Accueil🇫🇷Chercher

Polémique sur l'abattage rituel en France

L'abattage rituel musulman et juif en France fait l'objet d'une polémique. Les dérogations à la loi commune pour que l'abattage des animaux de boucherie puisse être conforme aux rites religieux, musulman (dans ce cas on parle de viande halal) ou juif (dans ce cas on parle de viande cachère) ont donné lieu au début des années 2010, en France, à de nombreuses polémiques. La principale dérogation consiste en la possibilité d'égorger l'animal encore conscient alors que le droit commun exige un étourdissement préalable. Les associations de protection des animaux ont toujours protesté contre cette pratique arguant du fait qu'elle entraîne une souffrance animale supplémentaire. Cependant le débat est resté relativement confidentiel, les filières de la viande et les communautés religieuses voyant dans cette discrétion le souci de préserver des intérêts économiques.

C'est en 2012 en France que ces débats sont arrivés sur le devant de la scène médiatique puis politique. Il y eut tout d'abord une enquête du magazine de France 2 Envoyé spécial sur les abattoirs français, dont une partie était consacrée à l'abattage rituel. Cette enquête a permis à Marine Le Pen, en pleine campagne pour la présidentielle, d'ajouter une critique supplémentaire à son thème principal de la progression de l'islam en France. Ses propos ont ensuite été largement commentés par l'ensemble de la classe politique française. Puis le débat s'est étendu à d'autres pays, notamment le Canada dans la province du Québec. Le débat s'est apaisé au bout d'un mois et le gouvernement s'est chargé d'étudier plus à fond cette question au travers notamment de projets de lois.

Situation en Europe

Obligations légales pour l'abattage rituel en Europe :
  • Étourdissement non obligatoire
  • Étourdissement post-Ă©gorgement obligatoire
  • Étourdissement simultanĂ© obligatoire
  • Étourdissement prĂ©-Ă©gorgement obligatoire
  • Abattage rituel interdit
  • Pas de donnĂ©es

Au début du XXIe siècle, sous la pression, notamment, des associations de protection des animaux, des pays européens renforce leur législation limitant l'abattage sans étourdissement. Certains pays l'interdisent purement et simplement. D'autres exigent que les consommateurs soient informés du mode d'abattage par un étiquetage spécifique. Les États européens se basent sur la Directive 93/119/CE et la décision 88/306 du Conseil de l'Europe[1]. Dans la pratique, la situation est différente selon les pays et évolue dans le temps. La Norvège (depuis 1930), la Suède (depuis 1938), l’Islande, la Suisse (depuis 1893[2]), la Grèce, le Luxembourg et six provinces d’Autriche n’autorisent aucune dérogation. La production de viande halal et casher est donc interdite dans ces pays. En Suisse, une petite quantité de viande certifiée halal est toutefois produite à Clarens : la méthode d'abattage respecte la loi suisse, mais l'imam de la mosquée de Lausanne, Mouwafac El Rifaï, tolère que l'animal soit assommé électriquement quelques secondes avant égorgement, car sans égorgement l'animal reprend connaissance après quelques minutes[3]. En Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas et au Danemark, des exemptions existent, mais elles sont remises en cause. En France[4] et en Belgique, les associations de protection animale, comme l'Œuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (OABA), tentent de sensibiliser l’opinion, jusqu’ici sans succès. En Espagne, en Irlande et en Italie, des dérogations existent et n'ont pas fait l'objet de débats publics[5]. La Pologne autorise l'abattage sans étourdissement et a confirmé cette décision en 2012[6]. Aux Pays-Bas, en février 2016, l'étiquetage devient obligatoire pour réserver la viande abattue rituellement aux seuls consommateurs religieux[7] - [8].

Si l'abattage sans étourdissement est généralement interdit, l'importation de viande produite conformément aux rituels halal et casher est souvent permise. En Suisse, l'importation de viande casher ou halal est réservée aux membres des communautés juives et musulmanes[9]. Le Conseil fédéral décide du contingent d'importation accordée aux viandes casher et halal[10].

Le projet DIALREL

Pour tenter de faire converger les différentes positions : religieuses, vétérinaires, amis des animaux, un groupe de travail européen est mis en place en 2006. Il s'agit du projet DIALREL (« Dialogue sur les abattages religieux »)[11] créé par la Commission européenne. La représentante française est la sociologue Florence Bergeaud-Blackler.

Le projet conclut au fait que l'absence d'étourdissement pre mortem accentue les souffrances animales. Les viandes cachères ne sont donc pas conformes à la réglementation européenne[12]. Avant de trouver la solution de mise en conformité avec cette réglementation, le 16 juin 2010 le Parlement européen vote un amendement dans le projet de réglementation sur l'étiquetage[13].

Historique en France

La première loi évoquant l'abattage rituel date de 1964. Seules quelques préfectures, comme Paris, avaient émis des règlements spécifiques. Le décret du 16 avril 1964 définit l’abattage rituel[14]. Le décret du 23 septembre 1970[15] spécifie que l'abattage devra être pratiqué par un « sacrificateur » habilité par un organisme religieux lui-même. Trois organismes ont été à ce jour agréés, liés respectivement à la Grande mosquée de Paris, la Mosquée d'Évry et la Grande mosquée de Lyon[16]. Mais ces organismes certificateurs présentent de nombreux dysfonctionnements, et celui de la mosquée d’Evry n’emploie aucun contrôleur[17].

Situation en France avant la polémique

Une réglementation spécifique est applicable pour l'abattage rituel[18].

Le gouvernement français, qui accepte l'argumentation des autorités juives françaises qui considèrent que cet étiquetage mettrait à mal la filière cachère française, se mobilise pour freiner ces initiatives. Le 6 septembre 2010, le ministre de l’Intérieur (chargé des cultes), Brice Hortefeux, déclare à la synagogue de la Victoire à Paris : « Aujourd'hui, alors qu’un vote au Parlement européen pourrait imposer un étiquetage discriminant pour l'abattage rituel, nous restons particulièrement vigilants. Vous pouvez compter sur ma mobilisation et celle des députés français au Parlement européen pour que le projet n’aboutisse pas »[19].

le 25 octobre 2011 paraît un Règlement européen d'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (R1169-2011) expurgé, sous la pression du gouvernement français, de toute obligation d'étiquetage des viandes en fonction du mode d'abattage[19].

Françoise Hostalier, députée UMP du Nord, fait plusieurs propositions de loi refusées par le ministre de l'agriculture.

La filière viande est aussi contre cet étiquetage. Elle a :

  • peur que des consommateurs se dĂ©tournent des viandes provenant d'animaux non Ă©tourdis ;
  • un intĂ©rĂŞt Ă©conomique Ă  uniformiser l'ensemble de l'abattage vers cet abattage rituel[20] - [21]. La filière a en effet dĂ©veloppĂ© d'elle-mĂŞme l'abattage rituel, constatant que celui-ci Ă©tait plus simple en supprimant l'Ă©tape d'Ă©tourdissement et donc moins onĂ©reux que l'abattage traditionnel. Elle a ainsi profitĂ© de la dĂ©rogation exceptionnelle qui autorise l'abattage sans Ă©tourdissement pour les juifs et musulmans pour Ă©tendre l'utilisation de cette dĂ©rogation Ă  une plus grande Ă©chelle.

Les quatre grands groupes interprofessionnels (Syndicat national de l'industrie des viandes, Interbev, Fédération nationale des exploitants des abattoirs publics, Coop de France), qui représentent la majorité des abattoirs, ont jusqu'à présent pris position contre cet étiquetage[22]. Frédéric Freund, directeur de l’Œuvre d’assistance aux bêtes d'abattoir, pense au contraire qu'« ils craignent les associations de consommateurs et de protection des animaux ! ». Le risque de stigmatisation est aussi mis en avant par les représentants de la communauté juive[23].

Enquête d'Envoyé spécial

Une enquête réalisée par Camicas Productions et diffusée lors du magazine Envoyé spécial du 16 février 2012 relance la polémique. Cette enquête traite des problèmes d'hygiène dans les abattoirs français mais une partie de l'enquête se focalise plus particulièrement sur deux problèmes liés à l'abattage rituel : elle avance notamment que le consommateur ignore le type d'abattage de la viande qu'il consomme et qu'il existe des risques sanitaires pour les viandes rituellement abattues et insuffisamment cuites. L'enquête porte sur l'abattage sans étourdissement. Cela concerne de façon indifférenciée l'abattage rituel musulman halal encore appelé Dhabiha ou l'abattage rituel juif casher encore appelé Shehita.

