Langues officielles de l'Union européenne
Les langues officielles de l'Union européenne sont les langues de communication officielle des institutions de l'Union européenne (UE). Au nombre de quatre à l'origine des Communautés européennes, elles sont aujourd'hui au nombre de vingt-quatre.
Historique
La Communauté économique européenne (CEE), lors de sa création le par le traité de Rome, reconnaßt quatre langues officielles : l'allemand, le français, l'italien, le néerlandais[1].
Le , lors du 1er élargissement de la CEE par le traité de Bruxelles, s'ajoutent l'anglais et le danois.
Le , lors du 2e élargissement de la CEE par le traité d'AthÚnes, s'ajoute le grec.
Le , lors du 3e élargissement de la CEE par le traité de Madrid/Lisbonne, s'ajoutent l'espagnol et le portugais.
Ainsi l'Union européenne (UE), lors de sa création le par le traité de Maastricht, reconnaßt neuf langues officielles : l'allemand, l'anglais, le danois, l'espagnol, le français, le grec, l'italien, le néerlandais, et le portugais.
Le , lors du 4e élargissement de l'UE par le traité de Corfou, s'ajoutent le finnois et le suédois.
Lors du 5e élargissement de l'UE s'ajoutent d'abord le l'estonien, le hongrois, le maltais, le letton, le lituanien, le polonais, le tchÚque, le slovaque et le slovÚne (traité d'AthÚnes), puis le le bulgare et le roumain (traité de Luxembourg). Le s'ajoute également l'irlandais, qui avait jusqu'alors le statut de « langue des traités » et dont le nouveau statut lui avait été accordé le par le Conseil[2].
Le , lors du 6e élargissement de l'UE par le traité de Bruxelles, s'ajoute le croate.
Les différents élargissements de l'Union ont ainsi mené à 24 le nombre de ses langues officielles[3].
En 2019, le Brexit entraßne des interrogations sur la question linguistique dans l'Union européenne face à la domination de la langue anglaise sur les autres langues officielles et notamment le français[4] - [5].
Liste des langues
Voici les vingt-quatre langues officielles de l'Union européenne (depuis 2013) et leur code :
Date | Langue | Code | Ătats membres de l'UE dont c'est une langue officielle | |
---|---|---|---|---|
Nom dans cette langue | Nom en français | |||
2007 | бŃлгаŃŃĐșĐž (bÄlgarski) | bulgare | bg | Bulgarie |
2004 | ÄeĆĄtina | tchĂšque | cs | RĂ©publique tchĂšque |
1973 | dansk | danois | da | Danemark |
1958 | Deutsch | allemand | de | Allemagne, Autriche, Belgique, Luxembourg |
2004 | eesti | estonien | et | Estonie |
1981 | ΔλληΜÎčÎșÎŹ (ellinikĂĄ) | grec | el | Chypre, GrĂšce |
1973 | English | anglais | en | Irlande, Malte (et Royaume-Uni avant le Brexit) |
1986 | español (castellano) | espagnol (castillan) | es | Espagne |
1958 | français | français | fr | Belgique, France, Luxembourg |
2007 | Gaeilge | irlandais | ga | Irlande |
2013 | hrvatski | croate | hr | Croatie |
1958 | italiano | italien | it | Italie |
2004 | latvieĆĄu | letton | lv | Lettonie |
2004 | lietuviĆł | lituanien | lt | Lituanie |
2004 | magyar | hongrois | hu | Hongrie |
2004 | malti | maltais | mt | Malte |
1958 | Nederlands | néerlandais | nl | Belgique, Pays-Bas |
2004 | polski | polonais | pl | Pologne |
1986 | portuguĂȘs | portugais | pt | Portugal |
2007 | romĂąnÄ | roumain | ro | Roumanie |
2004 | slovenÄina | slovaque | sk | Slovaquie |
2004 | slovenĆĄÄina | slovĂšne | sl | SlovĂ©nie |
1995 | suomi | finnois | fi | Finlande |
1995 | svenska | suédois | sv | Finlande, SuÚde |
Pour un exemple d'utilisation de toutes ces langues dans l'Union européenne, voir « In varietate concordia », la devise de l'Union, qui a été adaptée dans chacune des langues officielles de l'Union, ou encore les noms de l'Union dans les différentes langues officielles.
