Warwickite
La warwickite est le minéral titano-borate de magnésium et accessoirement de fer, corps composé de formule chimique (Mg,Fe)3Ti(O, BO3)2 parfois écrite sous une forme de borate en incluant les impuretés métalliques principales Mg (Ti, FeIII, Cr, Al)(BO3)O[4]. Ce corps naturel rare apparaît le plus souvent en agrégats prismatiques, transparents en petits grains ou en lames fines, ou subtranslucides de couleur brun, noir, d'éclat subvitreux à perlé.
Warwickite Catégorie VI : borates[1] | |
Effilades brunes de Warwickite, mine de Nuestra Señora del Carmen, La Celia, Jumilla, Province de Murcie, Espagne | |
Général | |
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Classe de Strunz | 06.AB.20
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Classe de Dana | 24.2.2.1
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Formule chimique | MgTi0.6Fe(III)0.3Al0.1(BO3)O |
Identification | |
Masse formulaire[2] | 147,285 ± 0,01 uma Al 1,83 %, B 7,34 %, Fe 11,37 %, Mg 16,5 %, O 43,45 %, Ti 19,5 %, |
Couleur | gris à brun noir, gris noir à noir, brun à jaune sombre, brun clair à brun rougeâtre... |
Classe cristalline et groupe d'espace | dipyramidale, groupe de point mmm (2/m 2/m 2/m) ; groupe d'espace Pnam |
Système cristallin | orthorhombique |
Réseau de Bravais | orthorhombique a = 9,197 Å ; b = 9,358 Å ; c = 3,085 Å Z = 4 V = 265,51 Å3 avec densité calculée 3,6 |
Clivage | parfait sur (100), avec reflet légèrement métallique ou parfois vraie teinte cuivrée, sur le clivage |
Cassure | irrégulière et esquilleuse (très fragile) |
Habitus | cristaux prismatiques minces, à terminaisons arrondies, cristaux allongés jusqu'à 5 mm, petits grains cristallins parfois transparents, agrégats prismatiques plus ou moins fins et allongés, le plus souvent translucides, petites masses parfois ternes (état d'altération) parfois soyeuses (aspect fibreux), petits grains ou nodules dispersés dans des calcaires métamorphisés et autres roches ultramafiques des socles précambriens. |
Échelle de Mohs | 3 à 6 (le plus souvent entre 3 et 4) |
Trait | noir bleuâtre |
Éclat | sub-vitreux à sub-translucide, soyeux ou perlé à sub-métallique (clivage), parfois terne et mat en masse (transparent à translucide en lame mince, parfois opaque en couches épaisses) |
Propriétés optiques | |
Indice de réfraction | nα = 1.806 nβ = 1,809 nγ = 1,830 |
Pléochroïsme | visible : sur x = brun jaune, sur y = brun rougeâtre, sur z = brun cannelle |
Biréfringence | biaxial (+) δ = 0,024 |
Dispersion | 2 vz ~ forte |
Fluorescence ultraviolet | non fluorescent |
Transparence | en lame mince de l'ordre de 30 micromètres, brun rougeâtre (lumière transmise) |
Propriétés chimiques | |
Masse volumique | 3,34 Ă 3,36[3] g/cm3 |
Solubilité | insoluble dans l'eau, attaqué par l'acide sulfurique |
Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire. | |
Topotype, appellation et synonyme
La warwickite, décrite par Charles Upham Shepard (en) la première fois en 1838, tire son nom des calcaires cristallins précambriens observables au sud-ouest d'Edenville, sur la municipalité de Warwick, dans le comté d'Orange, dans l'état de New York[5]. Le minéral apparaît en petits cristaux prismatiques et rugueux, gris sombre à gris noir, au sein du marbre blanc de Franklin. Il peut être associé à la chondrodite.
Les roches précambriennes qui le contiennent sont en général des skarns, calcaires méta-somatisés ou transformés par métamorphisation.
Le terme enceladite rappelant le géant de la mythologie grecque Enkelados, aujourd'hui à vocation unique de synonyme désuet, est proposé à l'origine en 1846 pour tenter de décrire la gamme des variétés et autres aspects de ce minéral, selon le minéralogiste Thomas Sterry Hunt[6].
