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Pangaré

Le pangaré est un gène et un phénotype de la robe des équidés et des petits camélidés, connu en particulier chez le cheval, l'âne et l'alpaga. Il s'exprime par une décoloration de zones spécifiques du pelage. Le museau, le contour des yeux, le ventre et la face interne des membres sont plus clairs. Surtout étudié dans le domaine de l'hippologie, le pangaré est en relation avec le gène agouti. Il provoque ces décolorations sous sa forme dominante, bien qu'une mutation faux sens puisse réduire sa transmission. Le pangaré forme une particularité de la robe du cheval bien connue chez les races primitives, comme le Fjord et l'Exmoor. Il est également observé chez les équidés sauvages, comme le cheval de Przewalski et le Kiang. Le pangaré est rare par ailleurs. À ce titre, il témoigne d'un type sauvage, impliquant une contre-illumination.

Pangaré

Robe du cheval

Description de cette image, également commentée ci-après
Cheval de Przewalski à la robe pangarée
GĂ©notype
Notation P (exprimé si PP ou Pp)
Robe de base Bai ou alezan
Dilution Gène pangaré
Phénotype
Corps Décoloration autour des naseaux, des yeux, sur le ventre, les cuisses et à l'intérieur des membres
Crins Pas d'effet
Fréquence
Porteur(s) Cheval de Przewalski, Fjord, Exmoor

Terminologie

Le mot repris en français[1] et Ă  l'international pour dĂ©signer le phĂ©notype et le gĂ©notype[2], « pangarĂ© Â», provient de la dĂ©nomination espagnole[3] utilisĂ©e notamment en Argentine pour les chevaux prĂ©sentant des zones claires sur leur pelage. Ce nom est alors employĂ© en combinaison avec celui de la robe de base sur laquelle le pangarĂ© est actif, par exemple castaño pangarĂ© pour le bai et alazan pangarĂ© pour l'alezan. Les anglo-saxons parlent historiquement de « mealy muzzle Â» pour dĂ©signer les dĂ©colorations spĂ©cifiques de la tĂŞte et du museau[4], et de sorrel pour dĂ©signer les alezans pangarĂ©s[2], mais ils ont fini par adopter la dĂ©nomination « pangarĂ© Â». En allemand, ces chevaux sont nommĂ©s « wildfald Â». En italien, ils Ă©taient jadis dĂ©nommĂ©s zaino en combinaison avec le nom de la robe de base (par exemple baio zaino et sauro zaino). La rarĂ©faction de cette robe a fini par entraĂ®ner un glissement sĂ©mantique du terme, qui dĂ©signe dĂ©sormais les chevaux sans marques blanches[4].

Description

Le pangaré est une décoloration des parties inférieures de la robe de base, incluant le ventre, l'intérieur des coudes, les grassets, l'intérieur des membres, le bout du nez et le contour des yeux[1]. Cette décoloration peut apparaître dans des tons blanchâtres ou jaunâtres[5].

Détails de la robe pangarée sur base baie d'une jument de race Trait du Nord
  • TĂŞte
    TĂŞte
  • Membres antĂ©rieurs
    Membres antérieurs
  • Membres postĂ©rieurs
    Membres postérieurs

L'apparence des décolorations pangarées et du reste de la robe dépend des gènes propres à celle-ci. Chez le cheval, on peut observer du pangaré sur une base de robe baie ou alezane, les décolorations allant du quasi-blanc au fauve pâle[6].

Génétique

Un jeune alpaga brun.
Décoloration de l'intérieur des membres sur un jeune alpaga.
Un cheval se roulant sur le ventre.
Décoloration du ventre typique de la robe pangarée.

Les gènes Ă  l'origine de la robe pangarĂ©e ont fait l'objet de peu de recherches. Deux allèles sont connus et supposĂ©s actifs en relation avec le gène agouti. Il n'y a pas de consensus pour leur notation, puisqu'ils sont parfois notĂ©s « P Â» (et « p Â»)[1], parfois « LP Â» (pour Light Points)[7] et parfois « Pa Â»[2]. Seule la forme dominante (P) provoque une modification de la robe de base, la forme rĂ©cessive (p) n'en entraĂ®nant pas. La forme dominante est donc facilement transmissible Ă  la descendance[1]. Une mutation faux sens sur la protĂ©ine ASIP est toutefois responsable de la non-transmission du phĂ©notype pangarĂ© chez l'âne, lorsqu'il est issu de parents tous deux pangarĂ©s : cette dĂ©couverte Ă©tait suspectĂ©e par des Ă©leveurs d'ânes miniatures amĂ©ricains, constatant que l'ânon issu de deux parents pangarĂ©s n'arbore pas toujours la mĂŞme coloration[7]. Le mĂ©canisme de transmission du pangarĂ© semble assez similaire chez l'âne et le cheval, bien qu'il n'ait Ă©tĂ© testĂ© () qu'en relation avec la robe baie[8] :

