Dynastie macédonienne
La dynastie macĂ©donienne (en grec : ÎαÎșÎ”ÎŽÎżÎœÎčÎșÎź ÎÏ ÎœÎ±ÏÏΔία) rĂ©gna pendant presque deux siĂšcles Ă Constantinople, soit de 867 Ă 1057. Elle doit son nom Ă son fondateur, Basile Ier qui naquit dans le thĂšme byzantin de MacĂ©doine (district administratif correspondant Ă la rĂ©gion d'Andrinople en Thrace)[1] - [2]. Elle a comptĂ© plus de vingt souverains, certains accĂ©dant au trĂŽne soit par usurpation, soit par mariage.
Le nom mĂȘme de « dynastie macĂ©donienne » a portĂ© Ă controverse, certains auteurs soutenant que son fondateur Ă©tait de descendance armĂ©nienne[1] - [3], certains autres slave[4] - [5] ou « armĂ©no-slave »[6]. Câest pourquoi quelques-uns comme George Bournoutian[7] et Mack Chahin[8] se rĂ©fĂšrent Ă elle comme Ă la « dynastie armĂ©nienne ».
Cette pĂ©riode, que George Ostrogorsky qualifiait dâ« apogĂ©e de lâEmpire byzantin » (en la faisant partir du rĂšgne de Michel III), verra aprĂšs la perte des possessions byzantines dâItalie, les querelles suscitĂ©es par la crise iconoclaste et la lutte contre les invasions perses et arabes, un renouveau qui devait se traduire par la crĂ©ation dâune nouvelle zone dâinfluence chez les Slaves grĂące Ă la christianisation des populations, une renaissance culturelle que lâon a qualifiĂ©e de « renaissance macĂ©donienne », caractĂ©risĂ©e par la rĂ©surgence des idĂ©aux, concepts et formes dâart de lâAntiquitĂ© classique[9], une croissance Ă©conomique[10] ainsi quâune expansion politico-militaire rĂ©tablissant la puissance de lâempire en MĂ©diterranĂ©e, reculant ses frontiĂšres vers lâEst et se soumettant Ă nouveau les Balkans[11].
Contexte historique
La dynastie amorienne nâavait rĂ©gnĂ© quâun peu moins de cinquante ans, soit de 820 Ă 867. Cette pĂ©riode avait Ă©tĂ© marquĂ©e par divers conflits religieux dont le principal fut celui de lâiconoclasme qui se terminera lorsque lâimpĂ©ratrice ThĂ©odora (r. 842 - 856) rĂ©tablira le culte des images. La nomination du haut-fonctionnaire Photios comme patriarche marquera le dĂ©but dâun schisme entre Rome et Constantinople sous Michel III. Par ailleurs, si les missions de Cyrille et MĂ©thode contribuĂšrent Ă faire entrer les Slaves dans lâorbite de Byzance, le khan bulgare profitera des tensions entre Rome et Constantinople pour affirmer son indĂ©pendance en crĂ©ant une Ăglise nationale.
Sur le plan intĂ©rieur, on assistera au sein de lâempire Ă une extension des thĂšmes en Orient ainsi quâĂ un renouveau du savoir avec des personnages tels que Theoktistos, le CĂ©sar Bardas, LĂ©on le MathĂ©maticien et la crĂ©ation de lâuniversitĂ© de la Magnaure, renouveau qui rendra possible la « Renaissance macĂ©donienne ».
Sur le plan extĂ©rieur, lâempire sâĂ©tait recroquevillĂ© sur lui-mĂȘme, les Arabes continuant leur progression en CrĂšte, en Sicile et dans le sud de lâItalie, sans toutefois faire de gains significatifs en Asie Mineure.
Le dernier empereur de cette dynastie, Michel III dit l'Ivrogne (r. 842 - 867), longtemps tenu Ă lâĂ©cart du pouvoir par sa mĂšre ThĂ©odora (r. 842 â 856) dĂ©lĂ©gua pendant nombre dâannĂ©es les soucis du pouvoir Ă son oncle, le CĂ©sar Bardas, passant son temps lorsquâil nâĂ©tait pas Ă la guerre Ă se divertir avec des athlĂštes parmi lesquels il remarqua un dompteur de chevaux et lutteur extraordinaire du nom de Basile dont il fit son nouveau favori et garde du corps[12] - [13]. Mais Basile nâĂ©tait pas seulement dotĂ© de capacitĂ©s physiques extraordinaires ; il possĂ©dait aussi une ambition dĂ©bordante. Au cours d'une expĂ©dition contre les Arabes, Basile rĂ©ussit Ă convaincre Michel III que son oncle, le CĂ©sar Bardas, complotait pour s'emparer du trĂŽne et, avec l'accord de l'empereur, Basile assassina celui-ci le 21 avril 866[14]. Devenu la personnalitĂ© la plus en vue de la cour, il fut bientĂŽt investi du titre de cĂ©sar[N 1], devenu vacant avec la mort de Bardas, et fut couronnĂ© coempereur le 26 mai 866[15] - [16]. Toutefois, lorsque Michel III porta son attention vers un autre courtisan, Basiliskianos et menaça de lui donner Ă©galement le titre de coempereur Basile se sentit menacĂ© et, dans la nuit du 23 au 24 septembre 867, lui et un groupe de compagnons s'introduisirent dans les appartements impĂ©riaux et assassinĂšrent lâempereur. Ă la suite de la mort de Michel III, Basile, dĂ©jĂ couronnĂ© coempereur, devint immĂ©diatement basileus, mettant ainsi fin Ă la dynastie amorienne[1] - [17] - [18].
Basile Ier (r. 867-886)
Il n'y eut que peu de rĂ©actions Ă Constantinople aprĂšs lâannonce de la mort de Michel III, les fonctionnaires lui reprochant son total manque d'intĂ©rĂȘt pour les devoirs qui incombaient Ă sa charge alors que son manque de ferveur religieuse lui avait aliĂ©nĂ© la population en gĂ©nĂ©ral. En dĂ©pit du fait qu'il n'ait eu aucune Ă©ducation formelle ni expĂ©rience militaire ou administrative, Basile montra dĂšs ses dĂ©buts qu'il entendait gouverner pour le bien de l'Ătat et, ayant dĂ©diĂ© lors de son couronnement sa couronne au Christ, il maintint tout au long de son rĂšgne une rĂ©putation de piĂ©tĂ© et d'orthodoxie[19].
Sur le plan domestique, Basile choisit de ne pas rĂ©pudier l'Ă©pouse que lui avait imposĂ©e Michel III, Eudocie Ingerina. Ayant dĂ©jĂ eu un fils de sa premiĂšre Ă©pouse, appelĂ© Constantin, il s'empressa de couronner celui-ci comme coempereur en 869 et fit de mĂȘme avec LĂ©on, le fils dâEudocie dont le pĂšre Ă©tait Michel III en 870.
DĂšs le dĂ©but de son rĂšgne, Basile Ier s'attaqua Ă une rĂ©forme du droit. PremiĂšre tentative de rĂ©forme depuis Justinien, l'Eisagoge (en grec : ÎጰÏαγÏγΟ [ÏοῊ ÎœÏÎŒÎżÏ ], Introduction [Ă la loi]), aussi appelĂ© Epanagoge (en grec : áŒÏÎ±ÎœÎ±ÎłÏγΟ, Mise au point) fut promulguĂ© en 886[20]. ComplĂ©tĂ© sous le rĂšgne de LĂ©on VI le Sage et intitulĂ© Basilika[21], ce nouveau code demeurera le fondement du droit byzantin jusquâĂ la conquĂȘte par les Ottomans.
De retour aprĂšs le long interlude de lâiconoclasme, la paix religieuse avait Ă©tĂ© compromise dans lâempire par la nomination dâun ancien haut-fonctionnaire, Photios, comme patriarche de Constantinople aprĂšs le renvoi dâIgnace qui avait eu maille Ă partir avec le CĂ©sar Bardas. Le pape Adrien II avait donnĂ© raison aux partisans dâIgnace[1]. Pour rĂ©tablir la paix religieuse Ă l'intĂ©rieur de l'empire, Basile renvoya Photios en poste depuis deux mois et rappela Ignace. Ce faisant, Basile cherchait aussi Ă crĂ©er une alliance avec le pape, ainsi qu'avec l'empereur germanique, pour protĂ©ger les positions byzantines dans le sud de l'Italie et en Sicile, sĂ©rieusement compromises par l'avancĂ©e des Arabes qui devaient conquĂ©rir Malte en 870[22]. Photios devait toutefois revenir en grĂące et, aprĂšs un court exil, ĂȘtre nommĂ© prĂ©cepteur des princes Constantin et LĂ©on, avant de succĂ©der Ă Ignace aprĂšs la mort de celui-ci en 877.
En politique Ă©trangĂšre Basile porta dâabord son attention vers la partie orientale de la MĂ©diterranĂ©e oĂč des pirates avaient fait leur apparition en 867. Les villes dalmates et les tribus slaves qui avaient vu leurs liens avec Byzance se relĂącher pendant la crise iconoclaste firent appel Ă la marine byzantine qui rĂ©ussit Ă refouler les assaillants vers lâItalie du Sud. L'autoritĂ© de l'Empire byzantin fut ainsi rĂ©tablie sur le littoral oriental de l'Adriatique permettant la crĂ©ation du thĂšme de Dalmatie et une rapide diffusion du christianisme dans la rĂ©gion[23].