Des échantillons topotypes sont conservés à Paris, en France, au Muséum national d'histoire naturelle, ainsi qu'à Washington, D.C., aux États-Unis, au National Museum of Natural History, où les échantillons proviennent de l'ancien musée minéralogique de la Smithsonian Institution.
Cristallographie et cristallochimie
Ce sont parfois de fins cristaux prismatiques, bien formés et/ou à terminaisons arrondies. Les plans les plus fréquents sont {010}, {100}, {110}, {130}, {310}.
Ces prismes appartiennent au système cristallin orthorhombique. La structure précise de la warwickite n'a été élucidée qu'en 1950 par le cristallographe français Erwin Félix Lewy-Bertaut (pl)[7]. Elle s'applique à différents minéraux décrits par la formule B2O3 · Fe2O3 · 2M2O, où M correspond à l'ion métal divalent Mg, Fe(II), Co ou Ni dans ce cadre descriptif, la composition théorique de la warwickite extrêmement pure, sans trace de Fe(III), s'écrit B2O3 · TiO2 · 3MgO[8].
Ce minéral de formule élémentaire (Mg,Ti,Fe,Cr,Al)2O(BO3) fait partie des borates anhydres A2BO2[XO3] de la classification de Dana.
La yuanfuliite Mg(Fe3+,Al3+)O(BO3) et ce minéral font partie du groupe de la warwickite.
Propriétés physiques et chimiques avec critères de déterminations
Le minéral présente une dureté de Mohs de l'ordre de 3 à 5 et une densité de 3,36[9] - [10].
Le minéral se décompose facilement dans l'acide sulfurique.
Analyse
Voici quelques compositions observées :
- Mg1.5Ti0.5O(BO3) classique selon les tables minéralogiques de Strunz.
- MgTi0.6Fe(III)0.3Al0.1(BO3)O
- Mg1.1Fe(III)0.64Ti0.16Fe0.1Al0.1(BO3)O
- Mg(Mg,Fe,Ti,Al,Cr)O[BO3]
Gîtologie
Outre certains skarns et roches calcaires métamorphisées, la warwickite peut être présente dans les petites veines de lamproïte et de carbonatite associées aux premières comme c'est le cas à Jumilla, province de Murcie en Espagne. Les teneurs en oxyde chromique Cr2O3 peuvent au maximum atteindre 13 % en masse et même l'oxyde ferrique Fe2O3 dépasse parfois la moitié de l'assemblage minéral complexe[11].
Les structures rocheuses lamproïtiques s'expliquent par des laves porphyriques, la warwickite est présente avec le phlogopite, l'olivine, l'apatite et occasionnellement du clinopyroxène en phénocristaux dispersés dans la masse, partie prenante d'une même phase avec l'analcime ou la sanidine, la richtérite potassique, différents carbonates, la pseudobrookite, l'ilménite et la magnétite. Il n'est pas rare que la warwickite représente 10 % en masse des matières minérales de la veine.
Les roches précambriennes ultramafiques de la terre d'Inglefield au Groenland montrent en affleurement environ 5 % de la surface couverte de grains ou nodules de warwickite, minéral contenant en moyenne 9,7 % en masse d'alumine[12]. Les minéraux typiques de ce premier cortège métamorphique sont la forstérite, le pléonaste, le phlogopite, la magnétite et éventuellement la tourmaline. L'altération ultérieure de l'ensemble de ces minéraux donne une gamme variée de composés boratés, associée essentiellement à la magnétite.
Dans les calcaires cristallins de l'Ontario, par exemple dans le secteur de Bancroft ou du comté Hastings, la warwickite noirâtre apparaît avec du mica, de la dolomite, de la trémolite, de la szaibelyite, de la serpentine, de l'apatite, du spinelle vert foncé, de la sinhalite, de l'anatase, de la fluorite, de la chondrodite, du scapolite, de l'ilménite, de la marcassite, de la pyrrhotite, de la pyrite, du graphite et de la goethite.
