Juan Antonio Suanzes
Juan Antonio Suanzes FernĂĄndez (Ferrol, 1891 - Madrid, 1977) Ă©tait un militaire, ingĂ©nieur naval et homme politique espagnol, deux fois titulaire du portefeuille de lâIndustrie (1938-1939 et 1945-1951), et cofondateur, puis premier prĂ©sident, de lâInstitut national de l'industrie (INI).
Juan Antonio Suanzes | |
Fonctions | |
---|---|
Chef de la Commission pour le sauvetage de navires | |
â | |
Ministre de lâIndustrie et du Commerce | |
â (1 an, 6 mois et 9 jours) |
|
PrĂ©dĂ©cesseur | JoaquĂn Bau Nolla (au sein de la Junte technique) |
Successeur | Luis AlarcĂłn de la Lastra |
PrĂ©sident de lâInstitut national de l'industrie (INI) | |
â | |
Prédécesseur | Néant (organisme nouvellement créé) |
Successeur | JoaquĂn Planell Riera (supplĂ©ant, en tant que vice-prĂ©sident) |
Ministre de lâIndustrie et du Commerce | |
- â (5 ans, 11 mois et 29 jours) |
|
Premier ministre | Luis Carrero Blanco |
Prédécesseur | Demetrio Carceller Segura |
Successeur | JoaquĂn Planell Riera |
PrĂ©sident de lâInstitut national de lâIndustrie | |
â | |
Premier ministre | Luis Carrero Blanco |
Successeur | José Sirvent Dargent |
Biographie | |
Nom de naissance | Juan Antonio Suanzes FernĂĄndez |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Ferrol (province de La Corogne, Espagne) |
Date de décÚs | |
Lieu de décÚs | Madrid |
Nature du décÚs | Naturelle |
Nationalité | Espagne |
PÚre | Saturnino Suanzes Carpeña (officier de marine, enseignant) |
Conjoint | Joaquina Mercader y Bofill |
Enfants | 10 enfants |
DiplĂŽmĂ© de | AcadĂ©mie navale militaire de Ferrol ; Ăcole dâingĂ©nieurs et de machinistes de la marine |
Profession | IngĂ©nieur naval ; Enseignant (Ăcole navale militaire de San Fernando) |
Religion | Catholique |
RĂ©sidence | Ferrol ; CarthagĂšne ; Cadix ; Madrid |
Originaire du ghetto militaire de Ferrol â selon le mot de Bennassar â, oĂč il eut pour camarades de jeu et dâĂ©tudes Francisco Franco et Camilo Alonso Vega, il suivit une formation dâofficier de marine, complĂ©tĂ©e plus tard par un cursus dâingĂ©nieur naval, et mena jusquâen 1919 une carriĂšre dans la marine de guerre, avant dâĂȘtre embauchĂ© par la SECN, entreprise espagnole de construction navale, fondĂ©e en partenariat avec la britannique Vickers (cette derniĂšre censĂ©e apporter ses compĂ©tences, mais en rĂ©alitĂ© trĂšs jalouse de son savoir-faire) et adjudicataire de la construction navale militaire espagnole. UlcĂ©rĂ© par la dĂ©pendance de lâEspagne vis-Ă -vis de lâĂ©tranger (en particulier pour les piĂšces dĂ©tachĂ©es) et par les tentatives de mainmise sur la SECN par son coactionnaire britannique, Suanzes entra en conflit ouvert avec sa direction et finit par dĂ©missionner en 1934, pĂ©nĂ©trĂ© dĂ©sormais de la nĂ©cessitĂ© dâune souverainetĂ© Ă©conomique nationale et de lâimpĂ©ratif dâindustrialiser lâEspagne.
Ayant ralliĂ© le camp nationaliste en 1936, il se vit bientĂŽt confier par son ami intime Franco plusieurs missions, celle dâabord de renflouer les navires sabordĂ©s pendant la Guerre civile et obstruant les ports espagnols, puis celle de mettre sur pied (en 1941) et de diriger lâINI, grande institution industrielle et financiĂšre publique, vouĂ©e Ă rĂ©aliser â sous la houlette dâun Ătat-stratĂšge ultradirigiste et en totale adĂ©quation avec les conceptions de Suanzes â lâautosuffisance nationale et lâindustrialisation du pays, et appelĂ©e Ă devenir un acteur essentiel de la politique Ă©conomique lors de la phase dite « autarcique » de la dictature franquiste. Virent ainsi le jour, Ă la faveur de ce capitalisme dâĂtat, un ensemble dâentreprises publiques ou semi-publiques dans les domaines de lâindustrie lourde, de lâĂ©nergie, du pĂ©trole, de lâautomobile etc. Le bilan mitigĂ© de ces opĂ©rations, et de la politique autarcique en gĂ©nĂ©ral, conduisit Franco vers la fin de la dĂ©cennie 1950, sous lâinfluence des dĂ©nommĂ©s « technocrates », Ă changer de cap et Ă adopter une politique Ă©conomique nouvelle faite de libĂ©ralisation et dâouverture sur lâextĂ©rieur. Suanzes, cramponnĂ© aux anciens concepts, se brouilla durablement avec le Caudillo, dĂ©missionna en 1963 et se dĂ©tourna de la vie publique.
Biographie
Origines familiales et formation
NĂ© dans une famille qui appartenait depuis les XIXe et XXe siĂšcles au groupe des familles ferrolanes traditionnellement liĂ©es Ă la marine espagnole, Juan Antonio Suanzes FernĂĄndez avait pour pĂšre Saturnino Suanzes Carpeña, qui, membre du Corps gĂ©nĂ©ral de la marine, avait participĂ© Ă quelques campagnes militaires, mais qui allait se distinguer â et acquĂ©rir une certaine rĂ©putation â par son engagement dans lâenseignement, dirigeant en effet la plus importante des Ă©coles prĂ©paratoires de Galice vouĂ©es Ă former les candidats cadets Ă lâentrĂ©e dans lâĂcole navale de Ferrol[1] - [2]. Lâenseignement donnĂ© dans ces centres de prĂ©paration Ă lâAcadĂ©mie navale Ă©tait de façon gĂ©nĂ©rale, et celle du pĂšre de Suanzes en particulier, de bien meilleure qualitĂ©, comme lâobservait Francisco Franco, « parce quâil existait plusieurs acadĂ©mies, avec un nombre dâĂ©lĂšves limitĂ©, dirigĂ©es par des officiers de marine ou des militaires, et parvenues Ă une grande rĂ©putation en raison de succĂšs obtenus aux concours dâentrĂ©e : parmi elles, je choisis pour en ĂȘtre Ă©lĂšve celle qui Ă©tait dirigĂ©e par un capitaine de corvette, don Saturnino Suanzes »[3]. Les cours de cet Ă©tablissement, baptisĂ© collĂšge Notre-Dame-du-Carmel, Ă©taient dispensĂ©s Ă bord de la frĂ©gate Asturias, dans la rade de Ferrol elle-mĂȘme[4].