La flotte byzantine put alors porter ses efforts vers le sud de l'Italie pour contrer les avances des Arabes. Mais lâalliance que voulait conclure Basile avec Louis II de Germanie (roi d'Italie : 844 â 876 ; empereur d'Occident : 850 - 876) qui contrĂŽlait le nord et le centre de l'Italie nâeut pas les effets escomptĂ©s, Louis II comptant garder pour lui des territoires, comme Bari, que Constantinople voulait reprendre[24] - [25].
La tragĂ©die devait frapper Basile Ier en 879 lorsque son fils aĂźnĂ©, Constantin, mourut. Basile promut son fils cadet, Alexandre, au rang de coempereur au mĂȘme titre que LĂ©on. Les relations avaient toujours Ă©tĂ© difficiles entre LĂ©on et Basile, l'empereur n'aimant guĂšre ce garçon, fils selon toutes les apparences de Michel III et qui montrait plus de dispositions pour l'Ă©tude que pour la chose militaire. Aussi, lorsquâun proche de Photios accusa LĂ©on de vouloir assassiner l'empereur, ce dernier ne dut qu'Ă l'intervention du patriarche de ne pas ĂȘtre aveuglĂ©. ConfinĂ© au palais, il ne fut rĂ©tabli dans ses droits que peu avant la mort de Basile le 29 aoĂ»t 886 Ă la suite d'un accident de chasse[26] - [27].
LĂ©on VI (886-912)
Ă la mort de Basile Ier, LĂ©on accĂ©da au pouvoir, partageant thĂ©oriquement celui-ci avec son frĂšre Alexandre, mais sans lui donner de rĂŽle dans le gouvernement de lâempire[28] - [29].
L'un des premiers gestes de lâempereur sera de transfĂ©rer en grande pompe les restes de Michel III vers le mausolĂ©e impĂ©rial de l'Ă©glise des Saints-ApĂŽtres de Constantinople, accrĂ©ditant ainsi dans l'opinion publique la rumeur selon laquelle lui-mĂȘme se considĂ©rait fils du prĂ©dĂ©cesseur de Basile[30] - [29]. Sa propre vie privĂ©e devait par la suite crĂ©er de graves difficultĂ©s entre lui et lâĂglise. Sur ordre de son pĂšre, il avait d'abord dĂ» Ă©pouser en 886 ThĂ©ophano Martinakia, une cousine de sa mĂšre, laquelle dĂ©laissĂ©e par son mari, mourut dans un couvent en 896 aprĂšs lui avoir donnĂ© une fille. Devenu veuf, il se remaria en 898 avec sa maĂźtresse de toujours, Tzaoutzina, qui mourut en 899 aprĂšs lui avoir Ă©galement donnĂ© une fille. Le litige avec lâĂglise commença en 900 lorsquâil força le nouveau patriarche, Antoine II CaulĂ©as, Ă lui donner la dispense nĂ©cessaire pour un troisiĂšme mariage, lâĂglise dâOrient nâautorisant que deux mariages pour perpĂ©tuer la famille. Ce mariage permit la naissance dâun hĂ©ritier mĂąle, Basile, qui dĂ©cĂ©da le mois mĂȘme de sa naissance. Aux yeux de lâĂglise, un quatriĂšme mariage Ă©tait pure fornication. Câest pourquoi LĂ©on VI Ă©pousa en secret ZoĂ© Carbonopsina, avant de la proclamer en public Ă©pouse et impĂ©ratrice. La fureur de l'Ăglise Ă©clata au grand jour. Devant lâintransigeance du patriarche Nicolas Ier, lâempereur le remplaça par son ancien directeur de conscience, Euthyme Ier, et sollicita directement du pape Serge III lâautorisation nĂ©cessaire. De cette union naĂźtra en 905 le futur Constantin VII[31] - [32].
Sur le plan intĂ©rieur, LĂ©on VI porta Ă bien la grande rĂ©forme du droit entreprise sous Michel III. Aux Basiliques, Ă©crites en grec, sâajouta une collection de 113 Ă©dits, les Novelles qui, abolissant les privilĂšges des curies et du SĂ©nat, concentrĂšrent l'administration impĂ©riale entre les mains du souverain et de son appareil bureaucratique. ParallĂšlement (et on peut voir lĂ lâinfluence de Photios), elles dĂ©finissaient le fonctionnement de lâĂglise et les rapports devant exister entre lâempereur et le patriarche[33] - [34].
ConfrontĂ© Ă de nombreux ennemis Ă la fois, LĂ©on VI nâobtint pas les mĂȘmes succĂšs en politique Ă©trangĂšre. La longue paix avec la Bulgarie prit fin avec lâavĂšnement de SimĂ©on Ier en 893 Ă la suite d'un conflit commercial. LâannĂ©e suivante SimĂ©on passa Ă lâoffensive et dĂ©fit les Byzantins qui demandĂšrent lâaide de nouveaux arrivants dans la rĂ©gion, les Magyars, contre lesquels les Bulgares firent appel aux PetchĂ©nĂšgues. La bataille de Bulgarophygon en 896 confirma la supĂ©rioritĂ© des Bulgares qui en profitĂšrent pour affirmer lâindĂ©pendance de leur Ăglise[35] - [36].
Les Arabes tirĂšrent profit de cette guerre tant en Occident quâen Orient. Ainsi LĂ©on VI perdit le dernier point d'appui byzantin en Sicile en 902 avec la prise par les Arabes de Taormine et dut dĂ©fendre Thessalonique en 904, alors que ceux-ci razziaient lâArmĂ©nie et sâavançaient en Cilicie[37] - [38].
Ă leur tour, les Rusâ de Kiev, rĂ©clamant des avantages commerciaux, vinrent assiĂ©ger Constantinople en 907, guerre qui se terminera en 911 par la signature dâun traitĂ© commercial marquant le dĂ©but officiel des relations commerciales entre les deux puissances[39].
Câest au retour dâune campagne contre les Arabes en 912 visant Ă reprendre la CrĂȘte que LĂ©on tomba malade et mourut, laissant le trĂŽne Ă son frĂšre Alexandre.
Alexandre et Constantin VII (912-913)
DĂšs quâil fut seul empereur (Constantin VII n'ayant alors que sept ans)[N 2], Alexandre fit de son mieux pour se dĂ©marquer de son frĂšre. Il commença par utiliser le terme dâ« autocrator » (αáœÏÎżÎșÏÎŹÏÏÏ ÏÎčÏÏáœžÏ Î”áœÏΔÎČáœŽÏ ÎČαÏÎčλΔáœșÏ) sur ses monnaies pour marquer la fin des trente-trois ans passĂ©s comme coempereur ; il renvoya la plupart des conseillers de LĂ©on, dĂ©posa le patriarche Euthyme et fit enfermer lâimpĂ©ratrice ZoĂ© Karbonopsina dans un couvent. Nicolas Ier Mystikos, qui sâĂ©tait opposĂ© au quatriĂšme mariage de LĂ©on, fut rappelĂ© comme patriarche[40] - [41].
Durant son court rĂšgne, Alexandre se trouva aux prises avec les forces dâAl-Muqtadir en Orient et provoqua une guerre avec SimĂ©on de Bulgarie en refusant de payer le tribut annuel prĂ©vu par le traitĂ© de 896[40] - [41].
Il ne devait pas voir la tempĂȘte qui allait sâensuivre : il mourut dâĂ©puisement aprĂšs une joute de tzykanion le 6 juin 913.
Constantin VII (912-959)
NĂ© en 905, Constantin nâavait encore que huit ans Ă la mort de son oncle. Un conseil de rĂ©gence fut alors constituĂ© prĂ©sidĂ© par lâimpĂ©ratrice ZoĂ© qui dut bientĂŽt faire appel Ă lâamiral Romain LĂ©capĂšne pour Ă©viter un coup dâĂtat. Celui-ci prit soin de marier dâabord sa fille, HĂ©lĂšne LĂ©capĂšne, Ă Constantin avant de sâemparer lui-mĂȘme du pouvoir en 920, et de renvoyer ZoĂ© Karbonopsina dans un couvent. De tempĂ©rament intellectuel, Ă©pris dâhistoire, Constantin passa ses annĂ©es dâinactivitĂ© Ă Ă©cumer les bibliothĂšques, colligeant tout ce quâil pouvait trouver sur lâhistoire, lâadministration et le cĂ©rĂ©monial adoptĂ© par les empereurs prĂ©cĂ©dents[42] - [43]. Il devait en rĂ©sulter le premier volume du « De Ceremoniis ». Câest aussi pendant ces annĂ©es que sa femme lui donna deux fils, LĂ©on et Romain, le premier devant mourir en bas Ăąge[44].
Si Constantin conserva le titre impĂ©rial durant cette pĂ©riode, il prit la deuxiĂšme place aprĂšs celui qui Ă©tait devenu Romain Ier LĂ©capĂšne (r. 920 â 944) et mĂȘme aprĂšs le fils de ce dernier, Christophe[45]. Ce nâest quâen 944, aprĂšs la mort de Romain LĂ©capĂšne, que Constantin parvint Ă exercer vĂ©ritablement le pouvoir Ă lâĂąge de trente-neuf ans[46].