Génotype Phénotype Transmission du gène à la descendance
PP Pangaré Systématique, sauf si mutation faux sens sur la protéine ASIP
Pp Pangaré Donne environ 75 % de pangarés si accouplé à un autre Pp
pp Non-pangaré Impossible

La dĂ©coloration bien visible causĂ©e par le pangarĂ© chez les Ă©quidĂ©s est gĂ©nĂ©tiquement comparable Ă  celle qui s'observe chez la souris, impliquant Ă©galement le gène agouti[7]. Par contre, l'apparence visuelle similaire trouvĂ©e chez les moutons et les chèvres semble dĂ©pendre d'un autre type de gène[5]. Le gĂ©nĂ©ticien Dr Dan Phillip Sponenberg avait identifiĂ© le gène pangarĂ© comme dominant sur le non-pangarĂ©, et supposĂ© (dès 1983) qu'il serait actif sur la robe noire du cheval, donnant le noir pangarĂ©[5] - [9]. Cela a donnĂ© lieu Ă  l'officialisation de la dĂ©nomination « noir pangarĂ© Â» par les haras nationaux français, mais cette thĂ©orie s'est rĂ©vĂ©lĂ©e fausse Ă  la lumière de nouvelles dĂ©couvertes gĂ©nĂ©tiques, le gène pangarĂ© n'Ă©tant pas actif sur la robe noire[10].

Fréquence

Il existe de solides preuves de l'existence du locus pangaré chez les équidés et certains petits camélidés, le Dr Sponenberg ayant rassemblé des preuves génétiques chez l'alpaga[11].

Chez les chevaux

Le pangarĂ© est plus frĂ©quent chez les chevaux primitifs, sa reprĂ©sentation est d'ailleurs Ă©vidente sur de nombreuses peintures rupestres, parfois schĂ©matisĂ©e par un trait foncĂ© en forme de « M Â»[12]. De ce fait, il est considĂ©rĂ© comme caractĂ©ristique d'un type sauvage[13], impliquant un phĂ©nomène de camouflage frĂ©quent chez les animaux, la contre-illumination. Ă€ l'Ă©poque magdalĂ©nienne, le pangarĂ© semble ĂŞtre la particularitĂ© de robe dominante chez les chevaux sauvages. C'est une caractĂ©ristique bien connue chez le cheval de Przewalski, le dernier cheval sauvage subsistant. Elle est devenue rare chez les chevaux domestiques modernes, le contraste au niveau de la robe n'Ă©tant d'ailleurs pas aussi Ă©vident que chez les Przewalski. La robe pangarĂ©e est systĂ©matique chez les races du Fjord et de l'Exmoor, deux poneys connus pour leurs caractères primitifs[4]. Elle peut Ă©galement ĂŞtre trouvĂ©e chez l'Islandais[14], le trait belge[15], l'Ardennais[16] et le Haflinger[17].

Chez les ânes et les mulets

Les ânes sauvages et domestiques ont très souvent une robe pangarée, ce qui fait que le gène se retrouve aussi fréquemment chez les mules et mulets, issus d'une hybridation entre un âne et une jument, par transmission du père âne[18]. La robe pangarée est reconnue officiellement chez la race de l'âne miniature américain. Bien qu'elle ne soit pas reconnue officiellement chez les races d'ânes françaises, elle est phénotypiquement très fréquente[7].

Chez les autres équidés sauvages

D'autres équidés sauvages sont bien connus pour arborer une apparence pangarée, tels que l'Hémione et le Kiang[19]. Cette observation empirique n'a pas fait l'objet d'études.