Ă Ferrol sâĂ©tait formĂ©e â selon le terme de Bennassar â une microsociĂ©tĂ© dâadolescents, composĂ©e des Franco Bahamonde, de leurs cousins Franco Salgado-AraĂșjo (dont PacĂłn), et des De la Puente Bahamonde, qui retrouvaient dâautres compagnons dâĂ©tudes et de jeux, comme Pedro Nieto AntĂșnez, Juan Antonio Suanzes ou Camilo Alonso Vega, qui tous entreront dans la carriĂšre militaire et, Ă la suite de Franco, investiront les allĂ©es du pouvoir, Ă la seule exception de Ricardo de la Puente Bahamonde, qui choisira le camp rĂ©publicain[5]. Toutes ces familles Ă©taient prolifiques : Juan Antonio Suanzes p. ex. avait 5 frĂšres et sĆurs, et lui-mĂȘme allait engendrer 10 enfants[6].
Ces antĂ©cĂ©dents familiaux ont sans doute favorisĂ© lâinscription en 1903 du jeune Juan Antonio Ă lâĂcole navale de Ferrol, avec le statut dâaspirant de la Marine, alors quâil nâavait encore que douze ans. Il y eut pour camarades de promotion, entre autres, Alfredo et Luis Guijarro, JosĂ© Crespo et le frĂšre du futur Caudillo, NicolĂĄs Franco Bahamonde[1], que Suanzes qualifia de « surdouĂ© », mais de qui par ailleurs il ne se priva pas ensuite de critiquer vertement le comportement professionnel et les mĆurs[7].
Il y a lieu dâinsister sur lâimportance pour Juan Antonio Suanzes de ce contexte familial, en ceci, dâune part, que son Ă©ducation militaire renforça chez lui sa sensibilitĂ© patriotique, et dâautre part, que sa proximitĂ© avec la famille Franco fut dĂ©terminante pour le choix de sa personne Ă des postes de responsabilitĂ© pendant une grande partie du rĂ©gime franquiste[2].
CarriĂšre dans la marine espagnole
En 1906, trois ans aprĂšs son inscription Ă lâĂcole navale, il fut fait garde-marine et reçut sa premiĂšre affectation sur le vĂ©tuste navire garde-cĂŽtes Numancia, puis fut assignĂ© au vieux cuirassĂ© Pelayo[1]. Il gravit ensuite rapidement les Ă©chelons, montant au grade dâenseigne de frĂ©gate en 1908 et dâenseigne de vaisseau en , fut affectĂ© au poste de commandement dâartillerie de Ferrol[2], puis prit part Ă plusieurs campagnes comme membre dâĂ©quipage de diffĂ©rents bĂątiments de la marine, dont, lâannĂ©e suivante, le Reina Regente, sur lequel il restera jusquâen , la canonniĂšre MarquĂ©s de MolĂns, et, peu aprĂšs, le yacht royal Giralda. En , Suanzes alla rejoindre la commission dâinspection de Ferrol, dans le but de faire partie bientĂŽt de lâĂ©quipage initial du cuirassĂ© España, qui avait Ă©tĂ© nouvellement livrĂ© Ă la marine et oĂč il restera jusquâĂ fin 1914, date Ă laquelle il fut Ă nouveau assignĂ© au Reina Regente[1].
La dĂ©cision du ministre de la Marine, Augusto Miranda, portant que les officiers du Corps gĂ©nĂ©ral avaient dĂ©sormais accĂšs Ă lâĂcole dâingĂ©nieurs et de machinistes de la marine, crĂ©Ă©e Ă Ferrol peu avant dans le but de mettre en Ćuvre le programme de constructions navales militaires, signifia un tournant dans la trajectoire professionnelle de Suanzes[1] - [8]. Faisant partie de la premiĂšre promotion de cette AcadĂ©mie, oĂč figuraient Ă©galement dâautres ingĂ©nieurs appelĂ©s Ă exercer dâimportantes responsabilitĂ©s tant dans la construction navale que dans la vie politique, tels que Ăureo FernĂĄndez Ăvila, NicolĂĄs Franco ou Federico Beigbeder Atienza, il dĂ©crocha en 1917 le titre dâingĂ©nieur de marine[2]. LâactivitĂ© professionnelle de Suanzes en tant quâingĂ©nieur de la marine militaire, qui sâĂ©tala entre 1917 et 1922, Ă©tait axĂ©e principalement sur le professorat Ă lâĂcole navale, qui venait dâĂȘtre transfĂ©rĂ©e de Ferrol Ă San Fernando, non loin de Cadix. En , il contracta mariage avec Joaquina (« Tina ») Mercader y Bofill (nĂ©e Ă Barcelone en 1897), fille de lâamiral Pedro Mercader, ce qui consacra lâunion de deux des familles de Ferrol dĂ©tenant un rĂŽle majeur dans la marine[2]. AprĂšs que Suanzes eut Ă©tĂ© nommĂ© professeur titulaire de mĂ©canique Ă lâĂcole navale, le couple Ă©lut domicile Ă San Fernando[1]. En 1921, Suanzes fut promu lieutenant-colonel du gĂ©nie naval.
CarriĂšre dans lâentreprise de construction navale SECN (1922-1934)
Convaincu du rĂŽle stratĂ©gique de la marine, militaire autant que marchande, pour la souverainetĂ© de lâEspagne, Suanzes sâengagea dans la difficile Ćuvre de reconstitution de la flotte espagnole, Ćuvre quâil sâemploya Ă rĂ©aliser au sein de la compagnie Sociedad Española de ConstrucciĂłn Naval (en abrĂ©gĂ© La Naval, appelĂ©e aussi La Constructora, ci-aprĂšs dĂ©signĂ©e par son sigle SECN), fondĂ©e comme sociĂ©tĂ© dâĂtat en 1908, et en exĂ©cution dâune sĂ©rie de plans de construction navale Ă©laborĂ©s par les pouvoirs publics en 1908, 1925 et 1926.
La SECN avait Ă©tĂ© fondĂ©e en 1908 sous la patronage dâentrepreneurs et dâinstitutions financiĂšres basques, et avec lâimportante participation de la firme britannique Vickers, qui apportait son savoir-faire industriel et prenait Ă son compte la gestion de lâentreprise. La SECN avait Ă©tĂ© dĂ©signĂ©e adjudicataire Ă lâissue du concours dâappel dâoffres organisĂ© par la marine espagnole en vue de son important programme de nouvelles constructions navales[note 1]. Suanzes fit partie de la direction de la SECN, Ă partir de son retrait de la carriĂšre militaire en 1922 jusquâen 1934. Le parcours professionnel de Suanzes dans cette sociĂ©tĂ© le conduisit dâabord Ă la direction du chantier naval de CarthagĂšne entre 1922 et 1926, laps de temps oĂč furent livrĂ©s six sous-marins et trois destroyers, puis lâenvoya prendre les rĂȘnes du chantier naval de Ferrol de 1926 Ă 1932 pour y rĂ©aliser les projets de construction des croiseurs Canarias et Baleares[2] - [note 2].