Lâun de ses premiers gestes fut de couronner son fils Romain comme coempereur et seul hĂ©ritier[46]. Ayant toujours considĂ©rĂ© son beau-pĂšre comme un ignare inculte, Constantin se tourna vers une famille rivale des LĂ©capĂšne, celle des Phocas. Bardas Phocas l'Ancien fut nommĂ© gĂ©nĂ©ral des armĂ©es d'Orient, tandis que ses fils NicĂ©phore II Phocas et LĂ©on Phocas le Jeune deviennent stratĂšges des Anatoliques et de Cappadoce. Toutefois, et en dĂ©pit de son inimitiĂ© pour Romain LĂ©capĂšne, Constantin poursuivit les rĂ©formes entreprises par celui-ci en faveur des petits propriĂ©taires paysans, ordonnant mĂȘme en 947 que soient restituĂ©es sans compensation toutes leurs terres acquises par la grande aristocratie terrienne depuis le dĂ©but de son rĂšgne, en 913[47].
Sur le plan extĂ©rieur, Constantin comme ses prĂ©dĂ©cesseurs dut faire face aux Arabes. Ses tentatives en 949 pour leur reprendre la CrĂšte Ă©chouĂšrent de mĂȘme que les forces quâil envoya dans le sud de lâItalie oĂč les Arabes occupĂšrent Rhegium. Il eut plus de succĂšs en Orient oĂč des gĂ©nĂ©raux comme le futur Jean Ier TzimiscĂšs, LĂ©on Phocas et Basile HexamilitĂšs rĂ©ussirent peu Ă peu Ă mettre en Ă©chec les forces de Sayf al-Dawlah[48] - [49]. La visite de la princesse russe Olga en 957 devait inaugurer une nouvelle Ăšre dans les relations entre la Rusâ et Byzance qui se renforceront lors de la conversion de son pays au christianisme sous le petit-fils dâOlga, Vladimir[50] - [51].
Romain Ier LĂ©capĂšne (920-944)
Le rÚgne de Romain Ier LécapÚne inaugure la période pendant laquelle des généraux épouseront des impératrices de la dynastie macédonienne pour préserver les droits des héritiers légitimes, fiction qui permet à la dynastie de se maintenir sur le trÎne.
Comme Basile Ier avant lui, Romain LĂ©capĂšne sâĂ©tait hissĂ© du rang de simple soldat Ă celui de gĂ©nĂ©ral devenant dâabord stratĂšge du thĂšme de Samos, puis drongaire de la flotte[52].
Brillant militaire, mais Ă©galement fin diplomate, Romain aidĂ© par le patriarche Nicolas le Mystique rĂ©ussit Ă contenir la menace bulgare. SimĂ©on de Bulgarie avait espĂ©rĂ© accĂ©der au trĂŽne de Constantinople en mariant sa fille avec le coempereur Constantin VII. Le mariage de celui-ci avec la fille de Romain LĂ©capĂšne faisait disparaĂźtre cet espoir. La guerre commencĂ©e Ă lâĂ©tĂ© 919 devait se poursuivre jusquâen septembre 924, moment oĂč aprĂšs avoir ravagĂ© la Thrace et la MacĂ©doine, SimĂ©on apparut devant Constantinople. Au terme dâune rencontre entre Romain Ier et SimĂ©on Ier, il fut entendu que SimĂ©on pourrait porter le titre de Basileus Ă condition de limiter la portĂ©e de ce titre Ă la Bulgarie[37]. Ceci nâempĂȘcha nullement SimĂ©on de se proclamer Ă son retour « autocrator des Bulgares et des Grecs » et, face aux protestations de Romain, de sâadresser au pape dont il reçut confirmation Ă la fois du titre impĂ©rial et de lâĂ©lĂ©vation de lâarchevĂȘque de Bulgarie au rang de patriarche, crĂ©ant ainsi une Ăglise nationale bulgare[53] - [54].
Romain LĂ©capĂšne dut aussi affronter les Rusâ qui, avec leurs alliĂ©s PetchenĂšgues, avaient envahi en 941 la Bithynie. ArrivĂ©s devant Constantinople, les envahisseurs durent se retirer aprĂšs que la flotte de lâempereur Romain Ier a fait usage du feu grĂ©geois. Une deuxiĂšme campagne devait ĂȘtre lancĂ©e en 943 ou 944 ; cette fois, Constantin, devenu seul empereur, envoya une ambassade rencontrer les Rusâ sur le Danube et nĂ©gocier une entente qui devait se rĂ©vĂ©ler moins favorable Ă ces derniers que celle de 911[55].
Sur le plan intĂ©rieur, Romain LĂ©capĂšne, Ă la suite de la dĂ©sastreuse famine de 928, adopta une politique visant Ă aider les petits propriĂ©taires terriens qui avaient dĂ» mettre leurs terres en gage, politique perpĂ©tuĂ©e par Constantin VII[56]. De plus, Romain LĂ©capĂšne parvint Ă rĂ©tablir la paix religieuse Ă la fois en rĂ©conciliant les partisans de lâancien patriarche Euthyme et ceux de Nicolas le Mystique, ainsi quâen rĂ©tablissant les relations avec Rome, rompues depuis la dispense accordĂ©e Ă LĂ©on VI par le pape Serge III concernant son quatriĂšme mariage[57] - [58] - [59].
Romain II (959-963)
PorphyrogĂ©nĂšte[N 3] et couronnĂ© coempereur en 945, Romain II recueillit sans difficultĂ© lâhĂ©ritage de son pĂšre. De caractĂšre frivole, il laissa le pouvoir Ă ses conseillers quâil sut cependant choisir avec discernement. Lâadministration gĂ©nĂ©rale Ă©chut au patrice et parakikomĂšne Joseph Bringas.
Sur le plan militaire, Romain qui semble avoir voulu intensifier la lutte contre les Arabes[60] divisa le commandement des armĂ©es entre deux habiles gĂ©nĂ©raux, les frĂšres LĂ©on et NicĂ©phore Phocas. DĂšs novembre 959, NicĂ©phore Ă la tĂȘte dâune imposante flotte se dirigea vers la CrĂȘte oĂč il rĂ©ussit en 961 Ă sâemparer de la capitale al-Handak (aujourdâhui HĂ©raklion), Ă capturer lâĂ©mir et Ă prendre possession des trĂ©sors amassĂ©s pendant un siĂšcle de piraterie. LâĂźle reconquise fut convertie en un « thĂšme »[61] - [62].
Pendant ce temps, le général Léon Phocas, fut envoyé contre l'émir de Mossoul, Ali Sayf al-Dawla qui, en 944, s'était emparé d'Alep. En novembre 960, Léon Phocas parvint à décimer l'armée arabe en l'attirant dans un défilé rocheux et en la faisant écraser sous les rochers[61].
AprĂšs une rĂ©ception triomphale Ă Constantinople, NicĂ©phore prit le chemin de lâAsie en 962 pour lutter contre lâĂ©mir de Mosul, Ali Sayf al-Dawla. Celui-ci sâĂ©tait emparĂ© dâAlep en 944 ; aprĂšs un siĂšge difficile, NicĂ©phore qui avait entre-temps repris plusieurs villes de Cilicie et dâAlep en dĂ©cembre 962, dĂ©truisant le principal obstacle sâopposant Ă une plus grande pĂ©nĂ©tration en Asie[63] - [64] - [65].
Ă son retour, il devait apprendre la mort du jeune empereur des suites dâĂ©puisement physique Ă la chasse, dĂ©cĂšs que la rumeur publique ne tarda pas Ă attribuer Ă un empoisonnement de la main de son Ă©pouse ThĂ©ophano[66].
Nicéphore II (963-969)
ThĂ©ophano avait donnĂ© deux enfants Ă Romain II, couronnĂ©s coempereurs pratiquement Ă leur naissance: Basile alors ĂągĂ© de 5 ou 6 ans et Constantin, trois ans plus jeune. Il avait Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© du vivant de Romain, quâen cas de dĂ©cĂšs ThĂ©ophano deviendrait rĂ©gente, que Bringas continuerait Ă diriger le gouvernement et Phocas les armĂ©es. Toutefois, Bringas dĂ©testait Phocas et voulut susciter contre lui des opposants dans la personne de deux autres excellents gĂ©nĂ©raux, Jean TzimiskĂšs et Romain Courcouas qui rĂ©vĂ©lĂšrent le tout Ă NicĂ©phore. Celui-ci fut immĂ©diatement proclamĂ© empereur par ses troupes et marcha sur Constantinople qui lui ouvrit ses portes Ă la faveur dâune rĂ©volution populaire contre Bringas. Le 16 aoĂ»t 963, NicĂ©phore faisait son entrĂ©e dans la ville, Ă©tait couronnĂ© par le patriarche et, le 20 septembre, Ă©pousait ThĂ©ophano. Usurpateur Ă la suite dâun coup dâĂtat militaire, NicĂ©phore devenait par son mariage basileus de plein droit, quoique thĂ©oriquement simplement associĂ© au trĂŽne des deux hĂ©ritiers lĂ©gitimes[67] - [68].
Militaire dans lâĂąme, NicĂ©phore II reprĂ©sentait, contrairement Ă Romain LĂ©capĂšne, les grands propriĂ©taires fonciers dâAsie Mineure[69]. Revenant sur les lois sociales de Romain LĂ©capĂšne qui privilĂ©giaient les petits paysans, il accorda aux puissants le droit de prĂ©emption sur les grandes propriĂ©tĂ©s tombĂ©es en dĂ©shĂ©rence[70] - [71]. Toutefois, suivant lâexemple de son prĂ©dĂ©cesseur, il tenta dâendiguer le dĂ©veloppement de la grande propriĂ©tĂ© ecclĂ©siastique, non seulement parce quâun mouvement portait de plus en plus de jeunes hommes Ă prendre lâhabit monastique pour Ă©chapper au recrutement militaire, mais aussi parce que lâattribution de plus en plus grande de terres au profit de ces monastĂšres non seulement privait lâĂtat de revenus considĂ©rables, mais quâun manque de terres arables commençait Ă se faire sentir[72] - [70].
