fait plus rare dans la rĂ©gion[17]. On a longtemps vu l'Ardennais (l'une des races de chevaux les plus anciennes de France[18] et probablement le plus ancien cheval de trait d' Europe[19]) comme un descendant direct du « cheval de SolutrĂ© Â»[Note 3] - [18] - [20], qui au 50e millĂ©naire av. J.-C. vivait dans les bassins de la SaĂ´ne et de la Meuse, et se serait Ă©tabli sur des plateaux schisteux au climat rigoureux Ă  la mĂŞme Ă©poque[21]. Cependant, ren ne prouve que les chevaux du site de SolutrĂ© aient migrĂ© vers les Ardennes[17].

La Quina

Sur le site de La Quina Ă©galement, Equus caballus gallicus succède Ă  Equus caballus germanicus[22]. Cette Ă©volution est vraisemblablement liĂ©e Ă  des changements climatiques. La datation par le carbone 14 la fait remonter Ă  43 000 ans environ, ou Ă  35 000 ans, les diffĂ©rences Ă©tant peut-ĂŞtre dues au manque de prĂ©cision de cette mĂ©thode[23].

Grotte Tournal

SituĂ©e sur la commune de Bize-Minervois dans l'Aude, elle connaĂ®t aussi une transition entre les deux sous-espèces, datĂ©e d'environ 33 000 ans avant notre ère[24] - [5], est donc plus tardive qu'Ă  La Quina[5]. La majoritĂ© des ossements retrouvĂ©s appartiennent Ă  Equus caballus gallicus[25].

Notes et références

Note

  1. Vera Eisenmann notamment emploie cette graphie.
  2. Avec le réchauffement du climat, des forêts commencent à recouvrir ces territoires, formant un biotope beaucoup moins favorable aux chevaux
  3. Le cheval de Solutré n'existe pas en tant que tel, plusieurs sous-espèces de chevaux étant identifiées sur ce site, même si Equus caballus gallicus en représente la majorité.

Références

  1. Eisenmann 1991, cité par Armand 1998, p. 353
  2. Guadelli 1986
  3. Pozzi, Depracter et de La Torre 2004, p. 63
  4. Eisenmann 1991, cité par Armand 1998, p. 353
  5. Armand 1998, p. 353
  6. Eisenmann 1991, p. 753
  7. (en) N. Spassov et N. Iliev, « The wild horses of eastern europe and the polyphylethic origin of the domestic horse », Anthropozoologica, nos 25-26,‎ , p. 753-761, 2 fig.
  8. Patou-Mathis 1994, p. 24
  9. Prat 1968
  10. Prat 1969
  11. Langlois 2005, p. 73-110
  12. Eisenmann 1991, p. 751
  13. Pozzi, Depracter et de La Torre 2004, p. 64
  14. Guadelli 1987
  15. Mourer-Chauviré 1980
  16. Guadelli 1991, cité par Jean-Luc Guadelli et Françoise Delpech, « Les Grands Mammifères du début du Paléolithique supérieur à Temnata », dans Temnata Cave. Excavation in Karlukovo Karst Area, Cracow, Jagellonian University, , p. 53-158
  17. Jean-Pierre Penisson, « Les origines du cheval dans les Ardennes », Terres Ardennaises, no 10,‎ (lire en ligne)
  18. Union des éleveurs de chevaux de la race ardennaise, « Description de la race trait ardennaise » [PDF], sur Haras nationaux (consulté le )
  19. Marianne Kottenhoff, « L'ardennais, un colosse au cœur d'or », Cheval Star, no 115,‎ (lire en ligne)
  20. Marcel Vacher, Le cheval, , 98 p. (lire en ligne), p. 55
  21. Collectif, Chevaux et poneys, Éditions Artemis, , 128 p. (ISBN 978-2-844160256, lire en ligne), p. 105
  22. Armand 1998, p. 345
  23. Armand 1998, p. 352
  24. Patou-Mathis 1994, p. 1
  25. Patou-Mathis 1994, p. 18

