AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Maladie vibroacoustique

La notion de « maladie d’origine vibroacoustique Â» ou « maladie vibroacoustique Â», ou « VaD Â» pour Vibroacoustic disease) dĂ©signe un syndrome caractĂ©risĂ© par des symptĂŽmes trĂšs divers mais comprenant toujours une pĂ©ricardite caractĂ©risĂ©e par un Ă©paississement du pĂ©ricarde (qui alors peut ĂȘtre deux Ă  trois fois plus Ă©pais que la normale, Ă  la suite de la formation d'une couche supplĂ©mentaire de tissus[1]). On observe aussi chez tous les patients un Ă©paississement continu des parois des vaisseaux sanguins - sans processus inflammatoire, sans plaques d'athĂ©rome (cholestĂ©rol) et sans dysfonctionnement diastolique, ce qui fait Ă©liminer les maladies cardiovasculaires les plus classiques. Cet Ă©paississement est la principale caractĂ©ristique de la VaD[2], mais d’autres effets nĂ©gatifs, moins spĂ©cifiques, l’accompagnent toujours. Ce syndrome semble induit par l'exposition durable et gĂ©nĂ©ralement conjointe Ă  des vibrations physiques (par exemple pour un ouvrier utilisant couramment un marteau-piqueur) et Ă  des sons de basse frĂ©quence, dont Ă©ventuellement inaudibles comme les infrasons.
L'environnement naturel (vent, vagues, chutes d'eau, sismicitĂ© de la terre..) est une source constante d’infrasons naturels, mais ils sont dans ce cas le plus souvent d’une intensitĂ© faible Ă  modĂ©rĂ©e et - selon les connaissances disponibles - sans effet sur notre santĂ©, mais depuis la rĂ©volution industrielle, des sources artificielles d’infrasons et de sons de basse frĂ©quence sont de plus en plus nombreuses. Les Ă©tudes faites sur le rat de laboratoire montrent qu’une VaD peut chez cet animal apparaitre dĂšs 13 semaines d’exposition continue Ă  un haut niveau de sons Ă  basse frĂ©quence (incluant les infrasons) ; Ă  partir d’environ 100 dB selon Mendes & al. (2007) [3]. Ce niveau est atteint par des personnes travaillant prĂšs de rĂ©acteurs d'avions, prĂšs d’engins trĂšs bruyant ou vibrants (marteau-piqueur, tronçonneuse, disqueuses
) ou chroniquement exposĂ©s Ă  de la musique diffusĂ©e par de puissants haut-parleurs (concerts, boites de nuit)


Les pilotes de chasse et les techniciens de bord travaillant à proximité des avions font partie des personnels trÚs exposés au syndrome dit de la maladie vibroacoustique

Ce syndrome est dit « systémique », c'est-à-dire qu'il touche le corps entier et pas spécialement l'oreille interne ou moyenne.
Les anglophones l'ont aussi autrefois nommé « vibronoise pathology »"[2].

Histoire médicale

La surditĂ© est connue (depuis des millĂ©naires) comme pouvant ĂȘtre induite par un bruit excessif et chroniquement rĂ©pĂ©tĂ©, mais - Ă  haute intensitĂ© et de maniĂšre chronique - on a rĂ©cemment montrĂ© que des sons inaudibles de basse-frĂ©quence peuvent aussi avoir des effets dĂ©lĂ©tĂšres et pernicieux pour l'organisme.

Or, depuis la rĂ©volution industrielle et l’explosion des transports rapides, presque toute la population est de plus en plus chroniquement exposĂ©e Ă  des ondes de basses frĂ©quence. Une petite partie de cette population (certains ouvriers, marins, militaires et pilotes principalement) est pĂ©riodiquement ou chroniquement exposĂ©e Ă  de telles ondes Ă©mises Ă  de fortes intensitĂ©s, et dont on se protĂšge d'autant moins quelles sont en grande partie non perceptibles par l’oreille humaine. Dans ces cas (haute intensitĂ©) elles semblent pouvoir significativement voire gravement affecter la santĂ©[2].

Au dĂ©but du XXe siĂšcle les hygiĂ©nistes s'intĂ©ressent aux effets du bruit, y compris ailleurs que dans les usines. Ainsi en 1928, Laird publie une des premiĂšres Ă©tudes sur les effets physiologiques (y compris autres qu'auditifs) du bruit chez des dactylographes (utilisant des machines Ă  Ă©crire, ce qui Ă  l’époque nĂ©cessitait de frapper les touches avec force et le lancer le chariot vers la gauche pour le retour Ă  la ligne ; mouvement se terminant par le choc du chariot sur sa butĂ©e[4]).