NicĂ©phore Ă©tait Ă©galement profondĂ©ment mystique : pour lui la guerre contre lâIslam Ă©tait une mission sacrĂ©e[73]. Son rĂšgne fut la continuation des campagnes quâil avait menĂ©es sous Romain II et marqua une pĂ©riode particuliĂšrement glorieuse de conquĂȘtes. Les deux premiĂšres annĂ©es furent consacrĂ©es Ă la conquĂȘte de la Cilicie et de Chypre. Par la suite, il se tourna vers la Syrie et en 968 et 969 sâempara dâAntioche depuis trois siĂšcles aux mains des musulmans ; lâĂ©mir dâAlep devint un vassal de Byzance[74].
Il fut moins heureux en Occident. CouronnĂ© empereur un an avant la prise du pouvoir par NicĂ©phore, Othon Ier envoya en 968 une ambassade conduite par lâĂ©vĂȘque de CrĂ©mone, Liutpold, pour proposer un arrangement matrimonial entre le fils dâOthon et une sĆur de lâun des coempereurs dont la dot aurait Ă©tĂ© les possessions byzantines dâItalie ; reçu froidement, il se fit rĂ©pondre que son maĂźtre nâĂ©tait ni empereur, ni romain, mais un simple roi barbare[75]. Les relations avec la Bulgarie restĂšrent Ă©galement tendues. Une ambassade bulgare venue en 965 rĂ©clamer le tribut habituel se vit renvoyĂ©e les mains vides. Tout Ă ses plans en Orient, NicĂ©phore demanda au prince rusâ Svjatoslav de sâoccuper des Bulgares ce que celui-ci se hĂąta de faire, capturant en 969 le nouveau tsar Boris II. RĂ©alisant quâil avait remplacĂ© un adversaire faible par un ennemi puissant, NicĂ©phore chercha dĂšs lors Ă faire plutĂŽt alliance avec les Bulgares contre Svjatoslav[76].
Toutefois ces campagnes coĂ»taient cher et lâempereur sâĂ©tait aliĂ©nĂ© presque toutes les sphĂšres de la sociĂ©tĂ© en subordonnant leurs besoins aux impĂ©ratifs militaires. Son Ă©pouse, ThĂ©ophano, sâĂ©tait pendant les campagnes de son Ă©poux amourachĂ©e de lâun des gĂ©nĂ©raux de NicĂ©phore, son ancien camarade dâarmes et neveu, Jean TzimiscĂšs : dans la nuit du 10 au 11 dĂ©cembre, NicĂ©phore fut assassinĂ© et Jean TzimiscĂšs, assurĂ© du soutien de lâarmĂ©e, monta sur le trĂŽne[77].
Jean Ier TzimiskĂšs (969-976)
ThĂ©ophano devait regretter cette passion. Alors que le nouvel empereur se rendait Ă Hagia Sophia pour y ĂȘtre couronnĂ©, le patriarche Polyeucte lui fit jurer quâil nâĂ©tait pour rien dans l'assassinat de NicĂ©phore II Phocas, et quâil Ă©loignera ThĂ©ophano, laquelle fut effectivement exilĂ©e au monastĂšre de lâĂźle de Proti en 970 dont elle ne reviendra quâĂ lâavĂšnement de ses fils[78] - [79]. Et pour lĂ©gitimer son arrivĂ©e sur le trĂŽne, il Ă©pousa en novembre 970 ThĂ©odora, sĆur de Romain II et fille de Constantin VII, associant au trĂŽne les deux fils de Romain II, Basile II (960 â 1025) et Constantin VIII (962 â 1028) dont il se fit, comme NicĂ©phore avant lui, le dĂ©fenseur[80] - [81].
AprĂšs avoir rĂ©sistĂ© aux tentatives des Phocas pour reprendre le pouvoir et sâĂȘtre conciliĂ© les faveurs du peuple, de lâĂglise et de lâarmĂ©e[82], Jean Ier put se consacrer Ă la politique Ă©trangĂšre et continuer la politique dâexpansion de son prĂ©dĂ©cesseur. Dans les Balkans, il rĂ©ussit Ă sâemparer de la capitale bulgare, puis Ă mettre en fuite Svjatoslav rĂ©fugiĂ© Ă Silistrie (Silistra en Bulgarie). Ayant ramenĂ© prisonnier le tsar Boris Ă Constantinople, il annexa simplement le pays et abolit le patriarcat bulgare[83] - [84] - [85]. Il rĂ©gla la question des relations avec lâempire dâOccident en faisant Ă©pouser en 972 lâune de ses parentes, ThĂ©ophano, Ă Othon II[86] - [87] - [85]. Enfin, il continua la politique dâexpansion de NicĂ©phore en Syrie. AprĂšs avoir pris Damas, il se dirigea vers la Terre sainte oĂč il sâempara de CĂ©sarĂ©e, le principal point dâappui des Arabes dâAfrique. Mais mĂȘme si JĂ©rusalem Ă©tait Ă portĂ©e, lâempereur prĂ©fĂ©ra ne pas pousser plus loin vu les frais quâoccasionnait une telle guerre et dĂ©cida de rentrer Ă Constantinople[88] - [89] - [90].
DĂšs son retour toutefois, il devait sâĂ©teindre aprĂšs un court rĂšgne de six ans, frappĂ© vraisemblablement par le typhus. Il restait Ă Basile II de terminer lâĂšre des grandes conquĂȘtes.
Basile II (960-1025)
Jean Ier Ă©tant mort sans enfant, le trĂŽne revenait aux deux jeunes empereurs nĂ©s de Romain II et de ThĂ©ophano sous la tutelle du parakikomĂšne Basile LĂ©capĂšne, leur grand-oncle, lequel partageait le pouvoir avec Bardas SklĂ©ros Ă la tĂȘte de lâarmĂ©e. Basile Ă©tait alors ĂągĂ© de 18 ans et Constantin de 16[91] - [92].
En Ăąge de rĂ©gner, Basile dut toutefois faire face Ă treize ans de guerre civile avant de pouvoir Ă©tablir son pouvoir. Une premiĂšre rĂ©volte commença lorsque Bardas SklĂ©ros voulut enlever la tutelle des empereurs au parakikomĂšne. Elle devait se terminer par la dĂ©faite de SklĂ©ros qui sâenfuit en pays arabe. Dans un deuxiĂšme temps, Basile qui commençait Ă sâintĂ©resser aux affaires de lâĂtat entra en conflit avec son tuteur lequel, pour contrer les interventions du jeune empereur, sâallia aux gĂ©nĂ©raux Bardas Phocas et LĂ©on MĂ©lissĂ©nos[93]. Conscient du danger, Basile prit les devants, fit enfermer le parakikomĂšne dans un monastĂšre, retira la dignitĂ© de domestique des Scholes Ă Bardas Phocas, mais pardonna Ă LĂ©on MelissĂ©nos. AprĂšs une courte trĂȘve, la guerre civile devait reprendre, Bardas Phocas sâĂ©tant alliĂ© Ă son ancien ennemi, Bardas SklĂ©ros. Pour en venir Ă bout, Basile requit lâaide du grand prince rusâ Vladimir qui Ă©pousa la sĆur de Basile et lui envoya 6 000 hommes pour venir Ă bout de lâarmĂ©e de Bardas[94] - [95] - [96]. Ă partir de ce moment, Basile put gouverner seul, son frĂšre Constantin ne sâoccupant guĂšre des choses de lâĂtat.
Il Ă©tait maintenant convaincu de la nĂ©cessitĂ© de mettre au pas les grands propriĂ©taires terriens dâAsie Mineure dâoĂč Ă©tait partie la rĂ©volte. En janvier 996, il Ă©dictait une novelle qui abolissait lâacquisition illĂ©gale des biens des pauvres et forçait les grands Ă remettre Ă leurs propriĂ©taires initiaux les terres acquises depuis la premiĂšre loi de Romain LĂ©capĂšne, y compris celles acquises par lâĂglise. En mĂȘme temps, il remettait en place lâallelengyon[N 4] qui obligeait les puissants dâune circonscription (et non plus les communautĂ©s villageoises) Ă rĂ©pondre des pauvres incapables de payer leurs impĂŽts[97] - [98] - [99].
Soucieux dâassurer la prospĂ©ritĂ© de lâempire (il devait laisser Ă sa mort 200 000 livres dâor dans les coffres publics), Basile devait lui donner la plus grande extension gĂ©ographique dâun seul tenant quâil eĂ»t connue depuis Justinien : Balkans, Asie Mineure, Syrie septentrionale, MĂ©sopotamie, ArmĂ©nie, Transcaucasie, cĂŽte de lâAdriatique et Italie mĂ©ridionale[91].
De 1001 Ă 1014, il ne cessa de mener campagne contre les Bulgares, campagnes qui se terminĂšrent avec la bataille de Kleidon oĂč il captura 14 000 soldats bulgares, les aveuglant tous sauf un par centaine auquel il laissa un Ćil pour guider leurs camarades dans leur retour vers la capitale oĂč, dit-on, le tsar Samuel mourut de crise cardiaque en les voyant[100] - [101] - [102].