Notes et références

  1. S. Danvy, C. Dubois et A.C. Grison, « Génétique des mélanges de poils, panachures et autres particularités », Haras nationaux, (consulté le ).
  2. Khatib 2015, p. 109.
  3. Voir entre autres (es) Almanzor Marrero Galíndez, Cromohipología : clasificación de los pelajes, pelos, variedades, subvariedades, variantes, subvariantes, variaciones, señas y particularidades del ganado yeguarizo, (lire en ligne), p. 136-138.
  4. Azzaroli 1985, p. 164.
  5. Wood et Como 2004.
  6. (en) « Mealy/Pangare (Other Modifiers) » [archive], Equine Color, (consulté le ).
  7. Abitbol, Legrand et Tiret 2015, p. 1.
  8. Abitbol, Legrand et Tiret 2015, p. 2.
  9. Sponenberg 1983, p. 97-99.
  10. Amélie Tsaag Valren et Virginie Népoux, « Les robes du cheval : le noir pangaré », Cheval Savoir,‎ (lire en ligne).
  11. (en) Dr Sponenberg, Some Educated Guesses of Color Genetics of Alpacas, 2002, notes de séminaire citées par Wood et Como 2004.
  12. Azzaroli 1985, p. 165.
  13. (en) Sandra L. Olsen, Horses Through Time, Rowman & Littlefield, , 236 p. (ISBN 1-57098-382-8 et 9781570983825, lire en ligne), p. 212.
  14. (is) Marcia Stacy, « Pangare (mealy) », Icelandic Horse Colors (consulté le ).
  15. Sponenberg 1983, p. 29.
  16. bataille et Tsaag Valren 2017, p. 158.
  17. Emmanuelle Hubrecht (dir.), Les plus beaux chevaux du monde, Éditions Atlas, coll. « Atlas nature », (ISBN 978-2-7234-5140-6), p. 173.
  18. (en) Fran Lynghaug, « Mule », dans The Official Horse Breeds Standards Guide: The Complete Guide to the Standards of All North American Equine Breed Associations, MBI Publishing Company, (ISBN 1616731710 et 9781616731717), p. 399.
  19. (en) Leah Patton, « Pangare - Extensive "mealy points" on Mules » [archive] (consulté le ).

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • [Abitbol, Legrand et Tiret 2015] (en) Marie Abitbol, Romain Legrand et Laurent Tiret, « A missense mutation in the agouti signaling protein gene (ASIP) is associated with the no light points coat phenotype in donkeys », Genetics Selection Evolution, vol. 47, no 28,‎ (DOI 10.1186/s12711-015-0112-x, lire en ligne)
  • [Bataille et Tsaag Valren 2017] Lætitia Bataille et AmĂ©lie Tsaag Valren, Races Ă©quines de France, Paris, Éditions France Agricole, , 2e Ă©d. (1re Ă©d. 2008), 304 p. (ISBN 2-85557-481-1, OCLC 971243118, BNF 45194192)
  • [Azzaroli 1985] (en) Augusto Azzaroli, An Early History of Horsemanship, Leiden, BRILL, , 201 p. (ISBN 90-04-07233-0 et 9789004072336, lire en ligne), p. 164
  • [Khatib 2015] (en) Hasan Khatib, Molecular and Quantitative Animal Genetics, John Wiley & Sons, coll. « CourseSmart Series », , 336 p. (ISBN 978-1-118-67740-7 et 1-118-67740-4, lire en ligne)
  • [Sponenberg 1983] (en) Dan Phillip Sponenberg (photogr. Bonnie V. G. Beaver), Horse Color, Texas A&M University Press,
  • [Sponenberg et Bellone 2017] (en) Dan Phillip Sponenberg et Rebecca Bellone, Equine Color Genetics, Wiley, , 4e Ă©d., 352 p. (ISBN 1-119-13060-3, OCLC 971462711)
  • [Wood et Como 2004] (en) Ingrid Wood et Denise Como, « The pangarĂ© locus », dans A Breeder's Guide to Genetics, Dogwise Publishing, (ISBN 1617810819 et 9781617810817)
  • [Tsaag Valren et NĂ©poux 2019] AmĂ©lie Tsaag Valren et Dr. Virginie NĂ©poux, BeautĂ© des chevaux, le mystère de leurs robes, Éditions France Agricole, , 256 p. (ISBN 979-10-90213-98-2)
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