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Lagune de Venise

La lagune de Venise, ou lagune vénète, est une lagune de la mer Adriatique septentrionale, le long des côtes de la Vénétie où se situe la ville de Venise.

Venise et sa lagune *
Image illustrative de l’article Lagune de Venise
La lagune avant Venise : vue des lais naturels (barene) et des canaux (velme) qui les séparaient.
CoordonnĂ©es 45° 24′ 47″ nord, 12° 17′ 50″ est
Pays Drapeau de l'Italie Italie
Subdivision Province de Venise, Vénétie
Type Culturel
Critères (i) (ii) (iii) (iv) (v) (vi)
Numéro
d’identification
394
Zone géographique Europe et Amérique du Nord **
Année d’inscription 1987 (11e session)
Image illustrative de l’article Lagune de Venise
Carte de la lagune de Venise
Géolocalisation sur la carte : Vénétie
(Voir situation sur carte : Vénétie)
Venise et sa lagune
GĂ©olocalisation sur la carte : Italie
(Voir situation sur carte : Italie)
Venise et sa lagune
* Descriptif officiel UNESCO
** Classification UNESCO

La superficie de la lagune est d’environ 550 km2, dont 8 % sont occupĂ©s par la terre (Venise mĂŞme et les nombreuses petites Ă®les), 11 % environ sont en permanence composĂ©s d'eau, ou canaux draguĂ©s, et 80 % environ sont des zones marĂ©cageuses, des marais d'eau salĂ©e et des sansouires.

La lagune de Venise, ainsi que la ville de Venise, sont inscrites sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1987.

GĂ©ographie

La lagune de Venise est reliée à la mer Adriatique par trois embouchures : Lido-San Nicolò, Malamocco et Chioggia. Étant située à l’extrémité d’une mer méditerranéenne secondaire, allongée sur mille kilomètres du détroit d'Otrante au sud-est jusqu’à la Vénétie au nord-ouest, la lagune subit les puissantes seiches adriatiques, grandes variations du niveau de l’eau, surtout printanières et automnales, connues comme acque alte (« hautes eaux ») qui inondent périodiquement les îles les plus basses et la place Saint Marc, alternant avec des acque basse (« basses eaux ») qui rendent impraticables cette fois les canaux les moins profonds. Pour faciliter la navigation, les parcours plus profonds sont signalés par des ducs-d’Albe ou bricole, terme italien désignant une structure formée de trois piliers liés entre eux et enfoncés le long des canaux pour indiquer leurs bords.

  • Vue aĂ©rienne de la lagune vĂ©nitienne : au premier plan le Lido-San Nicolò
    Vue aérienne de la lagune vénitienne : au premier plan le Lido-San Nicolò
  • Image satellite de la lagune de Venise (dĂ©cembre 2001).
    Image satellite de la lagune de Venise ().
  • Panorama de la lagune.
    Panorama de la lagune.
  • La lagune Ă  la tombĂ©e de la nuit.
    La lagune à la tombée de la nuit.

Dans la zone centrale de la lagune se trouve la cité de Venise, à km de la terre ferme et km de la mer ouverte, dont la sépare le Lido. La ville est édifiée sur 118 petites îles (barene) séparées par 177 canaux (velme, dont le plus important est le Grand Canal) qu’enjambent 354 ponts, et elle est reliée à la terre ferme par un pont ferroviaire et routier. En outre, la cité s’étend sur la terre ferme par les agglomérations de Mestre, Marghera, Carpenedo (it) et Favaro Veneto.

Venise est une cité plus que millénaire d’art et de culture, chef-lieu régional et provincial, siège de deux universités, d’une école de commerce, de bibliothèques (la célèbre bibliothèque nationale Marciana), de nombreux musées, galeries d’art, et d’une profusion de commerces liés au tourisme ; en outre, les agglomérations de la lagune comptent d’innombrables activités commerciales, artisanales, industrielles et tertiaires. Les manifestations artistiques et culturelles de niveau international sont nombreuses.

