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Razzia

Une razzia ou rezzou est une attaque, un raid, une incursion rapide en territoire ennemi, dans le but de prendre du butin[1]. Le mot provient de l’arabe ghazi غزي (se prononçant razi), terme qui signifie envahisseur, conquérant, ou ghezwa غزوة (se prononçant rezoua), terme qui signifie raid[2], invasion ou incursion[3].

« Maures pillant un village mauritanien » (gravure de 1814)

Historiquement la pratique, très ancienne, a existé partout dans le monde.

Beaucoup de peuples qui ont historiquement pratiqué les razzias pratiquaient le nomadisme et étaient semi-sédentaires[4], mais ce n'est pas une règle.

Les razzias consistent souvent en un pillage de biens, et sont parfois accompagnées de massacres sur les hommes, viols et enlèvements de femmes et enlèvements d'enfants. Certaines victimes devenaient des esclaves sexuels, les plus âgées et les enfants, des servants.

Le type de razzia effectué diffère selon les groupes qui la pratiquent ou l'ont pratiquée.

Anthropologie

Jimena Paz Obregón Iturra avance que lors des razzias espagnoles ou indiennes, un des buts était de s'emparer des "pièces" ; les proies ainsi capturées n'étaient pas seulement des mâles, comme sur les champs de bataille, mais aussi des femmes et des enfants[5].

