Infrason
Les infrasons sont des ondes sonores de basse frĂ©quence ; ce sont donc Ă la fois des vibrations mĂ©caniques et des oscillations acoustiques. Ils sont habituellement situĂ©s sous le seuil de la limite moyenne des sons graves perceptibles par l'oreille humaine, soit entre 0 Hz et 16 Ă 20 Hz environ[1] - [2], câest-Ă -dire que les pĂ©riodes de leurs vibrations acoustiques se rĂ©pĂštent toutes les 16 Ă 20 fois par seconde. Sâils sont Ă©mis Ă haute intensitĂ© dans une gamme situĂ©e entre 16 et 20 Hz[3], ils peuvent provoque pour l'auditeur une sensation de « tonalitĂ© »[1]. Aux frĂ©quences infĂ©rieures, pour des raisons physiologiques, ils ne sont plus perçus par l'ouĂŻe (Ă partir d'une limite dite « frĂ©quence supĂ©rieure des infrasons »)[1].
De nombreuses Ă©tudes ont portĂ© sur la production et la transmission des infrasons et des ultrasons, ainsi que sur la sensibilitĂ© humaine (et de quelques espĂšces animales) Ă ces frĂ©quences, Ă diffĂ©rentes intensitĂ©s d'exposition. Les sources naturelles les plus constantes et communes en sont le vent (Ă 100 km/h, le vent produit des infrasons Ă environ 135 dB[4]), les vagues marines (qui Ă une frĂ©quence de moins de 1 Hz en Ă©mettent Ă une hauteur de 100 dB environ)[4]. La sismicitĂ© naturelle du globe terrestre en est aussi une source constante. Des sources artificielles dâinfrasons, notamment industrielles, sont de plus en plus prĂ©sentes et trĂšs nombreuses[4].
Audition et autres formes de perception
Exemples d'infrasons | |
Note : pour une perception optimale, se munir d'appareils d'écoute adéquats et écouter à haut volume. | |
Onde sonore sinusoïdale de fréquence 20Hz. | |
Onde sonore sinusoïdale de fréquence 16Hz. | |
L'oreille peine davantage à distinguer une tonalité à niveau sonore équivalent. | |
La sensibilité de l'audition humaine au spectre sonore et à l'intensité de sons varie, selon l'ùge, l'attention et les individus, approximativement de 20 à 20 000 Hz.
La bande de frĂ©quence de 20 Ă 40 Hz est une zone de transition entre les infrasons et les sons audibles[5]. Au-delĂ de 20 kHz et sous 20 Hz, les sons ne sont gĂ©nĂ©ralement plus perceptibles par l'oreille humaine (sauf Ă forte intensitĂ© pour les infrasons[1]) ; d'autres organes permettent alors de les ressentir en tant que phĂ©nomĂšne vibratoire, par exemple la cage thoracique, l'abdomen, la peau, les globes oculaires, les muscles, le squelette ou la boite crĂąnienne ou d'autres organes internes, en entrant en rĂ©sonance avec eux ou en ressentant l'Ă©nergie vibratoire induite. De tels infrasons sont Ă©galement perceptibles par une personne atteinte de surditĂ©, par exemple pour des niveaux sonores de lâordre de 124 dB, (dĂ©cibels) Ă 4 Hz[3]. On parle parfois dans ces cas de « perception vibrotactile »[3] (mais ce mot a d'autres acceptions). L'INRS estime en 2006 que selon la littĂ©rature scientifique, « Au-delĂ de 40 Hz et jusquâĂ 100 Hz, on admet que lâon a affaire Ă des sons audibles basse frĂ©quence »[3], et comme pour toutes les frĂ©quences audibles, une Ă©coute binaurale (par les deux oreilles) semble amĂ©liorer la sensibilitĂ© aux infrasons (de 3 dB par rapport Ă une Ă©coute monaurale)[6].
On sait depuis longtemps que le bruit Ă haute intensitĂ© est dĂ©lĂ©tĂšre pour lâaudition et on sâattache depuis plusieurs dĂ©cennies Ă dĂ©celer et mesurer dâĂ©ventuels effets de la part inaudible des vibrations auxquelles nous sommes exposĂ©s[7]. La NASA, qui expose ses pilotes et astronautes Ă des niveaux trĂšs Ă©levĂ©s de vibrations et de bruit, sây est notamment intĂ©ressĂ©e[8]. Les expĂ©riences prĂ©parant les missions Apollo ont exposĂ© sous contrĂŽle mĂ©dical des volontaires Ă des niveaux trĂšs Ă©levĂ©s dâinfrasons (120 Ă 140 dB)[9] - [10] sans effets nocifs dĂ©tectĂ©s sur leur santĂ© ; un niveau Ă©levĂ© dâinfrasons est ainsi bien plus supportable que le mĂȘme niveau sonore dans la plage normale de frĂ©quences audibles.