À l'extrémité méridionale émerge la cité de Chioggia, également d’origine antique et médiévale.

Histoire

Pendant la dernière glaciation, la rĂ©gion vĂ©nitienne actuelle Ă©tait Ă©mergĂ©e et recouverte de toundra : parfois l’on extrait encore de la vase des dents de mammouth et d’autres restes d’animaux adaptĂ©s au froid. Lorsque les grands glaciers alpins fondirent il y a 12 000 ans, les eaux de fonte des fleuves PĂ´, Adige, Piave, Brenta, Bacchiglione, Sile et Marzenego apportèrent les alluvions qui sont l’actuel substrat de la lagune, elle-mĂŞme reliĂ©e, Ă  la suite de la remontĂ©e gĂ©nĂ©rale du niveau marin il y a 6 000 ans, au vaste marais Padusa (zone marĂ©cageuse de la plaine du PĂ´, de Modène Ă  Ravenne, formĂ©e par le delta du PĂ´, le fleuve Reno et les torrents des Apennins). La stabilisation hydrologique s’acheva par la formation du Lido, dĂ©jĂ  frĂ©quentĂ© au nĂ©olithique par des pĂŞcheurs, si l’on en juge par les hameçons en os que l’on peut parfois y trouver[1].

Dans l’antiquité tardive, au VIe siècle, dans le contexte des « invasions barbares », la lagune offrit un abri aux Romains qui, après la fin de l’Empire d’Occident, restèrent citoyens de celui d’Orient dans ce que les historiens modernes appellent l’« Italie byzantine » jusqu’à la création, au Xe siècle, de la République de Venise et, dans les deux siècles suivants, de son empire maritime méditerranéen. Avec un mètre en moyenne de profondeur, et un labyrinthe de canaux (velme), de vasières (piane), de lais naturels (barene) et de sansouires (palude), la lagune offrait une excellente protection contre les envahisseurs à la fois terrestres qui s’y envasaient, et maritimes qui s’y échouaient : seuls des bateaux à fond plat pouvaient y accéder à condition que le pilote connaisse bien la topographie des lieux. Les hommes y vivaient de la chasse, de la pêche, de l’agriculture et de la production de sel.

À l’époque romaine, Venetia était le nom de la région nord-orientale d’Italie. Après l’invasion des Lombards, la lagune, qui s’allongeait alors depuis Loreo dans le delta du Pô jusqu'à Grado au sud du Frioul, est désignée par le nom de Venetia maritima, « Venise maritime », et les habitations typiques de la lagune sont les casoni, cabanons de pêcheurs en bois et cannes des marais, utilisées comme refuges par les habitants de ces zones.

La lagune de Venise, carte de 1603 (archive de Ferrare).

À l’époque médiévale, la lagune forme de Dogat de la république vénitienne, c'est-à-dire son centre politique et économique placé directement sous l’autorité du doge et administré par neuf podestats ; à l’ouest, au-delà de ses rivages, commencent les Domini di Terraferma (« Domaines de la Terre ferme ») administrés par un Provveditore generale di Terraferma et à l’est, au-delà du Lido, commence le Stato da Màr (« État de la mer ») placé sous l’autorité d’un Capitano general da mar[2].

Depuis l’époque des premières installations, l'activité humaine a profondément modifié l'aspect et l'équilibre hydrogéographique de la lagune, surtout à partir du XIVe siècle.