À partir de la Seconde Guerre mondiale, des mĂ©decins remarquent et signalent un syndrome qui semble liĂ©e Ă  l'exposition au bruit intense, chez des ouvriers produisant des moteurs d’avions, chez des pilotes et techniciens de l'aĂ©ronautique, chez les ouvriers d’une usine de bĂ©ton armĂ© et d’une chaudronnerie, souffrant de troubles de l’audition et d'autres maux[2]. Des symptĂŽmes spĂ©cifiques font alors Ă©voquer d'une pathologie Ă©mergente Ă  la fois due au bruit et aux vibrations intenses de basses frĂ©quences subies dans certains mĂ©tiers. Il reste cependant difficile d'identifier les causes prĂ©cise des symptĂŽmes et leurs part de responsabilitĂ© car ces personnels sont aussi exposĂ©s Ă  des solvants, des vapeurs de carburants, des mĂ©taux lourds ou mĂ©talloĂŻdes toxiques, l'inhalation de fumĂ©es et poussiĂšre, etc.

En 1979, un mĂ©decin militaire portugais (Castelo Branco) est intriguĂ© par une apparente crise d’épilepsie surgi chez un technicien au moment et prĂšs d’un dĂ©collage d’avion (Castelo Branco et Rodriguez, 1999). Ceci pousse le mĂ©decin Ă  Ă©tudier les dossiers mĂ©dicaux d'autres techniciens de l'aviation militaire pour y dĂ©tecter d’éventuels autres cas d’épilepsie Ă  dĂ©but tardif. Son intuition se confirme : 10% du personnel est touchĂ©, contre 0,2% attendus (au vu de la prĂ©valence moyenne de l'Ă©pilepsie au Portugal)[2]. C’est le dĂ©but d’un long travail sur ce sujet.
Par chance Castelo peut s’appuyer sur des dossiers mĂ©dicaux trĂšs complets (qui chez l’OGMA - Oficinas Gerais de Material AeronĂĄutico - remontaient Ă  1918) facilitant le suivi d’un groupe initial de 306 techniciens aĂ©ronautiques de sexe masculin, tous employĂ©s par OGMA depuis plus de 10 ans, dont 140 techniciens (Ăąge moyen de 42 ans) seront volontaires sĂ©lectionnĂ©s pour l’étude Ă©pidĂ©miologique Ă  long terme[2]. L'unitĂ© mĂ©dicale locale soignait gratuitement ses employĂ©s en archivant tous les problĂšmes de mĂ©decine interne, cardiologie, endocrinologie, psychiatrie, neurologie, psychologie clinique et sociale, dentisterie, orthopĂ©die, chirurgie gĂ©nĂ©rale, ophtalmologie et oto-rhino-laryngologie, et si un employĂ© devait voir un spĂ©cialiste indisponible localement, il devait ĂȘtre rĂ©fĂ©rĂ© Ă  ce spĂ©cialiste par l'un des mĂ©decins militaires du groupe[2], ce qui a permis de composer un corpus mĂ©dical de grand intĂ©rĂȘt.

1987 marque le dĂ©but de la vĂ©ritable histoire mĂ©dicale de cette maladie, avec la premiĂšre autopsie d'un patient atteint de ce syndrome. 5 ans plus tĂŽt le premier patient de ce groupe suivi au Portugal est mort subitement, mais son autopsie n'avait pas Ă©tĂ© possible. Un autre des malades (Felipe Pedro), Ă©galement technicien aĂ©ronautique et ancien de la marine, qui voulait comprendre ses problĂšmes de santĂ©, a couchĂ© sur son testament sa volontĂ© d'ĂȘtre autopsiĂ© par Castelo Branco. Porteur d’un diagnostic d'Ă©pilepsie tardive (en 1981), il est mort Ă  l’ñge de 58 ans d’un infarctus. L’ampleur des dommages, que son mĂ©decin suppose a priori induits par l’exposition chronique Ă  des ondes de basse frĂ©quence et de grande amplitude (LPALF) Ă©tait considĂ©rable : son cƓur prĂ©sentait 11 petites cicatrices d’évĂ©nements ischĂ©miques silencieux antĂ©rieurs, ses valvules cardiaques Ă©taient gonflĂ©es et le « sac pĂ©ricardique » trĂšs Ă©paissi ; les artĂšres coronaires Ă©taient Ă©galement Ă©paissies, mais sans plaques d'athĂ©rosclĂ©rose (habituelles et attendues dans les cas d'infarctus). Au lieu de cela, l'intima Ă©tait Ă©paisse et bordait toutes les parois des vaisseaux, Ă  la suite d'une prolifĂ©ration anormale des fibres de collagĂšne[2]. Il portait en outre deux tumeurs rĂ©nales et une tumeur dans la rĂ©gion pariĂ©tale droite du cerveau (astrocytome microcystique de stade I).
Les informations acquises lors de cette autopsie sont encore utilisées pour de nombreux projets de recherche[2]. 10 ans plus tard (en 1997) Izmerov et al. suggÚrent que tout le corps humain peut systématiquement négativement répondre aux infrasons s'ils sont émis à trÚs haute intensité[5].