Promu commandant du gĂ©nie, Suanzes reçut lâautorisation de suivre un cours de spĂ©cialisation en sous-marins Ă CarthagĂšne, pour ĂȘtre affectĂ© ensuite dans la Commission dâinspection de lâarsenal de ce port. Ă lâissue de quelques tribulations, lâintĂ©gration dans la rĂ©serve lui fut finalement accordĂ©e et Suanzes renonça alors dĂ©finitivement Ă son statut de militaire. Câest Ă cette Ă©poque quâen exĂ©cution du programme de Miranda il travailla Ă la rĂ©alisation de plusieurs unitĂ©s navales, notamment un ensemble de sous-marins de type Holland 8 et une sĂ©rie de destroyers. Câest alors aussi quâil commença Ă sâaviser de la mainmise de Vickers sur la gestion de la SECN. Pour Suanzes, cet Ă©tat de choses mettait en Ă©vidence lâune des causes du sous-dĂ©veloppement industriel de lâEspagne, Ă savoir, en lâespĂšce, la dĂ©pendance et la subordination vis-Ă -vis des Britanniques[9]. En 1908, la conception des vaisseaux, de mĂȘme que 80 % des piĂšces et des matĂ©riaux, Ă©taient importĂ©s. Suanzes Ă©tait prĂ©occupĂ© de voir la SECN dĂ©pendre dans une mesure croissante de lâapport Ă©tranger, en lâoccurrence de la compagnie Vickers, avec les intĂ©rĂȘts de laquelle il allait entrer en conflit ouvert en 1933-1934. Ces annĂ©es-lĂ , seulement 5 % des piĂšces dĂ©tachĂ©es des navires provenaient encore de lâĂ©tranger, et la SECN entra en concurrence ouverte avec les constructeurs navals anglais.
Devenu en 1926 directeur du chantier naval ferrolan Constructora, il y dĂ©ploya une intense activitĂ© durant plus de cinq ans. Ses relations peu cordiales avec les Britanniques, et plus particuliĂšrement le mĂ©pris que lui aurait tĂ©moignĂ© Ă plusieurs reprises le directeur anglais Spears, le portĂšrent, selon ses propres dires, Ă prĂ©senter sa dĂ©mission, incident qui provoqua le dĂ©part de quelques Britanniques. On ne peut Ă©carter lâhypothĂšse que le groupe Vickers ait dĂšs ce moment Ă©laborĂ© une stratĂ©gie pour se dĂ©faire des nouveaux ingĂ©nieurs, surtout Suanzes, comme cela allait finalement se produire plusieurs annĂ©es plus tard[10].
RattachĂ© au bureau central de la firme Ă Madrid en 1932, câest-Ă -dire au dĂ©but de la RĂ©publique, Suanzes sâemploya activement Ă obtenir des contrats ; si la conclusion dâun accord pour la vente de 15 canonniĂšres au gouvernement mexicain en est lâune de ses grandes rĂ©ussites, Suanzes avait cependant dĂ» de façon Ă peine dissimulĂ©e faire obstacle Ă la mĂ©diation de la maison Vickers, laquelle mĂ©diation se solda quand mĂȘme par un net prĂ©judice pour les intĂ©rĂȘts nationaux de lâEspagne. Bien que la prĂ©sidence de la SECN ait Ă©tĂ© aux mains du marquis dâUrquijo, câĂ©taient en fait les agents espagnols de Vickers qui dirigeaient lâentreprise, en se pliant aux desiderata britanniques[11]. Lâactionnaire anglais Vickers considĂ©rait la SECN quasiment comme sa succursale, ce qui ne pouvait manquer de heurter les sentiments patriotiques de Suanzes, qui estimait que la dĂ©fense nationale ne pouvait rester suspendue aux dĂ©cisions prises par des associĂ©s Ă©trangers. Par lĂ se manifestait dĂ©jĂ la philosophie autarcique de Suanzes, intransigeante en cette matiĂšre qui touchait Ă la souverainetĂ© nationale[2].
LâĂ©pisode qui fit dĂ©border le vase eut lieu en fĂ©vrier 1934, lorsquâun devis devait ĂȘtre rĂ©digĂ© en vue de la construction de 9 destroyers pour le compte de la marine brĂ©silienne. AprĂšs que lâoffre eut Ă©tĂ© Ă©tablie par Suanzes, les associĂ©s de Vickers en rehaussĂšrent le prix de 10 %, sous le prĂ©texte dâavoir Ă se conformer Ă certains critĂšres ; cependant, ce fut alors la Vickers britannique qui remporta le marchĂ©, ses prix apparaissant Ă prĂ©sent plus bas que ceux de la SECN. Ă la suite de cette manigance, lâamour-propre de Suanzes le poussa Ă rompre et Ă quitter la Constructora le , en mĂȘme temps que quelques-uns de ses collĂšgues ingĂ©nieurs navals[11] - [2].
Au terme dâune brĂšve tentative de mettre sur pied une agence de conseil, Suanzes trouva ensuite Ă sâemployer comme gĂ©rant de lâentreprise dâascenseurs Boetticher & Navarro, oĂč il eut Ă tĂąche dâamĂ©liorer la productivitĂ©, sans grand rĂ©sultat toutefois, ce quâil convient sans doute dâattribuer dans une certaine mesure Ă la tension sociale croissante dans lâentreprise[12] ; confrontĂ© Ă la grĂšve de , il opta pour le lock-out, procĂ©dure pourtant interdite alors, raison pour laquelle il fut interpellĂ© et mis en dĂ©tention par la Direction gĂ©nĂ©rale de la sĂ©curitĂ©. Suanzes demeura dans lâentreprise jusquâĂ lâĂ©clatement de la Guerre civile en .
Suanzes, rĂ©putĂ© un homme honorable, sympathique et Ă©nergique[13], portait depuis 1927 le titre (purement honorifique, ou peu sâen faut) de gentilhomme de chambre en exercice (« gentilhombre de cĂĄmara con ejercicio ») du roi Alphonse XIII.
Guerre civile
Le coup dâĂtat de juillet 1936 et la Guerre civile qui sâensuivit surprirent Suanzes Ă Madrid. Du fait de sa qualitĂ© de militaire, Suanzes et sa famille risquaient dâĂȘtre jetĂ©s en prison, ainsi quâil arriva effectivement Ă son frĂšre Luis, au militaire ferrolan Francisco Dopico, et Ă Suanzes lui-mĂȘme. Les trois purent recouvrer leur libertĂ© grĂące aux bons offices du gĂ©nĂ©ral rĂ©publicain Carlos Masquelet, ferrolan lui aussi, et allĂšrent se rĂ©fugier dans lâambassade de Pologne, puis, aprĂšs quelques pĂ©ripĂ©ties assez rocambolesques, parvinrent Ă se faire transporter Ă Valence, sur la cĂŽte mĂ©diterranĂ©enne, dâoĂč il gagnĂšrent Marseille Ă bord dâun navire de transport ; de lĂ , Suanzes se rendit ensuite Ă Fontarrabie, situĂ©e Ă ce moment dĂ©jĂ en zone nationaliste[12], oĂč il sâempressa dâoffrir ses services et oĂč il se vit bientĂŽt, grĂące Ă sa relation personnelle avec le gĂ©nĂ©ral Franco, confier certaines missions militaires dĂ©terminĂ©es[2] - [note 3].