  • Des canaux de dĂ©rivation furent crĂ©Ă©s pour dĂ©river, directement dans l’Adriatique, les fleuves Sile et Piave au nord de la lagune vers Jesolo, puis les fleuves Brenta et Bacchiglione vers le sud, sous Chioggia.
  • Les embouchures des ports, initialement plus nombreuses, ont Ă©tĂ© rĂ©duites aux 3 actuelles : Lido-San Nicolò, Malamocco et Chioggia.
  • Les cordons sablonneux (les lidos) qui sĂ©parent la lagune de la mer ont Ă©tĂ© renforcĂ©s et stabilisĂ©s avec les Murazzi, très longs barrages en pierre d'Istrie posĂ©s pour la dĂ©fense du pĂ©rimètre extĂ©rieur lagunaire. Au XVIIIe siècle, le lido de Pallestrina, large de 14 mètres, long de 14 km et Ă  4 mètres au-dessus du niveau moyen des vagues, demanda 42 annĂ©es de travail (1740-1782). Au XIXe et XXe siècles, les bouches des trois ports furent consolidĂ©es par des jetĂ©es de pierres avançant dans la mer.
  • Depuis toujours les canaux Ă  l’intĂ©rieur de Venise sont curĂ©s de la boue qui s’y accumule.

Aujourd’hui encore, la lagune dessert le port de Venise (commercial et industriel), celui de Chioggia (commercial et pêche), mais aussi l’arsenal de la marine militaire et des chantiers navals (à Venise, Marghera, Chioggia et Pellestrina). En dépit des pollutions et des activités industrielles et de l’afflux touristique, la lagune reste un milieu propice à la pêche, à la chasse et aux activités aquacoles (conchyliculture et pisciculture).

GĂ©ophysique

Bassin versant de la lagune

Le vaste bassin d’écoulement de 200 000 ha qu’est la VĂ©nĂ©tie, se concentre dans un bassin rĂ©cepteur de 250 ha, formant une zone humide, vaste territoire marĂ©cageux :

  • sur les bords des fleuves, lĂ  oĂą le courant est moins rapide, les sables alluvionnaires issus des montagnes alpines se dĂ©posent par gravitĂ© (dĂ©cantation) ;
  • sans le thalweg des fleuves, lĂ  oĂą la vitesse des eaux est la plus Ă©levĂ©e et l’apport de sable plus important, le flux avance dans la mer et subit deux oppositions :
    • la très faible dĂ©nivellation des fonds marins ; en effet Ă  30 km au large, la profondeur n’est que d’environ 26 mètres, soit une pente d'un millimètre par mètre. Cette configuration de terrain est propre Ă  l’Adriatique du nord et freine le flux alluvionnaire (contrairement Ă  ce qui se passe pour le RhĂ´ne oĂą la très forte pente de la MĂ©diterranĂ©e au-delĂ  de la Camargue, empĂŞche toute formation de « lido ») ;
    • les marĂ©es s’opposent Ă  l’avancement des alluvions et les refoulent en formant les cordons littoraux ou lidos.

Au fil des siècles, l’action des courants marins de l’Adriatique a mobilisé ces sédiments fluviaux et formé des cordons littoraux et de petites îles naturelles en face de l’embouchure des fleuves.

Vie dans la lagune

Les zones marécageuses, formées de limons très fertiles, se couvrent d’algues et de phanérogames aquatiques, qui par leurs longues racines maintiennent les sols et empêchent l’érosion par les marées. En effet, toutes les six heures, la marée entrant dans la lagune par les trois ports, en ressort complètement au bout de deux à trois heures. Les eaux et, partant, les sédiments sont freinés par les algues et le réseau très tortueux des milliers de petits canaux qui serpentent au milieu des lais (ou barene) et des hauts-fonds (ou velme). L’érosion due aux marées est compensée par l’apport constant des sables fluviaux.

En 1150, Ă  partir de Ficarolo (20 km en amont de Ferrare), les eaux changèrent de direction vers le bras nord du PĂ´ au dĂ©triment du PĂ´ di Primaro et du PĂ´ di Volano, accentuant l’apport d’alluvions dans la zone nord du delta. Cet apport d'alluvions, conjointement Ă  ceux de l'Adige, constitua un ensablement de la fossa Claudia (ou Clodia, futur Chioggia) au sud de la lagune

Actions de l’homme

Actions directes

Les interventions de l’homme, au cours des siècles, ont provoqué un appauvrissement très net de l’apport en sables fluviaux dans la lagune.