Absence d'informations explicites concernant le mode d'abattage

La traçabilité mise en place en France depuis la crise de la vache folle permet a priori de connaître le type d’abattage de la viande. Dans les grandes surfaces, la viande emballée porte une étiquette de traçabilité. Après la mention abattu figurent deux lettres. Si ces deux lettres sont « FR », cela signifie que l'abattage a eu lieu en France. Il y a ensuite une série de 8 à 11 chiffres appelée « code d’identification de l'abattoir ». Les deux premiers chiffres représentent le numéro du département. Le reste du code permet de trouver le nom de l'abattoir grâce à ce tableau de correspondance fourni par le ministère de l'agriculture et de la pêche. Certains de ces abattoirs déclarent officiellement ne pratiquer que de l'abattage rituel, c'est le cas de tous les abattoirs de la région parisienne. D'autres ne donnent pas facilement cette information. Dominique Langlois, représentant de l'Intersyndicale de la viande bovine, reconnaît le 20 février 2012 qu'il ne peut pas en donner l'exhaustivité. Les chiffres, suivant les enquêtes, oscillent entre 10 %[24], 32 % de la viande bovine abattue en France[25] (ces chiffres sont plus importants pour les ovins). François Hallépée, directeur de la maison de l'élevage d'Île-de-France, confirme que les cinq abattoirs de la région Île-de-France ne pratiquent plus que de l'abattage rituel. Les abattoirs sont réticents à donner cette information de peur de voir une partie de leurs clients fuir. De plus, faire un mixte abattage traditionnel - rituel est un non-sens économique. Florence Bergeaud explique que les responsables religieux exigent un nettoyage complet approfondi de toute l'installation à chaque changement. Pourtant cette information est obligatoire dans toute l'Union européenne depuis 2011. Face à l'inquiétude des autorités religieuses, la France a longtemps rechigné à la mettre en application. Le décret est néanmoins publié au Journal Officiel le 29 décembre 2011. Là encore, les abattoirs traînent des pieds comme le constatent les reporters d’Envoyé spécial dans l’enquête diffusée le 16 février. L'Oaba fournit une liste d'abattoirs qui ne font pas d'abattage rituel[26]. Le Point reprend des informations gouvernementales triant les abattoirs[27].

Risque de contamination bactérienne

  • Gilbert Mouthon, professeur Ă  l'Ă©cole vĂ©tĂ©rinaire et expert auprès des tribunaux, estime que l'abattage rituel peut parfois favoriser la propagation des bactĂ©ries E coli. En effet, ces bactĂ©ries sont très toxiques pour l'homme et elles entraĂ®nent 300 complications graves par an. Elles sont situĂ©es dans l'estomac des bovins. Des techniques simples permettent d'Ă©viter qu'elles ne souillent la viande lors de la saignĂ©e. Il suffit de mettre un Ă©lastique pour ligaturer l'Ĺ“sophage Ă  ce moment. Cela est fait dans le cas de l'abattage conventionnel. Cela est impossible dans le cas de l'abattage rituel, dans 15 Ă  20 % des cas le contenu de l'estomac se dĂ©verse sur la partie appelĂ©e collier de la viande[28]. Il donne un conseil aux amateurs de viande : la faire bien cuire. Pour les consommateurs juifs et musulmans qui Ă©taient les seuls dans le passĂ© Ă  consommer ce type de viande, cela a rarement entraĂ®nĂ© des problèmes sanitaires. En effet dans ces deux cultures, il est de coutume de cuire longuement toutes les viandes. Le collier, notamment, sert dans les ragouts cuits pendant de longues heures or E Coli est complĂ©ment dĂ©truit par la cuisson.
  • Avant et après l’enquĂŞte d'EnvoyĂ© spĂ©cial, plusieurs scientifiques soulignent les risques sanitaires induits par la pratique de l'abattage rituel sans Ă©tourdissement prĂ©alable.
  1. Pascale Dunoyer, chef du bureau des établissements français d'abattage et de découpe à la Direction générale de l'alimentation, indique dans le Bulletin de l'Académie vétérinaire de France que ce mode d'abattage « peut avoir des conséquences en termes de salubrité et de sécurité des carcasses[29]. » Elle explique que « le tranchage de la trachée et de l'œsophage (…) peut provoquer le déversement du contenu gastrique (voire pulmonaire) sur les viandes de têtes, de gorge et de poitrine[29]. » . Elle signale aussi que la pratique de la betiqua (inspection dans le rituel casher), lorsqu'elle est réalisée sur des carcasses au sol, peut entraîner la souillure de la peau de l'animal.
  2. Jean-Louis Thillier, expert en sécurité sanitaire, affirme que l'abattage sans étourdissement a pour conséquence une augmentation des contaminations par la bactérie intestinale Escherichia coli car « le contenu de l'œsophage et des intestins des animaux risque de souiller la viande, particulièrement les quartiers avant qui finissent dans les steaks hachés[30]. »
  3. Le Dr Olivier Boscassi, secrétaire général de l'ordre des vétérinaires du Limousin confirme le risque[31]
  4. Le vétérinaire Michel Courat, membre de Eurogroup for Animals (une organisation européenne œuvrant pour le bien-être animal), note que lors de la section de la trachée et de l'œsophage, il y a un « reflux du contenu des estomacs qui souille la coupe de la viande », notamment chez les ovins[32]. Il soutient que le « parage » qui consiste à retirer avec un couteau la partie souillée de la viande « a tendance » à ne pas être effectué parce qu'il engendre une importante perte de profit et qu'il est souvent remplacé par un jet d'eau qui crée un « brouillard très chargé en bactéries » et peut contaminer l'ensemble de la carcasse[32]. S'il assure que les personnes consommant de la viande provenant d'un abattage sans étourdissement ont beaucoup plus de risques d'être contaminées que les autres, il indique toutefois que « si la viande est bien cuite », le risque est négligeable[32].
  • Après cette enquĂŞte d'envoyĂ© spĂ©cial, le 11 mars 2012, l'Ă©mission « La vĂ©ritĂ© si je mange » de France 5 reprend les dangers sanitaires liĂ©s Ă  l'E. coli du mode d'abattage sans Ă©tourdissement halal/casher. Le toxicologue Jean Louis Thiallier cite le chiffre de 100 enfants par an mourant de cette bactĂ©rie en France, sans pour autant que le lien entre ces morts et l'abattage rituel soit formellement Ă©tabli[33]. Il existe des pics Ă©pidĂ©miques, en France notamment[34], le toxicologue en attribue une part Ă  l’abattage rituel. Le grand rabbin, Bruno Fiszon, spĂ©cialiste de ces questions au Consistoire, estime que « nous avons des donnĂ©es scientifiques qui contredisent cela. Nous devons les mettre en avant, car la question sanitaire est encore plus redoutable que celle du bien-ĂŞtre animal. LĂ -dessus, nous pouvons rĂ©pondre, car les Ă©tudes montrent qu’il n’y a pas de diffĂ©rence bactĂ©riologique entre des carcasses venant d’abattage rituel ou d’abattage traditionnel. C’est un fantasme, qu’il va falloir combattre[35] ». Yves-Marie Le Bourdonnec, surnommĂ© « le boucher des stars », prĂ©conise l'abattage rituel qu'il considère meilleur pour le bien-ĂŞtre des animaux. Il minimise le risque sanitaire des bactĂ©ries en provenance de l'intestin de l'animal car « normalement l'animal est mis Ă  jeun 24 h avant son abattage »[36] - [37].

Conséquence sanitaire

Pour Michel Courat, les problèmes signalés dans les deux paragraphes précédents seraient mineurs.

  • D’une part, il n'y aurait aucun problème pour un non musulman ou un non juif Ă  consommer de la viande abattue rituellement sauf pour les personnes soucieuses de la protection animale qui pensent que ce mode d'abattage entraĂ®ne une souffrance animale supplĂ©mentaire.
  • D'autre part, les bactĂ©ries E coli sont dĂ©truites par une cuisson longue ou Ă  haute tempĂ©rature des viandes, si celles-ci sont cuites Ă  cĹ“ur, la tempĂ©rature atteignant au moins 70 °C en toute part[38] - [39].
  • En revanche, comme le type d'abattage se gĂ©nĂ©ralise en France, certains consommateurs risquent d'utiliser de la viande Ă  collier halal ou casher pour prĂ©parer des steaks hachĂ©s, des steaks tartares, donc crus. Le risque d’une contamination grave par E coli est, dans ce cas, rĂ©el. Le ministère a pris cette question au sĂ©rieux, dans un rapport de 2007 il souligne que ce problème est accru dans les abattoirs pratiquant des abattages rituels[40]. Ce qui inquiète les professionnels de l'abattage, et qui a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© par le reportage d'EnvoyĂ© spĂ©cial, La viande dans tous ses Ă©tats, ce sont les règles d'hygiène que ne respecteraient pas le rite halal. En effet, pour Jean-Baptiste Gallo, le halal prĂ©sente « un risque bactĂ©riologique » car l'abattage rituel consiste Ă  trancher tout le cou de la bĂŞte, Ĺ“sophage compris, rendant alors possible la contamination de la viande par les matières prĂ©sentes dans le système digestif de l'animal, et pouvant contenir la bactĂ©rie Escherichia coli. Lors de l'abattage conventionnel, ce risque est Ă©vitĂ© car l'Ĺ“sophage est ligaturĂ©[41].
  • En attendant la mise en place de la traçabilitĂ© promise par Bruno Le Maire, les experts interrogĂ©s par EnvoyĂ© spĂ©cial sont unanimes et conseillent de ne plus consommer de viande hachĂ©e sans bien la cuire et dĂ©conseillent de manger des steaks tartares fabriquĂ©s avec de la viande abattue en France.