Liste historique de peuples ayant pratiqué les razzias

  • Des razzias étaient pratiquées durant la traite arabe et la traite orientale ;
  • La première incursion arabo-musulmane en péninsule Ibérique, menée par les Omeyyades, fut de ce type. Cette opération de reconnaissance a donné lieu à des plans d’invasion beaucoup plus élaborés et qui mèneront à la conquête musulmane de l'Hispanie ;
  • Les Ottomans ont effectué des razzias dans l'ensemble Balkans[6] - [7];
  • Durant l'époque coloniale en Afrique subsaharienne, des razzias étaient effectuées par les colons européens au sein de tribus afin de s'approvisionner en esclaves pour le commerce triangulaire ;
  • Les Européens razziaient les peuples amérindiens après la découverte de l'Amérique[8]. Ces razzias consistaient entre autres en des vols de bétail, mais s'accompagnaient aussi de massacres[9] ;
  • Les nazis effectuaient des razzias, aussi appelées raids nazis[10] ;
  • Au Maghreb, les colons européens effectuaient parfois des razzias dans des villages :
    • Les Portugais en pays Abda et Doukkala[11] au Maroc ;
    • Les Normands, les Italiens et les Espagnols sur les Kerkeniens, insulaires des îles de Kerkennah en Tunisie[12] ;
    • Les Français effectuaient des razzias dans les régions berbérophones du Maghreb. Des documents coloniaux admettent que c'était une technique prise sur une tactique des Turcs, utilisée afin de faire abdiquer les Berbères, dont l'esprit de résistants trop attachés à leur indépendance les rendait difficiles à soumettre contrairement aux Maures[13] - [14];
  • Au Maghreb, les Turcs utilisaient la tactique des razzias sur les Berbères en raison de leur insoumission notoire et ravageaient leurs territoires afin de les soumettre[13] ; les Turcs ont notamment effectué des razzias à la frontière de la Tunisie et de la Tripolitaine[15] ;
  • En Australie, en Tasmanie et aux îles Fidji, des administrateurs anglais pratiquaient des battues et razzias jusqu'aux confins du désert poursuivant les aborigènes par des patrouilles destinées à détruire toute trace d'autochtones[16] ;
  • En Méditerranée, du VIIIe au XIXe siècle, les raids maritimes des Arabes[17], Sarrasins, Barbaresques, Ottomans, et du XIe au XIIe siècle, ceux des Normands[18] relèvent également de la razzia : ils ont contribué au dépeuplement d’un grand nombre d’îles de petite et moyenne taille (notamment en mer Égée) et aux échanges génétiques en raison de l’esclavagisme pratiqué par les assaillants ;
  • Les pirates et corsaires européens pratiquaient des razzias en mer Méditerranée et dans l'Atlantique[19] ; parmi eux, les corsaires français et anglais[20], espagnols, portugais et italiens ; Albert Odouard notifie que mis à part les razzias espagnoles, eurent lieu des pillages de corsaires anglais, français ou portugais, lorsque ces puissances étaient en guerre avec l’Espagne, et que pendant trois siècles, Lanzarote et Fuerteventura ont constitué ainsi une véritable marche frontière entre le reste de l’archipel canarien et l’Afrique[21] - [22] ;
  • Au Sahara, à l’époque où les Touaregs la pratiquaient, jusqu’au début du XXe siècle, elle prenait le nom de rezzou, le terme touareg la désignant est ahhaɣ (ahhagh), du verbe aheɣ (ahegh), « prendre par la force, piller » ;
  • Les razzias des Espagnols :
    • Sur les Guanches autochtones des îles Canaries[23], qui furent presque tous exterminés ;
    • Sur les Rifains[24]. Ces razzias ont contribué avec la prise de Penon de Velez, et la prise de Melilla, à entrainer un mouvement maraboutique et mystique puissant qui aura son rôle dans la course et qui contribuera au peuplement de la région. Le Rif sera aussi une terre d'exil pour les exilés après les razzias des Espagnols[24].
    • Le butin provenant des razzias espagnoles était écoulé par les Juifs, négociants et contrôleurs de l'approvisionnement de la garnison, ayant servi quelquefois d'intermédiaires dans le commerce des esclaves entre les Chrétiens et les Musulmans[25] ;
    • En Afrique du Nord, les razzias espagnoles ont fini par déclencher des représailles, siècles jalonnés par des expéditions punitives arabes (1569-1571, 1586-1618). En 1586, les troupes d'Amurat pillent Teguise, capitale de Lanzarote dans l'archipel canarien, et capturent la femme du marquis. Entre 1593 et 1595, les Maures tiennent en permanence le nord-est de Fuerteventura. En 1618, Soliman investit le Jameo del Agua, un tunnel de lave qui servait de refuge, et s’empare de 800 personnes dont il échangea la vie contre du bétail. La dernière incursion arabe aura lieu à Jandia en 1779[26] ;