  • Au XIVe et XVe siècles, le fleuve Brenta qui s’écoulait en face de Venise fut dĂ©viĂ© plus au sud en face du port de Malamocco.
  • Au XVIe siècle, le fleuve Piave fut Ă©galement dĂ©viĂ© de Jesolo plus au nord (Taglio di Re). Le fleuve Brenta fut de nouveau dĂ©viĂ© (Brenta Nova ou Cunetta) plus en amont de son cours et dirigĂ© vers Chioggia.
  • En 1604, la rĂ©alisation du Taglio di Porto Viro par la RĂ©publique de Venise dĂ©via les eaux vers la poche de Goro plus au sud, « sauvant ainsi le lagune de l’ensablement » et modifiant du mĂŞme coup la morphologie du delta du PĂ´. Les alluvions créèrent, Ă  partir de Porto Tolle de nouvelles Ă®les (Isola della Donzella et Isola di Polesine), mais dans la rĂ©alitĂ© « ce qui apparaĂ®t, au lecteur d'aujourd'hui, comme une action de sauvegarde de la nature Ă  intĂ©rĂŞt touristique, n'est en fait, au XVIIe siècle, qu'une action politique, commerciale et stratĂ©gique entre la RĂ©publique de Venise contre l'État papal de ClĂ©ment VIII, État qui comprenait Ă©galement la Romagne, donc les territoires du delta du PĂ´ sous l'autoritĂ© de Ferrare. Rapports sur l’hydrographie de l’architecte Giovan Battista Aleotti (1546-1636) fit au pape en aoĂ»t 1599 et en mars 1600 au duc de Modène ; sur consĂ©quence d’un dĂ©tournement des eaux du PĂ´ dans la poche de Goro : « …un ensablement du port de Goro obligerait le commerce fluvial sur la Lombardie Ă  passer par la VĂ©nĂ©tie et donc de lui payer les 13 % de droit… ». »[3]
  • En 1610, un nouveau canal (Taglio Novissimo) amène l’excĂ©dent d’eau du Brenta, depuis Mira Ă  Brondolo, oĂą il rejoint la dĂ©viation de fleuve Bacchiglione.
  • Fin du XVIIe siècle, le fleuve Sile est dĂ©viĂ© par un canal (Taglio del Sile) qui l’amène dans l’ancien lit du Piave pour se jeter dans le port de Jesolo, plus au nord.
  • Au XVIIIe siècle, construction des « Murazzi » pour protĂ©ger le cordon littoral de Pellestrina de l’érosion de la mer.
  • Au XIXe siècle, construction du pont ferroviaire de Mestre Ă  Venise et du nouveau port commercial. Travaux de consolidation des issues des ports du Lido et de Malamocco, par la construction des jetĂ©es qui Ă©vitent l’ensablement.
  • Au XXe siècle, crĂ©ation de la première zone industrielle de Marghera et creusement du canal qui conduit au port du Lido. Construction du pont routier le long de la voie ferrĂ©e. Creusement du « canal des pĂ©troliers » entre Marghera et le port de Malamocco.

Actions indirectes

  • Le pompage des eaux dans la nappe phrĂ©atique a provoquĂ© un affaissement des sols de plus de 20 cm.
  • La pollution due aux nitrates et produits azotĂ©s provoque la disparition des algues phanĂ©rogames au profit de l'Ulva rigida. Cette dernière, qui se nourrit de ces pollutions en produisant de l’oxygène utile Ă  la faune, ne peut retenir efficacement les sols avec ses racines très courtes (rhizoĂŻdes).
  • Les techniques de pĂŞche illicites : telle la pĂŞche aux coques (vongole) et palourdes avec des appareils qui aspirent les fonds marins jusqu’à 50 cm de profondeur, dĂ©truisant toute forme de vie.
  • Les courants marins, les vents, comme la Bora, qui accĂ©lèrent le dĂ©sensablement.
  • Les embarcations Ă  moteur provoquent des vibrations et des ondes qui Ă©rodent les sols, favorisant la disparition des barènes et Ă®lots naturels. Cette nuisance est due Ă  la vitesse excessive des embarcations appartenant aux principales familles qui dĂ©tiennent les transports privĂ©s, contre lesquelles les autoritĂ©s (Police de la ville, Finance, capitainerie du port, police lagunaire et magistrature des eaux) ne peuvent (ou ne veulent) rien faire.