En Corée du Nord, la warwickite serait incluse dans un marbre altéré par métasomatisme marqué par l'élément bore, elle est associée à la calcite, à la forstérite, au spinelle, à la ludwigite, à la clinohumite, à la pyrrhotite.
Minéraux associés : borates (szaibelyite, sinhalite, ludwigite, yuanfuliite), magnétite, hématite, graphite, spinelle, oxydes de titane complexes ou simples (Ilménite, anatase, brookite...), silicate de titane comme la titanite ou borosilicates comme la tourmaline, la dravite, mais aussi la calcite et la dolomite, la sabinaïte (carbonate de Ti de l'Ontario), le phlogopite, le diopside, la scapolite, la clinohumite, la fluorite, l'apatite, la chondrodite, la pyrite, la pyrrhotite, l'olivine, la forstérite ...
Gisements remarquables ou occurrences
- Allemagne
- Ilfeld, Nordhausen, Harz, Thuringe
- Australie
- Tasmanie
- Canada
- Herschel Township, comté Hastings, Ontario[13]
- États-Unis
- Comté de Sussex, New-Jersey
- Espagne
- carrière de La Aljorra, Carthagène, ou mine Notre Seigneuresse de Carmen, La Celia, Jumilla, en province de Murcie
- Japon
- mine Neichi ou Kamineichi, ville de Miyako, préfecture de Iwate, île Honshu
- Norvège
- Kvaefjord, Troms
- Russie
- Oblast de Cheliabyn, Oural
- Dépôt ferrifère de Tayozhnoye, 550 km au sud de Iakoutsk, et dépôt de borate-magnétite de la taïga de Sakha, Sibérie orientale
Usages
Références
- La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- à 20 °C
- La formule la plus simple sans fer, ni aluminium ni chrome est Mg(Mg0,5Ti0,5)[O|BO3]. on peut concevoir ce corps minéral comme un borate de magnésium, dans lequel une partie des ions magnésium est substitué par des ions titane.
- Shepard, American Journal of Science, Tome 34, 1838, p. 313-315 et tome 36, 1839, note p. 85.
- Hunt, American Journal of Science, Tome 2, 1846, p. 30 puis Tome 11, 1851, p. 352.
- Les travaux de structures cristallochimiques se sont poursuivis au début des années 1970, par exemple pour B2O3 · Fe2O3 · 2CoO avec la mise en évidence théorique de l'oxyborate de cobalt FeCoO(BO3) dans la revue "Materials Science Bulletin" en 1972 ou le Journal of solid state chemistry
- (en) « Warwickite », sur Webmineral
- (en) « Warwickite », sur Mindat
- S. Bigi, M.-F. Brigatti, S. Capedri, opus cité.
- Peter W. Uitterdijk Appel, "Al-rich warwickite from Inglefield Land, North-West Greenland", opus cité infra
- http://rruff.geo.arizona.edu/doclib/hom/warwickite.pdf Manuel de Minéralogie
Voir aussi
Bibliographie
- Peter W. Uitterdijk Appel, "Al-rich warwickite from Inglefield Land, North-West Greenland", Mineralogical Magazine, volume 61, , p. 693-698. article sur le site rruff
- Peter W. Uiterdijkt Appel, Simona Bigi, Maria Franca Brigatti, "Crystal structure and chemistry of yuanfuliite and its relationships with warwickite", European Journal of Mineralogy, Volume 11, Number 3, 1999, p. 483-492
- Simona Bigi, Maria-Franca Brigatti, Silvio Capedri, "Crystal chemistry of Fe and Cr-rich warwickit", American Mineralogist, volume 76, 1991, p. 1380-1388.
- P.B. Moore, T. Araki, American Mineralogist, Tome 59, année 1974, p. 985-1004
- Henri-Jean Schubnel, avec Jean-François Poullen, Jacques Skrok, Larousse des Minéraux, sous la coordination de Gérard Germain, Éditions Larousse, Paris, 1981, 364 p. (ISBN 2-03-518201-8). Entrée Warwickite p. 343.
- Y. Takéuchi, T. Watanabé, T. Ito, "The crystal structures of warwickite, ludwigite and pinakiolite", Acta Cristallographica, Tome 3, 1950, p. 98-107.