RĂ©action du CSA

  • Le 26 juin 2012 le CSA Ă©pingle France TĂ©lĂ©vision. Le CSA note notamment que « dans la mesure oĂą ce sujet pouvait prĂŞter Ă  controverse, il aurait Ă©tĂ© souhaitable que des efforts supplĂ©mentaires aient Ă©tĂ© mis en Ĺ“uvre par la chaĂ®ne afin de mieux assurer l’expression de la diversitĂ© des points de vue »[42].

Polémique « halal seul » ou bien « halal et casher » ?

  • Lorsque le dĂ©bat quitte le secteur mĂ©diatique et scientifique, certains parlent de polĂ©miques « halal uniquement », d'autres parlent de polĂ©mique « halal et casher ».
  • Objectivement : cette polĂ©mique, lancĂ©e par EnvoyĂ© SpĂ©cial, s'adresse Ă  l'abattage sans Ă©tourdissement. Les critiques portent sur deux aspects.
  1. Le fait que les viandes issues de ces abattages ne soient pas étiquetées spécifiquement est vrai pour la viande casher et la viande halal. Il est donc tout à fait légitime d'employer l'expression « halal et casher ».
  2. Le fait que cet abattage qui coupe l'œsophage ne permet pas d'éviter le risque de contamination de la viande du collier par les bactéries de l'intestin est aussi identique dans les deux cas d'après les scientifiques. Des membres de la communauté juive remettent cependant en question ces similitudes des risques sanitaires. Ces personnes pensent que les précautions supplémentaires prises dans le rite israélite permettent de minimiser les risques sanitaires de l'abattage juif par rapport à l'abattage musulman.
  • Subjectivement : les diffĂ©rents intervenants choisissent leurs termes suivant les messages qu'ils veulent faire passer.
  1. Dans la grande majorité des cas, les intervenants emploient plus usuellement le terme « halal ». Cela est tout à fait logique, la répartition halal / casher dans la viande abattue rituellement en France est inconnue mais probablement entre 90 % / 10 % et 70 % / 30 %[43]. Cependant ils rajoutent souvent une fois dans le texte le terme « casher » afin de montrer que cette polémique ne concerne par uniquement les musulmans.

Différences et similitudes entre les deux rituels

La shechita est l'abattage rituel des mammifères et des oiseaux selon la loi juive. La dhabiha est la méthode utilisée pour abattre un animal selon la tradition islamique.

Similitudes

  • Les deux shechita et dhabiha consistent Ă  couper en travers le cou de l'animal avec une lame non dentelĂ©e afin de trancher proprement les principaux vaisseaux sanguins[44].
  • Ils exigent que la moelle Ă©pinière ne soit pas touchĂ©e lors de l'abattage[44] - [45].
  • Les deux nĂ©cessitent une saignĂ©e drainant le sang de l'animal[44] - [46].
  • Tout Juif adulte sain d'esprit qui connaĂ®t la bonne technique peut effectuer la shechita[47]. De mĂŞme, les dhabiha peuvent ĂŞtre effectuĂ©es par tout « adulte sain d'esprit musulman… en suivant les règles prescrites par la charia »[48]. Les autoritĂ©s islamiques acceptent cependant que la dhabiha puisse ĂŞtre effectuĂ©e par « les Peuples du Livre » : (Juifs et ChrĂ©tiens)[44].

Différences

  • La dhabiha exige que le nom de Dieu puisse ĂŞtre prononcĂ© avant chaque abattage[44]. Certains musulmans acceptent que de la viande soit considĂ©rĂ©e comme halal sans nĂ©cessairement avoir respectĂ© toute la dhabiha ; en d'autres termes, la viande casher est considĂ©rĂ©e comme halal par les musulmans. Durant la shechita, une bĂ©nĂ©diction est rĂ©citĂ©e avant de commencer l'abattage. Aussi longtemps que le cho'het n'a pas fait une longue pause ou perdu la concentration, cette bĂ©nĂ©diction couvre tous les animaux abattus durant cette pĂ©riode.
  • Il n'y a aucune restriction sur les organes ou les parties de la carcasse pour les musulmans qui peuvent manger l'animal tout entier, Ă  l'exception du sang, des os et des pièces de blessĂ©s. Les Juifs, eux, s’interdisent en plus de manger le nerf sciatique, donc l'arrière-train d'un animal casher doit subir un processus, appelĂ© nikkur, d’extraction de ce nerf sciatique afin d'ĂŞtre apte Ă  la consommation par les Juifs. Comme le nikkur est un processus coĂ»teux, fastidieux, il est rarement pratiquĂ© en dehors d’IsraĂ«l, et les membres postĂ©rieurs des animaux casher abattus dans le reste du monde sont gĂ©nĂ©ralement vendus sur le marchĂ© non casher[49].

Importance de ce débat pour les Français

  • Nicolas Sarkozy affirme le 5 mars 2012 que ce sujet est le premier sujet de discussion actuel des Français[50]. Il semble cependant que, dans l'enquĂŞte citĂ©e par le prĂ©sident, les Français parlent bien de cette polĂ©mique mais seulement en 9e sujet sur 13 loin derrière l'Oscar de Jean Dujardin[51].

Avis des communautés religieuses

Communauté musulmane

  • Selon Gilles Kepel dans Quatre Vingt Treize, les musulmans souhaitent dĂ©velopper le modèle halal français sur le modèle casher. Ils apprĂ©cient notamment la forte traçabilitĂ© de ce modèle qui Ă©vite bien mieux que dans la filière halal le risque de fournir de la viande illicite Ă  des pratiquants. Ils sont donc, depuis longtemps, partisans d'une meilleure traçabilitĂ© et donc de l'Ă©tiquetage que propose l'Union europĂ©enne.
  • Cet Ă©tiquetage ne risque pas de poser de problème Ă©conomique Ă  la filière halal pour plusieurs raisons.
  1. Ce marché est en pleine expansion, deux fois plus important que le marché bio.
  2. La communauté musulmane est suffisamment importante pour absorber la totalité de la viande halal sans craindre un éventuel boycott des non musulmans ou des associations de consommateurs.
  3. Cet abattage sans étourdissement est plus simple, et donc moins cher que l'abattage traditionnel. Si les prix de l'abattage non halal augmentaient pour respecter les règles européennes, la viande halal pourrait avoir un avantage concurrentiel supplémentaire.
  4. Des musulmans très religieux, qui ne consomment actuellement pas de viande halal par peur de viande non conforme du fait du manque de traçabilité, pourraient alors se laisser séduire par cette nouvelle viande halal plus rigoureuse.
  • Par contre, depuis le dĂ©but de la polĂ©mique, la communautĂ© s'oppose Ă  la stigmatisation de sa religion. Elle critique le fait que le manque de traçabilitĂ© pointĂ© du doigt par les politiques et les mĂ©dias, qui concerne tout l'abattage rituel, soit systĂ©matiquement dĂ©formĂ© en « polĂ©mique halal » alors que le manque de traçabilitĂ© est dĂ» uniquement Ă  la communautĂ© juive[52].
  • Par la suite, les musulmans dĂ©cident de crĂ©er une commission thĂ©ologique afin de vĂ©rifier si les lois religieuses permettent ou non l'Ă©tourdissement prĂ©-mortem[53]. Cette idĂ©e fait du chemin chez les musulmans, lesquels pourraient accepter de se mettre en totale conformitĂ© avec la loi française : traçabilitĂ© et Ă©tourdissement[54].

Communauté juive

  • Le marchĂ© de la viande casher ne peut pas fonctionner Ă©conomiquement sans des consommateurs non juifs. En effet, les règles très strictes de la cacherout font rejeter hors de la filière deux carcasses sur trois.
  • De plus, du fait de la proscription portant sur la consommation des parties interdites, dont le tendon inguinal, c'est-Ă -dire le nerf sciatique[55], cette opĂ©ration, pratiquĂ©e quasi universellement jusqu'au XIXe siècle, Ă©tait dĂ©licate et peu rentable, la viande possĂ©dant un aspect « dĂ©plaisant ». De ce fait, les autoritĂ©s rabbiniques europĂ©ennes[56], ainsi que le grand-rabbin de New York, ont jugĂ© prĂ©fĂ©rable de dĂ©clarer les parties arrière des animaux impropres Ă  la consommation, et les bouchers les remettent dans le circuit de distribution des viandes non kascher. Ces parties, qui s'Ă©tendent jusqu'Ă  la huitième cĂ´te pour les bovins, et incluent les rumstecks, filets, faux-filets, bavettes, onglets, entrecĂ´tes et cĂ´tes, sont les morceaux de première catĂ©gorie, les plus tendres de l'animal[57]. Si ces meilleurs morceaux venaient Ă  ĂŞtre difficiles Ă  revendre aux non juifs Ă  cause de l'Ă©tiquetage, le modèle Ă©conomique de la filière casher s'effondrerait[58] - [59].
  • Les responsables de la communautĂ© ont donc toujours fermement combattu les propositions d'Ă©tiquetage.
  • Sur le deuxième point soulevĂ© par l’enquĂŞte d'EnvoyĂ© spĂ©cial, concernant les risques sanitaires de l'abattage rituel, certains membres de la communautĂ© pensent que ces risques ne concernent que l'abattage halal. Ils pensent en effet que les règles très strictes de la cacherout offrent une protection sanitaire supĂ©rieure aux autres types d'abattage. Le consistoire est en possession d'Ă©tudes montrant qu'il n'y pas de risques bactĂ©riologiques spĂ©cifiques.
  • Contrairement aux musulmans, les autoritĂ©s religieuses juives pensent que leurs règles ne permettent pas d'accepter l'Ă©tourdissement des animaux. Ils ne sont donc pas prĂŞt Ă  s'extraire de cette dĂ©rogation.
  • JoĂ«l Mergui, prĂ©sident du Consistoire, constate des Ă©volutions inquiĂ©tantes pour l'avenir Ă©conomique de la filière cachère en France ainsi que des risques Ă  l'international : « Nous constatons depuis quelques jours que des abattoirs commencent Ă  pratiquer l'Ă©tiquetage de la viande, que d'autres ne pratiquent plus l'abattage rituel, qu'il est plus difficile d'Ă©couler cette viande dans le circuit non casher, que d'autres pays se sont saisis de ce dĂ©bat. […] J'espère […] qu'on va se rendre compte que l'abattage selon le rite juif ne fait pas plus souffrir les bĂŞtes que les autres formes d'abattage. »[60].
  • Des institutions relèvent avec inquiĂ©tude la montĂ©e mondiale des critiques vis-Ă -vis des pratiques cultuelles juives comme l'abattage rituel et la circoncision[61] - [62].