Annexes

Article connexe

Bibliographie

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Articles

  • François Prat, Le Cheval de SolutrĂ©, Equus caballus gallicus Prat, 1968, Bordeaux, Soc. Anthropologique du Sud-Ouest, , 4, 6 p., 2 fig., 3 tabl.
  • C. Mourer-ChauvirĂ©, « Le gisement plĂ©istocène supĂ©rieur de la grotte de Jaurens Ă  Nespouls, Corrèze, France : Les ÉquidĂ©s », Nouv. Arch. MusĂ©um Hist. nat. Lyon,‎ , p. 17-60, 6 fig., 25 tab., 5 pl
  • J.-L. Guadelli, « RĂ©vision de la sous-espèce Equus caballus gallicus : Contribution du Cheval Ă  la connaissance des palĂ©oenvironnements », 11ème RĂ©union des Sciences de la Terre, Clermont-Ferrand,‎ (lire en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • J.-L. Guadelli, « Les Chevaux de SolutrĂ© », CaractĂ©risation et datation des milieux plĂ©istocènes. Cahiers du Quaternaires, Paris, Ed. du CNRS, no 16,‎ , p. 261-336, 9 fig., 62 tab., 1 annexe
  • Vera Eisenmann, « Les chevaux quaternaires europĂ©ens (mammalia - perrissodactyla). Taille, typologie, biostatigraphie et taxonomie », Geobios, no 6,‎ , p. 747-759
  • M. Patou-Mathis, « ArchĂ©ozoologie des niveaux moustĂ©riens et aurignaciens de la grotte Tournal Ă  Bize (Aude) », Gallia prĂ©histoire, no 36,‎ , p. 1-64
  • Dominique Armand, « Sur la prĂ©sence d’Equus caballus gallicus dans les niveaux supĂ©rieurs de la station Amont de La Quina (Charente) », Quaternaire, vol. 9, no 4,‎ , p. 345-353 (DOI 10.3406/quate.1998.1616, lire en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Yasmina ChaĂŻd-Saoudi, « Le Genre Equus : nouvelles donnĂ©es », Nouvelles de l'archĂ©ologie, no 94,‎ , p. 12-14 (prĂ©sentation en ligne)
  • (es) JosĂ© Yravedra Sainz de los Terreros, « ÂżPatrones esquelĂ©ticos del paleolĂ­tico en la PenĂ­nsula Iberica : perspectivas teĂłricas sobre su interpretaciĂłn? », Tabona. Revista de Prehistoria y de Arqueologia, no 13,‎ , p. 9-40 (prĂ©sentation en ligne)
  • Alain Langlois, « Le Cheval du gisement PlĂ©istocène moyen de La Micoque (Les Eyzies-de-Tayac, Dordogne) : Equus mosbachensis micoquii nov. ssp. », PalĂ©o, no 17,‎ , p. 73-110 (lire en ligne)

Thèses

  • F. Prat, Recherches sur les ÉquidĂ©s plĂ©istocènes en France : Thèse de doctorat d’État ès Sciences Naturelles, FacultĂ© des Sciences de Bordeaux, , 4 vol., 696 p., 149 fig., 126 tabl, chap. 226
  • J.-L. Guadelli, Contribution Ă  l’étude des zoocĂ©noses prĂ©historiques en Aquitaine (WĂĽrm ancien et interstade wĂĽrmien), Thèse de l’Univ. Bordeaux I, , 3 tomes, 568 p., 163 fig., chap. 148

Ouvrages de recherche

  • Enrico Pozzi, Danielle Depracter et Sandra de La Torre, Les MagdalĂ©niens: art, civilisations, modes de vie, environnements : coll. « L'Homme des origines Â», Éditions JĂ©rĂ´me Millon, , 368 p. (ISBN 9782841371440, lire en ligne), p. 63. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article

Articles connexes

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