Chef de la Commission de sauvetage de navires (1937-1938)
En , il fut placĂ© Ă la tĂȘte de la Commission de la marine pour le sauvetage de navires (« ComisiĂłn de la Armada de Salvamento de Buques »), organisme chargĂ© de remettre Ă flot les vaisseaux coulĂ©s, tant civils que militaires, dont un bon nombre dans les ports espagnols mĂȘmes, qui sâen trouvaient obstruĂ©s[2]. Ă la fin de la Guerre civile, le , il y avait 148 navires Ă©chouĂ©s dans les ports et sur les cĂŽtes espagnols, en plus dâun nombre important dâembarcations plus petites[14]. Ătant donnĂ© le grand besoin de navires dans le camp rebelle, et au vu en particulier de la situation du destroyer rĂ©publicain CĂscar â qui avait Ă©tĂ© envoyĂ© par le fond dans le port de GijĂłn et que les troupes nationalistes avaient trouvĂ© couchĂ© sur le flanc le , lorsquâelles sâĂ©taient emparĂ©es du port de GijĂłn â, il apparaissait urgent dâexaminer les moyens de rĂ©aliser la remise Ă flot dudit bĂątiment. Cette possibilitĂ© une fois admise, Franco en personne fit appel fin Ă Suanzes, eu Ă©gard Ă sa qualitĂ© dâingĂ©nieur naval, pour diriger les travaux de renflouement. Dans le mĂȘme temps, une sĂ©rie dâordres furent Ă©mis Ă lâattention des diffĂ©rentes autoritĂ©s, leur enjoignant de mettre Ă la disposition de la Commission tous les moyens disponibles qui seraient demandĂ©s par Suanzes pour mener Ă bien sa tĂąche, tandis que lâĂ©quipe de renflouement se vit renforcĂ©e de scaphandriers, de membres du personnel de la marine marchande, dâouvriers de diverses spĂ©cialisations, et de 36 officiers, soit un total de 526 hommes, militaires et civils[14] - [15]. Les travaux dĂ©marrĂšrent avec la rĂ©cupĂ©ration de six torpilles intactes logĂ©es Ă bord du CĂscar, puis, au terme dâopĂ©rations compliquĂ©es, la Commission rĂ©ussit Ă la fin de mars le dĂ©sĂ©chouage du destroyer. Le CĂscar fut le premier de toute une sĂ©rie subsĂ©quente de renflouages rĂ©ussis dans le mĂȘme port de GijĂłn[14]. Ensuite, la mĂȘme Ă©quipe se mit en devoir de sauver aussi un bon nombre dâautres navires Ă©chouĂ©s, qui sous forme dâĂ©paves parsemaient tout le littoral espagnol[16]. Ă la fin de 1940, 95 navires avaient Ă©tĂ© rĂ©cupĂ©rĂ©s, pour un tonnage brut total de quelque 130 000 tonnes. Dix autres vaisseaux gisant Ă lâintĂ©rieur de ports espagnols reprĂ©sentaient encore 16 000 tonnes, dont huit susceptibles de renflouement, dâune capacitĂ© totale de 20 000 tonnes. En , lâĂ©quipe technique se dĂ©plaça Ă Barcelone avec mission de dĂ©gager lâintĂ©rieur du port, oĂč se trouvaient 38 vaisseaux et divers objets immergĂ©s[14].
Premier mandat comme ministre de lâIndustrie (1938-1939)
Le , Franco nomma Suanzes, son vieil ami de toujours, au ministĂšre de lâIndustrie et du Commerce dans le premier gouvernement du rĂ©gime franquiste[17] - [18] - [19] - [20]. Ă ce poste, quâil exerça de la ville de Bilbao, il sâefforça dâorganiser la production, dâentreprendre la reconstruction et dâassurer lâapprovisionnement, jusquâĂ sa dĂ©mission le [16]. Suanzes prĂŽnait une autarcie totale pour les industries militaires, et partielle pour les produits manufacturĂ©s, encore que pour ces derniers lâĂtat doive impĂ©rativement disposer dâinstruments afin dâĂ©viter des tensions sur les marchĂ©s internationaux. Toutefois, il pensait quâune autarcie plus radicale nâĂ©tait pas viable compte tenu que, une fois surmontĂ©es les consĂ©quences de la Guerre civile, il sâagira de pouvoir Ă©couler les excĂ©dents agricoles et miniers, ce qui requerra la conclusion de traitĂ©s de commerce avec dâautres pays ; de mĂȘme, la reconstruction de l'industrie endommagĂ©e par les combats passerait obligatoirement par lâimportation de machines-outils, dâĂ©quipements et de moyens de transport non disponibles en Espagne[2].
Ă la tĂȘte de la Direction des constructions et industries navales militaires (1939-1941)
En , ayant quittĂ© le gouvernement, il prit la tĂȘte de la Direction des constructions et industries navales militaires du ministĂšre de la Marine[2], tout en continuant Ă aider lâĂtat franquiste naissant dans divers domaines, apportant notamment son concours Ă la rĂ©daction du Fuero del Trabajo de [12]. MĂȘme si cette pĂ©riode de sa carriĂšre, que ne se prolongea pas au-delĂ de , nâest pas dâimportance primordiale dans son parcours personnel, elle fut mise Ă profit par Suanzes pour corriger ce quâil considĂ©rait comme une anomalie, Ă savoir le pouvoir dĂ©cisionnel de la firme Vickers dans la construction navale militaire espagnole, et pour faire en sorte que quelques-uns des chantiers de cette entreprise retournent Ă lâĂtat espagnol[2]. ReprĂ©sentatif de sa façon de penser est le passage suivant de lâun de ses discours :
« Une fois rĂ©volue la conjoncture de la rĂ©volution industrielle, et au bout de plus dâun siĂšcle de dĂ©cadence prĂ©cipitĂ©e, une Espagne assoupie, dĂ©sabusĂ©e, sceptique et progressivement paupĂ©risĂ©e Ă tous Ă©gards, en Ă©tait arrivĂ©e Ă devenir quelque chose comme la retardataire de toute lâEurope occidentale, oĂč naguĂšre encore elle avait exercĂ© une vĂ©ritable hĂ©gĂ©monie, tandis que, perdu tout notre esprit dâinitiative et de stimulation, une partie de notre richesse primaire et surtout celle miniĂšre, Ă©tait exploitĂ©e par des Ă©trangers[21]. »
Ministre de lâIndustrie et directeur de lâINI : la pĂ©riode dâautarcie
Comme Franco, Suanzes Ă©tait persuadĂ© que lâEspagne Ă©tait capable de sâautosuffire et, dĂšs les dĂ©buts de la Guerre civile, ses proclamations annonçaient des objectifs en rupture avec le systĂšme libĂ©ral ; il se proposait dâinstaurer un ordre nouveau dans lequel lâĂ©conomie serait organisĂ©e, orientĂ©e et dirigĂ©e par lâĂtat. Au vu des Ă©normes difficultĂ©s du commerce international pendant la guerre mondiale, le projet parut, pendant un temps, ĂȘtre en consonance avec les nĂ©cessitĂ©s : la crĂ©ation de lâInstitut national de l'industrie (« Instituto Nacional de Industria », acronyme INI) en 1941, dont le principal objectif Ă©tait de satisfaire les besoins de lâEspagne en matiĂšre de dĂ©fense, de stimuler le dĂ©veloppement de lâĂ©nergie, la production chimique et dâacier, la construction navale et la fabrication dâautomobiles, de camions et dâavions, sâinscrivait donc dans la logique Ă la fois des aspirations de Franco et de la conjoncture[22]. Dans le souci de prĂ©server la souverainetĂ© Ă©conomique de lâEspagne, la mission de lâINI consistait notamment Ă stimuler lâindustrie dans les secteurs dĂ©laissĂ©s par lâinitiative privĂ©e ou prĂ©sentant un caractĂšre stratĂ©gique. Il sâagissait, dans maints champs dâintervention, de tenter dâavoir dans la mesure du possible recours aux ressources nationales, en restant le moins possible tributaire de lâextĂ©rieur[16]. Lâinfluence grandissante des militaires au sein du rĂ©gime franquiste fut du reste propice Ă la mise en place dâun capitalisme dâĂtat, et lâINI devint une institution clef du rĂ©gime, absorbant plus du tiers de lâinvestissement public[23] - [24].