Pour y parvenir, Basile avait dĂ» en 999 suspendre les opĂ©rations contre les Fatimides et signer une trĂȘve de dix ans avec le calife Al-Hakim[103]. LâannĂ©e suivante, il apprit l'assassinat de David III d'IbĂ©rie, le roi de Haute-GĂ©orgie, lequel ayant apportĂ© son aide Ă Bardas Phocas le Jeune s'Ă©tait engagĂ© pour Ă©viter de perdre son royaume Ă le cĂ©der Ă sa mort Ă l'empire[104]. AprĂšs avoir pris possession de presque tout le royaume, Basile dirigea ses efforts en 1021-1022 contre la GĂ©orgie voisine oĂč le roi des Abasges, Giorgi, voulait rĂ©cupĂ©rer certains territoires de David III, son pĂšre adoptif. AprĂšs une bataille indĂ©cise dans la plaine de Basian, Giorgi sâenfuit vers lâAbkhazie, poursuivi par Basile jusque dans la rĂ©gion de Triflis oĂč aucun autre empereur ne sâĂ©tait aventurĂ© depuis HĂ©raclius. Il hiverna Ă TrĂ©bizonde oĂč il reçut la soumission du roi de la Grande ArmĂ©nie qui promit de lĂ©guer son territoire Ă lâempire aprĂšs sa mort. Le roi du Vazpourakan (sud du lac Van), incapable de rĂ©sister aux Turcs seldjoukides qui menaçaient dĂ©jĂ la rĂ©gion, lui cĂ©da de son vivant ses territoires en Ă©change du titre de magistros. Giorgi lui-mĂȘme fit sa soumission, abandonnant Ă Basile les territoires quâil revendiquait[105] - [106].
Entre les annĂ©es 1001 et 1025, alors que Basile Ă©tait occupĂ© en Bulgarie et en Orient, les possessions byzantines en Italie et sur la cĂŽte dalmate Ă©taient menacĂ©es par la reprise des incursions arabes, la rĂ©volte des Lombards alliĂ©s aux Normands et lâagression de lâempereur Henri II. Dans un premier temps, Basile fit alliance avec Venise encore thĂ©oriquement sous suzerainetĂ© byzantine. En 998 il avait autorisĂ© le doge Pietro Orseolo Ă dĂ©fendre les villes du thĂšme de Dalmatie. LâexpĂ©dition de celui-ci en 1001 fut un vĂ©ritable succĂšs en mĂȘme temps que la source des prĂ©tentions ultĂ©rieures de Venise sur la cĂŽte dalmate. En 1004, Venise envoya une flotte secourir Bari, capitale du thĂšme byzantin dâItalie, assiĂ©gĂ©e par les Arabes. Cinq ans plus tard devait Ă©clater dans la mĂȘme ville une rĂ©volte conduite par deux frĂšres de lâaristocratie lombarde, MelĂšs et son beau-frĂšre Datto, qui en chassĂšrent la garnison byzantine et requirent lâaide dâauxiliaires normands qui arrivĂšrent bientĂŽt en grand nombre. Ce nâest quâen 1018 que les armĂ©es byzantines purent mettre fin Ă la rĂ©volte, rĂ©tablissant lâautoritĂ© byzantine en Apulie, en Dalmatie et en Croatie[107] - [108].
AprĂšs son retour dâArmĂ©nie, Basile songeait Ă aller rejoindre les armĂ©es dâItalie pour mener campagne en Sicile, point de dĂ©part des incursions arabes, lorsquâil fut terrassĂ© par un mal subi et expira le 15 dĂ©cembre 1025[109] - [110].
Constantin VIII (1025-1028)
Ă la mort de Basile qui ne sâĂ©tait jamais mariĂ© et nâavait pas dâhĂ©ritier, son frĂšre, Constantin VIII, coempereur durant les soixante-trois derniĂšres annĂ©es[N 5], devint seul empereur. Veuf et ĂągĂ© de soixante-cinq ans, il sâĂ©tait toujours contentĂ© de jouir des privilĂšges dus Ă son rang, sans manifester dâintĂ©rĂȘt pour les affaires de lâĂtat quâelles soient civiles ou militaires. Son attitude ne changea guĂšre durant les trois ans de son rĂšgne qui marqua le dĂ©but de ce quâOstrogorsky a appelĂ© « Le rĂ©gime de la noblesse civile »[111].
Souffrant de goutte et ayant de la difficultĂ© Ă marcher[112], il puisa abondamment dans le TrĂ©sor laissĂ© par son frĂšre en faveur de ses favoris, se mĂ©fia des gĂ©nĂ©raux de son frĂšre dont il fit aveugler plusieurs incluant le duc de Vaspurakan, et des membres Ă©minents des familles Burtzes, Phocas et SklĂ©ros[113]. Il remplaça les principaux hauts fonctionnaires de lâadministration et officiers de lâarmĂ©e par des eunuques du Palais sans aucune compĂ©tence dans ces domaines (le poste de parakikomĂšne et domestique des Scholes Ă©chut Ă son valet, lâeunuque Nicolas ; un fonctionnaire subalterne du palais devint chef de la police, etc.[114]). CĂ©dant aux pressions des grands propriĂ©taires terriens dâAnatolie, il supprima les rĂ©formes de ses prĂ©dĂ©cesseurs en faveur des paysans : rapidement ces grands propriĂ©taires reprirent les terres, laissant les paysans se dĂ©brouiller avec une dĂ©cennie de sĂ©cheresse et dâinvasion de locustes comme au VIe siĂšcle[115].
Ce nâest quâĂ lâarticle de sa mort quâil se soucia du problĂšme de sa succession. De sa femme, HĂ©lĂšne Alypios, Constantin VIII avait eu trois filles. LâaĂźnĂ©e, Eudoxie, ayant souffert de petite vĂ©role dans son enfance sâĂ©tait rĂ©fugiĂ©e dans un couvent ; les deux cadettes, ZoĂ© et ThĂ©odora, nâĂ©taient pas encore mariĂ©es[116]. Les fonctionnaires du Palais se partageaient entre deux membres de la noblesse, Constantin Delassenos dont la maison avait toujours Ă©tĂ© fidĂšle Ă la dynastie macĂ©donienne et le prĂ©fet de la Ville, Romain Argyre. CĂ©dant aux pressions de son entourage Constantin VIII se dĂ©cida en faveur de Romain qui se vit offrir le choix dâĂȘtre aveuglĂ© ou de divorcer de son Ă©pouse et dâĂ©pouser ZoĂ©. Romain Argyre fut mariĂ© Ă ZoĂ© le 8 novembre, trois jours avant la mort de Constantin[117] - [118].
Romain III Argyre (1028-1034)
Tout comme Ă la fin de la dynastie amorienne, la dynastie macĂ©donienne ne devait subsister de 1028 Ă 1057 que grĂące au rĂ©gime des empereurs-Ă©poux ou adoptĂ©s. Mais alors quâau Xe siĂšcle ce rĂŽle avait Ă©tĂ© tenu par des hommes de qualitĂ© exceptionnelle, ceux de la dynastie macĂ©donienne sâavĂ©rĂšrent incapables de prĂ©server lâhĂ©ritage de Michel III et de Basile II[119].
Continuant la politique de son prĂ©dĂ©cesseur, Romain III laissa les grands propriĂ©taires terriens exploiter la paysannerie rurale, bientĂŽt rĂ©duite Ă un Ă©tat de servitude. Ceci eut un effet dĂ©sastreux sur le recrutement militaire. Les rĂ©ductions de taxes consenties aux puissants, joint Ă une plus faible base de recrutement pour lâarmĂ©e, contribuĂšrent Ă appauvrir lâĂtat[120] - [119].
Se sentant mĂ©prisĂ© par lâarmĂ©e et craignant un complot qui aurait vu le gĂ©nĂ©ral Constantin DiogĂšne Ă©pouser la porphyrogĂ©nĂšte ThĂ©odora, Romain III dĂ©cida de rehausser son prestige en se lançant dans une campagne militaire contre lâĂ©mir dâAlep, devenu pourtant client de Byzance. Ă peine arrivĂ©es en Syrie, ses troupes furent dĂ©faites par les Fatimides qui avaient entre-temps envahi le territoire et tuĂ© lâĂ©mir. Les troupes byzantines se dĂ©bandĂšrent et lâhonneur ne fut sauvĂ© que par lâhabiletĂ© du jeune stratĂšge, Georges ManiachĂšs, qui par ruse parvint Ă dĂ©faire les troupes fatimides venues assiĂ©ger Telouch Ă leur retour[121] - [122].
HumiliĂ©, lâempereur retourna Ă Constantinople et, abandonnant lâespoir de devenir un grand gĂ©nĂ©ral Ă l'instar de Trajan ou Hadrien, voulut imiter Justinien le bĂątisseur et se consacra Ă la construction de somptueux Ă©difices. AprĂšs avoir dĂ©pensĂ© une fortune pour faire dorer les chapiteaux dâHagia Sophia et de la Vierge des Blachernes, il entreprit la construction de lâĂ©norme Ă©glise de la Vierge Peribleptos sur la septiĂšme colline de Constantinople et du monastĂšre attenant, si grand nous dit Psellos que lâon ne put trouver assez de moines pour lâoccuper[123].