Conséquences

  • Le dĂ©sĂ©quilibre entre l’apport de sables fluviaux et l’érosion des marĂ©es, dĂ©grade l’aspect morphologique de la lagune. Il a Ă©tĂ© observĂ© que, depuis un siècle, 60 millions de tonnes de sable sont partis en mer, la superficie des lais ou barènes est rĂ©duite de 70 Ă  40 km2 et que la profondeur a augmentĂ© de 35 cm (ce qui aggrave le phĂ©nomènes des ondes).
  • La disparition des petits canaux et la rĂ©duction de la section des canaux navigables provoquent un nivellement des fonds marins. Ce phĂ©nomène favorise l’expansion dĂ©sordonnĂ©e de la marĂ©e, l’accĂ©lĂ©ration des courants et, annuellement, la dispersion en mer de 700 000 tonnes de sable alors que les fleuves n’en apportent plus que 30 000 tonnes.

Sauvegarde de la lagune

Projet MOSE en cours de réalisation

Aujourd’hui, les îles constamment émergées représentent 5 % de la superficie de la lagune, alors que 20 % sont des lais (bas fond, dos sablonneux laissé à découvert lorsque la mer se retire et recouvert d’une végétation résistante au sel).

Quelques îles plus petites sont entièrement artificielles, alors qu’une grande partie des zones autour du port de Marghera sont issues d’une intense activité d’assainissement. Par contre les grandes îles de la bande côtière (Lido, Pellestrina et Cavallino-Treporti) sont sablonneuses.

Après des années de palabres, le projet MOSE de sauvegarde de la lagune contre les assauts de la mer a démarré en 2003 malgré diverses oppositions. Sa mise en service a eu lieu le 3 octobre 2020[4].

Conclusion

Le destin de la lagune peut être envisagé selon trois scénarios :

  • si la sĂ©dimentation compense l’érosion, la lagune survivra selon un Ă©quilibre assez prĂ©caire ;
  • si l’apport en sĂ©diments est trop important, la lagune ne sera plus qu’une terre Ă©mergĂ©e, comme le delta du PĂ´ aujourd’hui ;
  • si la marĂ©e et son Ă©rosion ont le dessus, Ă  ce rythme, dans un demi-siècle, la lagune ne sera plus qu’un bras de mer et Venise sera une Ă®le Ă  km au large (si l’érosion n’affecte pas le sol oĂą sont enfoncĂ©s les pilotis).

Écosystème lagunaire

L’écosystème lagunaire est composé de trois entités étroitement liées par des échanges réciproques : le bassin d’écoulement, la lagune même et la mer Adriatique.

Le bassin d’écoulement

Le bassin versant vénitien draine les eaux douces des fleuves, les eaux usées des centres urbains, industriels et agricoles, répartis administrativement sur trois provinces :

  • province de Venise pour 52 %,
  • province de Padoue pour 40 %
  • province de TrĂ©vise pour 8 %, soit quelque 1,5 million d’habitants rĂ©partis sur 101 communes. Ces eaux se dĂ©versent dans la lagune au travers de 29 embouchures, auxquelles il faut ajouter les rĂ©seaux d’eaux noires et des stations d’épuration urbaines et industrielles.
  • Superficie de bassin d’écoulement : 1 877 km2
  • Superficie Ă  usage agricole : 1 164 km2
  • RĂ©seau hydraulique (fleuves, canaux) : 2 515 km
  • Volume d’eau douce dĂ©versĂ©e par an : 900 millions de m3
  • QuantitĂ© d’azote apportĂ©e par an : 7 000 tonnes
  • QuantitĂ© de phosphore apportĂ©e par an : 1 500 tonnes