Prise de position du personnel politique et les réactions qu'elles suscitent

  • Les 10 candidats Ă  l'Ă©lection prĂ©sidentielle ont rĂ©pondu aux questions de 30 millions d'amis sur ce sujet[63]. Le gouvernement français a dĂ©cidĂ© le 8 mars 2013 d'imposer des modifications d'urgence Ă  la procĂ©dure d'abattage rituel afin de minimiser les risques sanitaires.

François Fillon

  • Le Premier ministre, s'exprimant Ă  titre personnel, a estimĂ© le 4 mars 2012, que « les religions devaient rĂ©flĂ©chir au maintien de traditions qui n'ont plus grand-chose Ă  voir avec l'Ă©tat aujourd'hui de la science, l'Ă©tat de la technologie, les problèmes de santĂ© ». François Fillon a suggĂ©rĂ© aux juifs et aux musulmans de revenir sur les « traditions ancestrales » d'abattage rituel des animaux[64].
  • Ces phrases ont Ă©tĂ© vivement critiquĂ©es, y compris dans son propre camp par Jean-François CopĂ©[65], Rachida Dati[66], Salima Saa[67], Bernard DebrĂ©[68], Alain JuppĂ©[69].
  • Pour le Grand Rabbin de France, « il y a y quelque chose de dĂ©calĂ© par rapport Ă  l'esprit mĂŞme d'une religion rĂ©vĂ©lĂ©e ». Il dĂ©nonce « un mĂ©lange des genres entre le discours de l'ordre du religieux et de l'autre le discours de l'ordre des valeurs de l'universel ».« On ne peut pas parler d'une religion comme d'un archaĂŻsme », a poursuivi le Grand Rabbin, qui s'est dit « très gĂŞnĂ© » par ces propos[70].
  • François Fillon organise le 7 mars une rĂ©union avec le Grand Rabbin Gilles Bernheim et son spĂ©cialiste de ces questions Bruno Fiszon afin de dĂ©samorcer la polĂ©mique[71].

Marine Le Pen

  • Marine le Pen utilise les informations de l'enquĂŞte d'EnvoyĂ© spĂ©cial, qui montrait que les trois abattoirs Ă  bovins de la rĂ©gion parisienne ne font uniquement que de l'abattage rituel. Dans son meeting de Lille du 19 fĂ©vrier 2012, elle prĂ©sente cette information en annonçant que l'ensemble de la viande diffusĂ©e en ĂŽle-de-France est maintenant halal.
  • Le gouvernement rejette ces informations et rappelle que ces trois abattoirs sont très petits et ne reprĂ©sentent que 2 % de la viande consommĂ©e en ĂŽle-de-France. Le reste provient des autres abattoirs français via le marchĂ© de Rungis.
  • Marine Le Pen corrige ensuite ses propos et annonce que 100 % de la viande en ĂŽle-de-France est « suspectĂ©e » d'ĂŞtre halal du fait de l'absence de traçabilitĂ©.
  • Marine Le Pen Ă©voque Ă  nouveau le sujet, le 6 mars 2012 : « Je ne crois pas du tout que le halal soit un sujet accessoire. C'est un sujet qui touche quand mĂŞme quatre grands thèmes pour les Français : le problème de la laĂŻcitĂ©, de la sĂ©curitĂ© sanitaire, de la nĂ©cessaire transparence Ă  l'Ă©gard des consommateurs et de la souffrance animale »[72].
  • Le 3 avril 2012, Marine Le Pen s'exprime Ă  nouveau sur ce qu'elle appelle « Un scandale sanitaire sans prĂ©cĂ©dent »[73] après la publication par Le Parisien, le 2 avril 2012, d'un extrait du rapport[74] de l’AESA sur la bactĂ©rie Campylobacter. Ce rapport, ne traitant que de la viande de volaille, n'a pourtant rien Ă  voir avec cette polĂ©mique.

Nicolas Sarkozy

  • Sur la question de l'abattage rituel, Nicolas Sarkozy a plusieurs fois fait Ă©voluer sa position
  • En 2006, lors de la campagne prĂ©sidentielle, il avait promis aux organisations de protection animale qu'il prĂ´nerait l'Ă©tourdissement prĂ©alable Ă  l'abattage[75].
  • Ces promesses n'ont pas Ă©tĂ© tenues. Au contraire, la France s'est battue pour freiner ce type d'initiative au niveau europĂ©en, principalement sous la pression des professionnels de la filière viande, qui voient dans la gĂ©nĂ©ralisation de l'abattage sans Ă©tourdissement un gain Ă©conomique.
  • Ă€ la suite d' EnvoyĂ© spĂ©cial et des premières piques de Marine Le Pen sur le halal, il se rend Ă  Rungis et annonce qu'il n'y a pas lieu de polĂ©miquer et rectifie les chiffres donnĂ©s par la dirigeante du Front national.
  • Il semble Ă  nouveau changer d'avis en donnant raison Ă  son premier ministre François Fillon qui demande, au moins, un Ă©tiquetage de la viande abattue rituellement. Le prĂ©sident annonce cet Ă©tiquetage dans son discours de Bordeaux.
  • Ă€ la suite d'une rĂ©union entre les autoritĂ©s religieuses juives et le premier ministre oĂą celles-ci rĂ©affirment leur refus de l'Ă©tiquetage, le prĂ©sident modère Ă  nouveau ses propositions en ne demandant plus, lors de l'Ă©mission Des paroles et des actes, qu'un Ă©tiquetage sur la base du volontariat.

Évolution des positions des politiques

Sous la présidence de Nicolas Sarkozy

  • L'enquĂŞte d'EnvoyĂ© spĂ©cial, les attaques rĂ©pĂ©tĂ©es de Marine Le Pen, la publication par la presse de rapports officiels montrant les dĂ©rives de l'abattage rituel[76] commencent Ă  rendre mĂ©fiants les consommateurs, lesquels demandent des comptes Ă  leur boucher. Les vocables utilisĂ©s par la presse, insistant sur les problèmes de traçabilitĂ© de la viande halal, ont pour effet de stigmatiser la communautĂ© musulmane (alors que les responsables musulmans ont toujours Ă©tĂ© favorable Ă  la traçabilitĂ©).
  • Face Ă  ce danger de stigmatisation, un dĂ©putĂ© UMP demande le 21 fĂ©vrier 2012 au gouvernement d’accĂ©lĂ©rer l’application du dĂ©cret du 28/12/2011, prĂ©vue pour le 1er juillet 2012. Le ministre de l’agriculture Bruno Le Maire Ă  l’AssemblĂ©e nationale le 21 fĂ©vrier 2012 annonce que plus aucun abattage rituel ne sera autorisĂ© sans bon de commande prĂ©alable. Le 8 mars, Bruno Le Maire annonce l'application immĂ©diate de ce dĂ©cret.
  • Cependant, face aux diffĂ©rentes pressions que subit le gouvernement, la position de la majoritĂ© prĂ©sidentielle oscille. La dĂ©putĂ©e UMP Françoise Hostalier a dĂ©posĂ© le 22 fĂ©vrier une proposition de loi visant au respect de la rĂ©glementation europĂ©enne pour la production de viande provenant d'animaux abattus sans Ă©tourdissement. Cette mĂŞme dĂ©putĂ©e retire son texte le 1er mars, sous la pression, selon le journal Le monde, du parti prĂ©sidentiel[77].
  • MĂŞme l'ÉlysĂ©e hĂ©site sur la position Ă  tenir. Alors que Nicolas Sarkozy s'est prononcĂ© samedi 28 fĂ©vrier Ă  Bordeaux pour l'Ă©tiquetage des modes d'abattage de la viande, il modère ses propos lors de l'Ă©mission Des paroles et des actes sur France 2 et parle seulement d'un Ă©tiquetage sur la base du volontariat.
  • Face Ă  l’ampleur prise par la polĂ©mique, les professionnels de la filière viande font aussi machine arrière. Ainsi Dominique Langlois dĂ©clare : « En 2011, nous avons Ă©cartĂ© le problème. Mais vu l’importance du dĂ©bat, et comme on met en cause la filière, nous devons rĂ©agir »[78].
  • En tant que rapporteur du Parlement europĂ©en sur l’étiquetage de la viande bovine, la dĂ©putĂ©e europĂ©enne Sophie Auconie rĂ©pond
    • Ă  la demande d’étiquetage obligatoire exprimĂ©e par les bouchers : « Je vais poursuivre mes discussions Ă  ce sujet avec mes collègues parlementaires, consulter les organisations reprĂ©sentatives concernĂ©es et veillerai Ă  ce que la rĂ©vision en cours du règlement (EC) no 1760/2000 sur l’étiquetage de la viande bovine tienne compte des dĂ©bats dans les États membres »
    • Ă  l'inquiĂ©tude sur les risques bactĂ©riens : « Comme les 3 millions de tĂ©lĂ©spectateurs de l’émission EnvoyĂ© SpĂ©cial, le reportage sur la sĂ©curitĂ© alimentaire dans le secteur de la viande bovine m’a particulièrement interpellĂ©. Aujourd’hui, alors que s’ajoute la problĂ©matique de la sĂ©curitĂ© alimentaire et des risques potentiellement lĂ©gèrement accrus de contamination Ă  l’E.coli, je vais interpeller le Commissaire europĂ©en John Dalli, chargĂ© de la santĂ© et de la protection des consommateurs, sur l’état des lieux de la mise en Ĺ“uvre de la lĂ©gislation europĂ©enne dans l’ensemble des États membres. » »[79].