Les rĂ©sultats troublants de la premiĂšre autopsie (structures cardiaques Ă©paissies notamment) ont motivĂ© une Ă©tude Ă©chocardiographique Ă  long termes d'un groupe de 485 techniciens aĂ©ronautiques : Marciniak et al. en 1999 constatent qu'ils ont tous un pĂ©ricarde Ă©paissi et dans beaucoup des cas, les valvules cardiaques le sont Ă©galement[6]. Une Ă©tude bibliographique montre alors qu'au Japon, le Pr Matoba avait en 1983 fait un mĂȘme constat d’épaississement pĂ©ricardique chez des bĂ»cherons maniant la tronçonneuse (Ă©galement exposĂ©s Ă  l'inhalation de fumĂ©es d'hydrocarbures, mais aussi conjointement au bruit Ă  des vibrations intenses)[7].

Ce syndrome est encore considĂ©rĂ© comme maladie Ă©mergente dans les annĂ©es 1990[8]. Comme le secteur de la dĂ©fense est concernĂ© et qu’il existe de trĂšs nombreuse sources d’exposition Ă  des infrasons artificiels dans les sociĂ©tĂ©s industrielles contemporaines, les autoritĂ©s ne semblent pas incitĂ©es Ă  agir.

En 2001 un tableau clinique similaire est trouvĂ© chez des pilotes de ligne et agents de bord ainsi qu'au sein d'une population insulaire (Ăźle de Vieques Ă  Puerto Rico) exposĂ©e dans son environnement Ă  des vibrations intenses et de basse frĂ©quence[9]. De plus cet Ă©paississement des structures cardiovasculaires commence aussi Ă  ĂȘtre observĂ©, avec constance dans le modĂšle animal, ce qui confirme son importance pour le diagnostic du syndrome, bien que le mĂ©canisme qui conduit Ă  cet Ă©paississement soit encore mal compris [2].

Classification médicale

Ce syndrome n’a pas encore de reconnaissance officielle dans le monde, mais pourrait ĂȘtre en partie rapprochĂ©e de la rubrique (Effects of vibration) T75.2 du CMS (Centers for Medicare & Medicaid Services)

Causes

Ondes de choc autour d'un T-38 Talon en vol supersonique, rendues visibles par les différences de densité et donc d'indice de réfraction des différentes couches
Photo aĂ©rienne montrant l’USS Iowa en train de tirer deux coups de canon lors d’un exercice Ă  Puerto Rico, en 1984. L’onde de choc (accompagnĂ©e d’infrasons de haute intensitĂ©) est ici matĂ©rialisĂ©e par la dĂ©pression circulaire du niveau de l’eau, qui s'est formĂ©e autour de la bouche des canons. Dans ce cas les personnels sont aussi exposĂ©s Ă  l'inhalation de fumĂ©es de tir
Les personnels de l'aéronautique civile ou militaire travaillant prÚs des avions comptent parmi les personnes risquant de développer un syndrome "vibroacoustique"
L'utilisation professionnelle réguliÚre d'outils vibrants et trÚs bruyants tels que la tronçonneuse semble aussi une source de risque[7]
La musique écoutée à forte intensité endommage le systÚme auditif, mais semble aussi, dans le spectre des sons de basse ou trÚs basse fréquence pouvoir affecter d'autres organes, dont le péricarde et les vaisseaux sanguins[2]

La maladie semble toujours dĂ©clenchĂ©e et/ou aggravĂ©e (Ă©ventuellement chez des personnes plus sensibles) par l’exposition chronique du corps Ă  de fortes vibrations et/ou des infrasons ou sons de basse frĂ©quence (moins de 500 Hz) et haute intensitĂ© (ou autrement dit Ă  un niveau de pression Ă©levĂ©e [90 dB SPL ou plus])[10].
Il faut que l’exposition ait Ă©tĂ© chronique (10 ans ou plus), comme typiquement un ouvrier utilisant frĂ©quemment un marteau-piqueur, une tronçonneuse, ou comme chez certains personnels de l’aviation[11] et notamment les pilotes de chasse s’exposant Ă  l’onde de choc du « bang » se produisant au moment du passage du mur du son [12].