On a montrĂ© en laboratoire sur le modĂšle animal que les infrasons ont bien des effets physiologiques, mais uniquement en cas d'expositions chroniques et de haute amplitude[11]. Chez l'humain, Ă partir d'un niveau Ă©levĂ© (qui porte lâinfrason prĂšs du seuil d'audition) des rĂ©actions de fatigue, de dĂ©pression, de stress, dâirritation, dâasthĂ©nie, de mal de tĂȘte, de troubles de la vigilance ou de lâĂ©quilibre et des nausĂ©es (« mal de mer ») ont Ă©tĂ© dĂ©crits. Le seuil d'audibilitĂ© est le volume sonore minimal perceptible par lâoreille humaine ; « plus les frĂ©quences sonores sont basses, plus le niveau sonore doit ĂȘtre Ă©levĂ© pour quâil soit perceptible »[11]. Ces rĂ©actions pourraient ĂȘtre dues Ă la mise en vibration de certains organes internes (digestifs, cardio-vasculaires, respiratoires) ou des globes oculaires en prĂ©sence de certains infrasons.
Ă titre de comparaison, de telles rĂ©actions nâapparaissent quâĂ des seuils bien supĂ©rieurs aux infrasons Ă©mis par les Ă©oliennes (par exemple Ă©valuĂ©s en 2004 par Jakobse[12] et par van den Berg[13]. Selon les rĂ©sultats de Hayes (2006), induire une maladie vibroacoustique (VaD) chez l'animal nĂ©cessite de l'exposer Ă un niveau de 50 Ă 60 dB plus Ă©levĂ© que le niveau dâinfrasons et de sons de basse frĂ©quence Ă©mis par les fermes Ă©oliennes dans cette plage de frĂ©quences[14].
Sources d'infrasons
Selon l'Institut national de recherche et de sĂ©curitĂ© (INRS), « les sources infrasonores sont nombreuses, quâelles soient naturelles ou artificielles ». Certaines sont nocives ou gĂȘnantes[3]. Exceptionnellement, des sources cohĂ©rentes Ă©mettant deux frĂ©quences pures non infrasonores assez proches peuvent aussi â en raison de non-linĂ©aritĂ©s du milieu â localement provoquer lâapparition dâinfrasons parasites perçus comme des battements (mais alors Ă des niveaux sonores gĂ©nĂ©ralement assez faibles[4]).
Sources naturelles
Parmi elles, la littérature scientifique identifie dans une large fréquence de sons « des composantes de haute énergie se situant dans la partie infrasonore du spectre »[3], notamment :
- les mouvements violents de masses d'air, qui tous engendrent des infrasons. Ainsi des vents forts, des tempĂȘtes (marines, notamment[16]), cyclones tropicaux, trombes et tornades en particulier qui produisent des infrasons jusquâĂ 135 dB Ă 100 km/h[3], pouvant parfois perturber lâionosphĂšre[17] ;
- la pénétration dans l'atmosphÚre d'un météore[18] - [19] ;
- les fluctuations rapides de la pression atmosphérique (< 1 Hz à 100 dB)[3] ;
- les mouvements de grandes masses d'eau (vagues océaniques, < 1 Hz)[3], tsunamis[20] ;
- certaines vibrations du sol induites par des éruptions volcaniques et d'autres phénomÚnes tectoniques (dont les tremblements de terre) ;
- le tonnerre et les Ă©clairs ;
- les chutes d'eau ;
- certains animaux, tels que baleines, PinnipÚdes, éléphants, casoars... qui utilisent les infrasons pour communiquer à grande distance (à 15 à 30 Hz pour l'éléphant d'Afrique par exemple)[21]. Il est possible que leur sensibilité aux infrasons explique une partie des capacités étonnantes des oiseaux migrateurs ; le pigeon voyageur s'y montre par exemple trÚs sensible : il perçoit des infrasons dans la gamme de 0,1 à 20 Hz (fréquences correspondant à des longueurs d'onde de l'ordre de la centaine de mÚtres et se propageant à des kilomÚtres). Les oiseaux seraient ainsi bien plus sensibles que nous aux variations brusques de pression atmosphérique et aux ondes de pression de certains phénomÚnes sismiques[21], ce qui pourrait expliquer leur anticipation avancée de certains changements météorologiques.