Sous la présidence de François Hollande

  • François Hollande a prĂ©sentĂ©, lors de la campagne prĂ©sidentielle, une politique en continuitĂ©, sur ce point, avec son prĂ©dĂ©cesseur. Il affirme pendant le dĂ©bat du second tour que « sous ma prĂ©sidence, rien ne sera tolĂ©rĂ© en termes de prĂ©sence de viande halal dans les cantines de nos Ă©coles »[80]
  • Manuel Valls affirme le 31 mai 2012 que d'ores et dĂ©jĂ , le problème ne se pose pas car en France « il n'y a pas de cantine scolaire servant cette viande »[81].
  • Pourtant le mĂŞme jour, le maire socialiste de Strasbourg, Roland Ries, admet que 1750 des 8200 repas, servis chaque jour dans les cantines de la ville, sont halal. Il semble, de plus, opposĂ© Ă  toute mesure de suppression sauf en cas de loi. Il dĂ©clare : François Hollande l'a dit, certes, mais j'attends de voir comment il veut concrĂ©tiser ça. Tant qu'il n'y aura pas de loi, nous maintiendrons le dispositif[82]. Selon lui, les menus vĂ©gĂ©tariens en remplacement des menus halal ne fournissent pas les besoins en protĂ©ines des Ă©lèves.
  • En octobre 2012, Manuel Valls, ministre français de l'intĂ©rieur dĂ©clare au magazine Information juive : « La France, rĂ©publique laĂŻque s'est dotĂ©e d'un système juridique clair qui garantit le libre exercice des libertĂ©s religieuses. Il est donc hors de question de revenir sur l'abattage rituel. […] Les Juifs de France […] peuvent manger casher. »[83] - [84]
  • Le 13 novembre, une pleine page de publicitĂ© du Parisien interpelle François Hollande pour lui demander d’interdire "tout abattage sans Ă©tourdissement prĂ©alable". Un "appel au prĂ©sident de la RĂ©publique" est signĂ© par la sĂ©natrice UDI de l’Ain, Sylvie Goy-Chavent qui, parallèlement, a dĂ©posĂ© une proposition de loi au SĂ©nat[85] - [86] - [87]
  • Par la suite, les polĂ©miques continuent de plus en plus frĂ©quentes[88].
    • Le 30 juin 2013 un barbecue scolaire ne sert que de la viande Halal ce qui crĂ©e une vive tension. L'inspecteur d'acadĂ©mie dĂ©clare "La loi n’imposant pas aux Ă©tablissements publics de proposer des repas confessionnels, ceux-ci ne sauraient ĂŞtre les seuls commandĂ©s. En revanche, rien n’empĂŞche, de faire deux barbecues."[89]

Sous la présidence d'Emmanuel Macron

Lors de la cérémonie de vœux à la communauté juive, le 2 octobre 2017, le premier ministre, Édouard Philippe s'engage « à ce que l’abattage rituel ne soit pas remis en cause »[90].

Lors de la campagne pour les élections européennes de 2019, le candidat du Rassemblement national Jordan Bardella estime l'abattage rituel « indigne »[91].

Présentation de cette polémique dans la presse non française

  • Cette polĂ©mique est reprise par de nombreux mĂ©dias anglo-saxons[92] - [93] - [94]. Ceux-ci sont très critiques sur l'attitude du gouvernement français[95]. Selon le Guardian, notamment, Nicolas Sarkozy, se sentant quasi battu pour la prĂ©sidentielle, tente par cette polĂ©mique, un virage Ă  l'extrĂŞme-droite afin de prendre des voix Ă  Marine le Pen pour ĂŞtre en meilleure position après le premier tour[96] - [97].
  • Les mĂ©dias algĂ©riens suivent de près cette polĂ©mique et sont extrĂŞmement critiques : « Le halal, un dĂ©bat "raciste et odieux" »[98].
  • Les mĂ©dias israĂ©liens accusent le gouvernement français de faire machine arrière sur son acceptation de viande rituelle dans le marchĂ© traditionnel sans Ă©tiquetage[99].

Financement occulte d'organismes religieux

  • D'après le dĂ©putĂ© UMP Lionel Luca, « les citoyens financent des communautĂ©s religieuses Ă  leur insu ». Ce soupçon, rĂ©current, est rĂ©apparu lors de la polĂ©mique lancĂ©e par EnvoyĂ© spĂ©cial, dans les paragraphes ci-dessous sur la prĂ©sence de viande abattue rituellement dans le circuit de distribution conventionnel.
  • Ce soupçon est fortement repoussĂ© tant par les responsables juifs[100] que musulmans[101].
  • Florence Bergeaud-Blackler, sociologue spĂ©cialisĂ©e de ce domaine, rejette aussi ce soupçon[102].

Modèle économique

  • Il existe très peu d'informations complètes chiffrĂ©es sur l'Ă©conomie de l'abattage rituel. On peut en entrevoir un aperçu d'après les informations fournies par Bruno Benjamin, PrĂ©sident dĂ©lĂ©guĂ© du consistoire israĂ©lite de Marseille. La communautĂ© juive de Marseille est la plus importante de France après celle de Paris :
    • « Nous avons agrĂ©Ă© un abatteur, Bigard en l’occurrence, chez lequel se rendent nos trois sacrificateurs, chaque semaine (Ă  Castres et Ă  Dijon pour les ruminants, Ă  Valence pour la volaille), sous le contrĂ´le du Dayane (juge rabbinique). La consommation de la communautĂ© marseillaise est de 50 Ă  60 bĂŞtes par semaine mais pour obtenir cette quantitĂ© il faut en Ă©gorger 200 car les rabbins refusent les animaux dont les poumons prĂ©sentent des adhĂ©rences…. ».
    • La viande casher « fournit, Ă  travers la taxe rabbinique perçue pour l’attribution du certificat de cacherouth, 40 % de son budget annuel (du consistoire israĂ©lite de Marseille) de 3 millions d'Euros »[103].

Conséquences sur les cantines scolaires

  • La polĂ©mique suscitĂ©e en 2012 par l'abattage rituel dĂ©borde Ă  nouveau sur le sujet des nourritures confessionnelles Ă  l'Ă©cole[104], principalement Ă  cause des propos de Claude Gueant pronostiquant du halal obligatoire dans les cantines en cas de droit de vote des Ă©trangers non europĂ©ens. D’après les experts, tout cela relève du fantasme.
  • Depuis des annĂ©es, il Ă©tait de coutume en France de tolĂ©rer des menus spĂ©cifiques pour les communautĂ©s religieuses juives et musulmanes dans les cantines, notamment sans porc ou sans viande dans certaines cantines scolaires. Le prĂ©sident Sarkozy englobait cet accommodement raisonnable sous le titre de « laĂŻcitĂ© positive ». En 2004, le « Rapport Obin »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) avait montrĂ© que cela n'avait pas diminuĂ© les conflits, au contraire et pourtant, en 2007, Jean-Pierre Obin reconnaĂ®t que, trois ans après, le gouvernement n'a pas Ă  l'Ă©poque tirĂ© les conclusions des alertes contenues dans ce rapport[105] Cependant, Ă  la suite de cette polĂ©mique, le discours politique s'est radicalisĂ©. Ainsi le prĂ©sident Sarkozy est maintenant dĂ©cidĂ© Ă  revenir sur ces tolĂ©rances : « dans les cantines scolaires, nous voulons les mĂŞmes menus pour les mĂŞmes enfants de la RĂ©publique française ! »[106] - [107]. François Hollande annonce ĂŞtre sur la mĂŞme ligne lors du dĂ©bat d'entre les deux tours (voir ci-dessus).
  • Cette tolĂ©rance semble depuis la polĂ©mique en voie d'extinction : ainsi Le 25 juin 2012, La ville d’Hagondange (Moselle) a annulĂ© sa kermesse annuelle. L’invitation envoyĂ©e Ă  l’ensemble des parents qui scolarisent leurs enfants Ă  l’école Jean de la Fontaine a choquĂ©. Une petite ligne signale : « Les brochettes de bĹ“uf et les saucisses proviennent d’une boucherie halal ». Ă€ la suite de cette polĂ©mique, le maire Divers Droite (DVD) d’Hagondange, Jean-Claude Mahler a pris la dĂ©cision d’annuler la manifestation pour Ă©viter tout « malentendu »[108]
  • Le 15 mai France 3 diffuse le documentaire Et la LaĂŻcitĂ© dans tout ça qui confirme le maintien des tensions[109].
  • Le 11 juillet 2013, Les sĂ©jours vacances, notamment ceux de la Ligue de l'enseignement, sont de plus en plus confrontĂ©s aux revendications religieuses. La Ligue Ă©dite un guide dĂ©terminant les limites de l'acceptable[110].

