Bataille d'Arcis-sur-Aube
La bataille dâArcis-sur-Aube a lieu les 20 et , entre une armĂ©e française commandĂ©e par NapolĂ©on Ier et une armĂ©e autrichienne commandĂ©e par Schwarzenberg.
Date | 20- |
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Lieu | Arcis-sur-Aube |
Issue |
Victoire stratégique française Victoire tactique autrichienne |
Empire français | Empire d'Autriche Empire russe Royaume de BaviÚre Royaume de Wurtemberg |
⹠Napoléon Ier | ⹠Karl Philipp de Schwarzenberg |
20 000 puis 28 000 hommes | 43 000 puis 80 000 hommes |
4 200 morts ou blessés dont 800 prisonniers | 4 000 morts ou blessés |
Batailles
- Hoogstraten (de)
- Anvers
- Berg-op-Zoom
- Courtrai
CoordonnĂ©es | 48° 32âČ 17âł nord, 4° 08âČ 31âł est |
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Campagne précédant la bataille
AprÚs la campagne d'Allemagne, Napoléon est forcé de repasser le Rhin : il refait ses troupes (voir les Marie-Louise). Les armées coalisées affluent de toutes parts vers la France : les Anglo-Espagnols franchissent les Pyrénées, des armées autrichiennes franchissent les Alpes, des armées russes, prussiennes et autrichiennes le Rhin.
LâarmĂ©e française est pour sa plus grosse part dispersĂ©e dans les places des Pays-Bas, dâAllemagne, de Belgique. Ses corps de manĆuvre sont de taille rĂ©duite, et peuvent Ă tout moment ĂȘtre submergĂ©s par des forces trĂšs supĂ©rieures en nombre. Ces diffĂ©rentes colonnes convergent vers Paris, qui est lâenjeu de la campagne de France.
Contre toute attente, NapolĂ©on remporte victoire sur victoire pendant lâhiver 1814. Son plan est de battre sĂ©parĂ©ment les corps des coalisĂ©s, en attendant que les troupes françaises dâAllemagne, sous la conduite de Davout, rejoignent la France.
Le , Schwarzenberg a affrontĂ©, sans les dĂ©truire, les troupes des marĂ©chaux Oudinot et Macdonald dans le secteur de Provins (bataille de LĂ©chelle-Cormeron). Le 17 mars, il sâest emparĂ© du passage de la Seine Ă Nogent, de telle sorte que ses avant-gardes se trouvent Ă moins de cent kilomĂštres de Paris. Il stoppe sa marche vers la capitale et dirige l'essentiel de son armĂ©e, Ă la rencontre de celle de NapolĂ©on, vers Arcis-sur-Aube.
Pour Ă©viter que lâarmĂ©e de BohĂȘme arrive sous les murs de la capitale dans les quatre jours, NapolĂ©on dĂ©cide de lâassaillir au plus vite. LâEmpereur opte pour lâaudacieuse solution dâaccourir de Reims sur Troyes par Arcis-sur-Aube, de façon Ă tomber sur les arriĂšres de lâennemi une cinquantaine de kilomĂštres en deçà de ses tĂȘtes de colonne. Il laisse Ă Fismes et Ă Reims Mortier et Marmont face Ă BlĂŒcher, et met lui-mĂȘme le cap vers le sud. Le 19 mars, apprenant que les Autrichiens occupent Arcis, il passe lâAube Ă Plancy et marche sur MĂ©ry, sâimaginant dĂ©boucher en ce point en plein dans le dos de lâadversaire. Mais son arrivĂ©e si foudroyante quelle soit, nâest pas restĂ©e inaperçue ; les chefs de lâarmĂ©e de BohĂȘme, aussitĂŽt informĂ©s, ont rĂ©trogradĂ© en toute hĂąte. Lâensemble de leurs forces se replie mĂ©thodiquement vers Troyes et, dans les alĂ©as dâun recul aussi massif, elles ne laissent aux mains des coureurs français que quelques voituresâŠ
Ce nouveau coup dâaudace impĂ©riale a sauvĂ© Paris une fois de plus. Mais la disproportion des forces rend une victoire inenvisageable. LâEmpereur engage une nouvelle manĆuvre sur les arriĂšres de lâarmĂ©e de BohĂȘme. Il lui suffit de passer au nord de cette derniĂšre, en rejoignant Saint-Dizier par Arcis-sur-Aube, puis de descendre sur Joinville ou Doulevant-le-ChĂąteau pour se retrouver dans le dos de Schwarzenberg, avec de plus la communication directe assurĂ©e avec les garnisons des places de lâEst, voire avec Augereau et ses divisions lyonnaises.
La bataille
Le 20 mars, aprĂšs avoir rappelĂ© Ă lui Oudinot et Macdonald, NapolĂ©on se dirige vers Arcis-sur-Aube. En ce point, Ă 14 heures, sa cavalerie se heurte Ă lâavant-garde de lâarmĂ©e de BohĂȘme, dont le chef, le dĂ©couvrant aventurĂ© le long de lâAube, vient de dĂ©cider une offensive gĂ©nĂ©rale propre Ă en finir avec lui en le culbutant dans la riviĂšre.
NapolĂ©on voit les obus exploser devant un bataillons de jeunes recrues, qui se replient. Il se prĂ©cipite, se place Ă leur tĂȘte, et quand un obus tombe au pied de son cheval, il ne bouge pas. L'obus explose, le cheval est Ă©ventrĂ©, mais NapolĂ©on se relĂšve au milieu de la fumĂ©e. Les soldats l'acclament, partent Ă l'assaut et prennent Torcy.