La lagune

La lagune de Venise est la plus Ă©tendue d’Italie avec une superficie de 550 km2 environ, dont 418 sous les eaux. Elle est dĂ©limitĂ©e au nord-est par le fleuve Sile, au sud- ouest par le Brenta, Ă  l’est par les cordons littoraux de Cavallino, Lido, Pellestrina et Sottomarina et Ă  l’ouest par la terre ferme.

Du point de vue hydraulique, la lagune est composĂ©e de trois bassins communiquant avec la mer par les embouchures des ports du Lido (large de 800 m), de Malamocco et Chioggia (large de 400 m chacun). Du fait que la marĂ©e agit simultanĂ©ment sur les trois embouchures, les eaux entrant dans la lagune ressortent par les mĂŞmes embouchures au moment du reflux. Ce phĂ©nomène naturel est contrariĂ© par temps de bora oĂą les eaux des trois bassins se mĂ©langent engendrant des courants transversaux Ă  l’intĂ©rieur de la lagune. La grande variation de niveau entre les bords du bassin et les canaux navigables provoque une nette augmentation de la vitesse des eaux Ă  la sortie des ports.

Ces variations de vitesse des courants dans la lagune agissent également sur la granulométrie du fond, qui, de l’état sableux vers les ports (là où la vitesse est la plus élevée), devient graduellement argileux vers les l’intérieur, là ou la vitesse est plus faible ; cela favorise la fixation des substances organiques.

Le mélange des eaux de la mer avec celles du continent donne à la lagune, une ambiance saumâtre, avec une salinité qui varie avec les marées, les conditions atmosphériques et l’évaporation. La salinité la plus basse se trouve vers l’embouchure des rivières Dese, Osellino, Sile et Piave (zone de pêche).

La température de l’eau est très variable entre l’hiver et l’été avec une amplitude d’environ 20 °C. De 30 °C en saison chaude, l’eau peut atteindre en hiver les conditions de gel, surtout dans les zones internes où la profondeur et la salinité sont moindres. La variabilité de la température n’est due qu’à la seule action du soleil et au faible volume d’eau, volume qui, avec une inertie thermique relativement basse, provoque entre l’atmosphère et le fond un échange thermique très rapide.

La mer

Les variations entre les « marĂ©es astronomiques » (action combinĂ©e de la lune et du soleil) et les « marĂ©es climatiques » (action de la mĂ©tĂ©o), sont retransmises Ă  l’Adriatique par la MĂ©diterranĂ©e Ă  travers le dĂ©troit d’Otrante dans un mouvement rotatoire anti-horaire, qui, dans la partie nord, est dirigĂ© depuis les cĂ´tes istrio-dalmates vers la lagune. Mouvement parfois accentuĂ© par le sirocco venant du sud et surtout la bora venant de l’est. Ces courants de marĂ©e sont accentuĂ©s par des eaux plus chaudes et plus salĂ©es provenant de la MĂ©diterranĂ©e, qui remontent depuis des fonds de 4 000 m pour arriver dans l’Adriatique, le long des cĂ´tes albanaises et de l’ex-Yougoslavie, Ă  des niveaux variant rapidement ; passant Ă  1 000 m Ă  l’aplomb de Bari, puis de 265 m Ă  100 m au large d’AncĂ´ne. De plus dans le golfe de Venise, les eaux sont peu profondes puisque, Ă  30 km au large du littoral, la profondeur atteint en moyenne les 26 mètres, soit une pente d'un millimètre par mètre.

