Le Salon beige
Le Salon beige est un blogue quotidien d'actualité catholique et créé en 2004 en France. Considéré comme un site influent parmi les milieux catholiques traditionalistes et « pro-vie », il s'oppose notamment à l'euthanasie[1], à l'avortement, au mariage homosexuel et à la théorie du genre. Il est classé à l'extrême droite ou proche de celle-ci.
Le Salon beige | |
Adresse | lesalonbeige.fr |
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Commercial | Non |
Publicité | Oui |
Type de site | Blog d'actualité |
Langue | Français |
Inscription | Sans |
Siège social | Paris France |
Directeur de la publication | Guillaume de Thieulloy |
Lancement | 2004 |
État actuel | En activité |
Plusieurs médias de vérification de l'information ont mis en avant le fait que le site diffuse régulièrement de fausses informations.
Histoire
Le blog est lancé en [2] par trois laïcs catholiques anonymes et non professionnels des médias en s'inspirant du modèle des États-Unis où, selon Marc Baudriller, l'importante audience de certains blogs catholiques a permis de « peser sur le monde des idées »[3]. Son principal auteur, connu sous le pseudonyme « Michel Janva », exerce la profession de « contrôleur des exportations de matériels de guerre » dans une entreprise d'armement et est de sensibilité traditionaliste[4].
En 2010, Guillaume de Thieulloy rachète le site, en devient le responsable, et rémunère, dès lors, ses chroniqueurs[5].
Audience
La première année, le blog enregistre en moyenne une affluence de 5 000 visites par jour. En 2006, ses auteurs défendent le pape Benoît XVI lors de la controverse de Ratisbonne. Son audience se situe alors entre 6 000 et 8 000 visites par jour, ce qui en fait l'un des blogs d'orientation catholique les plus fréquentés[6] - [7]. En 2007, à la faveur de l'actualité politique (l'élection présidentielle française) et religieuse (motu proprio de Benoît XVI), le blog passe à 10 000 visites par jour[6].
En 2008, il frôle les 12 000 visites par jour et atteint les 15 000 visites par jour en 2009, alors que l'actualité catholique est notamment marquée par la levée des excommunications des évêques de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X[6].
En 2011 et 2012, le blog revendique 20 000 visites par jour[8]. Son audience monte à une moyenne de 46 000 visites début 2013 lors des manifestations d'opposition au mariage homosexuel en France. Le , lors de l'élection du pape François, le blog atteint un pic d'audience à près de 100 000 visiteurs[2].
Contenu
Se définissant d'abord comme catholiques, les contributeurs du blog indiquent fonder leur ligne éditoriale sur trois principes énoncés par Benoît XVI en 2006 :
Le blog traite ainsi de l'actualité nationale et politique, en portant une attention particulière au comportement des élus vis-à -vis des trois principes[9].
Le Salon beige relaie des tribunes opposées au Pape François qui selon La Croix « s'est mis à dos des catholiques de droite et d'ultra-droite »[10].
En décembre 2021, Le Salon beige fait partie des sites internet à relayer un appel à la mobilisation contre la tenue d'un concert de la musicienne suédoise Anna von Hausswolff devant se tenir dans l'église Notre-Dame-de-Bon-Port à Nantes. Anna von Hausswolff est accusée de satanisme pour sa chanson Pills dans laquelle elle chante avoir « fait l'amour avec le Diable », métaphore pour la consommation de drogue. Suivant cet appel, le concert est empêché de se produire par des catholiques intégristes[11].
Positionnement politique
La presse classe généralement Le Salon beige comme un blog d'extrême droite[3] ou proche de l'extrême droite. Le journal Le Monde le considère ainsi comme « très influent à l'extrême droite » et le classe parmi les « catholiques traditionalistes et intégristes »[12]. Le site Arrêt sur images et le magazine en ligne Slate le décrivent comme « proche de l'extrême droite »[13] - [14]. Le Journal du dimanche le classe à l'extrême droite[15]. Jacques Leclercq le considère comme « partenaire de Civitas », avec entre autres le quotidien Présent, le Blog de Jeanne Smits et l'Observatoire de la christianophobie[16], et remarque qu'il relaie des billets en provenance d'autres sites « allant du Figaro à la « conscience politique », des traditionalistes catholiques aux franges plus explicites du camp national et nationaliste »[17]. Pour Marc Baudriller, le site « a fédéré avec un succès incontestable toute une frange de catholiques militants dans sa sphère conservatrice »[18]. Vice News considère l'ensemble des sites dirigés par Guillaume de Thieulloy comme « marqués à l’extrême droite et promouvant une vision ultraconservatrice du catholicisme »[19]. Libération décrit ce dernier comme un « rouage important de la fachosphère » et le classe également à l'extrême-droite, avec une ligne « catholique, identitaire et réactionnaire »[20] - [21].
Mediapart le classe dans la « blogosphère d'extrême droite » et le décrit comme la « référence première » parmi les « sites traditionalistes, tournés vers la religion catholique et la sauvegarde de ses valeurs »[22].