    • De nombreuses expéditions espagnoles considérées comme des actes de souveraineté d'un genre spécifique ont été effectuées sur la côte marocaine et le Sahara occidental voisins des îles Canaries. L'objet de ces razzias était de maintenir l'activité économique des îles Canaries fondée sur le système esclavagiste[27] ;
  • Les razzias arabes sur les aborigènes des Canaries[28] - [29] dans l'Atlantique, bien que leur impact ait été moindre que les razzias espagnoles sur les aborigènes canariens.
  • Les razzias arabes sur les Yézidis [30], notamment les razzias des tribus Shammar venant des plaines en particulier qui leur firent subir des pertes importantes[31] ;
  • Les razzias kurdes :
    • Dans de nombreux villages du Kurdistan tel que relevé par l'archevêque de Canterbury, Frederick Temple[32].
    • Sur les Assyro-Chaldéens durant des siècles[33], notamment dans la Ourmia ;
    • Sur les Arméniens[34] ; des documents de la fin du 19e siècle notifient que les Kurdes semaient la terreur dans des villages arméniens, et des mises-à-sac de nombreux villages , entre autres Khaguev, Kharkhotz, Anabad, Norchen, Eghontz, Tarountz, Prountz, Vérin-Karassou, Nerkin-Karassou, Hégou, Mantenz, Nam, Brochentz, Khadzous, Gargar, Spaguert, Gadig, Gardjgan, Dosp[35] ;
    • Sur les Yézidis[30], dont la religion diffère de celle du reste des Kurdes ;
  • Les Kasrouanites (Alaouites, Druzes, Métualies) s'entre-razziaient[36] ;
  • Les Druzes :
  • Les Bédouins ; ces derniers ont ont assuré leur existence à travers les siècles en menant des razzias contre les fermiers des oasis ou en leur faisant payer leur protection[38] ;
  • En Afghanistan :
    • Les Baloutches pratiquaient les razzias et tuaient souvent tous ceux qu'ils faisaient prisonniers[39]. Pour mettre fin aux razzias baloutches dans la province de Kerman, le shah perse décida de soumettre ces tribus[40]. Sous le règne de Nochirwan, pour punir les Baloutches de leurs razzias, le souverain en fit de grands massacres. Ils se tinrent alors tranquilles au moins pendant une génération, puis reprirent leurs habitudes[41] ;
    • Les nomades pachtounes cessé d'être mêlés à des razzias ou toutes sortes de conquêtes territoriales, le plus souvent en dehors des frontières actuelles de l'Afghanistan[42]. Les tribus pachtounes ont depuis des millénaires tracé dans l'espace géographique des lignes de migration et des itinéraires de razzia (ou de conquête) qui ont toujours fait fi des frontières et des États[43] ;
  • En Inde, des razzias avec captures d'individus accompagnées de réduction en esclavage étaient pratiquées, comme on peut le lire dans la Buddhist India[44];
  • Les Hongrois infligeaient des razzias aux Slaves de la mer noire et ceux du plateau transylvain, puis vendaient les captifs à des marchands grecs dans un port qui serait celui de l'ancienne Carcina. Ils se lançaient en pillards jusque dans le bas Danube, le long des Carpathes, et jusque dans l'empire des Carlovingiens[45] ;
  • Les Romains effectuaient des razzias régulières[46] ;
  • Les Byzantins effectuaient des razzias[47] ;
  • Les Germaniques effectuaient des razzias, notamment sur les Gréco-Romains[48] ;
  • Les Celtes pratiquaient aussi les razzias. En Europe celtique, elles l'étaient notamment en Irlande (voir le mythe Táin Bó Cúailnge) ;
  • Les Scandinaves :
  • Les peuples turciques[51] et les Mongols[52] effectuaient des razzias sur les peuples alentour et lors de leurs conquêtes :
    • Les Khazars : au sein des peuples turciques on connaît notamment les razzias des khazars[53]. Les armées khazares firent maintes razzias en Géorgie et en Arménie et pénétrèrent dans les domaines du califat jusqu'à Mossoul. Selon l'archéologue soviétique M.I. Artamonov : «Jusqu'au IXe siècle la suprématie khazare fut sans rivale dans les régions au nord de la mer Noire, dans la steppe avoisinante et dans les zones forestières du Dniepr[54]. On note également le « Souvenir de la terreur que les raids khazars inspiraient aux Arabes, les musulmans appellent encore la Caspienne, mer aussi changeante que les nomades, qui baigne les steppes de leur domaine, Bahr-ul-Khazar, la mer des Khazars»[55] ;
  • Les Illyriens effectuaient des expéditions de razzias dans lesquelles utilisaient les lemboi, navires rapides transportant une cinquantaine d'hommes[56]. Leurs razzias furent l'occasions de guerres acharnées[57]. Certains prétendirent que les razzias par des tribus barbares avaient été ordonnées par Julien[58] ;
  • Les Perses effectuaient des razzias, et en l'an 600 l'Asie mineure est dévastée par les razzias perses, à tel point que sa population urbaine fut en baisse[59]. Des razzias étaient aussi menées sur les contrées slaves[60] ;
