Accueil🇫🇷Chercher

Ombre pluviométrique

L’ombre pluviométrique est un phénomène météorologique qui se produit sur le versant d'une montagne qui n'est pas soumis au flux direct des masses d'air humide. Alors que le versant au vent de la montagne est copieusement arrosé lors de l'arrivée de masses d'air humide menant à la formation de nuages et de précipitations, le côté protégé des vents reste beaucoup plus au sec car l'humidité atmosphérique s'est déjà déposée sur le versant face au vent au moment où la masse d'air arrive. Le phénomène est parfois lié à l'effet de foehn et parfois à une séparation entre la circulation de bas niveau et celle de haut niveau près d'un relief montagneux important.

Schéma de l'apparition d'une ombre pluviométrique.

« Ombre » est employé par analogie parce que le versant au vent de la montagne fait écran à la pluie pour le versant moins arrosé. L'expression est relativement récente (en anglais rain shadow) mais reconnue par l'Organisation météorologique mondiale[1]. Les climatologues lui préfèrent souvent la notion plus générale de climat d'abri, qui englobe les multiples effets, pluviométriques et autres, que produit ce positionnement topographique.

Description

Au niveau des océans, sous l'effet de la chaleur, d'énormes quantités d'eau s'évaporent avant d'être transportées par des masses d'air. Lorsque ces masses d'air rencontrent des montagnes, elles sont forcées de prendre de l'altitude pour pouvoir passer outre à la dénivelée et continuer leur course. En grimpant et alors que la pression atmosphérique diminue, l'air se refroidit lentement lors d'un processus adiabatique. L'humidité de l'air a alors tendance à se condenser et à former des nuages qui donnent des précipitations parfois abondantes. Le versant de la montagne qui est face au vent peut recueillir ainsi d'énormes quantités de précipitations (pluvieuses ou neigeuses en fonction de l'altitude et des températures).

Il existe ensuite deux façons pour que le côté sous le vent soit en ombre pluviométrique :

Effet de foehn

Lorsque les nuages ont atteint le sommet et se sont refroidis, le processus inverse se produit. En descendant sur l'autre versant et alors que la pression augmente d'autant, l'air se réchauffe petit à petit (effet de foehn) et la condensation se réduit fortement, ce qui fait que les précipitations diminuent puis disparaissent d'autant plus qu'une grande partie de l'humidité a déjà disparu sous forme de précipitations sur l'autre versant. La région qui est affectée par l'ombre pluviométrique est ainsi plus aride[2].

Effet de barrière

Si la circulation atmosphérique n'est pas assez forte ou non perpendiculaire à l'obstacle sous le sommet de la montagne, l'air de bas niveau ne passe pas de l'autre côté. Ainsi, un découplage se produit entre la circulation humide de bas niveau qui demeure en amont et celle en altitude qui continue de l'autre côté. Cette dernière peut être chargée de nuages mais les précipitations tombent dans de l'air sec de l'autre côté et s'évapore, donnant de la virga qui ne touche pas le sol.

Climatologie

Le plateau Tibétain (au-dessus) est un exemple concret de l'ombre pluviométrique. L'humidité qui arrive par le sud et l'ouest est bloquée par la chaîne de l'Himalaya (zone de coloration verte et blanche). Le plateau tibétain est ainsi privé d'une grande partie des précipitations ce qui rend la région plus aride.

Vu que les vents dominants sont généralement orientés dans un flux d'ouest aux latitudes tempérées, les zones d'ombres pluviométriques sont généralement situées à l'est de zones montagneuses. Cependant, l'orientation des chaînes montagneux étant aussi important, certains zones vont être orientées différemment. Dans les zones tropicales soufflent les alizés qui sont des vents de nord-est dans l'hémisphère nord et de sud-est dans l'hémisphère sud. Les zones d'ombres pluviométriques se situent donc sur les versants ouest des montagnes aux basses latitudes.

Ci-dessous sont donnés quelques exemples de zones d'ombre pluviométrique.

Afrique

  • Le cĂ´tĂ© au vent de Madagascar reçoit de l’air chaud et humide par les alizĂ©s alors que le cĂ´tĂ© opposĂ© (l’ouest) est dĂ©sertique, l’air devant passer au-dessus d'un haut plateau.
  • Dans l’ouest de la province du Cap en Afrique du Sud, la vallĂ©e de la rivière Breede et le dĂ©sert du Karoo sont dans l’ombre de la ceinture plissĂ©e du Cap et sont arides.
  • L’Atlas marocain est en partie responsable du climat du Sahara.

Amérique du Nord et Antilles

Les chaînes de montagnes le long de la côte ouest du continent (Cascades, Rocheuses, Sierra Nevada, etc.) offrent un important obstacle à l’entrée de l’humidité du Pacifique à l’intérieur des terres. L’effet le plus prononcé est dans les régions entre deux chaînes parallèles qui peuvent ainsi bloquer l’humidité arrivant de l’est également[3]. Il s'agit entre autres des déserts de la province géologique de Basin and Range et au Mexique, incluant :

La côte sud-ouest des Antilles (Cuba, Hispaniola, la Jamaïque, etc.) est plus sèche que leur côte est à cause de l’ombre pluviométrique des montagnes subissant les alizés. De la même façon, il y un contraste marqué entre les deux côtés des îles Hawaï.