Premiers Ă©tiquetages

  • Ă€ la suite de la polĂ©mique, un abattoir de Tarascon (Bouches-du-RhĂ´ne) a dĂ©cidĂ©, pour rĂ©pondre aux inquiĂ©tudes de ses clients, d’élaborer des Ă©tiquettes « abattage conventionnel garanti », de façon Ă  informer directement les bouchers dĂ©taillants et les grossistes[111].
  • Le sĂ©nateur Sylvie GOY-CHAVENT a prĂ©sentĂ© le 17 janvier 2013, avec 24 autres sĂ©nateurs, une proposition de loi visant Ă  informer le consommateur quant Ă  l'origine des viandes issues des filières d'abattage rituel[112].

Commission du sénat sur la traçabilité dans la filière viande

Le 11 juillet 2013 la mission sur la filière viande du sénat rend ses conclusions. Au nombre de ces propositions, la mission suggère l'instauration d'un "étiquetage obligatoire du mode d'abattage selon des modalités non stigmatisantes", visant les modes d'abattage sans étourdissement prescrits par les rituels casher et halal. En revanche L’interdiction de l’abattage sans étourdissement, nécessaire à un abattage rituel, est une piste écartée par la mission[113]. Les débats furent très houleux. La rapporteure Sylvie Goy-Chavent, qui avait déjà déposé deux projets de loi favorables à l’étiquetage, devant le Sénat, a notamment affirmé que les rapports scientifiques sont unanimes pour dire que l'animal étourdi souffrira le temps de l'étourdissement, c'est-à-dire le temps d'une balle, donc de l'ordre de la seconde, alors qu'un animal égorgé peut mettre jusqu'à un quart d'heure. Les représentants du judaïsme s’emportent et citent des rapports contradictoires, mais la sénatrice les juge non neutres. Les juifs craignent la stigmatisation pourtant la proposition en faveur d'un étiquetage du mode d'abattage des animaux de boucherie est "une des 40 adoptées par les sénateurs, au même titre que l'étiquetage obligatoire du pays d'origine de l'ensemble des viandes brutes et transformées, dans le souci d'éclairer les choix des consommateurs", rappelle la présidente de la mission. Le samedi suivant sur le site de l’ex candidat à la députation Jonathan-Simon Sellem, des propos racistes et des menaces de mort sont exprimés à l’égard de la sénatrice Sylvie Goy-Chavent qui annonce porter plainte[114] - [115] - [116] - [117] - [118].

Rapport ANSES

L'Anses - Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – publie en juillet 2013 une Évaluation du Guide de bonnes pratiques d’abattage des bovins en matière de protection animale[119]. Ce rapport conclut que « l’étourdissement avant l’égorgement reste la méthode minimisant les douleurs » (page 14). Le rapport propose comme palliatif pour l'abattage rituel un étourdissement après l'égorgement : « il est nécessaire d’observer les animaux individuellement et soigneusement pendant au moins 45 secondes après l’égorgement. Si les observations montrent que l'animal est inconscient, il peut être libéré du piège. Dans le cas contraire, il est étourdi ».

Extension de la polémique aux autres pays

  • Le 28 mars 2012, l'hebdomadaire Courrier international signale que la polĂ©mique française s'exporte dans de nombreux pays[120]. La chaĂ®ne saoudienne Al-Arabiya s'en Ă©tonne : « Ce dĂ©bat est peu surprenant en France, un pays qui se demande depuis des annĂ©es jusqu'Ă  quel point il est prĂŞt Ă  s’accommoder de l'islam ». Au Royaume-Uni, par contre, « la nouvelle controverse sur les mĂ©thodes d’abattage halal risque de surprendre les communautĂ©s musulmanes ».

Québec

  • Le 23 mars 2012, Ă  la suite de la polĂ©mique française, le parti quĂ©bĂ©cois demande que le gouvernement mette en place un système d'Ă©tiquetage pour que le consommateur soit informĂ© de la provenance de la viande qu'il achète[121] - [122]. Le dĂ©putĂ© AndrĂ© Simard, porte-parole du parti quĂ©bĂ©cois en matière d'agriculture, vĂ©tĂ©rinaire de profession, estime que l'abattage rituel peut aussi occasionner un risque de contamination pour la santĂ© publique[123]. Enfin, Ă  la suite d'un reportage fait par Le Journal de MontrĂ©al, AndrĂ© Simard a voulu savoir ce qu'il en coĂ»tait Ă  l'État pour servir des repas halal dans les prisons, ou casher dans les centres de la petite enfance (CPE)[124] - [125].
  • Le 17 avril 2012, pour rĂ©pondre aux questions instantes du parti quĂ©bĂ©cois, le ministre de l'agriculture Pierre Corbeil a dĂ©cidĂ© de se pencher plus Ă  fond sur le dossier de l'abattage rituel, en particulier pour savoir quels sont les impacts financiers des certifications halal et casher. Quant Ă  l'Ă©tiquetage des produits, qui est de responsabilitĂ© fĂ©dĂ©rale, le ministre Corbeil dit ĂŞtre d'accord, mais est toujours en attente d'une lettre Ă  ce sujet adressĂ©e Ă  son homologue Ă  Ottawa[124].

Luxembourg

  • L'abattage rituel est uniquement autorisĂ© au Luxembourg contre une dĂ©rogation Ă©mise par le ministre de l'agriculture en fonction. Pour l'instant, Romain Schneider, ministre de l'agriculture, a signalĂ© qu'aucune dĂ©rogation n'avait Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©e et il n'envisage pas d'en dĂ©livrer une Ă  l'avenir. Aucun abattage rituel n'a donc encore Ă©tĂ© fait au Luxembourg. Le Luxembourg milite auprès de la Commission europĂ©enne pour qu'elle prĂ©sente une proposition lĂ©gislative par rapport Ă  l'Ă©tiquetage des viandes halal ou casher dans le cadre de sa stratĂ©gie pour la protection et le bien-ĂŞtre animal de 2012-2015[126].

Royaume-Uni

  • La Commission europĂ©enne devrait faire rapport sur l'abattage rituel d'ici l'Ă©tĂ© 2012, mais, le ministre de l'Environnement, Lord Taylor d'Holbeach, a dit que si l'Union europĂ©enne ne parvient pas Ă  s'entendre sur un système d'Ă©tiquetage des aliments rituels, le Royaume-Uni prendra des mesures[127] - [128].
  • Cependant, alors qu’en France les cantines scolaires sont de moins en moins nombreuses Ă  proposer un menu diffĂ©rent pour les enfants, elles sont de plus en plus nombreuses outre-Manche. Les communautĂ©s religieuses applaudissent, en revanche cela est vivement critiquĂ© par la droite. Ainsi, le conservateur et lĂ©gislateur Philip Davies dĂ©clare : « Je suis d’accord sur le fait que les Ă©lèves devraient ĂŞtre en mesure de choisir de ne pas consommer du porc, je crois cependant que les Ă©coles ont tort d’imposer Ă  tous les Ă©lèves les croyances religieuses de certains en leur refusant la possibilitĂ© de choisir du porc ». Pour lui, c’est ce genre de politique qui amène le ressentiment vis-Ă -vis des minoritĂ©s. D'autres critiques viennent des producteurs de porcs comme Stewart Houston : « Il est dĂ©cevant de constater que les Ă©coles ne peuvent pas ĂŞtre suffisamment organisĂ©es pour donner aux enfants un choix de viandes. Saucisses, saucissons et rĂ´ti de porc sont des aliments du rĂ©gime alimentaire britannique, et les enfants aiment les manger »[129].

