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Alignements de Carnac

Les alignements de Carnac forment un site d'alignements mĂ©galithiques exceptionnel situĂ© sur les communes de Carnac et de La TrinitĂ©-sur-Mer dans le dĂ©partement du Morbihan en Bretagne, la rĂ©gion de Carnac rĂ©unissant la plus forte concentration de mĂ©galithes du monde[1]. ConstituĂ©s de menhirs, de dolmens et d'allĂ©es couvertes rĂ©partis sur plus de quatre kilomètres, ces alignements Ă©rigĂ©s vers 4 500 ans avant notre ère, sont les ensembles mĂ©galithiques les plus cĂ©lèbres et les plus impressionnants de cette pĂ©riode avec près de 4 000 pierres levĂ©es[2].

Alignements de Carnac
Alignement de Kermario Ă  Carnac.
Présentation
Type
Civilisation
Patrimonialité
Liste indicative du patrimoine mondial (d) ()
Classé MH ()
Site web
Localisation
Pays
RĂ©gion
DĂ©partement
Commune
Accès et transport
Gare
Coordonnées
47° 35′ 36″ N, 3° 04′ 47″ O
GĂ©olocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
GĂ©olocalisation sur la carte : Bretagne
(Voir situation sur carte : Bretagne)
GĂ©olocalisation sur la carte : Morbihan
(Voir situation sur carte : Morbihan)
GĂ©olocalisation sur la carte : alignements de Carnac
(Voir situation sur carte : alignements de Carnac)

Les menhirs sont protégés au titre des monuments historiques par plusieurs listes et arrêtés successifs, les premiers en 1889. En 1996, les sites mégalithiques de Carnac sont inscrits sur la liste indicative de l'UNESCO en vue d'une candidature d'inscription au Patrimoine mondial dans la catégorie culturelle.

Description

Localisation géographique

Les alignements de Carnac se suivent sur environ km entre la baie de Plouharnel et la rivière de TrinitĂ©-sur-Mer. Ils marquent la jonction de deux territoires diffĂ©rents, l'un littoral au sud et l'autre continental au nord [3]. Ils comprennent notamment 2 733 menhirs, chiffre sans doute largement en deçà de ce qui existait au NĂ©olithique[4]. Il est possible que les alignements aient atteint la rivière de Crac'h en se rĂ©partissant sur 8 kilomètres.

Composition des alignements

Les principaux alignements de menhirs de Carnac sont (d'Ouest en Est) : Le MĂ©nec, Kermario, Kerlescan et Le Petit MĂ©nec. L'ensemble a une direction gĂ©nĂ©rale sud-ouest nord-est (N 65°)[5]. Dans chaque alignement, les menhirs sont placĂ©s par ordre croissant en direction de l'Ouest. Un cromlech prĂ©cède l'alignement du MĂ©nec distant de 240 mètres de l'alignement de Kermario, prĂ©cĂ©dĂ© lui d'un dolmen. L’alignement de Kerlescan distant de 390 mètres est, comme le MĂ©nec, prĂ©cĂ©dĂ© d'un cromlech semi-circulaire.

Les menhirs sont exclusivement formés de granite local, un granite d'anatexie à deux micas hétérogènes, comprenant des zones porphyroïdes[6].

Les alignements du MĂ©nec

Ces alignements constituent l'ensemble de menhirs le plus reprĂ©sentatif : 1 165 mètres de long sur 100 mètres de large pour 1 099 menhirs rĂ©partis sur 11 files. Les plus hautes pierres qui les composent atteignent 4 mètres. Les alignements du MĂ©nec commencent au sud-ouest par un cromlech comprenant encore 71 blocs rescapĂ©s dont certains se faufilent entre les bâtiments du village du MĂ©nec. Un cromlech très ruinĂ© existe encore Ă  l'est.

Les alignements du Ménec fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis 1889[7].

Alignement du MĂ©nec.

L'alignement de Kermario et le Manio

Cet alignement est le plus connu et le plus fréquenté des alignements de Carnac. En effet, c'est ici que l'on trouve les plus gros menhirs. Il compte 10 lignes représentant un total de 982 menhirs. Il fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis 1889[8].