Amérique du Sud

  • Le dĂ©sert d'Atacama, au Chili, est l’endroit le plus sec sur Terre car il est Ă  l’ouest sous l’ombre des Andes et sous l’effet de l’anticyclone de l'Ă®le de Pâques du cĂ´tĂ© Pacifique.
  • La province de Mendoza, en Argentine, est une rĂ©gion agricole et vinicole importante qui dĂ©pend entièrement de l’irrigation provenant des eaux de fonte des glaciers car elle est dans l’ombre des Andes qui la coupe de l’humiditĂ© du Pacifique.
  • La Patagonie est dans le mĂŞme cas et n’est utilisĂ©e que pour le pâturage des moutons.
  • La pĂ©ninsule de Guajira, dans le nord de la Colombie, est dans l’ombre de la sierra Nevada de Santa Marta. MalgrĂ© sa position près de tropiques, elle est semi-aride et il ne tombe pas de pluie de sept Ă  huit mois de l’annĂ©e.

Asie

Europe

  • Les Pennines Ă  travers les Ă®les Britanniques donnent une ombre sur l’est du Royaume-Uni par vents sud-ouest. Manchester et Glasgow reçoivent ainsi le double des prĂ©cipitations de villes comme Sheffield et Édimbourg[4].
  • La cordillère Cantabrique divise l’Espagne entre la cĂ´te Cantabrique, très verte, et le plateau central, très sec.
  • En France mĂ©tropolitaine, les CĂ©vennes jouent un rĂ´le analogue. Ă€ l'ouest de la chaĂ®ne, les hauts-plateaux sont très humides, alors que les basses vallĂ©es de l'Ardèche et du Gard, ainsi que la basse-vallĂ©e du RhĂ´ne sont beaucoup plus arides et ont un climat mĂ©diterranĂ©en. On observe aussi un phĂ©nomène similaire au nord du Massif central : la chaĂ®ne des Puys provoque Ă©galement un effet de foehn qui a pour consĂ©quence de rĂ©duire considĂ©rablement les prĂ©cipitations dans la plaine de la Limagne (qui a un climat semi-continental d'abri). Ainsi, la moyenne annuelle de prĂ©cipitations n'est que de 57 cm Ă  Clermont-Ferrand[5] ce qui en fait l'une des villes avec la pluviomĂ©trie la plus faible de France. Un phĂ©nomène analogue se produit dans les vallĂ©es intra-alpines (notamment autour de Grenoble et sur la Savoie). Il en est de mĂŞme en Haute-Provence et sur les versants français et espagnol des PyrĂ©nĂ©es. De mĂŞme, l'effet de foehn fait que Colmar, dans le Grand Est, est aussi une ville française assez sèche avec 61 cm de prĂ©cipitations par an[6].
  • En Suisse, le canton du Valais est connu pour ĂŞtre particulièrement sec.
  • La rĂ©gion vinicole du PiĂ©mont, dans le nord de l’Italie, est presque entièrement entourĂ©e des Alpes et reçoit peu de pluie (ex. 527 mm Ă  Asti [7]).
  • En Scandinavie, des villes comme Oslo qui se situent Ă  l'est des montagnes bĂ©nĂ©ficient d'un climat plus sec que celles de la cĂ´te atlantique comme Bergen (Norvège).

Océanie

  • En Nouvelle-CalĂ©donie, la cĂ´te est environ trois fois plus arrosĂ©e que la cĂ´te ouest de la Grande Terre. Les pluies apportĂ©es par les alizĂ©s sont bloquĂ©es par la ChaĂ®ne centrale qui parcourt l’île sur toute sa longueur.
  • Sur l’île du Sud de la Nouvelle-ZĂ©lande, les Alpes du sud interceptent l’humiditĂ© venant de la mer de Tasmanie. Du cĂ´tĂ© ouest il tombe jusqu’à 6 300 mm par an et par endroits seulement 380 mm Ă  50 km Ă  l’est de celles-ci.
  • Dans les États de Nouvelle-Galles du Sud et Victoria en Australie, les Snowy Mountains et les montagnes cĂ´tières donnent un climat sec dans la rĂ©gion de Monaro.
  • En Australie-Occidentale, les rĂ©gions de Wheatbelt et de Great Southern sont dans l’ombre des monts Darling. Par consĂ©quent, il tombe Ă  Mandurah, près de la cĂ´te, environ 700 mm par an mais Ă  Dwellingup, 40 km Ă  l’intĂ©rieur des terres et sur la face ouest des montagnes, la pluviomĂ©trie est de plus de 1 000 mm et Narrogin, Ă  130 km plus Ă  l’est, reçoit moins de 500 mm.

Sources

Référence

  1. Organisation météorologique mondiale, « Ombre pluviométrique », sur Le grand dictionnaire terminologique, Office québécois de la langue française, (consulté le )
  2. Whiteman 2000
  3. (en) « How mountains influence rainfall patterns », sur USA Today, (consulté le )
  4. (en) « UK Rainfall averages », sur Met Office (consulté le )
  5. Météo de la France, p. 226
  6. Météo de la France, p. 239
  7. (en) « Asti weather », sur weatherbase.com (consulté le )

Bibliographie

  • (en) C. David Whiteman (trad. du grec ancien), Mountain Meteorology : Fundamentals and Applications, New York, Oxford University Press, , 355 p. (ISBN 978-0-19-513271-7, LCCN 99024940, lire en ligne)
  • (fr) [MĂ©tĂ©o de la `France] Jacques Kessler et AndrĂ© Chambraud, La meteo [sic] de la France, JClattès, , 312 p. (ISBN 978-2-7096-0491-8)

Annexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.