Ces vingt-quatre langues officielles de l'Union europĂ©enne ne doivent pas ĂȘtre confondues avec les langues officielles des Ătats membres. En effet, le luxembourgeois, langue officielle au Luxembourg, et le turc, langue officielle Ă Chypre, ne sont pourtant pas des langues officielles de l'Union.
Langues de travail des institutions européennes
Les institutions de l'Union europĂ©enne ont diffĂ©rentes politiques linguistiques[6]. Toutefois, une tendance Ă privilĂ©gier l'anglais dans les institutions europĂ©ennes et dans la communication avec les Ătats membres est constatĂ©e malgrĂ© la politique officielle.
Conseil de l'Union européenne
Pour des raisons pratiques, seules trois langues de travail sont utilisées par les fonctionnaires du Conseil : l'anglais, le français et l'allemand[1].
Commission européenne
Trois des langues officielles de l'Union sont utilisĂ©es comme langues de travail au sein de la Commission : l'anglais, le français et l'allemand[7]. Ces langues sont celles qui sont parmi les plus parlĂ©es dans lâUnion europĂ©enne, que ce soit en tant que langue maternelle (français, allemand), ou en tant que seconde langue (anglais).
Cour de justice de l'Union européenne
Les dĂ©libĂ©rĂ©s de la Cour de justice de l'Union europĂ©enne se font en français, mais les arrĂȘts sont obligatoirement publiĂ©s dans la version du cas[8].
Parlement européen
Le Parlement europĂ©en se doit d'assurer un multilinguisme intĂ©gral pour lâensemble des sĂ©ances plĂ©niĂšres, des rĂ©unions des organes parlementaires, des commissions parlementaires et des groupes politiques. Jusqu'en 2020, l'irlandais n'est pas une langue de travail du parlement, celui-ci Ă©tant soumis Ă une dĂ©rogation[9]. Cependant, les documents Ă©crits sont systĂ©matiquement traduits dans les 24 langues (certains documents ne sont pas traduits en irlandais, Ă cause notamment du peu de traducteurs disponibles pour cette langue). Lors des sessions plĂ©niĂšres, les 23 autres langues sont utilisĂ©es Ă l'oral. Seule l'eurodĂ©putĂ©e Liadh NĂ Riada utilise l'irlandais. Pour les confĂ©rences de presse, le nombre de langues est souvent limitĂ© Ă trois : le français, l'anglais et la langue de l'orateur (Ă dĂ©faut l'allemand).
Avec 24 langues officielles, 552 combinaisons linguistiques (permutation mathĂ©matique de 24 Ă©lĂ©ments pris deux par deux) sont possibles (ou 276 couples de langues diffĂ©rents), puisque chaque langue peut ĂȘtre traduite dans 23 autres langues. La difficultĂ© Ă trouver des interprĂštes pour tous les couples de langues augmentant avec leur nombre, ont Ă©tĂ© mises en place des langues pivots ou relais (l'anglais, l'allemand et le français, et selon les dĂ©putĂ©s prĂ©sents aux rĂ©unions l'espagnol, l'italien et le polonais) : le discours est traduit dans une des langues relais, Ă partir de laquelle (ou desquelles) il est traduit Ă nouveau dans chacune des autres langues officielles[10].
L'Union européenne dispose de deux services distincts pour les communications interlingues :
- le Service commun interprétation-conférences (SCIC) pour les traductions orales ;
- la Direction générale de traduction (DGT) pour les traductions écrites.
Cour des comptes européenne
Les documents publiés par la Cour des comptes européenne le sont dans toutes les langues officielles. En revanche, la langue de travail est majoritairement le français, et dans une moindre mesure l'anglais et l'allemand[6].
Banque centrale européenne
La Banque centrale européenne fonctionne pour sa part uniquement en anglais[11], et ce depuis sa création[12].
Choix des langues officielles
Les langues officielles de l'Union europĂ©enne font l'objet d'une dĂ©cision spĂ©cifique, sur base des souhaits des Ătats membres. Certains pays demandent que chacune de leurs langues nationales soit langue officielle de l'Union, d'autres celles les plus en usage. Dans tous les cas, au moins une langue nationale est langue officielle.