Cet alignement est marqué par l'existence du moulin de Kermaux qui offre un point de vue sur les alignements. Enfin, l'étang de Kerloquet creusé au XIXe siècle a détruit une partie des alignements. Il sépare en deux l'alignement avec le Kermario d'un côté et le Manio de l'autre. Le site de Kerloquet, composé de 82 menhirs, fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le [9].

Non loin de cet alignement se trouve le quadrilatère du Manio qui est constituĂ© de plusieurs blocs de granit de 1 mètre de hauteur placĂ©s jointivement. Ils dĂ©limitaient un tertre tumulaire. On trouve aussi le GĂ©ant du Manio qui se dresse Ă  une hauteur de 6 mètres. L'ensemble fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis 1900[10].

Alignements de Kermario.

L'alignement de Kerlescan et le petit MĂ©nec

Cet alignement contient 540 menhirs rĂ©partis sur 13 lignes et sur 3,50 hectares de surface. Ă€ son extrĂ©mitĂ©, se trouve un cromlech de 39 menhirs. C'est l'alignement le mieux conservĂ©. Il fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis 1889[11].

L'alignement de Kerlescan se prolonge dans un bois situé au-delà de la route menant à la Trinité-sur-Mer avec le Petit Ménec, aujourd'hui restauré, et qui fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le [12].

Histoire

Fouilles archéologiques

Le plan de Murray Vicars, en 1832, recensant aussi des mégalithes de Erdeven, Plouharnel, La Trinité-sur-Mer et l'Île-aux-Moines.
L'emprise du plan de Murray Vicars sur un fond de carte actuel.

Ce n'est qu'à partir de 1750 que l'on s'intéresse aux alignements de Carnac et que les premières hypothèses sont émises. Le comte de Caylus en 1764 pense que les mégalithes datent d'avant l'époque des Gaulois et des Romains. F. de Pommereul en 1790 émet l'hypothèse d'une origine celte qui va pendant de nombreuses années envaser les réflexions archéologiques sur les mégalithes Des publications autour de Carnac ont inspiré de nombreux hommes célèbres à cette époque :

Les fouilles en 1881 de l'archéologue James Miln puis en 1920 de son assistant Zacharie Le Rouzic, à l'origine du musée de préhistoire à Carnac, introduisent de nouvelles interprétations fondées sur l'archéologie. Ils tentent de vérifier les origines de ces pratiques liés aux cultes, c’est-à-dire à la vénération de quelqu'un ou de quelque chose. Ces deux savants participent également à la remise en valeur du site dégradé par les pratiques agricoles (monolithes placés dans les talus, comme constaté par Miln[14]), le pâturage, le brûlis et l'écobuages des landes dans un but de fertilisation, ou le tracé des routes, car la majorité des pierres ont été renversées ou déplacées. Le vandalisme officiel a également participé à cette dégradation puisque de nombreuses pierres ont été prélevées pour construire l'église de Carnac à partir de 1629 et le phare de Belle-Île-en-Mer à partir de 1826[15]. Ces archéologues en font relever une grande partie en les marquant d'une petite pastille de ciment rouge à leur base, pour signaler les menhirs non en position originelle[16]. « Seuls demeurent les plus gros monolithes, formant les amorces des lignes reconstituées depuis, sans scrupule, par extrapolation. Certaines files seraient parfaitement fantaisistes, inventées de toutes pièces ». Le préhistorien Pierre-Roland Giot, chercheur au CNRS, qui fait autorité, parle de "restauration abusive", relevant que désormais seuls 36 % des menhirs sont à leur stricte place et situation originelle[14].

Pendant l'Occupation l'archéologie nazie s'intéresse aux alignements de Carnac y voyant un signe de l'« indo-germanisation » de la région par des populations extérieures venues du nord par la mer. Une mission est envoyée sur place en automne 1940 et réalise avec l'aide de la Luftwaffe des relevés topographiques du secteur[17]. Ces recherches, organisées par l'Institut archéologique allemand, sont directement chapeautées par Alfred Rosenberg un des idéologues du parti nazi. À la suite de ces études le tumulus associé aux menhirs de Kerlescan est fouillé entre 1941 et 1942. Le cours de la guerre interrompt ensuite les recherches[18].

Lors de fouilles préventives réalisées au au parc Belann où la ville de Carnac a un projet immobilier, des traces d'habitations néolithiques sont mises au jour, ce qui suggère que les constructeurs de ces alignements habitaient à proximité immédiate des mégalithes[19].