Suanzes, quoique manquant de formation en Ă©conomie et en finances, mais homme intĂšgre et Ă©nergique[24], fut dĂ©signĂ© en 1941 directeur de lâINI, fonction quâil occupera jusquâen 1961. Son mandat Ă lâINI connut deux phases, une premiĂšre entre 1941 et 1945, annĂ©e oĂč il fut de nouveau appelĂ© Ă assumer le portefeuille de lâIndustrie et du Commerce, et une seconde qui courut de 1951, oĂč il quitta son poste ministĂ©riel, jusquâĂ 1963, annĂ©e oĂč il mit un terme dĂ©finitif Ă son activitĂ© professionnelle ; Ă noter quâentre ces deux phases, la prĂ©sidence de lâINI avait Ă©tĂ© laissĂ©e vacante[2].
Le projet sous-tendant lâINI rĂ©pondait aux idĂ©aux les plus profonds de Suanzes et Ă sa conviction de la nĂ©cessitĂ© dâindustrialiser lâEspagne. Ă ses yeux, le dĂ©veloppement Ă©conomique ne pouvait se rĂ©aliser si on laisse les mains libres Ă la logique de marchĂ©, et requĂ©rait au contraire lâimpulsion et lâappui de lâĂtat. Suanzes sâĂ©tait toujours nettement exprimĂ© contre une politique libĂ©rale et en faveur dâune Ă©conomie dirigĂ©e, compte tenu aussi que les Ă©vĂ©nements internationaux Ă©taient en train dâĂ©loigner lâEspagne de ses zones de commerce et dâĂ©changes traditionnelles[25]. Suanzes prĂ©conisait un vigoureux interventionnisme dâĂtat, ainsi quâune censure a priori de tous les moyens dâinformation afin que le peuple ne se sâaperçoive pas de lâampleur de la crise Ă©conomique de lâaprĂšs-guerre civile ; il sâingĂ©niait parallĂšlement Ă expliquer les positions antifranquistes des gouvernements amĂ©ricain et britannique par des manipulations des « rouges » exilĂ©s[26].
Dans le cadre de ses rapports, pas toujours cordiaux, avec le gouvernement, oĂč ses interlocuteurs habituels Ă©taient Carrero Blanco et Franco lui-mĂȘme, il nâhĂ©sita pas Ă brandir Ă plusieurs reprises la menace de sa dĂ©mission, ce qui avait pour effet de renforcer son autoritĂ©. Quand, de 1945 Ă 1951, il revint Ă exercer comme ministre de lâIndustrie, on nomma, sur suggestion de Suanzes, vice-prĂ©sident de lâINI, chargĂ© dâassurer lâintĂ©rim, le lieutenant-colonel dâartillerie JoaquĂn Planell, alors prĂ©sident de lâENCASO (acronyme dâEmpresa Nacional Calvo Sotelo, dĂ©nomination complĂšte : Empresa Nacional Calvo Sotelo de Combustibles LĂquidos y Lubricantes)[26].
Pendant ses deux mandats Ă l'INI, Suanzes allait crĂ©er les principales grandes entreprises du secteur public[24]. Dans lâaprĂšs-guerre civile, la situation internationale avait provoquĂ© une distance croissante entre lâEspagne et ses clients et fournisseurs traditionnels, raison pour laquelle lâautarcie apparaissait dans une certaine mesure inĂ©vitable. Aussi, pendant son premier mandat Ă la tĂȘte de lâINI, Suanzes lança-t-il toute une sĂ©rie de projets allant dans ce sens, dont notamment : un projet de distillation de schistes bitumineux Ă Puertollano, destinĂ© Ă remĂ©dier au manque de pĂ©trole, projet qui toutefois ne se concrĂ©tisa pas avant 1950 ; le soutien apportĂ© Ă lâentreprise Siderurgia Asturiana S.A., qui tentait de produire de lâacier sans matiĂšres premiĂšres dâimportation ; la fabrication de fertilisants Ă partir de produits agricoles autochtones ; le dĂ©veloppement dâune production nationale de charbon, etc., tous projets oĂč le facteur coĂ»t nâĂ©tait pas jugĂ© prioritaire[2]. Suanzes sâappliquait Ă dĂ©velopper Ă©galement la marine marchande, la production dâaluminium, dâĂ©nergie Ă©lectrique et dâautomobiles. Poursuivant toujours ses objectifs de souverainetĂ© Ă©conomique, il se prĂ©occupa aussi de soustraire le secteur des tĂ©lĂ©communications Ă lâemprise de la compagnie amĂ©ricaine ITT, Ă laquelle avait Ă©tĂ© concĂ©dĂ© en 1924 le monopole de la tĂ©lĂ©phonie en Espagne. Il fut aussi, dĂšs avant la crĂ©ation de lâINI, lâartisan de la mise sur pied de la compagnie aĂ©rienne Iberia en 1940. Il est Ă souligner que la part de capital Ă©tranger dans les entreprises de lâINI ne pouvait alors dĂ©passer les 24 %. De son poste de prĂ©sident, Suanzes chargea Wifredo Ricart de crĂ©er lâENASA, prĂ©figuration de la marque de camions et dâautomobiles Pegaso. LâINI fut Ă lâorigine Ă©galement de la SEAT, de lâEndesa, de lâEnsidesa et de lâENCASO, dâoĂč surgira ensuite lâactuel Repsol[note 4], et nombre dâautres entreprises.
Quant Ă la politique maritime, le nouveau rĂ©gime lâavait articulĂ©e autour de trois axes fondamentaux : un protectionnisme et interventionnisme affirmĂ© ; des plans pour la reconstitution du tonnage de la marine marchande et soutien aux chantiers navals ; et enfin, la mise sur pied dâune entreprise publique capable de supplĂ©er Ă lâaction insuffisante de lâinitiative privĂ©e. La loi de prescrivait lâintĂ©gration de la Gerencia de Buques Mercantes dans lâINI, accordait le statut dâ« Ă©tablissement naval national » aux entreprises crĂ©Ă©es par lâinstitut, et suspendait les limitations budgĂ©taires du crĂ©dit naval. La politique du gouvernement se recoupait avec les thĂšses de Suanzes touchant Ă la production navale, Ă savoir la nĂ©cessitĂ© de mettre en Ćuvre de vastes programmes de construction de navires aptes Ă garantir aux chantiers navals une charge de travail suffisante, de façon Ă stimuler lâexpansion de leurs installations, ainsi que dâuniformiser les types de navire Ă fabriquer en adoptant des modĂšles communs, ce qui rendrait leur construction plus compĂ©titive[27]. LâINI eut aussi un rĂŽle notable dans le rachat ou la prise de participation dans des entreprises de construction navale en difficultĂ© financiĂšre[note 5].
Cependant, il apparut Ă©vident que lâINI nâavait obtenu au cours de cette premiĂšre phase que de piĂštres rĂ©sultats : les projets de Puertollano avaient nĂ©cessitĂ© un effort Ă©conomique considĂ©rable et ne sâĂ©taient soldĂ©s par aucun rĂ©sultat tangible dâaucune sorte ; la production de fertilisants et dâacier nâarrivait pas Ă prendre pied ; lâon avait renoncĂ© aux initiatives dans le domaine de lâexploration miniĂšre ; les interventions de lâINI tendant Ă accroĂźtre la production de charbon dans quelques-uns des gisements exploitĂ©s par le secteur privĂ© (nommĂ©ment Ă La Camocha, Utrillas, Barruelo, Mieres) avaient dĂ©bouchĂ© sur un Ă©chec cuisant, etc. Tout cela eut pour consĂ©quence que la politique dâautarcie avait pris du plomb dans lâaile, ce dont lâun des indices les plus sĂ»rs Ă©tait le fait que Suanzes fit Ă©tat devant Franco de la nĂ©cessitĂ© dâouvrir des pourparlers avec la Grande-Bretagne et les Ătats-Unis en vue de la fourniture possible de biens dâĂ©quipement[2].