Les composantes de basse frĂ©quence de ces phĂ©nomĂšnes peuvent ĂȘtre transmises d'un fluide Ă un objet ou inversement, « rĂ©-Ă©mises dans l'air »[3]. Dans le milieu naturel (ou anthropisĂ©), la prĂ©sence locale et parfois temporaire de certaines « couches » dans les nuages, dans le sol gĂ©ologique et dans l'eau peut conduire des infrasons sur de trĂšs grandes distances (dizaines Ă centaines de kilomĂštres). Certaines espĂšces de baleines utilisent ainsi des couches ocĂ©aniques de densitĂ© thermique et/ou saline diffĂ©renciĂ©e comme canal SOFAR (SOFAR channel, l'Ă©quivalent d'un guide d'ondes acoustique, Ă©tudiĂ© et utilisĂ© par l'acoustique sous-marine) pour communiquer sur de trĂšs longues distances (Ă l'inverse des animaux qui Ă©mettent dans l'ultrason, dont les appels et chants sont rapidement attĂ©nuĂ©s par le milieu ambiant). Dans un contexte normal, le chant de la baleine Ă bosse (15 400 Hz) est audible Ă dix kilomĂštres, mais jusqu'Ă plusieurs centaines ou milliers de kilomĂštres dans les meilleures conditions.
Moyen de communication animale
Les infrasons jouent un rĂŽle dans la communication chez certains mammifĂšres tels que les Ă©lĂ©phants, les baleines, les dauphins (9 Hz chez certaines espĂšces), les furets (16 Hz) les okapis et peut-ĂȘtre les girafes ou le furet[22] voire certains poissons (le Poisson rouge les perçoit un peu sous les 20 Hz).
ĂlĂ©phants
L'Ă©lĂ©phant peut communiquer Ă grande distance (une trentaine de kilomĂštres) en produisant des infrasons avec son larynx (cachĂ©s dans le barrissement) ou en frappant des pieds sur le sol. L'onde sismique est alors perçue par la partie vestibulaire de son oreille interne (crĂȘtes des ampoules des canaux semi-circulaires, macules utriculaires et sacculaires)[23] - [24].
Cétacés
Les Cétacés émettent des sons dans une trÚs large bande de fréquence, entre 9 Hz et 150 kHz environ, donc pas tous audibles par l'homme[25].
Okapis et girafes
Les okapis[22] ou les girafes, que l'on pensait autrefois muettes, communiquent, selon certains auteurs, au moyen d'infrasons, d'aprĂšs des enregistrements de girafes du zoo de Riverbanks de Columbia (Caroline du Sud), et celles du zoo d'Asheboro (Caroline du Nord)[26] - [27] - [22]. Il a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© que le vaste sinus frontal des girafes pourrait jouer un rĂŽle de chambre de rĂ©sonance pour la production et/ou perception d'infrasons[28] et que certains mouvements du cou (Ă©tirement notamment) pourraient ĂȘtre associĂ©s Ă la production de vocalisations infrasonales par rĂ©sonance de Helmholtz[22], bien qu'en 2003 Bashaw lors de sa thĂšse n'Ă©tait pas arrivĂ© Ă confirmer qu'il existe une vraie communication infrasonore chez cette espĂšce[29]. Sur cinq enregistrements d'infrasons effectuĂ©s dans la nature, deux ont Ă©tĂ© produits lors d'interactions sociales de proximitĂ©, suggĂ©rant que ces vocalisations pourraient jouer un rĂŽle de communication, qui reste Ă confirmer[22]. Les mĂ©canismes de transmission aĂ©rienne et/ou sismique de ces vocalisations doivent encore ĂȘtre Ă©valuĂ©s[22].
Des enregistrements effectués (de jour et de nuit) dans trois zoos européens ont montré en 2015 que la girafe produit la nuit des sons de différents types, dont des grognements et des vocalisations harmoniques, soutenues et modulées en fréquence (dont aucune n'est dans la gamme infrasonore). Les auteurs de cette étude suggÚrent de considérer avec prudence l'hypothÚse d'une vraie communication infrasonienne chez la girafe et invitent à des études complémentaires[30].