Destructions liées à l'exploitation agricole, urbanistique et de carrière du lieu

Route départementale longeant l'alignement du Ménec.

Tout au long du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les alignements de Carnac servent de réserve de pierre permettant la construction locale : clôtures des champs, phares, maisons, canaux, routes, chemins de fer[20]… Une enquête, réalisée dans les années 1850, cherche à déterminer si le phare de Belle-île-en-mer est réalisé en pierres de Carnac, mais ses résultats ne sont pas concluants[20]. En 1898, le dolmen de Rogarte est détruit afin d'en récupérer les pierres[20].

Le fort développement agraire de l'époque aboutit à la mise en culture des champs de menhirs de Carnac, où des blocs de granit sont alors déplacés ou débités pour faciliter l'exploitation des terres[20].

Dans les années 1950, une route départementale longeant les alignements est créée, perturbant les niveaux archéologiques et déplaçant les files les plus méridionales[20].

Candidature d'inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO

En 1996, les sites mégalithiques de Carnac sont inscrits sur la liste indicative de l'UNESCO en vue d'une candidature d'inscription au patrimoine mondial dans la catégorie culturelle[21].

L’association Paysages de mégalithes, créée en 2013 par le conseil départemental du Morbihan, porte le projet d’inscription des mégalithes de Carnac et des rives du Morbihan au patrimoine mondial de l’UNESCO. Outre Carnac, 26 autres communes du golfe du Morbihan sont concernées[22] avec un total de 397 sites. Le dossier de candidature doit être déposé courant 2023 auprès des autorités françaises qui ne peuvent présenter à l'UNESCO qu'un seul projet par an. Si la candidature est validée, la décision de l'UNESCO ne sera pas prise avant 2025[23] - [24] .

Folklore et légendes

Les alignements appartiennent au folklore de la région de Carnac où ils ont suscité diverses superstitions, légendes et interprétations fantaisistes très anciennement et parfois généralement accréditées[25]. Ces pierres seraient ainsi réputées pour abriter un trésor à leur pied, mais que toute personne cherchant à l'obtenir mourrait[26].

La légende de saint-Cornély raconte ainsi la mésaventure des soldats romains poursuivant Cornély, pétrifiés et transformés en menhirs par celui-ci[20]. Une ancienne pierre boiteuse, située près du village de Luffang, à Crach, serait aussi un soldat pétrifié, mais en retard par rapport au reste de l'armée car boiteux[26]. La nuit de Noël, ces pierres vont boire dans les ruisseaux, écrasant humains et bêtes sur leurs passages[27]. Recueillie en 1864, cette légende était très populaire parmi les enfants de Carnac, au point qu'ils aillent, tous les jeudis, la raconter aux touristes visitant la région, jusqu'à ce qu'un arrêté municipal pris dans les années 1960 interdise cette pratique[26].

Le menhir de Krifol, au nord de l'alignement du Ménec, fait aussi l'objet d'une légende : il serait le corps, changé en pierre de Minour Krifol : des versions en font un jeune homme très riche, changé en pierre par Dieu pour le punir de ses dépenses inconsidérées quand d'autres en font un soldat déserteur[26]. Dans tous les cas, son âme errait autour de la pierre, et il est dangereux de s'y promener la nuit[26].

Longtemps qualifié d'antiquités gauloises, l'écrivain André-François Boureau-Deslandes voit dans ces pierres, en 1732, des vestiges du Déluge[28].

Hypothèses scientifiques

La celtomanie s'est nourrie des représentations fantasmatiques et romantiques qui voyaient les druides pratiquer des sacrifices humains à des fins divinatoires. Illustration de la forêt de Carnac, avec la pleine lune permettant de distinguer, à l'arrière-plan, un alignement (Les Mystères de Paris d'Eugène Sue, 1851).

L'alignement de Kermario, vraisemblablement contemporain de Kerlescan, semble construit sur le tertre du Manio qui est daté de - La construction des alignements semble légèrement postérieure, ceux-ci dateraient donc du milieu du IVe millénaire (fin du Néolithique moyen)[29].