Ă 16 heures, la bataille fait rage ; le soutien de lâinfanterie de Ney nâa pas permis aux cavaliers français de progresser plus avant. Le « brave des braves » sâaccroche au hameau de Torcy-le-Grand, tenant tĂȘte aux Bavarois de De Wrede, tandis que la position mĂȘme dâArcis, Ăąprement disputĂ©e contre les Autrichiens avec lâassistance vigoureuse de la division de la Vieille Garde conduite par Friant. La nuit dâhiver ne ralentit pas le combat ; Torcy-le-Grand nâest plus quâun amas de dĂ©combres dĂ©vorĂ©s par lâincendie, quand Ă minuit la fusillade dĂ©cline pour devenir sporadique. 16 500 Français fanatisĂ©s viennent de tenir tĂȘte Ă 30 000 alliĂ©s pendant plus de huit heures de corps Ă corps.
Ă lâaube du 21 mars, Schwarzenberg, trompĂ© par lâĂ©tonnante rĂ©sistance de ses adversaires, surestime lâimportance de leurs effectifs et perd toute la matinĂ©e Ă attendre lâarrivĂ©e de ses rĂ©serves pour reformer sa ligne de bataille. Face Ă lui, les renforts affluent Ă©galement : le corps de Macdonald nâest plus loin et lâentrĂ©e en ligne de celui dâOudinot porte les forces napolĂ©oniennes Ă 28 000 baĂŻonnettes et 6 000 sabres.
Si le prince autrichien a commis une faute en surestimant son adversaire, NapolĂ©on, trompĂ© par ce calme dĂ©but de matinĂ©e du 21 mars, sous-estime le sien en sâimaginant que son inactivitĂ© correspond Ă une retraite. Aussi, vers 10 heures, les Français reçoivent-ils lâordre dâattaquer ; mais bientĂŽt, force leur est de se rendre compte quâils donnent au cĆur dâune armĂ©e de 100 000 combattants dont les diffĂ©rents Ă©lĂ©ments dessinent un arc de cercle autour dâArcis, avec dâouest en est, Wurtembergeois, Russes et Bavarois et Autrichiens formant la rĂ©serve. 370 canons appuient cet ensemble imposant. Aucune autre solution pour NapolĂ©on que de faire retraite en repliant tout son monde sur la rive droite de lâAube, par lâunique petit pont dâArcis.
Heureusement pour lui, Schwarzenberg ne commence son attaque quâĂ 16 h 30. Oudinot lui tient tĂȘte dans le bourg sous une pluie dâobus et rĂ©ussit vers 21 h Ă ne dĂ©truire le passage quâaprĂšs avoir retirĂ© sa derniĂšre brigade.
Il arrive Ă Saint-Dizier, le mercredi 23 mars 1814 Ă 14 heures. Les fantassins sont couchĂ©s a mĂȘme le sol contre les façades des maisons. AprĂšs des jours et des jours de marche et de combats les soldats sont Ă©puisĂ©s et leur uniforme sont souillĂ©s. Quand il entre dans la maison du maire, les marĂ©chaux sont dĂ©jĂ lĂ . Berthier et Ney lui disent que la bataille d'Arcis-sur-Aube a Ă©tĂ© coĂ»teuse et que l'ennemi dispose d'au moins 100 000 hommes et de plusieurs centaines de piĂšces de canons. NapolĂ©on commence Ă Ă©crire :
« Mon amie, J'ai Ă©tĂ© tous ces jours-ci Ă cheval. Le 20, j'ai pris Arcis-sur-Aube. L'ennemi m'y a attaquĂ© Ă six heures du soir, le mĂȘme jour je l'ai battu et je lui ai fait quatre mille morts. Je lui ai pris deux piĂšces de canons, il m'en a pris deux, cela fait quitte. Le 21, l'armĂ©e ennemie s'est mise en bataille pour protĂ©ger la marche de ses convois sur Brienne et Bar-sur-Aube. J'ai pris parti de me porter sur la Marne et sur ses communications afin de le pousser plus loin de Paris et me rapprocher de mes places. Je suis ce soir Ă Saint-Dizier. Adieu, mon amie. Un baiser Ă mon fils. NapolĂ©on »
Bilan
Par manque dâaudace et dâesprit dâinitiative, lâĂ©tat-major de lâarmĂ©e de BohĂȘme vient de perdre une magnifique occasion de faire de lâAube le tombeau de la Grande ArmĂ©e.
Pourtant, dans le Wurtemberg, en BaviĂšre et en Russie, la bataille fut commĂ©morĂ©e comme une victoire des alliĂ©s sur NapolĂ©on. En tĂ©moignent le nom de la rue ArcisstraĂe Ă Munich, et dâArcis, une colonie de peuplement allemand en Russie (aujourdâhui en Ukraine, dans la rĂ©gion dâOdessa), ainsi quâun village cosaque du Sud de l'Oural (ĐŃŃĐžĐœŃĐșĐžĐč/Arcinski (ru)). Ă Munich, le Conservatoire a son siĂšge dans lâArcisstraĂe, et de temps en temps des ensembles de musique choisissent ce nom bien sonnant (Arcis-Quintett, Arcis-Vokalisten), sans trop se soucier de son histoire belliqueuse.