Ces rĂȘves de grandeur lui avaient fait nĂ©gliger lâĂ©pouse qui lui avait pourtant permis dâaccĂ©der au trĂŽne. Celle-ci sâĂ©tait entretemps amourachĂ©e dâun jeune Paphlagonien introduit au palais par son frĂšre, le trĂšs influent Jean lâOrphanotrope. ZoĂ© fit Ă©touffer son impĂ©rial Ă©poux alors quâil Ă©tait dans son bain le 11 avril 1034. Le soir mĂȘme elle Ă©pousait son jeune amant qui monta sur le trĂŽne sous le nom de Michel IV[124] - [125].
Michel IV (1034-1041)
Devenu empereur Michel IV dĂ©laissa rapidement sa nouvelle Ă©pouse[126] la confinant au gynĂ©cĂ©e du palais oĂč son frĂšre Jean la fit constamment surveiller[127] - [128]. Laissant Ă son frĂšre Jean la gestion des finances publiques, il se consacra entiĂšrement Ă la politique intĂ©rieure et extĂ©rieure de l'Empire[129] - [130]. Pour faire face aux dĂ©penses militaires croissantes, ce dernier augmenta considĂ©rablement les impĂŽts, heurtant souvent les traditions locales bien ancrĂ©es[131]. Il devait en rĂ©sulter de nombreuses rĂ©voltes notamment chez les Serbes et les Bulgares oĂč Pierre Deljan prit la tĂȘte d'un mouvement visant Ă rĂ©tablir l'Empire bulgare, maintenant intĂ©grĂ© Ă l'Empire byzantin[131].
Souffrant depuis sa jeunesse d'Ă©pilepsie, mal auquel s'ajoutĂšrent Ă la fin de sa vie des ĆdĂšmes gĂ©nĂ©ralisĂ©s, l'empereur n'entreprit pas moins une campagne contre les Bulgares qu'il devait mener avec succĂšs[132] - [133]. Cette campagne eut raison de ses forces ; sentant que lâempereur allait sâĂ©teindre et dĂ©sirant garder le contrĂŽle du gouvernement, Jean lâOrphanotrope convainquit Michel IV de demander Ă l'impĂ©ratrice ZoĂ© d'adopter lâun de ses neveux, Ă©galement prĂ©nommĂ© Michel et de proclamer celui-ci cĂ©sar[134] - [135].
Michel IV devait s'Ă©teindre le 10 dĂ©cembre 1041 aprĂšs avoir abdiquĂ© la couronne pour revĂȘtir la robe de moine au monastĂšre des Saints-Come-et-Damien et avoir refusĂ© de voir lâimpĂ©ratrice ZoĂ© qui le suppliait de la recevoir une derniĂšre fois[136].
Michel V (1041-1042)
Ă la mort de Michel IV, le pouvoir revenait donc Ă lâimpĂ©ratrice ZoĂ©, laquelle comme niĂšce de Basile II devait choisir le nouvel empereur. Trois jours aprĂšs la mort de Michel IV et aprĂšs que Michel se soit prĂ©cipitĂ© Ă ses pieds avec ses frĂšres, jurant que grĂące Ă lui elle reprendrait le pouvoir qui Ă©tait le sien et que pour sa part il ne ferait rien sans elle, lâimpĂ©ratrice se dĂ©clara en sa faveur[137] - [138]. Effectivement, durant les premiers jours, voire les premiĂšres semaines, le scĂ©nario se dĂ©roula tel que prĂ©vu, Michel V affectant la plus grande soumission Ă l'Ă©gard de l'impĂ©ratrice et la plus grande affection Ă l'endroit de son oncle Jean[139] - [140] - [141].
Or Michel V, neveu de Jean lâOrphanotrope Ă©tait le fils de Marie, sĆur de Michel IV, laquelle avait Ă©pousĂ© un simple calfat[N 6] du nom d'Ătienne. MĂ©prisĂ© Ă cause de ses origines modestes, Michel V dĂ©sirant ĂȘtre son propre maĂźtre, supprima les privilĂšges de l'aristocratie de la cour et voulut procĂ©der Ă une profonde rĂ©forme de l'administration[142]. Changeant dâattitude Ă l'endroit de ses deux bienfaiteurs, il les fit exiler sur les conseils de son oncle Constantin qui avait remplacĂ© son frĂšre Jean lâOrphanotrophe comme principal conseiller[143]. Mais si l'exil de Jean l'Orphanotrophe, dĂ©testĂ© pour le fardeau fiscal imposĂ© au peuple, ne provoqua aucune rĂ©action, celui de l'impĂ©ratrice ZoĂ©, derniĂšre survivante avec sa sĆur ThĂ©odora de la dynastie macĂ©donienne, provoqua une rĂ©volution[144]. Michel et son oncle Constantin durent fuir Constantinople pour chercher refuge au monastĂšre du Stoudion oĂč, rattrapĂ©s par la foule, ils eurent les yeux crevĂ©s et furent enfermĂ©s dans deux monastĂšres diffĂ©rents le 21 avril 1042[145].
Zoé et Théodora (1042)
Au cours de cette rĂ©volution, la foule sâĂ©tait dâabord dirigĂ©e vers le couvent de Petrion oĂč se trouvait toujours la deuxiĂšme survivante de la dynastie, ThĂ©odora. D'abord hĂ©sitante, celle-ci fut conduite Ă la cathĂ©drale Sainte-Sophie pour y ĂȘtre proclamĂ©e impĂ©ratrice par le patriarche[146] - [147].
Pour la premiĂšre fois, l'Empire byzantin avait deux impĂ©ratrices, l'une au Grand Palais, l'autre Ă Sainte-Sophie. Le SĂ©nat devait dĂ©cider s'il fallait choisir ZoĂ© qui, comme aĂźnĂ©e, aurait dĂ» avoir la prioritĂ©, ou ThĂ©odora comme libĂ©ratrice de la tyrannie. ZoĂ© mit fin Ă l'indĂ©cision des sĂ©nateurs en appelant sa sĆur auprĂšs d'elle et en l'invitant Ă rĂ©gner conjointement Ă titre d'« autocratores », ThĂ©odora Ă©tant toutefois « soumise » Ă sa sĆur et son trĂŽne placĂ© quelque peu en arriĂšre de son aĂźnĂ©e dans les cĂ©rĂ©monies officielles[148] - [149].
Durant les quelques semaines pendant lesquelles elles rĂ©gnĂšrent de concert, les deux sĆurs prirent de sages dĂ©cisions, notamment en rĂ©voquant les favoris de Michel V et en abolissant dans les faits la vĂ©nalitĂ© des charges[149]. Toutefois si ThĂ©odora qui avait vĂ©cu au couvent toute sa vie Ă©tait rĂ©fractaire au mariage, ZoĂ© nâhĂ©sita pas en dĂ©pit de ses soixante-quatre ans Ă convoler en troisiĂšmes noces. Son choix se porta sur lâun de ses anciens amants, Constantin Monomaque qui, tombĂ© en disgrĂące sous Michel IV, se trouvait en exil Ă MĂ©litĂšne. AprĂšs avoir fait ratifier son choix par le SĂ©nat, ZoĂ© le fit rappeler d'exil[150] - [149]. L'Ăglise nâacceptant pas sans dispense les troisiĂšmes mariages, le patriarche Alexis Studite n'imposa pas lui-mĂȘme les mains aux deux Ă©poux pendant la cĂ©rĂ©monie du mariage le 11 juin 1042. Cependant, le lendemain il procĂ©dait sans difficultĂ© Ă la cĂ©rĂ©monie du couronnement, Constantin devenant Constantin IX[151] - [152].
Constantin IX (1042-1055)
JusquâĂ sa mort en 1050, ZoĂ© rĂ©gnera aux cĂŽtĂ©s de son Ă©poux, lequel du reste installa aprĂšs quelque temps Maria SklĂ©rina, sa maĂźtresse, au Palais, apparaissant dans les solennitĂ©s avec l'impĂ©ratrice ZoĂ© Ă sa droite et sa maĂźtresse Ă sa gauche, Ă la grande indignation de la population[153] - [154]. Si, comme lâimpĂ©ratrice ZoĂ©, il dilapida sans compter le trĂ©sor public, il gouverna, du moins dans les premiĂšres annĂ©es, avec lâaide de lettrĂ©s compĂ©tents pour Ă©chapper Ă lâinfluence des eunuques du Palais dâune part, aux chefs de lâaristocratie militaire dâautre part[N 7]. De mĂȘme, il rĂ©organisa lâ « UniversitĂ© de la Magnaure » fondĂ©e par le CĂ©sar Bardas vers 860 et destinĂ©e Ă devenir une pĂ©piniĂšre dâhommes dâĂtat et dâadministrateurs[155] - [156].
Souffrant de goutte et ne quittant pratiquement jamais le Grand Palais, lâempereur et les lettrĂ©s qui lâentouraient ne portĂšrent que peu dâintĂ©rĂȘt Ă lâarmĂ©e. Pour se mĂ©nager de nouvelles ressources, le gouvernement rĂ©duisit les effectifs, transforma les soldats-paysans en contribuables[N 8] et affaiblit le rĂ©gime militaire des thĂšmes en donnant de plus en plus dâimportance aux prĂ©teurs civils au dĂ©triment des stratĂšges militaires ; on dut ainsi compenser la rĂ©duction des effectifs indigĂšnes en faisant appel Ă des mercenaires[157] - [158]. La consĂ©quence fut que ce gouvernement civil ne put faire face aux nouveaux ennemis qui menaçaient ses frontiĂšres : les Turcs seldjoukides qui en Orient prennent la place des Arabes, les PetchenĂšgues, les Ouz et les Coumans qui remplaçaient les Rusâ et les Bulgares sur le Danube et les Normands qui sâinstallaient en Italie prenant la place des Lombards. Sous son rĂšgne commence ainsi la liquidation des politiques de conquĂȘtes des premiers empereurs de la dynastie[159] - [160].