Comme tout alignement mégalithique les explications pour tenter de justifier les constructions sont apportées par les nombreuses théories du mégalithisme. Le marquis Christophe-Paul de Robien, dans sa Description historique, topographique et naturelle de l'Ancienne Armorique ou Petite Bretagne rédigée vers 1753-1755, y voit des stèles funéraires[30]. Hypothèse rejetée car aucune dépouille n'y réside[31]. Compte tenu de la présence de nombreux dolmens dans les environs, ainsi que de deux cromlechs[32], du tumulus Saint-Michel, la fonction symbolique et sacrée a souvent été proposée : culte phallique voire ophiolâtrique au milieu du XIXe siècle[33] (culte druidique du serpent en raison des alignements franchement sinueux)[34] ; rassemblement des druides de l'Armorique et de l'île Britannique selon La Tour-d'Auvergne en 1805[28] ; culte solaire ou du zodiaque évoquée par le celtomane Jacques Cambry au début du XIXe siècle[35]. Maudet de Penhouët émet en 1826[36] la première hypothèse astronomique[28]. Ces dernières théories résultent d'un idéologie qui s'est développée à la fin du XVIIIe siècle, la celtomanie, mélange de mysticisme folklorique, de tradition littéraire et du renouveau des études historiques engendré par le développement de l'archéologie, idéologie qui régnera jusqu'à la fin du XIXe siècle[37]. D'autres théories ont depuis vu le jour : calendrier marquant les cycles agricoles[38], réponse propitiatoire face à la montée des océans[39].

Pierre Méreaux, qui a passé 30 ans à étudier les alignements sur le terrain, émet une hypothèse sismographique en 1992[40]. Il avance que les dolmens étaient plutôt sûrement utilisés comme instruments sismiques primitifs, la Bretagne étant une région sismiquement active. En particulier, il soutient que la Bretagne aurait été encore plus sismiquement active à l'époque, en raison de l'afflux d'eau avec le retrait des glaces. Il présente aussi des corrélations entre l'emplacement et l'orientation des menhirs, et ceux des lignes de failles sismiques. Ses études démontrent que l'équilibre entre les grosses pierres sur les points délicats agirait comme un détecteur de tremblement de terre efficace: «les lourdes tables de ces monuments, avec leur vertigineux porte-à-faux, devaient diantrement balancer sur leurs trois pattes, aux moindres chocs. En fait de station d'observation sismique, on ne ferait guère mieux de nos jours."[41]

Cependant, l'hypothèse privilégiée par la communauté scientifique a longtemps été, selon Jean-Michel Bonvalet, historien chargé d'actions éducatives et culturelles à la Maison des mégalithes de Carnac, celle du temple préhistorique. Mais l'organisation de ce temple correspond « sans doute à une restauration sauvage, non documentée, du début du XIXe siècle. Des gens ont remis des pierres en place. Et on sait que, quand on restaure quelque chose, c'est souvent orienté : on lui donne l'aspect de ce que l'on croit. Les gens étaient persuadés qu'ils restauraient un "temple gaulois"[31] ». L'hypothèse actuelle, selon Serge Cassen, directeur de recherche CNRS, repose sur une autre façon de regarder ces alignements : « L'idée, très simple, est de dire que les espaces entre les pierres ont autant de sens que les pierres elles-mêmes. On serait là face à des aménagements de passage, des … "pierres seuil" qui matérialiseraient un passage. Et on traverse comme on traverse une frontière[31] ».

Si le mystère persiste, les alignements, formes de pierres non jointives de taille croissant essentiellement d'est en ouest, correspondant en tout cas à une théâtralisation de l'espace[42].

Destination touristique

Plan à l'extérieur de la maison des mégalithes, montrant les principaux monuments mégalithiques du site.
La maison des mégalithes à Carnac et son cinéma, baptisé l'archéoscope.

Avec le développement du tourisme en Bretagne dans la seconde moitié du XIXe siècle, ces mégalithes intéressent un public désormais plus large que celui des antiquaires et en particulier l’intelligentsia parisienne[43].

Entre 1937 et 1953 est créée la « route des alignements » qui longe ceux-ci au plus près. Cet aménagement qui passe même entre les files de menhirs et en détruit certaines, suscite de nombreux conflits en lien avec le développement touristique[44]. Le surpiétinement d'un million de visiteurs dans les années 1970 est responsable des dégradations alarmantes du fragile couvert végétal, ce qui entraîne des mesures de préservation du site[45].

ÉdifiĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1990 au MĂ©nec, un bâtiment en bĂ©ton armĂ© tient lieu depuis 2003 d’accueil, de librairie-boutique et de centre d’interprĂ©tation au site de Carnac, gĂ©rĂ© par le Centre des monuments nationaux. Cette Maison des mĂ©galithes de 700 mètres carrĂ©s s’est avĂ©rĂ©e au fil des annĂ©es peu fonctionnelle pour accueillir convenablement les 700 000 visiteurs annuels[46]. Le , après 18 mois de travaux et avec un investissement de 3,5 millions d'euros concernant son rĂ©amĂ©nagement intĂ©rieur complet, la Maison des mĂ©galithes rouvre ses portes[47]. L'offre culturelle de cette maison est complĂ©tĂ©e en 2011 par l'installation de deux nouveaux points d'information dans des chalets en bois Ă  Kermario et au MĂ©nec[48].

En , la pose d'un grillage mĂ©tallique vert d’environ un mètre de hauteur, jugĂ© inesthĂ©tique, est plantĂ© dans de grands blocs de bĂ©ton[49]. Permettant de clĂ´turer le site afin de rĂ©guler la surfrĂ©quentation touristique et l'Ă©rosion anthropique (disparition des traces de piĂ©tinement des visiteurs, rĂ©duction du dĂ©chaussement des mĂ©galithes menacĂ©s de basculement) il est associĂ© Ă  un programme de revĂ©gĂ©talisation[45]. Ce programme de prĂ©servation suscite une polĂ©mique, l'association Menhirs libres et des Ă©lus locaux y voyant une privatisation du site qui masque la face cachĂ©e du projet, une lourde opĂ©ration d'amĂ©nagement et d'exploitation massive du tourisme[50]. Cette association de Carnac dĂ©nonce les expropriations dont certains habitants sont menacĂ©s et au premier chef la prĂ©sidente de Menhirs libres, CĂ©line Mary[Note 1], dont l'habitation est au cĹ“ur des alignements de Kermario (avec l'urbanisation croissante au XIXe siècle, de nombreuses maisons se sont en effet construites Ă  l'intĂ©rieur du site mĂ©galithique)[50]. Ă€ l'extĂ©rieur est amĂ©nagĂ© un parcours piĂ©tonnier. En saison estivale, afin de prĂ©venir les risques de dĂ©gradations humaines, les sites sont accessibles uniquement par les visites commentĂ©es avec un guide culturel de la Maison des mĂ©galithes et qui comptabilisent moins de 30 000 personnes par an[51]. Ces visites se font sur l’un ou l’autre site par souci de protection environnementale, la jauge ne dĂ©passant pas les 400 personnes par jour[51]. Cependant, le site est de nouveau en libre accès d'octobre Ă  mars, en raison du climat et du nombre limitĂ© de visiteurs. Cette protection permet d'Ă©viter les dĂ©chaussements des menhirs (bloquĂ©s dans des fosses de calage de petites pierres sur une quarantaine de centimètres depuis le niveau du sol), de prĂ©server le sous-sol archĂ©ologique, et la restauration de la vĂ©gĂ©tation[45].

En 1991 est ressorti le projet de construire une zone touristique autour du site de Carnac, via des travaux qui prévoyaient de dévier une route et de détruire des habitations[52]. Le sénateur-maire de Carnac, Christian Bonnet, imagine de construire, à l'instar de Lascaux 2, une réplique en béton des alignements, pour y gérer le flux de touristes[14]. Cependant, cette idée d'exploitation économique du site historique connaît une forte opposition de la part des riverains[53] et d'une association, Menhirs libres fondée en 1993 par Yannig Baron et Guy Mary, du fait notamment de l'expropriation d'une dizaine de familles d'agriculteurs habitant à proximité du site.

Le local commercial installé en bordure des alignements de Kermario est occupé 41 jours par le collectif « Holl-A-Gevret » (« tous ensemble »), dont Menhirs Libres fut membre. Le jour suivant leur expulsion du lieu, les militants organisent une manifestation de soutien à la dernière famille d'agriculteurs encore présente sur le site, bien qu'expropriée. Celle-ci est sévèrement réprimée par une compagnie de gardes mobiles. Plusieurs personnes sont blessées dans les rangs des manifestants et dans celui des gendarmes[54].