Sources anthropiques
- Certaines musiques (ex. : musique électronique drum and bass), des musiques diffusées à forte puissance et les bandes-sons de certains films (l'un des premiers cas d'effets sonores intégrant volontairement les basses-fréquences aurait été un film catastrophe intitulé Tremblement de terre, dont la bande son, amplifiée par des haut-parleurs spéciaux faisait trembler les fauteuils des spectateurs), encourageant les salles de cinéma à peu à peu s'équiper de haut-parleurs adaptés à cette gamme de fréquence (subwoofers)[31] ;
- Certains systĂšmes d'alarme[31], pour rendre le bruit Ă©mis plus insupportable pour un Ă©ventuel intrus ;
- Tous les moyens de transport motorisĂ©s classiques (motos, mobylettes, scooters, automobiles, camions, hĂ©licoptĂšres, avions, bateaux Ă moteur, trains/TGV...) ont une composante vibratoire basse frĂ©quence et infrasonore, exacerbĂ©e aux moments du dĂ©marrage et des changements de vitesse ou de direction[32], plus ou moins importante selon l'engin et son rĂ©gime de fonctionnement ou son Ă©tat ; Dans une voiture ou un train, un passager peut subir un niveau de 120 dB Ă des frĂ©quences de 1 Hz Ă 20 Hz, voire jusqu'Ă 115 Ă 150 dB (pour les mĂȘmes frĂ©quences) dans un cockpit d'hĂ©licoptĂšre[3] ;
- Certaines machines industrielles (lourdes et à moteurs tournants notamment[33]) sont connues comme étant émettrices d'infrasons : climatiseurs et ventilateurs, pompes et compresseurs, machines à sécher, machines à air climatisé, éoliennes, broyeurs, centrifugeuses à béton, etc. des marteaux-pilons, vibreurs, ou encore certaines machines à laver ou essoreuses produisent couramment des niveaux significatifs, voire élevés d'infrasons ;
- Dans les annĂ©es 2000, les Ă©oliennes sont souvent citĂ©es par leurs dĂ©tracteurs comme source d'infrasons nuisant Ă la santĂ©. En rĂ©ponse Ă cette crainte plusieurs Ă©tudes et bilans scientifiques ont Ă©tĂ© dressĂ©s. En 2005, les industriels anglais puis en 2006 l'INRS estiment que « les niveaux Ă©mis sont de lâordre de ceux des sources naturelles (vent) »[3].
En AmĂ©rique du Nord (Ătats-Unis et du Canada) face aux informations contradictoires sur le sujet, lâAWEA et le CanWEA ont commandĂ© une Ă©tude, confiĂ©e Ă un comitĂ© consultatif scientifique pluridisciplinaire. Ce comitĂ© regroupait huit experts indĂ©pendants : mĂ©decins en otolaryngologie, audiologistes et experts en acoustique, venant des Ătats-Unis, du Canada, du Danemark et du Royaume-Uni et impliquĂ©s en mĂ©decine du travail ou santĂ© publique. Il a Ă©tĂ© chargĂ© de mettre Ă jour une bibliographie scientifique (Ă©tudes revues par des pairs, collectĂ©es dans la base PubMed) sur le sujet du bruit des Ă©oliennes et d'Ă©ventuels effets sur la santĂ© (ainsi que sur les maladies dites d'origine vibroacoustique qui pourraient hypothĂ©tiquement ou avec certitude ĂȘtre induites par une certaine gamme ou hauteur de vibration) ; et de l'Ă©tudier, pour produire un document de rĂ©fĂ©rence faisant autoritĂ© pour les dĂ©cideurs (lĂ©gislatives et rĂ©glementaires) et pour « quiconque souhaitant y voir clair, compte tenu des informations contradictoires qui circulent sur le son produit par les Ă©oliennes ». « AprĂšs avoir passĂ© en revue, analysĂ© et Ă©changĂ© sur les connaissances actuelles dans ce domaine », le consensus scientifique du groupe a Ă©tĂ© que :
- « Il nây a pas de preuve que les sons Ă basse frĂ©quence en deçà des seuils audibles et les infrasons Ă©manant des Ă©oliennes ont des effets physiologiques nocifs directs de quelque nature que ce soit ».
- « Les vibrations des Ă©oliennes transmises par le sol sont trop faibles pour ĂȘtre dĂ©tectĂ©es par les humains et pour avoir des effets sur leur santĂ© ».
- « Les sons Ă©mis par les Ă©oliennes ne sont pas uniques. Il nây a aucune raison de croire, en se fondant sur les niveaux sonores et les frĂ©quences de ces sons, de mĂȘme que sur lâexpĂ©rience de ce panel en matiĂšre dâexposition au son dans les milieux de travail, que les sons des Ă©oliennes puissent, de maniĂšre plausible, avoir des effets directs qui pourraient ĂȘtre nocifs pour la santĂ© ».
