AlgĂšbre de Banach
En mathématiques, l'algÚbre de Banach est une des structures fondamentales de l'analyse fonctionnelle, portant le nom du mathématicien polonais Stefan Banach (1892-1945).
DĂ©finition
DĂ©finition â Une algĂšbre de Banach sur le corps K = â ou â est une K-algĂšbre associative normĂ©e telle que l'espace vectoriel normĂ© sous-jacent soit en outre un espace de Banach (c.-Ă -d. complet pour la norme).
On explicite cette dĂ©finition : une algĂšbre de Banach A sur le corps K = â ou â est un espace vectoriel normĂ© complet sur K (on note la norme) muni d'une loi interne notĂ©e multiplicativement, telle que quels que soient x, y, z Ă©lĂ©ments de A et Ă©lĂ©ment de K :
- (associativité) ;
- , et (bilinéarité) ;
- (sous-multiplicativité).
On parle d'algĂšbre de Banach commutative quand la loi produit est commutative.
Suivant les auteurs, la structure d'algĂšbre exige ou non la prĂ©sence d'un Ă©lĂ©ment unitĂ©[1] (nĂ©cessairement unique). Les termes algĂšbre unitaire et algĂšbre non unitaire permettent de diffĂ©rencier les structures. Dans une algĂšbre de Banach unitaire non nulle, l'Ă©lĂ©ment unitĂ© peut toujours ĂȘtre supposĂ© de norme 1, quitte Ă remplacer la norme par une certaine norme Ă©quivalente.
Exemples
- L'ensemble des nombres rĂ©els muni de la valeur absolue, de la somme et du produit est une algĂšbre de Banach rĂ©elle et unitaire. De mĂȘme, l'ensemble des nombres complexes, muni du module, de la somme et du produit est une algĂšbre de Banach complexe et unitaire. Ces exemples sont fondamentaux.
- Si E est un espace de Banach, l'espace â(E) des endomorphismes continus de E[2], muni de la composition et de la norme d'opĂ©rateurs. Si E est de dimension finie n, â(E) s'identifie Ă l'algĂšbre de matrices Mn(K), munie d'une norme matricielle adĂ©quate. M1(K) = K (muni de la valeur absolue si K = â et du module si K = â).
- Dans l'algĂšbre â(E) des opĂ©rateurs bornĂ©s d'un espace de Banach E, l'idĂ©al K(E) des opĂ©rateurs compacts. Si E est de dimension finie â et seulement dans ce cas â cette sous-algĂšbre K(E) est unitaire car Ă©gale Ă â(E).
- Pour 1 †p < â, l'algĂšbre normĂ©e des opĂ©rateurs de classe de Schatten (de) p sur un espace de Hilbert (qui sont les opĂ©rateurs Ă trace si p = 1 et les opĂ©rateurs de Hilbert-Schmidt (de) si p = 2) et plus gĂ©nĂ©ralement, celle des opĂ©rateurs nuclĂ©aires (en) d'ordre p sur un espace de Banach.
- L'algĂšbre ââ(X) des fonctions (Ă valeurs rĂ©elles ou complexes) bornĂ©es sur un ensemble X, munie de la norme de la convergence uniforme, dĂ©finie par .
- Si X est un espace compact, la sous-algĂšbre C(X) de ââ(X) constituĂ©e des fonctions continues sur X (ces fonctions sont nĂ©cessairement bornĂ©es).
- Plus gĂ©nĂ©ralement, si X est un espace localement compact, la sous-algĂšbre Cb(X) = C(ÎČX) de ââ(X) constituĂ©e des fonctions continues et bornĂ©es sur X, et la sous-algĂšbre C0(X) de Cb(X) constituĂ©e des fonctions continues et nulles Ă l'infini. Si X est compact â et seulement dans ce cas â C0(X) est unitaire car Ă©gale Ă Cb(X).
- Si G est un groupe localement compact et ÎŒ sa mesure de Haar, l'espace L1(G) des fonctions ÎŒ-intĂ©grables (modulo l'Ă©galitĂ© ÎŒ-presque partout), muni du produit de convolution xây(g) = â« x(h) y(hâ1g) dÎŒ(h). Elle est commutative si et seulement si G est abĂ©lien, et elle est unitaire si et seulement si G est discret.
Propriétés des algÚbres de Banach unitaires
Soit A une algÚbre de Banach unitaire, d'élément unité e.
Propriétés de l'application de passage à l'inverse
Comme dans tout anneau (et une algĂšbre associative unitaire en est en particulier un), les Ă©lĂ©ments inversibles de A forment un groupe. Tout Ă©lĂ©ment e â u de la boule ouverte de centre e et de rayon 1 en fait partie, et son inverse peut ĂȘtre exprimĂ© comme somme de la sĂ©rie gĂ©omĂ©trique de raison u, absolument convergente.
Il en résulte que le groupe G des éléments inversibles d'une algÚbre de Banach unitaire est un ouvert[3].
L'application de passage Ă l'inverse est un homĂ©omorphisme de G sur G, ce qui confĂšre Ă G une structure de groupe topologique. Il s'agit mĂȘme[3] d'une application diffĂ©rentiable (infiniment, par rĂ©currence), la diffĂ©rentielle au point x Ă©tant donnĂ©e par :
L'hypothĂšse de complĂ©tude est essentielle et ces rĂ©sultats tombent en dĂ©faut dans les algĂšbres normĂ©es non complĂštes. Par exemple considĂ©rons l'algĂšbre â[X] des polynĂŽmes Ă coefficients rĂ©els, munie de n'importe quelle norme d'algĂšbre. Le groupe des inversibles est â* qui est inclus dans le sous-espace vectoriel strict â de â[X] et est donc d'intĂ©rieur vide ; il n'est donc pas ouvert. Ceci montre en particulier que â[X] ne peut ĂȘtre muni d'une structure de â-algĂšbre normĂ©e complĂšte. D'ailleurs, d'aprĂšs le thĂ©orĂšme de Baire, un espace vectoriel normĂ© de dimension dĂ©nombrable n'est jamais complet : voir le § « ComplĂ©tude » de l'article sur les espaces vectoriels normĂ©s.
Idéaux et algÚbre quotient
Les idéaux maximaux d'une algÚbre de Banach unitaire sont fermés.
Une algÚbre de Banach unitaire complexe (non commutative a priori) dont tout élément non nul est inversible est isométriquement isomorphe au corps des nombres complexes (théorÚme de Gelfand-Mazur) ; en particulier, les idéaux maximaux des algÚbres de Banach unitaires complexes sont des hyperplans fermés.
Notes
- Dans le tome II de ses ĂlĂ©ments d'analyse, Jean DieudonnĂ© impose l'existence d'un Ă©lĂ©ment unitĂ© dans la dĂ©finition d'une algĂšbre de Banach. Au contraire, N. Bourbaki ne le suppose pas.
- De là découle la théorie des représentations des algÚbres de Banach.
- Voir par exemple cet .
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
(en) Alphons Willem Michiel Graven, Banach Modules over Banach Algebras, Meppel, Krips Repro, (lire en ligne)