Finalement, du fait de son illégalité reconnue par le tribunal administratif de Nantes, ce projet touristico-culturel qualifié de « Menhirland » par ses opposants, est officiellement abandonné en 2003 par Jean-Jacques Aillagon, alors Ministre de la Culture[55].

Mouton au milieu des alignements de Kermario.

Depuis 1995, le centre des Monuments nationaux a mis en place un élevage de moutons indigènes de la race Lande de Bretagne assurant l'entretien du site (afin de limiter la repousse des espèces végétales)[51].

Dans la fiction

Les alignements de Carnac sont un des lieux de tournage en extérieur du film, réalisé par Abel Gance, Le Roman d'un jeune homme pauvre, sorti en 1935.

Dans Astérix en Hispanie de Goscinny et Uderzo, c'est Ordralfabétix qui projette de créer les alignements de Carnac.

Les alignements de Carnac ont également servi de source d'inspiration à Junichi Masuda pour les jeux vidéo Pokémon X et Pokémon Y[56]. La ville fictive de Cromlac'h possède également son alignement de menhirs.

Les alignements de Carnac sont également représentés dans un album de la série Michel Vaillant, La Nuit de Carnac (1990), notamment dans le contexte d'une bataille entre des Chouans et des Bleus.

Dans Le Scrameustache de Gos, ils sont le théâtre de plusieurs aventures, notamment dans Le Magicien de la Grande Ourse et Le Cristal des Atlantes. Dans le premier, un menhir emprisonnant un personnage maléfique, Falzar, est ajouté aux alignements ; dans le second, ils servent de moyen de propulsion à la soucoupe spatiale des héros[57].

Voir aussi

Bibliographie

  • Christine Boujot et Emmanuelle Vigier, Carnac et environs : architectures mĂ©galithiques, Éd. du Patrimoine-Centre des monuments nationaux, cop. 2012 (ISBN 978-2-7577-0206-2 et 2-7577-0206-8, OCLC 805058016, lire en ligne)* Jean-Pierre Mohen, Les alignements de Carnac, temples nĂ©olithiques, Paris, 2000, 64 p.
  • Lionel Pirault et CĂ©cile Talbo, Diagnostic archĂ©ologique : commune de Carnac. Parcelles 40 AC, 71 AC, 134 AC, 86 M, 84 M, --, Ă©d. par le Service rĂ©gional de l'archĂ©ologie de Bretagne, Rennes, 1995, 61 p., avec une bibliogr. gĂ©nĂ©rale p. 40-53 du pdf (en ligne).
  • Pierre-Roland Giot, Les alignements de Carnac, Rennes, , 32 p. (lire en ligne)
  • John Bathurst Deane (en), « Observations on Dracontia », dans Archaeologia : Or Miscellaneous Tracts Relating to Antiquity, 25, Londres, 1834, p. 188-229 et aussi « plate XX », après la p. 202 : Murray Vicars, « Plan of the Dracontium of Carnac. Surveyed April 1832 » (en ligne).

Autres monuments autour de Carnac

Le menhir géant de Kerdeff vers 1908 (dessiné par Joseph Déchelette).

Proches de Carnac, de nombreux autres monuments de cette période se distinguent par une topographie, une géographie ou une géologie différentes :

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. « La détermination de la famille Mary lui vaut d'être comparée aux Gaulois d'Astérix dans un article qu'Armor Magazine lui consacre, intitulé « Les menhirs font de la résistance » ». Cf. Nathalie Dugalès, Ibid.