Arnot fait en 2003 remarquer que pour les cas Ă©tudiĂ©s certains avaient des horaires de travail rĂ©guliers entrecoupĂ©s de repos rĂ©guliers, alors que d’autres subissaient le dĂ©calage horaire ou des horaires trĂšs irrĂ©guliers : personnel militaire, machinistes de navires pouvant passer plusieurs semaines Ă  bord sans repos au domicile (et alors constamment exposĂ©s Ă  des environnements riches en basse-frĂ©quences de grande amplitude)[2]. Les travailleurs sur plates-formes pĂ©troliĂšres, les sous-mariniers ou astronautes sont aussi dans ce cas[2]. Selon Castelo Branco et M Alves-Pereira (2004) ces derniĂšres modes d’exposition (sans repos) pourraient exacerber le risque et grandement accĂ©lĂ©rer l'Ă©volution des signes et des symptĂŽmes[2].

Les guerres mondiales, d'autres guerres rĂ©centes et leurs dĂ©luges d’obus et de bombes, les essais nuclĂ©aires, les tirs de fusĂ©es ont Ă©tĂ© ou sont encore des sources intenses de "vagues d'infrasons"[13] dont on ignore s’ils ont des effets significatifs ou durables sur les hommes, les animaux ou les Ă©cosystĂšmes.

Prévalence, métiers touchés

La prĂ©valence globale en est mal connue. Les premiers mĂ©tiers manifestement concernĂ©s Ă©taient les pilotes et techniciens d’aĂ©ronefs, civils, commerciaux ou militaires, les machinistes de navires, puis des disc-jockeys (DJ’s) ont Ă©tĂ© signalĂ©s[2] - [14] - [15] - [10]. ou des utilisateurs de tronçonneuse, marteau-piqueur, tireurs rĂ©guliers


Les dĂ©placements en avion, en transports en commun, en voiture, en moto exposent les passagers, et dans les zones de circulation, les piĂ©tons et cyclistes sont passivement Ă©galement exposĂ©s Ă  des niveaux de vibrations et de sons de basse frĂ©quence dont les effets cumulĂ©s n’ont jamais Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s ni mesurĂ©s.

Effets et symptĂŽmes

Tableau clinique : Pour l’exposition d’une partie du corps (mains et avant-bras en gĂ©nĂ©ral) Ă  des vibrations intenses, des picotements et engourdissements apparaissent rapidement. Ils correspondent Ă  une insuffisance vasculaire. En cas d’exposition chronique (ou de sensibilitĂ© particuliĂšre) surviennent en outre une intolĂ©rance au froid et possiblement une « syncope locale des doigts » voire la perte d’un ou plusieurs doigts en cas d’insuffisance vasculaire grave, chronique et non traitĂ©e.

Dans le cas de l’exposition Ă  long terme du corps entier (Ă  des vibrations de basse frĂ©quence et haute intensitĂ©) on distingue souvent deux grands types d'effets :

1) Effets spécifiques

Des modifications de la matrice extracellulaire conjointement Ă  une atteinte (Ă©paississement de 100 Ă  300 % [1]) du pĂ©ricarde semblent ĂȘtre vraiment spĂ©cifiques Ă  ce syndrome[10], or un pĂ©ricarde Ă©paissi peut devenir fibreux puis se calcifier[16] en empĂȘchant alors le bon fonctionnement du cƓur. Plus rĂ©cemment certains auteurs y associent un fibrose diffuse de la trachĂ©e et une fibrose focale des poumon[1].

2) Effets non spécifiques

Ce sont des troubles frĂ©quent lors d’autres de pathologies, notamment induites par le stress. Ils pourraient donc n’ĂȘtre ici que des effets collatĂ©raux de la maladie, induit par l’exposition au bruit et aux vibrations et le stress physique et psychologique induit par l’affection cardiovasculaire principale [10].