  • Les pirates slaves ont effectué des razzias sur sur les côtes scandinaves au cours de la première partie du XIIe siècle, mais également sur leurs voisins slaves[61] ;
  • Les Monténégriens pratiquaient dans les Balkans des razzias sur les Bouches[62], les Musulmans et les fonctionnaires turcs[63] ;
  • Les autochtones montagnards de l'Aurès, guidés par leurs chefs, avaient effectué des razzias contre les Byzantins dans les villes coloniales romaines, pillant et déstruisant les villes de Lambèse, Diana Veteranorum, Thamugadi et Bagai[64] ;
  • Les Égyptiens anciens effectuaient des razzias sur les Libyens, dans les territoires de la Libye antique et de la partie occidentale du Nil[65] - [66]. Des captifs et du bétail étaient récupérés par les Égyptiens[66]. Ces razzias se seraient répétées périodiquement pendant deux millénaires ;
  • Selon l'Évangile, les Philistins faisaient des razzias dans les villes de Séphélah et du Négeb de Juda[67], puis vendaient les razziés aux Phéniciens, qui les revendaient aux Grecs ioniens[68].
  • Selon la Bible, les Égyptiens opérèrent des razzias et des pillages au Levant, en Syrie et en Palestine, et les Hébreux faisaient partie des populations déplacées[69].
  • Selon la Genèse, les Hébreux effectuaient des razzias lors desquelles ils tuaient tous les hommes et se partageait les femmes vierges, « Ne laissez la vie qu'aux petites filles qui n'ont pas partagée la couche d'un homme, et qu'elles soient à vous » (Les Nombres 31, La Genèse)[70] ;
  • Chez les Afar, les clans les plus riches possédaient des chevaux qui servaient aux razzias[71] ;
  • Les Arabes d'Arabie effectuaient des razzias en Éthiopie[72] ;
  • Les Garamantes effectuaient des razzias sur les territoires subsahariens, et sont connus des historiens berbérisants pour les razzias faites au moyen de chars attelés à quatre chevaux[73], scènes notamment représentées sur des peintures rupestres paléo-berbères en Libye ;
  • Les Garamantes et les Gétules effectuaient des razzias contre les territoires impériaux des provinces nord-africaines l'empire romain[74] ;
  • Les Malgaches effectuaient des razzias sur les îles Comores[75] ;
  • Les royaumes soudanais tels que Ségou, Songhai, Bornu et Adamawa couvraient leurs importations d'armes, de chevaux, etc. par l'exportation d'esclaves obtenus lors de razzias contre les païens. Certains de ces royaumes avaient des quartiers païens réservés à cet effet[76] ;
  • Les razzias des Amazones du Dahomey, une armée de femmes de l'ethnie Fon, étaient effectuées dans le but de se procurer des esclaves[77]. Cela leur permettait aussi de recruter des jeunes filles et femmes sans avoir besoin de les élever[78] ;
  • Dans la région de la Cafrerie en Afrique australe, les Cafres, les Zoulous[79] et les tribus voisines étaient souvent impliquées dans des conflits de razzias, entre autres de bétail ou d'esclaves[80]. L'expansion bantoue dans le Sud du continent, remplaçant progressivement les autochtones du grand groupe ethnique des Khoisan (Khoïkhoï et San), s'est aussi accompagnée de razzias ;
  • Les Polynésiens et les Micronésiens étaient parfois impliqués dans des conflits liés à l'anthropophagie qu'ils pratiquaient et dans lesquels des razzias, mais aussi des guerres civiles, des massacres et des engraissements d'esclaves avaient lieu[81] ;
  • Les Coinmen de Patagonie pratiquaient des razzias aux dépens de la tribu des Tékinikas[82] ;
  • Les Aztèques, à Mexico et dans tout l'empire aztèque, effectuaient la xoxiyaoyotl ou guerre fleurie : toute la nation prenait les armes; et sous quelque vain prétexte, les peuples de chaque province commençaient à faire des incursions sur leurs voisins pour des razzias destinées à ramenées le plus de captifs possible[83].  

Notes et références

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  3. « Arabdict », sur arabdict.com (consulté le ).
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  14. Dans les documents anciens Kabyles a le sens synonyme de Berbères, et Maures a le sens de Maghrébins arabophones citadins
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  31. Pierre-Jean Luizard, « B. - Majorité arabe chiite et culture de la division », dans La formation de l’Irak contemporain : Le rôle politique des ulémas chiites à la fin de la domination ottomane et au moment de la création de l’état irakien, CNRS Éditions, coll. « Hors collection », (ISBN 978-2-271-07860-5, lire en ligne), p. 34–61
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Bibliographie

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

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