Références

  1. Yannick Lageat, Dominique Sellier et Charles R. Twidale, « Mégalithes et météorisation des granites en Bretagne littorale, France du nord-ouest », Géographie physique et Quaternaire, vol. 48, no 1,‎ , p. 108 (lire en ligne).
  2. Datation des charbons de bois au carbone 14 et des tessons de poteries par thermoluminescence. Cf. Jean Danzé, Le secret des menhirs, La Découvrance Éditions, , p. 43.
  3. D. Sellier, Analyse morphologique des marques de la météorisation des granités à partir de mégalithes morbihannais. L'exemple de l'alignement de Kerlescan à Carnac, Revue archéologique de l'ouest, tome 8, 1991. p. 83-97.
  4. Joël Cornette, La Bretagne, une aventure mondiale, Tallandier, , p. 47.
  5. Les mégalithes dans leur environnement géomorphologique dans la région de Carnac (voir légende en A). Cf Yannick Lageat, Dominique Sellier et Charles R. Twidale, « Mégalithes et météorisation des granites en Bretagne littorale, France du nord-ouest », Géographie physique et Quaternaire, vol. 48, no 1,‎ , p. 109 (lire en ligne)
  6. Jean Cogné, Schistes cristallins et granités en Bretagne méridionale. Le domaine de l'Anticlinal de Cornouaille, Mémoires pour servir à l'explication de la Carte géologique détaillée de la France, Imprimerie Nationale, 1960, 382 p.
  7. Notice no PA00091074, base Mérimée, ministère français de la Culture
  8. Notice no PA00091076, base Mérimée, ministère français de la Culture
  9. Notice no PA00091126, base Mérimée, ministère français de la Culture
  10. Notice no PA00091138, base Mérimée, ministère français de la Culture
  11. Notice no PA00091075, base Mérimée, ministère français de la Culture
  12. Notice no PA00091123, base Mérimée, ministère français de la Culture
  13. Voire la notice du peintre dans la Biographie universelle ancienne et moderne de Louis-Gabriel Michaud (1843, tome 21, p. 150).
    Monumens celtiques de Carnac, de Locmariaker Sra, faisant suite à ceux de l'atlas des siècles de la monarchie française, Jean-Baptiste-Joseph Jorand, Paris, Engelmann, 1830 (en ligne).
  14. Nicolas de La Casinière, « A Carnac, les alignements de l'arnaque. Malmené depuis des siècles, le site fait l'objet d'un projet d'aménagement contesté », sur liberation.fr, .
  15. Pierre-Roland Giot, Les alignements de Carnac, Ouest-France, , p. 7
  16. Gérard Bailloud, Carnac : les premières architectures de pierre, éditions du CNRS, , p. 39.
  17. Reena Perschke: Les mégalithes du Morbihan littoral sous l´occupation allemande (1940-1944). Bulletin et Mémoires du Morbihan, Société Polymathique du Morbihan, tome CXXXIX (Vannes 2013), p. 63-89 (en ligne). Voir aussi Laurent Olivier, « [Renaissance de l'historiographie, 2] L'archéologie nazie, un passé qui ne passe pas », dans Cours du Collège de France, (en ligne)
  18. Jean-Pierre Legendre, Laurent Olivier, Bernadette Schnitzler, Des archéologues nazis en France occupée, La Recherche, no 409, p. 54-57.
  19. Nathalie Bougeard, « Des traces d'habitation du néolithique à Carnac », sur lefigaro.fr, .
  20. Christine Boujot et Emmanuelle Vigier, Carnac et environs : architectures mégalithiques, Éd. du Patrimoine-Centre des monuments nationaux, cop. 2012 (ISBN 978-2-7577-0206-2 et 2-7577-0206-8, OCLC 805058016, lire en ligne)
  21. Sites mégalithiques de Carnac sur whc.unesco.org
  22. « Candidature UNESCO : une commission se penche sur de nouvelles protections des mégalithes de Carnac et des rives du Morbihan », sur Ministère de la culture, (consulté le ).
  23. « Candidature UNESCO : une commission se penche sur de nouvelles protections des mégalithes de Carnac et des rives du Morbihan », sur Les Échos, (consulté le ).
  24. « Protection des menhirs : à Carnac, un alignement de bourdes », sur Libération, (consulté le ).
  25. Gwenc'hlan Le Scouëzec et Jean-Robert Masson, Bretagne mégalithique, Seuil, , p. 31-36
  26. GĂ©rard Lomenec'h, LĂ©gendes des dolmens et menhirs, Coop Breizh, (ISBN 978-2-84346-548-2 et 2-84346-548-6, OCLC 819302689, lire en ligne)
  27. Zacharie Le Rouzic, Carnac : légendes, traditions, coutumes et contes du pays, Éd. PyréMonde-[Princi Negue], impr. 2007 (ISBN 2-84618-444-5 et 978-2-84618-444-1, OCLC 471042295, lire en ligne)
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