Chaque jour, deux cycles de marĂ©e assurent le renouvellement des eaux de la lagune et fournissent les conditions idĂ©ales Ă  l’écosystème. L’échange maximum peut atteindre plus d’un mètre (1 Ă  1,4 m) pendant la pleine ou nouvelle lune (Ă©tat de syzygie oĂą le soleil et la lune sont en alignement avec la terre), avec un apport d’eau de 350 millions de m3 Ă  chaque cycle. Pendant les autres pĂ©riodes de quadrature (quartiers de lune, le soleil et la lune forment un angle de 90 degrĂ©s avec la terre), l’apport en eaux est de 175 millions de m3 avec des variations de marĂ©es de 20 Ă  40 centimètres. L’afflux maximum des marĂ©es Ă  travers les 3 embouchures des ports est de 20 000 m3 Ă  la seconde.

Structure morphologique

Bas fonds

Ce sont les parties séparées par les canaux et dont le niveau du sol est toujours inférieur au niveau moyen de la mer.

Hauts fonds

Ces hauts fonds (velme en italien) sont des dos sablonneux toujours immergés, sauf dans le cas de très basse marée où ils apparaissent au-dessus du niveau de l’eau.

Marais

Les marais ou paludes sont d’origines fluviales, constamment immergés et présentant un sol vaseux ou marécageux.

Lais

Les lais (barene en italien) sont les parties de marais toujours hors de l’eau, sauf en cas de haute marée. Avec un sol vaseux et argileux peuplé d'une végétation halophile, ces zones sont la continuité des hauts fonds et sont constamment alimentées en sédiment par le mouvement des marées, ce qui augmente leur hauteur. Cette situation favorise le développement des algues et micro-algues comme la diatomée qui favorise la sédimentation et la stabilisation des sols marécageux. Cet état des sols facilite le développement d’autres espèces de plantes comme la salicorne qui peut résister à la forte salinité et à la force des courants en période de submersion.

Canaux

Le rĂ©seau des canaux de la lagune ressemble au rĂ©seau sanguin du corps humain. Des canaux larges et profonds (environ 15 m) assurent la navigation entre les diffĂ©rentes Ă®les et les embouchures des ports vers la mer. Ces canaux, rĂ©gulièrement draguĂ©s sont balisĂ©s par des ducs-d'Albe (ou bricole en italien), poteaux assemblĂ©s par trois et plantĂ©s dans le fond pour diriger la navigation et Ă©viter les Ă©chouages. Ces grands canaux sont prolongĂ©s par tout un rĂ©seau de canaux plus petits (ghebi en italien), plus Ă©troits et peu profonds qui alimentent en eaux toute la lagune et particulièrement les lais. Ces petits canaux sont toujours en eau mĂŞme dans les basses marĂ©es ; de plus, leur parcours très sinueux ralentit le flux et reflux de l’eau et rĂ©duit l’érosion des terres.

Le canal des pétroliers dans sa majeure partie a été creusé mécaniquement et de façon rectiligne, pour permettre aux pétroliers et autres gros navires de rejoindre le port de Marghera par l’embouchure de Malamocco. Les remblais extraits lors du creusement de ce canal ont permis la création de deux îles artificielles.

Miroirs d’eau

Ce sont des « trous » d’eau saumâtre peu profonds, alimentés par les petits canaux, dont l’origine et le développement ne sont pas clairement définis.

ĂŽles

Les îles sont des terrains qui ne sont jamais submergés pendant les hautes marées, qui permettent l’habitat humain et la culture. On distingue deux sortes d’îles :

  • les Ă®les naturelles formĂ©es de dunes qui sont, soit les restes d’anciens littoraux comme Vignole ou Sant'Erasmo, soit des Ă®les formĂ©es par les Ă©luvions apportĂ©es par les fleuves, comme Burano et Torcello.
  • les Ă®les artificielles montĂ©es sur pilotis par la main de l’homme, comme Venise ou Murano.

Cordon littoral

C'est un ensemble d'Ă©troites bandes de terre qui sĂ©parent la lagune de la mer, qui s’étend sur 50 km, entre l’embouchure des fleuves Brenta et Sile et qui est divisĂ© par les trois embouchures des ports en quatre segments : Cavallino-Treporti, Lido, Pellestrina et Sottomarina.