La lĂ©gislation de l'Union europĂ©enne s'applique directement aux citoyens des Ătats membres, tandis que la politique linguistique de l'Union europĂ©enne demande une reconnaissance symbolique de chacune de ces langues, ce qui implique un choix plus large que les langues de travail de l'Union.
Lors de son adhĂ©sion, l'Irlande n'opte pas pour l'irlandais, pourtant sa premiĂšre langue nationale. Un statut spĂ©cial prĂ©voit certaines utilisations, comme la traduction des traitĂ©s. En 2007, l'irlandais devient langue officielle, mĂȘme si en 2015 les directives ne sont pas traduites dans cette langue.
Pratique des langues officielles de l'UE
Nombre de locuteurs natifs
De nombreuses langues sont parlĂ©es dans lâUnion europĂ©enne. On compte, outre les 24 langues officielles de l'UE, plus de 60 langues autochtones minoritaires ou rĂ©gionales et enfin, un grand nombre de langues non autochtones parlĂ©es par les communautĂ©s de migrants.
Pour la population europĂ©enne, pour la pĂ©riode avant le Brexit, la langue maternelle la plus parlĂ©e Ă©tait lâallemand (16 %), suivie de lâitalien et de lâanglais (13 % pour chacune des langues), puis du français (12 %), et enfin de lâespagnol et du polonais (8 % pour chacune des langues)[13].
AprÚs le Brexit, l'anglais n'est plus la langue maternelle que de 7 millions de personnes soit 2 % des citoyens de l'Union européenne[14].
Pratique des autres langues
54 % des EuropĂ©ens sont capables de tenir une conversation dans au moins une langue Ă©trangĂšre, 25 % de parler au moins deux langues Ă©trangĂšres et un sur dix peut converser dans au moins trois langues Ă©trangĂšres[13]. Les cinq langues Ă©trangĂšres les plus parlĂ©es sont lâanglais (38 %), le français (12 %), lâallemand (11 %), lâespagnol (7 %) et le russe (5 %).
- 44 % des EuropĂ©ens affirment comprendre au moins une langue Ă©trangĂšre suffisamment bien pour suivre les informations Ă la tĂ©lĂ©vision ou Ă la radio. Lâanglais est la langue la plus largement comprise, citĂ©e par 25 % des EuropĂ©ens. Le français et lâallemand sont citĂ©s tous deux par 7 % des rĂ©pondants, lâespagnol et lâitalien sont mentionnĂ©s par respectivement 5 % et 2 % des rĂ©pondants ;
- 44 % des EuropĂ©ens affirment pouvoir lire un article dans un journal ou un magazine en langue Ă©trangĂšre. Lâanglais est Ă nouveau la langue la plus citĂ©e, par 25 % des EuropĂ©ens. Le français est citĂ© par 7 % des EuropĂ©ens, et lâallemand par 6 %. Lâespagnol est mentionnĂ© dans 4 % des rĂ©ponses, suivi par le russe et lâitalien (2 %).
Enseignement des langues dans lâUE
68 % des EuropĂ©ens ont appris une langue Ă©trangĂšre Ă lâĂ©cole, tandis que 16 % ont appris en discutant avec un interlocuteur de langue maternelle, 15 % par des cours de langue hors de lâĂ©cole, 15 % par des sĂ©jours dans un pays oĂč la langue est parlĂ©e. LâUE a une influence limitĂ©e dans les domaines de lâĂ©ducation et des politiques linguistiques qui relĂšvent de la compĂ©tence des Ătats membres. Les recommandations en France sont d'Ă©tudier deux langues Ă©trangĂšres pendant la scolaritĂ©.
En 2015, une Ă©tude publiĂ©e par Eurostat a portĂ© sur le premier cycle de l'enseignement secondaire dans les pays de l'UE. Parmi les 17 millions d'Ă©lĂšves, ĂągĂ©s de 11 Ă 15 ans, qui Ă©tudiaient au moins une langue Ă©trangĂšre, la plupart (97,3 %) apprenaient lâanglais, 5 millions (33,8 %) le français, (23,1 %) lâallemand et (13,6 %) l'espagnol[15].
Références
- Thomas Ferenczi, « Union européenne : alerte sur les langues », Le Monde, .