En France l'AFSSET, en se basant sur des mesures faites sur et Ă proximitĂ© de 3 parcs Ă©oliens[34] par le CEREMA, produit une autre expertise collective qui conclut en 2017 que les rĂ©sultats des mesures ainsi que les donnĂ©es scientifiques, Ă©pidĂ©miologiques et mĂ©dicales disponibles sur les risques pour la santĂ© « ne justifient ni de modifier les valeurs limites dâexposition au bruit existantes, ni dâĂ©tendre les frĂ©quences sonores actuellement considĂ©rĂ©es dans la rĂ©glementation aux infrasons et basses frĂ©quences sonores ». L'effet dĂ©crit par certains riverains serait donc de type nocebo (effet inverse de lâeffet placebo) qui engendre des effets et un ressenti nĂ©gatifs quand on pense "ĂȘtre exposĂ©s Ă des infrasons inaudibles" alors quâon ne l'est pas, mais qui correspond Ă un stress rĂ©el[35]. L'AFSSET recommande de mieux informer des riverains lors de lâimplantation des parcs, et de continuer Ă complĂ©ter les connaissances sur l'exposition aux basses-frĂ©quences et ses Ă©ventuels effets sur la santĂ©[36] ; - Le bruit et le vibrations de certains chantiers (chantiers de dĂ©molition, explosions[3] en carriĂšre et chantiers impliquant par exemple l'utilisation de grues, de marteau-piqueur, de fonceurs de palplanches... chantiers de bĂ»cheronne Ă la tronçonneuse...) ;
- Deux sources de bruit, si elles sont cohérentes et proches et correspondent à « deux fréquences pures non-infrasonores proches », peuvent parfois interagir et produire des infrasons alors perçus comme des « battements à la fréquence différence (différence entre les deux fréquences de départ) en raison des non-linéarités du milieu »[3] ;
- Certains appareils thĂ©rapeutiques utilisent et Ă©mettent des infrasons ; ils produisent des massages vibratoires[3]. Cet usage a Ă©tĂ© approuvĂ© aux Ătats-Unis par la Food and Drug Administration (FDA) dans la plage de 8 Ă 14 Hz[37]) ;
- Les tirs de feux d'artifice ;
- Le vol et le bang sonique des avions supersoniques[20], militaires ou civils tels que par exemple le Concorde[38], qui ont aussi Ă©tĂ© utilisĂ©s pour « explorer » lâatmosphĂšre[39] ;
- Les tirs par armes Ă feu (du canon au pistolet), les tirs par armes Ă air comprimĂ©, les tirs de fusĂ©es ou de navettes spatiales[40] - [41], dont les vagues dâinfrasons perturbent lâionosphĂšre[42] ; les tirs de missiles[43], toute explosion sous-marine, tout changement brusque de vitesse et/ou de direction d'un vĂ©hicule ou d'un objet en mouvement rapide ;
- Les systÚmes actifs de mesure sismique par exemple utilisés pour la prospection miniÚre, pétroliÚre et gaziÚre ;
- Certains dispositifs militaires[44] (dont les niveaux ne sont pas publiés[3]).
Propagation et atténuation des infrasons
En raison des caractĂ©ristiques des basses frĂ©quences, les infrasons se propagent trĂšs bien dans tous les milieux ; liquides (eau), gazeux (dont l'air) ou Ă©lastico-solides (sol, structures, infrastructures construites, etc.). Seul le vide intĂ©gral les arrĂȘte immĂ©diatement. Les molĂ©cules constituant l'air ne diminuent lâĂ©nergie d'une onde infrasonore de 10 Hz que d'environ 0,1 dB/km, soit 100 fois moins que les 10 dB/km absorbĂ© par l'air pour des sons de frĂ©quence audible Ă 1 kHz.
La rÚgle de l'atténuation due à la propagation en ondes sphériques (6 dB de moins chaque fois que la distance double) vaut aussi pour les infrasons ; c'est le principal facteur d'atténuation énergétique des ondes infrasonores avec la distance.
Les sources d'infrasons peuvent dont ĂȘtre trĂšs Ă©loignĂ©es (centaines Ă milliers de kilomĂštres) et leur gamme de frĂ©quence (grandes longueurs dâonde, par exemple 34 m pour une frĂ©quence de 10 Hz) rend plus difficile la mesure de la directivitĂ© de la source. En outre, beaucoup de sources industrielles apparaissent « petites » par rapport Ă la longueur dâonde Ă©mise. Les infrasons Ă©tant peu freinĂ©s, la source Ă©mettrice les envoie dans toutes les directions de lâespace avec une Ă©nergie Ă peu prĂšs Ă©quivalente ; on les dit « omnidirectionnelles ». Ces caractĂ©ristiques rendent difficile la localisation de lâorigine de nombreux infrasons.
Pour toutes ces raisons, il est presque impossible de se protéger des infrasons par les méthodes classiques d'isolation phonique par absorption acoustique. Des solutions de « contrÎle actif du bruit » sont récemment apparues, qui permettent de créer un silence artificiel localement (dans une petite partie de la sphÚre d'émission), mais elles ne parviennent pas à inhiber toute l'émission, et sont imparfaites à grande échelle en raison de l'omnidirectionnalité des sources.