Enfin, la derniĂšre annĂ©e du rĂšgne de Constantin IX devait ĂȘtre celle de la sĂ©paration presque dĂ©finitive des Ăglises dâOrient et dâOccident lorsque, le 16 juillet 1054, le cardinal Humbert de Moyenmoutier dĂ©posa sur le maĂźtre-autel de Sainte-Sophie une bulle excommuniant le patriarche Michel Ier CĂ©rulaire et ses proches collaborateurs, excommunication qui fut suivie de celle du cardinal et de ses assistants par le patriarche[161] - [162] - [163].
Mais Ă ce moment lâempereur Ă©tait trop malade pour pouvoir rĂ©agir avec vigueur. Il devait mourir dĂ©but janvier de lâannĂ©e suivante.
Théodora (1055-1056)
Sans hĂ©ritier, Constantin IX avait songĂ© Ă nommer un prince bulgare, NicĂ©phore Proteuon, pour lui succĂ©der. C'Ă©tait sans compter sur la force de caractĂšre de l'impĂ©ratrice ThĂ©odora qui, contrairement Ă ses hĂ©sitations de 1042, se hĂąta de quitter son couvent et de faire voile vers Constantinople oĂč elle arriva juste avant le dĂ©cĂšs de l'empereur[164]. SeptuagĂ©naire, l'impĂ©ratrice, d'excellente santĂ© physique et toujours alerte d'esprit[165], prit fermement les rĂȘnes du gouvernement.
Sur le plan intĂ©rieur, son administration rĂ©ussit Ă tenir en Ă©chec les abus de la noblesse. Mais elle se fit de nombreux ennemis en choisissant comme Premier ministre LĂ©on Paraspondylos, homme compĂ©tent, mais dont le manque de charisme politique lui avait aliĂ©nĂ© une bonne partie des hauts fonctionnaires de l'empire[166]. Elle s'aliĂ©na Ă©galement le patriarche de Constantinople Michel Ier CĂ©rulaire qui non seulement aurait voulu jouer un plus grand rĂŽle dans les affaires de l'Ătat, mais qui n'apprĂ©ciait nullement qu'une femme s'ingĂšre dans le processus de nomination des Ă©vĂȘques, privilĂšge rĂ©servĂ© selon lui aux hommes[167]. Enfin, le limogeage de gĂ©nĂ©raux compĂ©tents comme Isaac ComnĂšne affaiblit lâarmĂ©e et devait avoir des consĂ©quences tragiques.
Le court rĂšgne de ThĂ©odora eut aussi des consĂ©quences dĂ©sastreuses pour la politique Ă©trangĂšre de l'empire en Orient. Alors que la paix avec le Califat fatimide avait Ă©tĂ© au cĆur de la politique des souverains prĂ©cĂ©dents, ThĂ©odora cessa les envois de grain aux sujets syriens du calife, ce Ă quoi celui-ci rĂ©pondit en interdisant l'entrĂ©e du Saint-SĂ©pulcre aux pĂšlerins allant Ă JĂ©rusalem et en rendant la vie difficile Ă ses habitants chrĂ©tiens. Par contre, en Occident, les relations avec la papautĂ© se normalisĂšrent, le pape cherchant lâappui de Byzance contre les Normands. De mĂȘme, un Ă©change d'ambassades tenta de mettre sur pied une alliance entre le Saint-Empire romain d'Henri III et l'Empire romain d'Orient[168].
Toujours cĂ©libataire, ThĂ©odora refusa de suivre les pressants conseils du patriarche qui aurait voulu que celle-ci se marie en dĂ©pit de son Ăąge avancĂ© pour assurer la succession au trĂŽne. Vers la fin du mois dâaoĂ»t 1056, lâimpĂ©ratrice fut saisie de violentes douleurs laissant prĂ©sager une fin prochaine. Ses conseillers, dĂ©sireux dâĂ©viter le retour au pouvoir de lâaristocratie militaire et de conserver leur pouvoir, lui suggĂ©rĂšrent un sĂ©nateur ĂągĂ©, ancien intendant de la caisse militaire, Michel Bringas, dont Psellos dira « qu'il Ă©tait capable moins de gouverner que d'ĂȘtre gouvernĂ© et conduit »[169]. La souveraine acquiesça et lâadopta immĂ©diatement en faisant de lui son successeur[170]. Michel Bringas Ă©tait connu sous le surnom de « stratiotikos », parce quâil avait passĂ© sa carriĂšre dans la bureaucratie oĂč il occupait le poste de « logothĂšte » (ministre) des affaires financiĂšres de lâarmĂ©e. AprĂšs que le patriarche eut fait confirmer le choix par lâimpĂ©ratrice Ă lâagonie, Michel fut couronnĂ© quelques heures Ă peine avant que ne sâĂ©teigne le 31 aoĂ»t 1056 la derniĂšre reprĂ©sentante de cette dynastie macĂ©donienne qui avait prĂ©sidĂ© aux destinĂ©es de l'empire pendant 189 ans[171].
Michel VI (1056-1057)
Le rĂšgne de vingt-trois mois de Michel VI constitua une transition pendant laquelle hauts fonctionnaires, militaires, patriarche et population de Constantinople lutteront pour le pouvoir.
Selon Anthony Kaldellis, le rĂšgne de Michel VI fut similaire en tous points Ă celui de ThĂ©odora, mais « au lieu dâune impĂ©ratrice gouvernant Ă travers ses eunuques, ce sont les eunuques qui rĂ©gnĂšrent Ă travers un faible empereur »[172]. Ne pouvant assurer sa lĂ©gitimitĂ© ni par sa naissance ni par une brillante carriĂšre, le nouvel empereur tenta tout dâabord de sâassurer lâappui de la haute fonction publique en distribuant avec largesse les dignitĂ©s, promouvant les fonctionnaires sans Ă©gard Ă la qualitĂ© de leurs services avec des consĂ©quences non nĂ©gligeables sur le TrĂ©sor public[173].
Michel nâavait pas sitĂŽt Ă©tĂ© proclamĂ© empereur quâil dut faire face Ă la rĂ©volte du proĂšdre ThĂ©odose, cousin germain de l'empereur Constantin IX qui considĂ©rait que le trĂŽne aurait dĂ» lui revenir. La rĂ©volte tourna court Ă la confusion de ThĂ©odose, mais effrayĂ© par cet incident, Michel VI se livra Ă une nouvelle ronde de promotions, en particulier au sĂ©nat[172].
Cette politique ne fit pas que des heureux, car elle ne profitait quâaux proches de lâempereur[174]. LâĂ©lite militaire pour sa part Ă©prouvait de plus en plus de ressentiment Ă lâendroit du rĂ©gime des eunuques et de lâĂ©lite bureaucratique parmi lesquels lâempereur choisissait les nouveaux hauts gradĂ©s militaires malgrĂ© leur manque dâexpĂ©rience[175], ce Ă quoi sâajoutait probablement le fait quâalors quâil Ă©tait logothĂšte des armĂ©es sous Constantin IX, le nouvel empereur les avait payĂ©s avec une monnaie dĂ©valuĂ©e. UlcĂ©rĂ©e, une dĂ©lĂ©gation dâofficiers prĂ©sidĂ©e par Isaac ComnĂšne relevĂ© trois ans plus tĂŽt de ses fonctions de stratopĂ©darque d'Orient se rendit au Palais Ă PĂąques 1057, au moment oĂč lâempereur distribuait les sommes d'argent correspondant au rang des hauts fonctionnaires civils et militaires. Ăconduits, les officiers dĂ©cidĂšrent de renverser Michel VI. Le 8 juin 1057, Isaac ComnĂšne Ă©tait proclamĂ© empereur Ă Gomaria en Paphlagonie et, Ă la tĂȘte des rebelles, se dirigea vers Constantinople. Michel VI tenta de parlementer, mais une Ă©meute Ă©clata Ă Constantinople oĂč le patriarche feignit dâaccepter sous la contrainte la proclamation dâIsaac, conseillant Ă Michel VI dâabdiquer et de se faire moine. Le dernier membre par adoption de la dynastie macĂ©donienne termina ainsi ses jours dans la solitude et lâoubli dâun monastĂšre[176].
Quant Ă Isaac ComnĂšne, il fut couronnĂ© empereur le 1er septembre 1057 par le patriarche Ă Sainte-Sophie[177]. Ce fut le dĂ©but dâune lutte acharnĂ©e entre le gouvernement civil du Palais et les chefs dâarmĂ©e portĂ©s au pouvoir pour le perdre presque aussitĂŽt jusquâĂ ce que, en 1081, Alexis ComnĂšne nâassure la victoire dĂ©finitive de lâaristocratie militaire et la consolidation de la dynastie des ComnĂšnes[178].
Tableau récapitulatif
La lettre « U » devant le nom dâun empereur indique que celui-ci rĂšgne par usurpation ; la lettre « M » par mariage ; la lettre « A » par adoption.