- « L'irlandais devient la 21e langue officielle de l'Union europĂ©enne », sur Europa (version du 24 mai 2009 sur Internet Archive) : « Le rĂšglement initial du Conseil de 1958 [...] a Ă©tĂ© modifiĂ© pour y inclure l'irlandais, qui devient la 21e langue officielle de l'Union, sur le mĂȘme plan que l'allemand, l'anglais, le danois, l'espagnol, [âŠ] », mais la place accordĂ©e Ă cette langue semble ĂȘtre plus limitĂ©e : « Pour des raisons pratiques, le Conseil a dĂ©cidĂ© que seuls les rĂšglements adoptĂ©s par le Parlement europĂ©en et le Conseil dans le cadre de la procĂ©dure de codĂ©cision devraient ĂȘtre disponibles en irlandais. »
- « Langues officielles de l'UE », sur Europa (version du 19 avril 2016 sur Internet Archive).
- Pierre Desorgues, « Brexit : le français peut-il redevenir la langue de travail de l'Union européenne ? », TV5 Monde,
- Thomas Smets, « Quelle place pour lâanglais dans lâUnion europĂ©enne post-Brexit ? », sur eyes-on-europe.eu, (consultĂ© le ).
- Phoebus Athanassiou, « The application of multilingualism in the European Union context », Legal Working Paper Series, Francfort-sur-le-Main, Banque centrale europĂ©enne, no 2,â (lire en ligne).
- Commission europĂ©enne - Direction GĂ©nĂ©rale de la Traduction, Ătude sur la traduction et le multilinguisme, Bruxelles, (lire en ligne), « Glossaire », p. 148
« Ă la Commission, [...] Les trois langues procĂ©durales sont lâanglais, le français et lâallemand. En fonction du dossier traitĂ© (par exemple, s'il concerne un Ătat membre particulier), dâautres versions linguistiques peuvent ĂȘtre nĂ©cessaires »
- (en) Mathilde Cohen, « On the Linguistic Design of Multinational Courts : The French Capture », International Journal of Constitutional Law, vol. 14, no 2,â , p. 498â517 (DOI 10.1093/icon/mow023).
- Samuel Morgan, « Lâirlandais s'impose dans les institutions europĂ©ennes », sur euractiv.com, (consultĂ© le ).
- « Parlez-vous européen ? », France-Soir, (consulté le ).
- Commission europĂ©enne - Direction GĂ©nĂ©rale de la Traduction, Ătude sur la traduction et le multilinguisme, Bruxelles, (lire en ligne), p. 129 (interview du 24 avril 2008 de Jacques Santer, prĂ©sident de la Commission europĂ©enne 1995-1999)
« Voyez la Cour de justice! Les arrĂȘts n'ont d'effet juridique que publiĂ©s dans la version du cas. [âŠ] Par contre, les dĂ©libĂ©rĂ©s se font en français. La Banque centrale europĂ©enne, elle, fonctionne en anglais uniquement. »
- (en) Todd Buell, « Translation Adds Complexity to European Central Bankâs Supervisory Role », The Wall Street Journal, .
- « Les Européens et leurs langues » [PDF], Commission européenne, .
- Jean Quatremer, « UE : aprÚs le Brexit, la fin de l'unilinguisme anglophone ? », Libération, .
- Alice Develey, « Le français est la deuxiÚme langue la plus étudiée dans l'Union européenne », Le Figaro, .
Compléments
Bibliographie
- José Carlos Herreras (dir.), L'enseignement des langues étrangÚres dans les pays de l'Union européenne, Louvain-la-Neuve, Peeters Publishers, coll. « BibliothÚque des cahiers de l'Institut de linguistique de Louvain » (no 92), , 401 p. (ISBN 90-429-0025-3 et 2-87723-376-6, lire en ligne).
- Thomas Szende (dir.), Politiques linguistiques, apprentissage des langues et francophonie en Europe centrale et orientale : Les dĂ©fis de la diversitĂ© (colloque international organisĂ© par l'Ăquipe de recherche PluralitĂ© des langues et des identitĂ©s, didactique, acquisition, mĂ©diations (PLIDAM) de l'INALCO, Paris, -), Paris, Archives contemporaines, , 189 p. (ISBN 978-2-8130-0003-3, lire en ligne).