La solution la plus pratique en cas de gĂȘne ou problĂšme grave est gĂ©nĂ©ralement de dĂ©sactiver, dĂ©placer ou supprimer l'Ă©metteur.
Effets des infrasons
Aux niveaux naturels courants, l'exposition aux infrasons n'a pas d'effets connus. Mais la vie moderne et certains mĂ©tiers exposent Ă de nombreuses sources artificielles d'infrasons[33], dont certains peuvent avoir un effet gĂȘnant voire nocif. Ainsi, fin 1963, le docteur Gavreau, du Laboratoire d'Ă©lectro-acoustique de Marseille, se rend compte que les chercheurs de son Ă©quipe sont sujets Ă des nausĂ©es et des maux de tĂȘte violents et inexplicables. Ils finissent par dĂ©couvrir quâun ventilateur du systĂšme de ventilation en est la cause : la machine en fonctionnant Ă©mettait un son Ă une frĂ©quence de 7 Hz qui, amplifiĂ© par le conduit d'aĂ©ration oĂč elle Ă©tait encastrĂ©e, devenait insupportable bien qu'inaudible[45]. L'hypothĂšse de la nocivitĂ© de certains infrasons pour l'Homme est pĂ©riodiquement mise en dĂ©bat dans les mĂ©dias.
La perception ou l'utilisation d'infrasons par la faune est Ă©galement abordĂ©e pour la communication Ă longue distance chez les Ă©lĂ©phants ou grands cĂ©tacĂ©s, ou dans un but hypothĂ©tiquement paralysant sur l'homme ou des proies animales des infrasons[46]. ExposĂ©es au rugissement d'un tigre au moment d'une attaque, des personnes auraient ressenti une peur panique irrĂ©pressible, bien que n'ayant auditivement perçu aucun son. Certains lieux rĂ©putĂ©s « hantĂ©s » par des esprits amplifieraient en fait des infrasons par des conduits d'aĂ©ration. D'anciens bureaux dĂ©saffectĂ©s ont servi de troisiĂšme exemple de cet effet des infrasons sur l'homme, de type syndrome du bĂątiment malsain. Le taux de suicide de salariĂ©s qui travaillaient dans de tels bureaux Ă©tait anormalement Ă©levĂ© ; le personnel y Ă©tait sujet Ă des dĂ©pressions, des nausĂ©es et des maux de tĂȘte. Dans ce cas, la cause s'est avĂ©rĂ©e ĂȘtre des infrasons Ă©mis par le systĂšme de ventilation d'un tunnel autoroutier proche[46].
Au delĂ de certains seuils de puissance, les infrasons constituent une gĂȘne physiologique importante pour les animaux et les humains. Une exposition prolongĂ©e induit un inconfort, une fatigue, voire des troubles nerveux ou psychologiques[47]. Ă forte puissance, les infrasons ont des effets mĂ©caniques et physiologiques nocifs, voire destructeurs. Des essais d'utilisation soniques non lĂ©tales[44] ou lĂ©tales ont eu lieu, notamment lors d'expĂ©riences menĂ©es durant la Seconde Guerre mondiale par les nazis[48]. Lâusage de telles armes pourrait ne jamais voir le jour en raison de leur caractĂšre dâarmes de destruction massive, non discriminante et des « souffrances inutiles » ou de « blessures superflues » quelles peuvent induire[9]. De plus, des solutions de contrĂŽle actif du bruit pourraient localement annuler leurs effets.
à forte puissance, les infrasons traversent tous les milieux, bien plus facilement que les hautes fréquences car ils sont moins vulnérables aux réflexions, ce qui explique la longue ou trÚs longue portée de leur énergie acoustique. Quand ils sont trÚs puissants, les infrasons peuvent faire vibrer des objets voire mettre un bùtiment en branle.
Si leur frĂ©quence est un sous-multiple de la frĂ©quence de rĂ©sonance de notre systĂšme auditif, ce dernier entre en rĂ©sonance, produisant un « bourdonnement d'oreilles » dont l'intensitĂ© varie avec celle des infrasons, Ă©ventuellement extrĂȘmement pĂ©nible. Plaquer les mains sur les oreilles ne change rien car elles sont « transparentes » aux infrasons, mais il suffit que d'autres frĂ©quences atteignent les tympans (si d'une intensitĂ© en rapport avec celle des infrasons) pour bloquer la rĂ©sonance : Ă©couter la tĂ©lĂ©vision ou la radio permet par exemple de reprendre un travail cĂ©rĂ©bral en ambiance ultrasonique. Nous n'entendons pas les infrasons, mais la rĂ©sonance induite (nombre de micro-centrales hydroĂ©lectriques sont source d'infrasons ; pour donner un ordre d'idĂ©e, une centrale de 1 500 kW peut Ă©ventuellement ĂȘtre perçue par l'oreille humaine Ă plus de huit kilomĂštres, une trois fois plus puissante Ă une trentaine de kilomĂštres. Il s'agit dans ces cas de centrales ou l'harmonie gĂ©nĂ©ratrice/roue/frappes n'est pas respectĂ©e, augmentant ainsi considĂ©rablement la gĂ©nĂ©ration d'infrasons)[47].