Pays-Bas

  • Aux Pays-Bas, l'Ă©tourdissement est la règle mais une dĂ©rogation existe depuis longtemps permettant, au nom de la libertĂ© des cultes, de supprimer l'Ă©tourdissement pour l'abattage halal et casher.
  • En juin 2011, cependant, un amendement visant Ă  supprimer cette dĂ©rogation a Ă©tĂ© adoptĂ© par les dĂ©putĂ©s nĂ©erlandais.
  • Le 13 dĂ©cembre 2011, les sĂ©nateurs indiquent qu'ils voteraient contre cette modification de la loi et ils demandent Ă  Hans Bleker, le secrĂ©taire d'État Ă  l'agriculture, de trouver une solution de compromis[130].
  • En juin 2012, les reprĂ©sentants des abattoirs et les reprĂ©sentants des communautĂ©s juive et musulmane signent un accord prĂ©voyant l'Ă©tourdissement des animaux quarante secondes après l'Ă©gorgement. Pour Hans Bleker, « un bon Ă©quilibre a Ă©tĂ© trouvĂ© entre la libertĂ© de culte et l'amĂ©lioration du bien-ĂŞtre des animaux ».
  • Le sĂ©nat batave maintien alors par 51 voix contre 21, l'autorisation de l'abattage rituel Ă  condition d'appliquer ce compromis
  • Cependant ce compromis est immĂ©diatement dĂ©noncĂ© par le Beth-Din d’Amsterdam : il « ne correspond ni Ă  nos souhaits, ni Ă  nos recommandations ».
  • L'affaire pourrait en retour avoir des rĂ©percussions en France, qui pourrait ĂŞtre tentĂ©e d'appliquer le mĂŞme compromis. En effet, depuis le dĂ©cret de dĂ©cembre 2011 rĂ©glementant l’abattage rituel, les pouvoirs publics français fixent un dĂ©lai de 90 secondes avant Ă©tourdissement. Il est possible que, sous la pression des dĂ©fenseurs des animaux, la France finisse par se ranger Ă  la solution nĂ©erlandaise des 40 secondes. Or, selon le grand rabbin Bruno Fiszon, qui gère le dossier au Consistoire central, 45 secondes au minimum sont nĂ©cessaires avant l’étourdissement pour que la viande soit considĂ©rĂ©e comme casher[131].

Belgique

  • En 2016 le parti N-VA conditionne sa participation au gouvernement Ă  l'interdiction totale de l'abattage rituel sans Ă©tourdissement[132]

Pologne

  • Alors que ses communautĂ©s juive et musulmane ne dĂ©passent pas Ă  elles deux les quelques dizaines de milliers d'individus, la Pologne est un des plus importants pays europĂ©ens exportateurs de viande estampillĂ©e halal ou casher. Selon des chiffres rapportĂ©s par l’AFP, en 2011 ces exportations ont produit un chiffre d’affaires total de 200 millions d’euros[133].
  • Le 8 juin 2012, cependant, Ă  la demande des organisations polonaises de protection des animaux, le procureur gĂ©nĂ©ral a saisi la Cour constitutionnelle pour statuer sur la conformitĂ© avec la loi fondamentale de la disposition ministĂ©rielle autorisant l'abattage rituel[134]. Des scientifiques Ă©crivent une lettre au premier ministre car ils considèrent barbare cette pratique[135].Le 27 novembre 2012, la Cour constitutionnelle juge l'abattage rituel contraire Ă  la Constitution mais le gouvernement assure que la Pologne continuera Ă  se conformer Ă  la directive europĂ©enne autorisant ce type d'abattage[136] - [137].

Danemark

En août 2013, un hôpital du Danemark reconnaît de ne plus servir que du bœuf halal, ce qui provoque des vives protestations dans le pays[138].

En février 2014, le ministre danois de l'Agriculture, Dan Jørgensen, au nom des droits des animaux et en précisant que « les droits des animaux sont prioritaires par rapport aux droits religieux » fait voter une loi rendant illégal l'égorgement des bêtes sans étourdissement[139] - [140].