Selon L'Obs, Le Salon beige fait partie des sites de la fachosphère qui soutient François Fillon contre Alain Juppé, rebaptisé « Ali Juppé » lors des primaires françaises de la droite et du centre de 2016. Guillaume de Thieulloy, directeur du Salon beige, considère Alain Juppé comme un « soutien des Frères musulmans », soutenant Jean-Frédéric Poisson qui selon L'Obs « a donné une certaine visibilité à ces théories conspirationnistes et délirantes »[23].
Le politologue Jean-Paul Gautier classe Ă©galement le Salon Beige Ă l'extrĂŞme-droite[24].
Sujets sociétaux
Le quotidien Le Monde estime qu'il bénéficie « d'une influence notable au sein de l'écosystème web des pro-vie »[25] et parle du Salon beige comme du « blog de référence de [la] frange catholique « ultra » » opposée au mariage homosexuel en France[26]..
Au mois de , un des contributeurs du blog réalise un classement « pro-famille » des députés français, en examinant les votes de 28 textes entre 2002 et 2007, comme la proposition de loi de Christine Boutin sur la pornographie à la télévision[27].
Le Salon beige s'oppose à la théorie « du genre »[28], et particulièrement à ce que le site considère être des expérimentations menées en milieu scolaire autour du concept de genre, comme le programme ABCD de l'égalité, lancé à la rentrée 2013[29] - [30] - [31]. En , il dénonce, avec le Printemps français, le caractère selon eux idéologique de certains livres proposés aux enfants dans les bibliothèques municipales de plusieurs villes de France en établissant une liste noire, s'indignant que des villes comme Versailles « dans laquelle qu'on pourrait croire que le lobby LGBT ne pénètre pas » en fassent partie. Les ouvrages pris pour cible ont notamment pour titre Papa porte une robe, Tango a deux papas et pourquoi pas ?, Mademoiselle Zazie a-t-elle un zizi ? ou encore La fille qui voulait être un garçon. Le site prévoit en remplacement des lectures bibliques[32] - [33].
Positionnement pro-russe
Le Salon beige fait partie des sites qui « citent sans distance la propagande officielle de la Russie à propos de l'Ukraine » selon Slate[34]. Pour Libération, le Salon beige fait partie « des sites prorusses de la fachosphère » relayant entre autres la propagande pro-Bachar el-Assad de la Russie sur la guerre civile syrienne[35].
Procédure juridique perdue contre Le Salon Beige
En , le responsable du site est condamné pour diffamation à la suite de la publication en 2013 de deux photos accolées comparant le traitement réservé à un militant de La Manif pour tous à celui infligé aux enfants juifs sous l'Occupation[36] interdits d'entrer dans un jardin public. Cependant, en 2017, la Cour de cassation casse sans renvoi l’arrêt de Cour d’appel de Paris, en date du , qui confirmait la peine[37] - [38].
Fausses informations
Le site est classé dans le top 10[39] des sites complotistes français les plus visités selon Conspiracy Watch, qui a mené un travail détaillé répertoriant les fausses informations diffusées par le site internet[40].
Le site est aussi classé rouge par l'outil Décodex du Monde, recensant les sources « diffusant régulièrement de fausses informations ».
Parmi celles-ci, une affirmation selon laquelle Les Restos du cœur refuseraient les dons alimentaires contenant du porc, une rumeur infondée affirmant que les vaccins envoyés en Afrique contiendraient des agents anti-fertilité[41]. Une rumeur reprise par le Salon Beige et Riposte Laïque selon laquelle un chant islamique aurait été appris aux enfants d'une école maternelle publique vient d'un mail de témoignage mensonger, créé de toutes pièces pour délibérément tromper les rédacteurs du site qui n'ont procédé à aucune vérification. L'auteur du mail voulait « Montrer qu'il est très facile (...) de faire croire ce que l'on veut à cette communauté, cette bulle qui s'autoalimente et qui s'autoconfirme dans ses idées, ses obsessions » et « Faire comprendre que la vérification, le croisement des sources indépendantes (...) c'est pas si mal finalement »[42]. Le Salon Beige a mis à jour son article dès qu'il a eu connaissance du mensonge par un nouveau message, et à également publié un « erratum » dans lequel il explique son erreur. La méthode de l'auteur du mail est critiquée par les Décodeurs à cause de la confusion qu'elle a créée en citant nommément une école d'Angers mais selon eux souligne aussi « les pratiques tout aussi contestables de sites militants peu préoccupés par l’authenticité des informations qu’ils diffusent »[42].
Le site a également partagé une fausse information de l'hebdomadaire d’extrême droite Minute affirmant à tort que 40 000 migrants dormiraient dans une chambre d’hôtel toutes les nuits, aux frais des contribuables[43].
Notes et références
- Émilie Cailleau, « Le débat sur l'euthanasie secoue la blogosphère », L'Express,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Antoine Vouillazère, « Les catholiques se bousculent sur Le Salon beige », Minute, (consulté le ).
- Baudriller 2011.
- Albertini et Doucet 2016, p. 170.
- Albertini et Doucet 2016, p. 176-177.
- Baudriller 2011, p. [lire en ligne].