De fait, dĂšs 1945, annĂ©e pourtant oĂč lâisolement de lâEspagne Ă©tait Ă son comble, Suanzes avait rĂ©ajustĂ© son objectif autarcique, et avait plus tard, lors de son deuxiĂšme mandat ministĂ©riel, vouĂ© un gros effort Ă obtenir lâappui financier des Ătats-Unis, dĂ©marche importante en direction de lâinternationalisation de lâĂ©conomie espagnole. En outre, il favorisa pour la premiĂšre fois en 1949 la prĂ©sence Ă©trangĂšre dans le capital dâune entreprise fondĂ©e par lâINI (p. ex., de Caltex dans la RefinerĂa de PetrĂłleos de Escombreras S.A.), et admit lâapport technologique de la Fiat dans le dĂ©veloppement de lâentreprise SEAT, choses encore inenvisageables dans les premiers temps de lâINI ; manifestement, la pensĂ©e de Suanzes en la matiĂšre avait Ă©voluĂ©. De mĂȘme, il avait tempĂ©rĂ© ses rĂ©ticences sur lâentreprise privĂ©e, la tolĂ©rant dĂ©sormais, pourvu que lâobjectif dâindustrialisation de lâEspagne nâen soit pas compromis, et moyennant aussi que la prĂ©sence de capital Ă©tranger nâentre pas en conflit avec lâintĂ©rĂȘt national, critĂšre dont Suanzes sâĂ©rigea lui-mĂȘme en le principal « interprĂ©tateur »[2].
PoussĂ© par Carrero Blanco, Franco procĂ©da en 1951 Ă un important remaniement de son gouvernement, dont la finalitĂ© principale Ă©tait la rĂ©orientation de sa politique Ă©conomique. Câest dans ce cadre que Suanzes dut cĂ©der son portefeuille Ă Manuel Arburua, qui amorça une libĂ©ration du marchĂ© extĂ©rieur et notamment des importations, accorda au secteur privĂ© des facilitĂ©s de crĂ©dit jusquâalors rĂ©servĂ©es au secteur public, et sâefforça dâĂ©tablir dans le secteur industriel une complĂ©mentaritĂ© entre lâINI et les entreprises privĂ©es. Les rĂ©sultats en Ă©taient encourageants : en 1953, le revenu per capita dĂ©passa enfin celui de 1935[28] - [note 6].
RelevĂ© de ses fonctions de ministre, Suanzes reprit la prĂ©sidence de lâINI, qui avait Ă©tĂ© maintenue vacante. Quelque grand quâait Ă©tĂ© son poids politique grĂące Ă sa proximitĂ© avec Franco, il Ă©tait conscient que dĂ©sormais lâinitiative publique perdait progressivement de ses appuis et Ă©tait de plus en plus menacĂ© de devoir affronter la concurrence de lâinitiative privĂ©e ressuscitĂ©e. Câest pourquoi Suanzes ne cessait de souligner que lâINI ne sâengageait dans des projets dâindustrialisation que lorsque lâargent du secteur privĂ© nâĂ©tait pas au rendez-vous, et conçut le postulat dit de la « temporaritĂ© » (temporalidad), selon lequel lâINI, aprĂšs avoir dĂ©veloppĂ© tel projet, cĂ©dait ses actions dĂšs quâaurait surgi un entrepreneur privĂ© intĂ©ressĂ© Ă prendre le relais, lâInstitut prĂ©fĂ©rant consacrer ses ressources Ă quelque autre initiative dont la necessitĂ© pouvait apparaĂźtre plus patente. Cependant, en pratique, une telle Ă©ventualitĂ© ne vint jamais Ă se produire, en raison justement des rĂ©ticences de Suanzes. Ce nonobstant, pendant cette pĂ©riode, lâINI mit en Ćuvre un vaste programme dâindustrialisation dans des secteurs de base, tels que le secteur minier, pĂ©trolier, Ă©lectrique, sidĂ©rurgique, de lâautomobile, etc.[2] Les activitĂ©s autarcisantes de lâINI et de Suanzes lui-mĂȘme ne cesseront nĂ©anmoins de sâeffriter, jusquâĂ atteindre leur Ă©tiage par suite de lâavĂšnement, Ă la fin de la dĂ©cennie 1950, des dĂ©nommĂ©s « technocrates », au moment oĂč lâINI nâĂ©tait dĂ©jĂ plus guĂšre quâun institut de soins pour entreprises en difficultĂ©[16].
DĂ©mission et retrait de la vie publique
La nouvelle politique Ă©conomique mise en place Ă partir de 1959, faite de libĂ©ralisation et dâouverture sur lâextĂ©rieur, et concrĂ©tisĂ©e en particulier par le Plan de stabilisation de 1959, mettait en cause le rĂŽle de lâINI, ce qui, ajoutĂ© Ă une mauvaise entente avec le gĂ©nĂ©ral Franco, provoqua le dĂ©part de Suanzes comme directeur de lâINI en 1963[2]. Les nouveaux concepts Ă©conomiques, propres Ă la dĂ©nommĂ©e technocratie, et le nouveau style politique se heurtaient ouvertement Ă lâinamovible croyance de Suanzes, qui persista Ă estimer nĂ©cessaire de garder un haut degrĂ© de gestion publique sur certaines entreprises. Suanzes dĂ©clara alors :
« Je ne peux pas ĂȘtre lâinstrument appropriĂ© dâune politique Ă©conomique dont je ne comprends pas, et ne partage encore moins, les objectifs fondamentaux et la mise en Ćuvre. Je crois que se font jour des tendances capitalistoĂŻdes et de dĂ©fense des privilĂšges des puissants. »
Un dĂ©saveu supplĂ©mentaire des convictions de Suanzes survint en 1962 de la part de la Banque mondiale qui, faisant rĂ©fĂ©rence Ă lâEspagne et Ă lâINI, fustigeait la concurrence nĂ©faste entre entreprise publique et privĂ©e, surtout quand celle-lĂ avait accĂšs Ă des ressources dont lâobtention Ă©tait malaisĂ©e pour celle-ci[29].
Lorsque son vieil ami Suanzes, en dĂ©saccord avec le libĂ©ralisme prescrit par LĂłpez-Bravo, met en balance sa dĂ©mission, Franco, consentant sans difficultĂ© majeure Ă renoncer Ă la vieille Ă©quipe qui Ă ses cĂŽtĂ©s avait conduit la politique de dirigisme et dâautarcie, se rangea aux avis de son nouveau ministre de lâIndustrie et accepta le dĂ©part de Suanzes, sans faire grand-chose pour le retenir[30] - [31], mais non sans avoir tentĂ©, il est vrai, de lui faire admettre que le nouveau gouvernement nâĂ©tait pas son ennemi et que lâINI et le secteur public continueraient de constituer une part importante de lâĂ©conomie politique du rĂ©gime ; cependant, devant lâinsistance de Suanzes, Franco finit par cĂ©der et Ă©crivit Ă son ami : « Tu ne mâas pas convaincu, mais tu mâas vaincu, et jâaccepte la dĂ©mission »[32], laissant Ă©chapper aussi, dâaprĂšs LĂłpez RodĂł, cette apprĂ©ciation dĂ©finitive : « Suanzes nâaime pas la jeunesse »[33]. Ainsi, câest donc de façon irrĂ©vocable cette fois que Suanzes remit sa dĂ©mission, au lendemain de lâadoption du premier Plan de dĂ©veloppement Ă©laborĂ© par LĂłpez RodĂł pour les annĂ©es 1964-1967, sur lequel il nâavait mĂȘme pas Ă©tĂ© consultĂ©, et cause dĂ©finitive de son dĂ©part[32] - [note 7].