- 867-886 : (U) Basile Ier le MacĂ©donien (ÎαÏίλΔÎčÎżÏ Î') (811 â 886),
- 886-912 : LĂ©on VI le Sage (ÎÎÏÎœ Σ΀' Îż ÎŁÎżÏÏÏ) (866 â 912),
- 912-913 : Alexandre III (ÎλÎΟαΜΎÏÎżÏ Î' ÏÎżÏ ÎÏ Î¶Î±ÎœÏÎŻÎżÏ ) (870 â 913),
- 913-919 : Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte (nĂ© dans la pourpre) (ÎÏÎœÏÏαΜÏÎŻÎœÎżÏ Î' Îż Î ÎżÏÏÏ ÏογÎΜΜηÏÎżÏ) (905 â 959), fils de LĂ©on VI,
- 919-944 : (U) Romain Ier LĂ©capĂšne (ÎĄÏΌαΜÏÏ Î' Îż ÎΔÎșαÏηΜÏÏ), associĂ© (870 â 948), beau-pĂšre de Constantin VII,
- 919-945 : Constantin VII, associé,
- 921-931 : Christophe LĂ©capĂšne, associĂ© (â 931), fils de Romain Ier,
- 924-945 : Ătienne LĂ©capĂšne, associĂ© (910 â 963), fils de Romain Ier,
- 924-945 : Constantin LĂ©capĂšne, associĂ© (912 â 946), fils de Romain Ier,
- 945-959 : Constantin VII,
- 959-963 : Romain II PorphyrogĂ©nĂšte (ÎĄÏΌαΜÏÏ Î' Îż Î ÎżÏÏÏ ÏογÎΜΜηÏÎżÏ) (939 â 963), fils de Constantin VII,
- 963-969 : (U) NicĂ©phore II Phocas (ÎÎčÎșηÏÏÏÎżÏ Î' ΊÏÎșÎŹÏ Îź ÎÎčÎșηÏÏÏÎżÏ Î' Îż ΊÏÎșÎŹÏ) (912 â 969), second Ă©poux de ThĂ©ophano Anastaso, veuve de Romain II,
- 969-976 : (U) Jean Ier TzimiskĂšs (ÎÏÎŹÎœÎœÎ·Ï Î' ÎÎżÏ ÏÎșÎżÏÎ±Ï Îż ΀ÏÎčÎŒÎčÏÎșÎźÏ) (925 â 976), beau-frĂšre de Romain II,
- 976-1025 : Basile II Bulgaroctone (ÎαÏίλΔÎčÎżÏ Î' Îż ÎÎżÏ Î»ÎłÎ±ÏÎżÎșÏÏÎœÎżÏ) (958 â 1025),
- 1025-1028 : Constantin VIII PorphyrogĂ©nĂšte (ÎÏÎœÏÏαΜÏÎŻÎœÎżÏ Î') (960 â 1028),
- 1028-1050 : ZoĂ© PorphyrogĂ©nĂšte (ÎÏÎź) (978 â 1050), fille du prĂ©cĂ©dent,
- 1028-1034 : (M) Romain III Argyre (ÎĄÏΌαΜÏÏ Î' Îż ÎÏÎłÏ ÏÏÏ) (968 â 1034), premier mari de ZoĂ©,
- 1034-1041 : (M) Michel IV le Paphlagonien (ÎÎčÏαΟλ Î' Îż ΠαÏλαγÏÎœ) (1010 â 1041), second mari de ZoĂ©,
- 1041-1042 : (A) Michel V le Calfat (ÎÎčÏαΟλ Î' Îż ÎαλαÏÎŹÏηÏ) (1015 â 1042), neveu de Michel IV,
- 1042-1050 : (M) Constantin IX Monomaque, troisiÚme mari de Zoé,
- 1050-1055 : Constantin IX Monomaque (ÎÏÎœÏÏαΜÏÎŻÎœÎżÏ Î' Îż ÎÎżÎœÎżÎŒÎŹÏÎżÏ) (1000 â 1055),
- 1055-1056 : ThĂ©odora PorphyrogĂ©nĂšte (ÎΔοΎÏÏα) (980 â 1056), fille de Constantin VIII, sĆur de ZoĂ©,
- 1056-1057 : (A) Michel VI Stratiotique (ÎÎčÏαΟλ Σ΀' Îż ÎŁÏÏαÏÎčÏÏÎčÎșÏÏ), fils adoptif de la prĂ©cĂ©dente.
Généalogie
Basile Ier le MacĂ©donien (811 â 886) x 1) Marie x 2) Eudocie IngĂ©rina (840 â 882) â ââ1> Constantin (â 879), coempereur â ââ2> LĂ©on VI le Sage (866 â 912) parentĂ© incertaine â x 1) ThĂ©ophanĂŽ Martinakia (â 897) â x 2) ZoĂ© Tzaoutzina (â 899) â x 3) Eudocie BaĂŻana (â 901) â x 4) ZoĂ© Carbonopsina (â ap.919) â â â ââ4> Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte (905 â 959) â x HĂ©lĂšne LĂ©capĂšne (910 â 961) â â â ââ> Romain II (937 â 963) â â x 1) Berthe Eudocie (â 949), fille illĂ©gitime d'Hugues d'Arles â â x 2) ThĂ©ophano Anastaso (941 â ap.978) â â â â â ââ2> Basile II le Bulgaroctone (958 â 1025) â â â â â ââ2> Constantin VIII (960 â 1028) â â â x HĂ©lĂšne â â â â â â â ââ> Eudocie PorphyrogĂ©nĂšte (976 â ap.1030) â â â â â â â ââ> ZoĂ© PorphyrogĂ©nĂšte (978 â 1050) â â â â x 1) Romain III Argyre (968 â 1034) â â â â x 2) Michel IV le Paphlagonien (1010 â 1041) â â â â x 3) Constantin IX Monomaque (1000/04 â 1055) â â â â â â â ââ> ThĂ©odora PorphyrogĂ©nĂšte (980 â 1056) â â â â â ââ2> Anna PorphyrogĂ©nĂšte (963 â 1011) â â x Vladimir Ier le Grand, grand-prince de Novgorod puis de Kiev â â â ââ> ThĂ©odora (937 â 963) â x Jean Ier, empereur byzantin â ââ2> Ătienne Ier (867 â 893), patriarche de Constantinople, parentĂ© incertaine â ââ2> Alexandre (870 â 913)
Bibliographie
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- Constantin PorphyrogĂ©nĂšte. âDe administrando imperioâ (bilingue) », traduction Marc Szwajcer. Site de Philippe Remacle & alii. L'antiquitĂ© grecque et latine du Moyen Ăge. [en ligne] http://remacle.org/bloodwolf/historiens/constantin/table.htm [archive] [archive].
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- Constantin PorphyrogénÚte. Le livre des cérémonies. Commentaires par Albert Vogt. Paris, Les Belles Lettes, 1967. Tome I (livre 1; chapitres 1-46). Tome II (livre 1 ; chapitres 47-92).
- Léon le Diacre. Leonis Diaconi Caloensis Historiae libri decem et Liber de velitatione bellica Nicephori Augusti e recensione Caroli Benedicti Hasii, Addita eiusdem versione atque annotationibus ab ipso recognitis. Accedunt Theodosii Acroases De Creta capta e recensione Fr. Iacobsii et Luitprandi legatio cum aliis libellis qui Nicephori Phocae et Ioannis Tzimiscis historiam illustrant, édité par Charles Benoßt Hase (Corpus Scriptorum Historiae Byzantinae, vol. 30), éd. Weber, Bonn, 1828.
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Notes et références
Notes
- Pour une explication des titres, voir lâarticle « Glossaire des titres et fonctions dans lâEmpire byzantin ».
- Depuis le 9 juin 911, lâEmpire byzantin avait trois empereurs : LĂ©on VI, son frĂšre Alexandre, et Constantin, fils de LĂ©on et neveu dâAlexandre (BrĂ©hier (1969) p. 134).
- LittĂ©ralement « nĂ© dans la pourpre » du nom de la salle oĂč accouchaient les impĂ©ratrices dont les murs, le plafond et le plancher Ă©taient recouverts de marbre de porphyre. Le fait dâĂȘtre nĂ© dans cette chambre confĂ©rait au prince une lĂ©gitimitĂ© ayant Ă lâoccasion prĂ©sĂ©ance sur le droit dâaĂźnesse.
- SystÚme fiscal qui consistait à faire payer par les puissants les impÎts que ne pouvaient pas payer les plus pauvres sans pour autant leur faire bénéficier du droit de préemption qui en découle normalement.
- Il avait Ă©tĂ© coempereur sous Romain II (962â963), NicĂ©phore II Phocas (963â969), Jean Ier Tzimiskes (969â976) et Basile II (962â1025)
- Un calfat est un ouvrier employé en construction navale pour le calfatage des bordés des navires.
- Le lettré Constantin LichoudÚs devint Premier ministre, le juriste et futur patriarche Jean Xiphilin devint nomophylax, ou directeur de la faculté de droit, le poÚte et érudit Jean Mavropous devient le conseiller intime de l'empereur et Michel Psellos fut nommé protoascretis, ou chef de la chancellerie (Bréhier (1969) p. 209).
- Les stratiotes purent racheter lâobligation du service militaire en versant une somme dâargent.
Références
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- Voir à ce sujet Treadgold (1997) « Cultural revival » pp. 558-560
- Treadgold (1997) « Economic growth », pp. 560-579
- Treadgold (1997) « The partnership of Emperor and Army » pp. 543-552
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- Bréhier (1969) p. 140
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- ThĂšse retenue par Edward Gibbon
- Bréhier (1969) p. 164
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