Zones de pĂŞche

Ce sont 31 zones d’une superficie totale de 92 km2, domaniales et privĂ©es, Ă  l’intĂ©rieur de la lagune, peu profondes, alimentĂ©es en eau saumâtre et qui sont depuis des temps très anciens dĂ©diĂ©es Ă  la pisciculture et Ă  la chasse. Elles sont composĂ©es de miroirs d’eau, de canaux grands et petits, naturels ou artificiels, de lais et de structures pour gĂ©rer l’apport en eaux salĂ©e ou douce.

Zones de remblai

Ce sont des îlots artificiels (cassa di colmata en italien) de forme géométrique, créés dans les années 1960 avec les remblais extraits lors du creusement du « canal des pétroliers », situés au sud du port de Marghera. Ces îlots ont remplacé des barènes existantes et ont été percés de petits canaux pour favoriser l’échange hydrique avec le reste de la lagune.

La plus importante de ces Ă®les est celle qui se trouve au sud du port de Marghera, sĂ©parĂ©e de celui-ci par le canal des pĂ©troliers. Cette Ă®le, entourĂ©e de 45 km de palplanches enfoncĂ©es jusqu'Ă  17 mètres de profondeur, retient une masse de dĂ©chets polluants recouverts par 2,5 millions de m3 de terre de dragage pouvant atteindre jusqu'Ă  9 mètres de hauteur.

Écologie

Les rejets des matières organiques d’origine mĂ©nagère comme les dĂ©tergents et surtout celles d’origine agricole comme les nitrates et produits azotĂ©s, conduisent Ă  l’eutrophisation du milieu. Le manque de lumière dans le milieu marin a fait chuter de 20 % les espèces animales, de 50 % les espèces vĂ©gĂ©tales recensĂ©es en 1996 et de 80 % la superficie de prairie sous-marine. La rarĂ©faction des plantes qui stabilisent le fond marin et la prolifĂ©ration de l’algue verte Ulva rigida, au dĂ©triment des autres vĂ©gĂ©taux, ont fortement aggravĂ© le problème d’envasement ; problème favorisĂ© par la configuration semi-fermĂ©e de la lagune et les très faibles courants marins. Les fonds marins sont aussi dĂ©truits par la pĂŞche Ă  la palourde, Ă  la suite du dragage sur plus de 10 cm de profondeur, arrachant toute forme de vĂ©gĂ©tation.

Le problème d'envasement de la lagune, de la pollution et le projet MOSE pour la construction du barrage mobile devant les trois issues vers la mer, se heurte également aux nécessités industrielles et économiques de la région. En effet, dans le port de Marghera (Mestre), la raffinerie de pétrole a, de tout temps, été une menace écologique. Les risques de pollution, d'incendie et d'accident sont quotidiens. Annuellement, le trafic maritime (environ 400 navires) représente plus de 10 millions de tonnes de produits pétroliers, dont 5,8 millions de tonnes de brut.

ĂŽles et archipels

Archipels

Une des quatre statues de lion décorant le pont Vigo se reflétant sur le canal Vena, à Chioggia.

ĂŽles

Références

  1. The building and history, Museo di Storia Naturale di Venezia, et , 2 sept. 2011.
  2. Jean-Claude Hocquet, Venise au Moyen Ă‚ge, Guide Belles Lettres des Civilisations, Les Belles Lettres, Paris 2003.
  3. Revue : “Ferrara-Voci di una città” de juin 2005, p. 62-63
  4. Niccolò Zancan, « Et Moïse sauve Venise des eaux », Courrier International (traduit de la Stampa), no 1564,‎ , p. 17

Annexes

Bibliographie

  • C. Canovetti, « La lagune et le port de Venise », dans Le GĂ©nie civil, , tome X, no 11, p. 169-170

Articles connexes

Liens externes

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