AprĂšs sa lettre de dĂ©mission, en date du Ă lâadresse de Franco, Suanzes cessa dâavoir des relations avec celui-ci, pourtant naguĂšre encore si frĂ©quentes, et prit garde depuis lors Ă se tenir totalement Ă lâĂ©cart du monde de lâentreprise. Son dĂ©sarroi Ă©motionnel Ă©tait tel quâil songea mĂȘme Ă rĂ©pudier le titre de marquis de Suanzes que le Caudillo lui avait octroyĂ© trois ans auparavant[29] - [34] - [2].
Son successeur Ă la tĂȘte de lâINI fut lâun de ses adeptes, lâingĂ©nieur JosĂ© Sirvent Dargent, encore que celui-ci ne se soit pas inscrit dans la droite ligne de son prĂ©dĂ©cesseur et ait pris dĂ»ment en considĂ©ration le changement de cycle intervenu dans la rĂ©alitĂ© nationale et internationale[35].
Suanzes Ă©tait membre de lâAssociation dâingĂ©nieurs et dâarchitectes navals de New York, de lâInstitution des architectes navals de Londres et de lâAssociation technique maritime et aĂ©ronautique de Paris. Il Ă©tait rĂ©cipiendaire de la MĂ©daille du mĂ©rite au travail et de la Grand croix dâAlphonse X le Sage.
Notes et références
Notes
- La procĂ©dure suivie, entre la publication du cahier des charges le et lâattribution du marchĂ© Ă la SECN lâannĂ©e suivante, Ă©tait entachĂ©e dâambigĂŒitĂ©s et dâabus de pouvoir plus ou moins maquillĂ©s. Certains chercheurs affirment que, malgrĂ© toutes les arguties utilisĂ©es pour lĂ©gitimer lâadjudication du marchĂ©, la dĂ©cision de choisir Vickers avait dĂ©jĂ Ă©tĂ© prise lors dâune entrevue tenue Ă CarthagĂšne entre les monarques britannique et espagnol, les 8 et , oĂč furent passĂ©s des accords concernant certains aspects de la politique mĂ©diterranĂ©enne, et selon toute probabilitĂ©, des sujets furent Ă©galement abordĂ©s en relation avec la possibilitĂ© que quelque firme britannique cĂšde sa technologie navale Ă lâEspagne. Du reste, cette adjudication douteuse eut plusieurs tenaces opposants. Cf. M. Valdivieso (2013), p. 249.
- Quand Ă lâissue du concours dâappel dâoffres le marchĂ© de lâEscuadra fut adjugĂ© en aoĂ»t 1908 Ă la SECN, Basil Zaharoff, alors lâun des principaux conseillers et actionnaires de la Vickers Sons & Maxim, acquit par lĂ une position importante dans lâĂ©tat-major de la compagnie hispano-britannique. Cette situation lui servit, Ă lui et Ă la Vickers, Ă mettre la main sur un site de production de plus au bĂ©nĂ©fice de son vaste systĂšme de commerce des armes. Tout en tirant des avantages commerciaux de la SECN, Vickers prenait soin de ne faire partager ses connaissances techniques aux Espagnols que dans certaines limites. Cette trame Ă©tait habilement ourdie par Zaharoff, avec la complicitĂ© de quelques personnalitĂ©s espagnoles influentes. Cf. M. Valdivieso (2013), p. 253.
- Suanzes Ă©tait, avec PacĂłn et Camilo Alonso Vega, lâun des trĂšs rares qui pouvaient tutoyer Franco. Cf. B. Bennassar (1999), p. 294.
- Menant une lutte acharnĂ©e pour la domination du secteur pĂ©trolier, Suanzes afficha Ă diverses occasions sa volontĂ© de contrecarrer le poids du monopole pĂ©trolier de la sociĂ©tĂ© CAMPSA et de sa flotte. En 1955, lorsque la sociĂ©tĂ© ELCANO avait lancĂ© la construction des navires pĂ©troliers de type T, et que JesĂșs Alfaro Fournier, directeur gĂ©nĂ©ral, nouvellement intronisĂ© Ă la prĂ©sidence de lâENE, Ă©voqua devant son ami Suanzes la vente du premier de ces navires Ă lâarmateur de Cantabrie Fernando M. Pereda , Suanzes refusa carrĂ©ment cette vente allĂ©guant la nĂ©cessitĂ© de garantir Ă REPESA la disponibilitĂ© dâune flotte pour les importations de brut et la nĂ©cessitĂ© que lâINI dispose elle aussi dâune flotte de pĂ©troliers, dans le cadre de sa combat contre CAMPSA. Cf. J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 309 et A. Ballestero Aguilar (1993), p. 334.
- Lâhistorien Juan Carlos DĂaz Lorenzo note : « La sociĂ©tĂ© Astilleros de CĂĄdiz. S.A. fut officiellement constituĂ©e le par devant le notaire JesĂșs Puig MartĂnez, de lâIlustre Colegio notarial de Madrid [âŠ]. Une semaine auparavant avait Ă©tĂ© effectuĂ©e la vente formelle du chantier de construction Ă lâINI [âŠ]. Pour parvenir Ă cet accord, il fallut dâabord attendre que la Sociedad Española de ConstrucciĂłn Naval mette un terme Ă la procĂ©dure quâelle avait engagĂ©e contre Echevarrieta [lâancien propriĂ©taire], aprĂšs quâelle eut appris la vente du chantier Ă lâĂtat. Astilleros de Cadix avait un capital social de 100 millions de pesetas, rĂ©parti sur 10 000 actions de 10 000 pesetas chacune. De ce total, 9 460 actions Ă©churent Ă lâINI et les 600 restantes, Ă©quivalant Ă 6 millions de pesetas, restĂšrent aux mains dâHoracio Echevarrieta, montant qui correspondait aux estimations faites de la valeur des installations et Ă ce qui avait Ă©tĂ© convenu entre Echevarrieta et Suanzes. [Les auteurs] Aceña et ComĂn soulignent que lâINI « canalisa vers lâentreprise dâimmenses quantitĂ©s de ressources », vu que les investissements directs passĂšrent de 26,5 millions de pesetas en 1952 Ă 557,9 millions en 1960, chiffre auquel allait plafonner lâapport de lâINI ; elle allait recevoir Ă©galement des fonds de lâĂ©mission dâobligations pour un montant de 350 millions de pesetas. Le , le chantier de Cadix passa dĂ©finitivement aux mains de la nouvelle entreprise, dont lâamiral Rafael de Estrada ArnĂĄiz fut le premier prĂ©sident [âŠ]. Le dĂ©cret portant sa crĂ©ation lui attribuait le qualificatif dâ« industrie dâintĂ©rĂȘt national », ce qui se traduisait par le fait quâelle pouvait obtenir des avantages fiscaux et des aides financiĂšres importantes. » Cf. J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 388 et P. MartĂn Aceña & F. ComĂn (1991), p. 223.