Gestion des risques, précautions et recommandations
Les travailleurs de certaines installations de transport, de certaines industries, de boites de nuit, d'organisation de concerts de plein air et certains musiciens ou auditeurs de musique, ou encore les bĂ»cherons utilisant des tronçonneuses peuvent y ĂȘtre particuliĂšrement exposĂ©s.
Des effets physiologiques sont démontrés pour des expositions à des niveaux élevés ; ils ont abouti à une prise en compte progressive dans la réglementation et les études d'impact, ainsi parfois qu'à certaines mesures correctives et de prévention.
Des valeurs limites d'exposition ont été proposées ou sont à l'étude dans plusieurs pays ; une revue scientifique spécialisée, Journal of Low Frequency Noise, Vibration and Active Control, a été lancée, consacrée aux effets des infrasons chez l'homme et aux moyens de les atténuer, éviter ou compenser. Leurs effets et plus encore les mesures à prendre aux intensités moyennes sont encore discutés[3].
En l'absence de réglementation, des recommandations et bonnes pratiques ont paru, notamment listées par l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS)en France, publiées dans la revue HygiÚne et sécurité du travail[3].
Applications
DĂ©tection et applications pour la surveillance
Lors de la PremiĂšre Guerre mondiale, les alliĂ©s ont utilisĂ© les infrasons pour localiser l'artillerie ennemie (parfois lointaine, camouflĂ©e en forĂȘt ou montĂ©e sur rails)[49]. Avec lâinvention de la bombe atomique, des rĂ©seaux de dĂ©tections dâinfrasons ont Ă©tĂ© mis en place de par le monde[50].
Aujourd'hui, des rĂ©seaux de capteurs fixes ou mobiles permettent (pour des objectifs civils et/ou militaires) de dĂ©tecter, mesurer et suivre sur des milliers de kilomĂštres d'importantes vagues d'ondes acoustiques basses-frĂ©quences (comprenant principalement les infrasons, jusqu'Ă des frĂ©quences de seulement quelques hertz), vagues dâondes qui se propageant dans le sol, la mer ou l'atmosphĂšre terrestre.
Une analyse informatique permet de les isoler et de prendre en compte leur interactions avec lâenvironnement (le vent notamment qui est aussi une source permanente dâinfrasons[51]). Ils permettent alors de dĂ©tecter et localiser des Ă©missions naturelles (tsunamis, volcanisme, entrĂ©e de mĂ©tĂ©orite dans l'atmosphĂšre) et/ou artificielles tels que bang sonique d'avions supersoniques ou des explosions (essais nuclĂ©aires ou accidents notamment), qui prĂ©sentent chacune des « signatures » particuliĂšres[20] ou encore des tirs de missiles[52] etc..
Des travaux de modĂ©lisation affinĂ©e (en 2D et 3D) en acoustique et mĂ©canique des fluides sont encore en cours. Elles visent Ă mieux tenir compte des interactions des infrasons avec les variations saisonniĂšres et jour/nuit de tempĂ©rature et surtout avec le vent[53], les sols, la mer. Il s'agit aussi de prendre en compte l'inhomogĂ©nĂ©itĂ© du sous-sol et des montagnes (effets non linĂ©aires et d'absorption thermovisqueuse dans l'air[54] et surtout dans les hautes couches de l'atmosphĂšre[20] - [55] - [56]. Ceci se fait sur la base de l'Ăquation de Burgers (augmentĂ©e[57]) et des Ă©quations de Navier-Stokes notamment[58] - [59]).
En 1986, la navette spatiale Challenger a explosĂ© Ă 15 km dâaltitude ; 13 heures aprĂšs une sĂ©rie de microbarographes au sol dĂ©tectait Ă environ 14300 km de lĂ une sĂ©quence dâondes infrasonores trĂšs intense (pĂ©riodes de 400 Ă 700 secondes, amplitude d'environ 30 Pa et vitesse de propagation d'environ 300 m/s, soit une signature proche de celles des explosions nuclĂ©aires ; la pĂ©riode principale du signal Ă©tait de 537 secondes et plus de 90% de l'Ă©nergie reçue lâa Ă©tĂ© dans la plage de 300 Ă 1000 secondes ; cette vague dâinfrason fut un tsunami invisible et inaudible mais intense puisquâĂ©quivalent Ă la vague dâinfrasons qui aurait Ă©tĂ© gĂ©nĂ©rĂ©e par 140 Mt de TNT ou lâexplosion de 2 Ă 3 bombes H nuclĂ©aires[60]. Ce rĂ©seau est notamment chargĂ© de vĂ©rifier que les pays signataires respectent le TraitĂ© d'interdiction complĂšte des essais nuclĂ©aires[61]).