- Clara Georges, Étienne Seguier, Olivier Nouaillas et Philippe Merlant, « Présidentielles 2007 : Homos, cathos, Hulot. Quand les lobbies battent la campagne », La Vie, no 3207,‎ , p. 23 (lire en ligne, consulté le ).
- Céline Hoyeau, « Les blogs catholiques s'organisent », La Croix, (consulté le ).
- Baudriller 2011, p. [114] et [lire en ligne].
- Ces catholiques que le pape François dérange, La Croix, 17 octobre 2016.
- Sophian Fanen, « Concerts annulés : la communion des extrêmes droites » , sur Les Jours, (consulté le )
- Abel Mestre et Caroline Monnot, « Les familles de l'extrême droite sur le Net », Le Monde, (consulté le ).
- « « Homosexualiste »/ diffamation : Pierre Bergé menace un site », Arrêt sur images, (consulté le ).
- Slate.fr, « Le «style chrétien» investit Internet », sur Slate.fr, (consulté le )
- Stéphane Joahny, « Toutes les chapelles de l'extrême droite se mobilisent », JDD, (consulté le ).
- Leclercq 2012, p. 177.
- Leclercq 2012, p. 197.
- Baudriller 2011, p. PT77.
- « Comment les cathos tradis tentent de s'emparer des « gilets jaunes » », sur vice.com (consulté le )
- Pierre Plottu et Maxime Macé, « Lafont et Thieulloy : collaborateurs de sénateurs LR et piliers de la fachosphère », sur Libération.fr, (consulté le )
- « Le Salon Beige - Œil sur le front », sur oeilsurlefront.liberation.fr (consulté le )
- Olivier Clairouin, « Blogosphère d'extrême droite : cartographie des réseaux d'influence », Mediapart, .
- Primaire de la droite : face à « Ali » Juppé, la fachosphère vote Fillon, L'Obs, 22 octobre 2016.
- Jean-Paul Gautier, Les extrĂŞmes droites en France: De 1945 Ă nos jours, Syllepse, (ISBN 978-2-84950-570-0, lire en ligne)
- « Le web de l'avortement : pro VS anti », Blog Linkfluence sur LeMonde.fr, (consulté le ).
- Samuel Laurent, « Comment une partie de la « Manif pour tous » a voulu occuper les Champs-Élysées », Le Monde, .
- Baudriller 2011, p. [114].
- Il n'y a pas de « théorie du genre » mais des « études de genre » (de l'anglais « Gender Studies »).
- « « ABCD de l'égalité » : qu'est-ce que c'est exactement ? », Le Point/AFP, (consulté le ).
- Olivier Monod, « ABCD de l'égalité: « La mixité à l'école a été décrétée sans être pensée » », L'Express, (consulté le ).
- « Expérimentation des « ABCD de l'égalité » dans 10 académies volontaires », Ministère de l'Éducation nationale, (consulté le ).
- Vincent Leconte, « Le Printemps Français s'attaque aux bibliothèques », L'Obs, (consulté le ).
- Éléonore Prieur, « Bibliothèques municipales et Printemps Français : fausse alerte d'Aurélie Filippetti », Le Figaro, (consulté le ).
- Cyrille, le bras religieux du nationalisme de Poutine - Slate, 8 décembre 2014.
- Pauline Moullot, Propagande prorusse sur Alep : qui est cette «journaliste indépendante» qui cartonne sur le Web ?, Libération, 15 décembre 2016.
- « Le responsable du site Le Salon beige condamné en justice », La Croix, (consulté le )
- Photomontage comparant les mesures discriminatoires prises contre les partisans de la « Manif pour tous » à celles de la police de Vichy : absence de diffamation - Légipresse no 356, 12 décembre 2017.
- Cour de cassation, France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 novembre 2017, 16-86613, (lire en ligne)
- « Complosphère : quels sont les 10 sites les plus visités ? », sur Conspiracy Watch, (consulté le )
- « Le Salon Beige », sur Conspiracy Watch, (consulté le )
- Présentation du Salon beige, Le Monde (accès réservé aux abonnés)
- Comment des sites militants ont diffusé un faux témoignage sur la « propagande islamique » - Adrien Sénécat, Le Monde, 2 mai 2018.
- « Non, 40 000 migrants ne dorment pas à l'hôtel toutes les nuits en France », sur Rue89Lyon, (consulté le )
Annexes
Bibliographie
- Marc Baudriller, Les réseaux cathos : Leur pouvoir, leurs valeurs, leur nouvelle influence, Paris, Éditions Robert Laffont, , 329 p. (ISBN 978-2-221-11391-2, présentation en ligne).
- Jacques Leclercq, De la droite décomplexée a la droite subversive : Dictionnaire 2010-2012, Paris, Éditions L'Harmattan, , 251 p. (ISBN 978-2-296-96809-7).
- « Les catholiques en leur « Salon », dans Dominique Albertini et David Doucet, La Fachosphère : comment l'extrême droite remporte la bataille d'internet, Paris, Flammarion, coll. « Enquête », (ISBN 978-2-0813-5490-6, BNF 45124584), p. 165-193.