- Lâannonce en 1950 des fiançailles de la fille de Franco, Carmencita, avec CristĂłbal MartĂnez-BordiĂș, fut une surprise pour la haute sociĂ©tĂ© madrilĂšne, qui tenait pour acquis que le principal prĂ©tendant de Carmencita Ă©tait un des fils de Suanzes. Cf. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 458-459.
- Carmen affirme que son pĂšre avait une opinion magnifique de Suanzes, et assure quâil Ă©tait intervenu Ă plusieurs reprises pour adoucir les rapports entre Suanzes et les ministres technocrates, mais que « chaque fois que mon pĂšre mettait un peu de paix entre les uns et les autres, Suanzes lui prĂ©sentait sa dĂ©mission⊠Je ne sais combien de fois⊠». Cf. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 739, note 56.
Références
- M. Valdivieso (2013), p. 248.
- (es) Alfonso Ballestero Aguilar, « Juan Antonio Suanzes Fernåndez », sur Diccionario biogråfico español, Madrid, Real Academia de la Historia, (consulté le )
- (es) Vicente Pozuelo, Los Ășltimos 476 dĂas de Francisco Franco, Barcelone, Planeta, , 234 p., p. 88
- BartolomĂ© Bennassar, Franco. Enfance et adolescence, Paris, Ăditions Autrement, coll. « Naissance dâun destin », , 193 p. (ISBN 2-7028-3307-1), p. 51-52
- Bartolomé Bennassar, Franco, Paris, Perrin, coll. « Tempus », (1re éd. 1995), 409 p. (ISBN 978-2-262-01895-5), p. 24
- B. Bennassar (1999), p. 30.
- B. Bennassar (1999), p. 58.
- Ă propos de cette Ă©cole, voir : (es) Jaime AntĂłn Viscasillas, « La Academia de Ingenieros y Maquinistas. Ferrol, 1915-1932. Impulso tĂ©cnico y renovaciĂłn del Cuerpo de Ingenieros de la Armada », Revista general de marina, Madrid, ministĂšre espagnol de la DĂ©fense, vol. 279, no 2,â , p. 391-410 (ISSN 0034-9569, lire en ligne).
- M. Valdivieso (2013), p. 249-250.
- M. Valdivieso (2013), p. 250.
- M. Valdivieso (2013), p. 251.
- M. Valdivieso (2013), p. 253.
- (es) Stanley G. Payne et JesĂșs Palacios, Franco. Una biografĂa personal y polĂtica, Barcelone, Espasa, , 813 p. (ISBN 978-84-670-0992-7), p. 285
- J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 304.
- A. Ballestero Aguilar (1993), p. 77-86.
- M. Valdivieso (2013), p. 254.
- P. Preston (2004), p. 330-332
- S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 207-208.
- Andrée Bachoud, Franco, ou la réussite d'un homme ordinaire, Paris, Fayard, , 530 p. (ISBN 978-2213027838), p. 170-171
- BartolomĂ© Bennassar, la Guerre dâEspagne et ses lendemains, Paris, Perrin, , 548 p. (ISBN 2-262-02001-9), p. 174-175
- J. A. Suanzes (1963), p. 127-128.
- B. Bennassar (1995), p. 190.
- S. G. Payne & J. Palacios (2014).
- S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 285.
- J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 308.
- M. Valdivieso (2013), p. 255.
- J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 308-309.
- B. Bennassar (1995), p. 192.
- M. Valdivieso (2013), p. 256.
- B. Bennassar (1995), p. 317.
- A. Bachoud (1997), p. 385.
- S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 491.
- (es) Laureano LĂłpez RodĂł, Memorias, Ă©d. Actualidad y Libros, S.A., , 789 p. (ISBN 978-8478630097), p. 273.
- Elenco de Grandezas y TĂtulos Nobiliarios Españoles (2014). Instituto Español de Estudios Nobiliarios, Editorial HidalguĂa.
- J. C. DĂaz Lorenzo (2019), p. 433-434.
Bibliographie
Ćuvres de Juan Antonio Suanzes
- (es) Ocho discursos de Suanzes, Madrid, Centro de Estudios EconĂłmicos y Sociales del INI, , 217 p..
Bibliographie sur Juan Antonio Suanzes
- (es) Alfonso Ballestero Aguilar, Juan Antonio Suanzes 1891-1977 : La polĂtica industrial de la posguerra, LeĂłn, LID Editorial empresarial, , 346 p. (ISBN 978-8488717115).
- (es) Pablo MartĂn-Aceña et Francisco ComĂn ComĂn, INI, 50 años de industrializaciĂłn en España, Madrid, Espasa-Calpe, , 541 p. (ISBN 8423958280).
- (es) Elena San RomĂĄn, EjĂ©rcito e industria : el nacimiento del INI, Barcelone, CrĂtica, , 335 p..
- (es) Pedro Schwartz et Manuel JesĂșs GonzĂĄlez, Una historia del Instituto Nacional de Industria 1941-1976, Madrid, Tecnos, , 288 p. (ISBN 84-309-0770-X).
- (es) ouvrage collectif, sous la direction dâAntonio GĂłmez Mendoza, De mitos y milagros : El Instituto Nacional de AutarquĂa, 1941-1963, Barcelone, Edicions de la Universitat de Barcelona/FundaciĂłn Duques de Soria, , 217 p. (ISBN 9788483382257).
- (es) JesĂșs Valdaliso, La Empresa Nacional Elcano de la Marina Mercante y la actuaciĂłn del INI en el sector naval durante la presencia de J.A. Suanzes, Madrid, FundaciĂłn Empresa PĂșblica, , 140 p. (lire en ligne) (document de travail).
- (es) Pablo MartĂn Aceña et Francisco ComĂn, INI : 50 años de industrializaciĂłn de España, Madrid, Espasa-Calpe, , 542 p. (ISBN 84-23958280, lire en ligne).
Liens externes
- Juan Antonio Suanzes FernĂĄndez, en la Real Academia de las Ciencias
- (es) Jaime Anton Viscasillas et Emilio AntĂłn Miranda, « In memoriam. El general Don Juan Antonio Suanzes y FernĂĄndez, marquĂ©s de Suanzes », Revista de Historia naval, Ferrol, LibrerĂa Central Librera,â (lire en ligne).
- (es) Alfonso Ballestero Aguilar, « Juan Antonio Suanzes Fernåndez », sur Diccionario biogråfico español, Madrid, Real Academia de la Historia, (consulté le )
- (es) Mario Valdivieso, « Juan Antonio Suanzes, mantenedor de utopias », FerrolAnĂĄlisis: revista de pensamiento y cultura, Ferrol, no 27,â , p. 248-257 (ISSN 1576-4540, lire en ligne).
- (es) Juan Carlos DĂaz Lorenzo, « La construcciĂłn naval en España en el siglo XX (1900â1975). Vicisitudes y desafĂos tecnolĂłgicos : El caso de CompañĂa TrasatlĂĄntica Española », La Corogne, UniversitĂ© de La Corogne / Departamento de Ciencias de la NavegaciĂłn e IngenierĂa Marina, (thĂšse de doctorat, sous la direction de Santiago Iglesias Baniela).