Plus loin de la Terre, les infrasons pourraient ĂȘtre utilisĂ©s pour comprendre comment est organisĂ© lâintĂ©rieur de VĂ©nus[62].
Dans le domaine musical
Une partie des instruments utilisĂ©s par les orchestres symphoniques ou contemporains (guitare Ă©lectrique, grosse caisseâŠ) et plus encore les puissants haut-parleurs diffusant de la musique synthĂ©tique et/ou Ă forte puissance Ă©mettent des infrasons.
La premiÚre moitié de la premiÚre octave perçue par l'humain (20 - 40 Hz ou 16-32 Hz[63]) est à la frontiÚre entre l'infrason et le « sous-grave (en) »[64], elle produit une impression à la fois auditive et physique, qui donne une sensation augmentée de « présence » et de « force » du son, par exemple recherchée dans les salles de cinéma ou sur certaines scÚnes de concert en extérieur.
Usages thérapeutiques sur l'homme et l'animal
De mĂȘme que des ultrasons, la mĂ©decine utilise parfois des infrasons, alors produits par des appareils de confort ou thĂ©rapeutiques (massage mĂ©canique, thĂ©rapie par onde de choc radiale). Au dĂ©but des annĂ©es 2000, plusieurs types dâappareils Ă masser sont utilisĂ©s sur lâhomme, ou par des vĂ©tĂ©rinaires sur lâanimal. Dans ce dernier domaine, l'outil s'est montrĂ© efficace sur des animaux grands (cheval) et de petite taille (chien)[65]. Ces appareils, autorisĂ©s par la Food and Drug Administration aux Ătats-Unis[37], sont munis dâembouts adaptĂ©s Ă diffĂ©rentes application allant du drainage bronchique chez le nourrisson au drainage lymphatique, en passant par le traitement de fibroses musculo-tendineuse, de contractures, dâarthrose dĂ©butante ou dâescarres[66].
SystĂšmes de sonorisation
Dans le domaine de la musique, la recherche de production ou reproduction d'infra-grave est beaucoup plus marginale que la celle de sous-grave ou sub-bass (en), les solutions proposées par le commerce sont donc trÚs rares. La plupart des amateurs avertis se tournent vers des solutions sur mesure, requérant des caissons renforcés trÚs volumineux, des transducteurs spécialisés et une réserve en amplification de puissance dépassant souvent le kilowatt.
Moins un transducteur (subwoofer) est efficace, moins il est en mesure de restituer le sous-grave Ă une pression sonore suffisamment Ă©levĂ©e. L'infra-grave Ă©tant trĂšs difficile Ă reproduire pour un transducteur, le risque d'atteindre les limites mĂ©canique () et parfois thermique du transducteur est important, provoquant souvent des bris de l'Ă©quipement s'il n'est pas protĂ©gĂ© par un filtre contre les infrasons (subsonic filter). Certains amateurs de cinĂ©ma-maison recherchent des performances de haut niveau en visant une reproduction des infrasons Ă des frĂ©quences aussi basses que 10 Hz à ± 3 dĂ©cibels par rapport au reste du spectre. Cela demande des transducteurs spĂ©cialisĂ©s dans les forts dĂ©placements d'air (jusqu'Ă huit litres par poussĂ©e, voire plus) et ayant une construction trĂšs robuste. Le diamĂštre d'un transducteur ou la taille de son aimant peuvent ne pas suffir, la conception d'un transducteur de grave est trĂšs diffĂ©rente de celle d'un transducteur de sous-grave, en particulier lorsque ce dernier doit reproduire aussi l'infra-grave. Pour la sonorisation professionnelle (spectacle, disco, Ă©vĂ©nements extĂ©rieurs, etc.), il n'est Ă peu prĂšs jamais question d'infra-grave et mĂȘme rarement de la premiĂšre octave (20-40 Hz) dans le sous-grave parce que trop difficile, coĂ»teux et laborieux Ă reproduire Ă un niveau de pression sonore suffisant.
Les infrasons sont moins connus que les ultrasons, notamment parce qu'ils sont moins utilisés et plus difficiles à produire.
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