Notes et références

  1. Council Decision 88/306, approved the (Council of Europe) European Convention for the Protection of Animals for Slaughter, 1979.1 This convention allows for ritual slaughter in Article 17. 1 Each Contracting Party may authorise derogations from the provisions concerning prior stunning in the following cases: slaughtering in accordance with religious rituals, … 2 Each Contracting Party availing itself of the provisions of paragraph 1 of this Article shall, however, ensure that at the time of slaughter or killing the animals are spared any avoidable pain or suffering.
  2. « L’interdiction de l’abattage rituel en Suisse » (consulté le )
  3. Stéphan Dussault, Le compromis suisse, Journal de Montréal, 22 octobre 2012, p. 11, sur le site de Point de bascule
  4. Abattage rituel
  5. Nouveaux enjeux autour de l’abattage rituel musulman : une perspective européenne
  6. JTA le 20 mai 2012 Polish agriculture minister says he won’t ban shechitah
  7. Pays-Bas. Abattage rituel : les Néerlandais durcissent les règles
  8. Dutch implement new restrictions on halal and kosher meat
  9. En Suisse, l'abattage rituel est interdit, mais l'on trouve dans les supermarchés des produits certifiés halal ou casher. Pourquoi ?, Archives InterroGE - Question / réponse, Ville de Genève, 16 juillet 2015
  10. Obligation de déclarer la viande d'animaux abattus rituellement - Avis du Conseil Fédéral du 30.05.2008, Motion 08.3154 de l'Assemblée fédérale, 19 mars 2008, sur le site de l'Assemblée fédérale
  11. « http://www.dialrel.eu/images/factsheet-legislation.pdf »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
  12. http://www.dialrel.eu/images/judaism-rules.pdf
  13. Résolution législative du Parlement européen du 16 juin 2010 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires (COM(2008)0040 – C6-0052/2008 – 2008/0028(COD)).
  14. DĂ©cret no 64-334 du 16 avril 1964 PROTECTION DE CERTAINS ANIMAUX DOMESTIQUES, CONDITIONS D'ABATTAGE.
  15. http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000518681
  16. « lejdd.fr/Election-presidentiel… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
  17. Salmonella : Casino rappelle un produit Wassila
  18. La réglementation applicable dans le domaine de l'abattage rituel, Pascale Dunoyer, 12 juin 2008
  19. Morgane Bertrand, Halal : les 3 obstacles Ă  la mise en Ĺ“uvre de l'Ă©tiquetage, Nouvelobs.com, 7 mars 2012.
  20. Si 32 % des animaux sont mis à mort selon un procédé rituel alors que la demande religieuse est estimée à 7% (chiffres 2008 du Bulletin de l’Académie vétérinaire cités par Florence Bergeaud-Blackler), c’est pour des raisons d’efficacité et de coût. Pour éviter les circuits doubles, « il est fréquent d’abattre la totalité d’un lot d’animaux en mode rituel pour n’en écouler qu’une partie dans les circuits de distribution religieux » .
  21. « Rentabiliser les carcasses » : le profit derrière le halal
  22. Selon Dominique Langlois, président d'Interbev : « Nous considérions que cela n'apportait pas d'information qualitative sur la viande et risquait de stigmatiser les cultes », Le nouvel observateur.
  23. Françoise Grossetête, députée UMP, Bruno Fiszon, grand rabbin de la Moselle et Kamel Kabtane, recteur de la grande mosquée de Lyon, « Viande : le risque de stigmatiser », sur Les Échos, .
  24. (chiffre donné par monsieur Langlois
  25. Chiffres donnés dans une enquête du ministère de l'agriculture de 2008.
  26. .
  27. « Le problème posé, le scandale même, analyse le Dr Jean-Louis Thillier, auteur de nombreux rapports officiels sur la sécurité sanitaire, c'est celui du non-respect des normes d'hygiène, conduisant à une augmentation des contaminations à l'Escherichia coli, ces terribles bactéries qui provoquent tant d'insuffisances rénales chez les enfants. Au cours de ce type d'abattages rituels, le contenu de l'œsophage et des intestins des animaux risque de souiller la viande, particulièrement les quartiers avant qui finissent dans les steaks hachés. Voilà pourquoi l'étiquetage indiquant comment les animaux ont été abattus est si important. Le consommateur est en droit de savoir. » Marine Le Pen : « Toute la viande française est devenue halal », Jean-Claude Jaillette, Marianne, 19 février 2012.
  28. Pascale Dunoyer, « La réglementation applicable dans le domaine de l'abattage rituel », Bulletin de l'Académie vétérinaire de France, vol. 161, no 4,‎ , p. 348 (lire en ligne)
  29. Jean-Claude Jaillette, « Marine Le Pen : « Toute la viande française est devenue halal » sur Marianne, . Consulté le 20 février 2012.
  30. La Montagne, 25 mai 2012
  31. « Abattage halal : "Où est donc passé le principe de précaution ?" », interview de Michel Courat par Victoria Gairin, sur lepoint.fr, le site du Point, . Consulté le 21 février 2012.
  32. .
  33. « http://www.hamodia.fr/article.php?id=3116 »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
  34. AllĂ´ Docteur, France 5, 18 avril 2012.
  35. « Yves-Marie Le Bourdonnec : « je suis pour la fin de l’étourdissement » »,
  36. Escherichia coli entérohémorragique (ECEH)
  37. http://www.memoireonline.com/11/06/280/m_thermoresistance-salmonella-oeuf-gesiers-de-poulet5.html
  38. Abattage halal : "Où est donc passé le principe de précaution ?" , Le Point.fr, 21 février 2012
  39. Delphine Roucaute, Malgré la polémique, le marché du halal a la cote, Le Monde.fr, 20 février 2012.
  40. « Le Nouvel Obs 26 juin 2012 »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
  41. Ce calcul, en absence de statistiques officielles, est difficile Ă  faire. Une première approche, qui part de nombre supposĂ© de musulmans en France d'environ 5 millions, Ă  comparer aux 500 000 Juifs, donne un rapport 10. Une approche plus fine devrait prendre en considĂ©ration le nombre de pratiquants respectant strictement les règles dans les deux religions. Enfin, il faut tenir compte du fait que les juifs ne consomment qu'une carcasse sur trois environ qu'ils abattent. De plus, leur religion leur interdit de consommer la partie arrière de l'animal.
  42. (en) « Islamic Guidelines Slaughtering Animals », Shariahprogram.ca (consulté le )
  43. « Shechita butchering »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ) at kosherquest.org
  44. Kosher laws regarding blood
  45. Maimonides' Code, Laws of Shechita 2:12Modèle:Psc
  46. (en) Syed Rasheeduddin, « Is Kosher Meat Halal? Not Really », Albalagh.net, (consulté le )
  47. Maimonides Laws of Slaughter 1:2 and commentaries ad locModèle:Psc
  48. Un sondage, il y a dix jours, disait : le premier sujet de préoccupation, de discussion des Français, je parle sous votre contrôle, c’est cette question de la viande halal." Une affirmation lancée aux journalistes lundi 5 mars par Nicolas Sarkozy
  49. Le halal apparaît bien dans le baromètre mensuel des sujets de discussion des Français (les Français en parlent) effectué par l'institut Ifop pour Paris-Match et publié mardi. Mais sur treize thèmes testés, il n'est cité qu'en neuvième position. En février, les Français ont d'abord parlé de l'Oscar de Jean Dujardin, de la campagne présidentielle, du Salon de l'agriculture, du naufrage du paquebot Costa Concordia ou encore… du chômage
  50. À l’instar du quotidien Libération qui diffusait une dépêche de l’AFP en modifiant le titre initial pour lui préférer un titre plus racoleur. Au départ, le titre de la dépêche AFP était le suivant : « Abattage rituel : un rapport contesté par Le Maire pointe des "dérives" ». Libération a préféré donc le racolage en choisissant de remplacer « abattage rituel » par « viande halal ». On évacue le cas de la viande casher qui n’est pas moins concernée par la polémique qui occupe la France médiatico-politique ces dernières semaines et on stigmatise le halal et, par extension, les musulmans. « Quand Libération exploite la polémique sur l’abattage rituel ».
  51. Voir sur tempsreel.nouvelobs.com.
  52. Voir sur lemonde.fr.
  53. Il est nécessaire de pratiquer le nikkour (ou treibering en yiddish), prélèvement du tendon inguinal, du suif et des gros vaisseaux environnants.
  54. L'abattage rituel et le droit suisse « Copie archivée » (version du 6 février 2011 sur Internet Archive).
  55. Bons morceaux du bœuf.
  56. « L'abattage rituel en danger ».
  57. « Le casher et l'argent ».
  58. .
  59. CRIF novembre 2013
  60. « Association Hamodia »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ). À la réunion des responsables du judaïsme européen tenue en février 2012, ces derniers s’inquiètent qu'après l'abattage rituel, les adversaires du communautarisme s'en prennent à la circoncision comme cela est déjà le cas dans les pays d’Europe du Nord
  61. « À l’évidence, il n’appartient certainement pas à des dirigeants politiques de dire à la place des responsables religieux quelles doivent être les prescriptions religieuses »
  62. « Moi je suis d'accord, les Français doivent connaître les modes d'abattage des animaux (…) c'est la transparence pour les consommateurs… Ensuite, il s'immisce dans les pratiques religieuses, il sort de son rôle » .
  63. Au nom de quoi parle-t-on de pratiques ancestrales ? Où est le respect de la foi, des pratiques et des individus ? Je suis attristée de voir s'étaler des jugements négatifs et dévalorisants sur les musulmans de France. « Ce genre de provocations doit s'arrêter. Il faut mettre fin aux discours de préjugés et de stigmatisation », .
  64. « On ne s'ingère pas dans les rites d'une religion, quelle qu'elle soit. On doit reconnaître ces rites, les respecter et à partir du moment où on les respecte, tout va bien. Après, qu'il y ait des problèmes de traçabilité possibles, oui, c'est vrai mais rien d'autre! »
  65. Alain Juppé, lui, n'a pas caché son agacement. Sur le débat sur la viande halal de manière générale. « J'ai déjà dit que le 'choc des civilisations' n'était pas ma tasse de thé. Je pense que le problème de la viande halal est un faux problème » .
  66. site du grand rabbin de France le 6 mars 2012
  67. le jdd le 7 mars.
  68. Halal : Pour Le Pen, un "sujet qui touche", France soir.fr, 6 mars 2012.
  69. Florence Bergeaud : « J'observe depuis cinq ans une radicalisation des positions des organisations de protection animale, et notamment de celles qui n’ont pas de lien historique avec l'extrême droite. Elles ont été exaspérées par les promesses non tenues du candidat Nicolas Sarkozy en 2006, lequel avait promis qu'il prônerait la généralisation de l'étourdissement préalable à l'abattage » « http://culturevisuelle.org/deusexmachina/archives/528 »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ).
  70. Ce qui ne devait être qu'une dérogation s'est généralisée, et il convient donc d'analyser les causes de cette dérive
  71. .
  72. .
  73. , Le Monde, 2 mai 2012.
  74. , Le Point, 31 mai 2012 .
  75. , 20 minutes, le 31 mai 2012.
  76. Information juive, no 326, octobre 2012, page 8
  77. extrait de l'interview précédente disponible sur le site du Consistoire
  78. Europe1
  79. France3 le 13 novembre 2012
  80. NouvelObs
  81. Le Figaro 1er juillet 2012
  82. Midilibre le 30 juin 2013
  83. Cécile Chambraud, « Edouard Philippe dans la continuité de la lutte contre l’antisémitisme », sur Le Monde,
  84. « Européennes: Jordan Bardella juge «indigne» l'abattage rituel pour les viandes halal et casher », sur 20 minutes,
  85. (en) Pierre Haski, This halal meat upset leaves Nicolas Sarkozy in a bad way, The Guardian, 8 mars 2012.
  86. (en) French premier tries to soothe Jewish, Muslim leaders over animal slaughter practices, Washingtonpost.com, 7 mars 2012.
  87. La presse algérienne suit de près les débats sur l'abattage halal qui agitent la campagne présidentielle. Pour Le Quotidien d'Oran, la polémique ne fait pas honneur à la droite. Quand cessera-t-on de prendre les Français pour des imbéciles ? Le halal, un débat "raciste et odieux", Le Quotidien d'Oran, 7 mars 2012.
  88. France PM scrambles to defuse halal-kosher row, haaretz.com, 8 mars 2012.
  89. « C'est un mythe, affirme le grand rabbin Bruno Fiszon, spécialiste de la question au grand rabbinat de France. La redevance sur la viande casher dans le circuit classique, c'est totalement faux. Elle est payée par le consommateur des produits casher et seulement prélevée sur la viande étiquetée casher ».
  90. Même dénégation de la part du président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui : « La redevance est perçue sur la viande certifiée halal ».
  91. .
  92. Bruno Benjamin, Président délégué du consistoire israélite de Marseille, le 7 mars 2012.
  93. .
  94. . Ce texte en forme d’alerte n’a pas fait l’objet, de la part de l’institution, d’une véritable diffusion ni de commentaires destinés à l’encadrement.
  95. Besançon le 30 mars 2012.
  96. Dans nos cantines scolaires, nous voulons les mĂŞmes menus pour tous les enfants de la RĂ©publique laĂŻque. Discours du 7 avril 2012 Ă  Saint Raphael Var.
  97. Loractu le 25 juin 2012
  98. Et la Laïcité dans tout ça.
  99. du Guide de la Ligue de l'enseignement
  100. « Une étiquette « abattage conventionnel garanti » créée par un abattoir provençal. »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
  101. Public Senat
  102. Le Point 19/07/2013
  103. Le Progrès 17/07/2013
  104. La France Agricole
  105. La France agricole le 26 juin 2013
  106. Rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail juillet 2013.
  107. France. La polémique sur le halal s'exporte bien, hélas
  108. Le gouvernement québécois rassure sur la sécurité de la viande
  109. Wort Luxembourg le 16 avril 2012
  110. Lord Taylor : « Le gouvernement se félicite de cette approche car elle permettra l'information des consommateurs à prendre en considération aux côtés de mesures visant à minimiser la souffrance des animaux abattus sans étourdissement préalable. En attendant, nous étudions comment nous pouvons utiliser la législation nationale ».
  111. Ajib le 19 juin 2012
  112. Chiourim.com le 29 juin 2012
  113. http://www.knack.be/nieuws/belgie/voor-n-va-moet-verbod-op-onverdoofd-slachten-in-volgend-regeerakkoord/article-normal-701473.html#link_time=1462866081
  114. Al Kanz le 24 juin 2012
  115. 30 millions d'amis
  116. « Pologne info »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le )
  117. L'abattage rituel déclaré contraire à la Constitution en Pologne
  118. La vie.fr.
  119. « Danemark : à l'hôpital, que du halal »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?) (consulté le ), sur le site fait religieux.com, 22 août 2013.
  120. Le Danemark met fin à l’abattage rituel, Le monde, 18 février 2014.
  121. Abattage : Bardot veut rencontrer Hollande, Le Figaro, 18 février 2014.

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.