Ces effets sont (aprĂšs une dizaine d’annĂ©es d’exposition, selon les donnĂ©es issues de la mĂ©decine du travail) :

  • des maux de tĂȘte[2] ;
  • des saignements de nez[2] ;
  • des troubles de l'Ă©quilibre (jusqu’au vertige grave parfois selon Martinho Pimenta et al. (1999)[17] - [2] ;
  • un risque trĂšs accru d’épilepsie tardive (dont la frĂ©quence diminue parfois avec l’éloignement du poste de travail ; Les stimuli auditifs ne dĂ©clenchent pas de crises mais parfois des rĂ©actions rageuses et des troubles du mouvement [18] - [2] ;
  • une propension Ă  l’insuffisance respiratoire aprĂšs un effort mĂȘme lĂ©ger[19] ;
  • des troubles cognitifs, avec diminution des capacitĂ©s cognitives (des Ă©pisodes uniques et soudains de dĂ©ficit neurologique non convulsif surviennent parfois, probablement induit par un accident vasculaire cĂ©rĂ©bral ischĂ©mique). Les EEG sont anormaux, et concordent avec le tableau clinique ; neurologique et psychologique qui signent une dĂ©tĂ©rioration neurologique progressive et un vieillissement prĂ©coce (avec apparition du rĂ©flexe palmo-mental archaĂŻque chez environ 40 % des cas)[2]. Ces troubles s’accompagnent gĂ©nĂ©ralement de dĂ©pression, d'irritabilitĂ©, d’une tendance Ă  l’isolement pouvant parfois conduire au suicide[2] ;
  • des perturbations endocriniennes ; thyroĂŻdiennes le plus souvent (dans 12,8 % des cas dans le panel de patients portugais, alors que la prĂ©valence n’est que de 0,97 % dans la population du pays) [2] ;
  • le diabĂšte, nettement plus frĂ©quent chez ces patients que dans la population moyenne [2] ;
  • des maladies auto-immunes : sur les biopsies, une mort cellulaire non apoptotique est souvent observĂ©e [2], qui semble induite par des forces biomĂ©caniques[2] ; le microscope montre des cellules Ă©clatĂ©es, avec des organites vivants et aucune membrane plasmique environnante, ce qui pourrait induire des maladies auto-immunes ; le lupus apparait plus vite chez les souris sujettes au lupus quand elles sont exposĂ©es Ă  des ondes de basses frĂ©quences Ă  haute intensitĂ©[20]. Le lupus a Ă©tĂ© signalĂ© chez des agents de bord[21] et au sein de familles entiĂšres d’insulaires exposĂ©es dans leur environnement Ă  des ondes de basse frĂ©quence Ă  haute intensitĂ©[22], de mĂȘme pour le vitiligo (associĂ© Ă  des changements immunitaires des populations de lymphocytes CD8 et CD4) ; changements immunitaires justement observĂ©s chez des travailleurs exposĂ©s et dans le modĂšle animal [23]. L’exposition au bruit avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© reliĂ©e Ă  des problĂšmes auto-immuns chez des travailleurs exposĂ©s, par Matsumoto et coll. en 1992 et 1989 ; Jones et al. en 1976 ; Soutar et al. en 1974 ; Lippmann et al. en 1973 mais avec des mĂ©canismes explicatifs encore incomplĂštement compris.

Effets génotoxiques, tumoraux et cancérogÚnes

La prĂ©sence de tumeurs malignes est anormalement frĂ©quente chez les humains exposĂ©s aux basses frĂ©quences de grande amplitude (LPALF), et il en va de mĂȘme chez l’animal[2].

Ainsi parmi les 140 professionnels portugais atteints et suivis, 28 ont dĂ©clarĂ© des tumeurs malignes. Cinq de ces 28 personnes avaient mĂȘme plusieurs tumeurs de types diffĂ©rents. Toutes les tumeurs du systĂšme nerveux central (SNC) Ă©taient des gliomes malins et toutes les tumeurs du systĂšme respiratoire Ă©taient des carcinomes Ă  cellules squameuses (5 dans le poumon, 1 dans le larynx). D'autres tumeurs Ă©taient localisĂ©es dans l'estomac (N = 10), le cĂŽlon et le rectum (N = 9), les tissus mous (N = 1) et la vessie (N = 1). Toutes les tumeurs du systĂšme digestif Ă©taient des adĂ©nocarcinomes faiblement diffĂ©renciĂ©s[2]. Ce constat a motivĂ© une Ă©tude sur la gĂ©notoxicitĂ© de l’exposition aux basse-frĂ©quences de grande amplitude (LPALF). Cette Ă©tude a conclu que la gĂ©notoxicitĂ© est dĂ©montrĂ©e chez l’homme (Silva et al., 1999) comme dans le modĂšle animal (Silva et al., 2002). L’exposition aux vibrations Ă  basse frĂ©quence Ă  puissance Ă©levĂ©e est maintenant reconnue comme ayant un effet gĂ©notoxique, via l’induction d’échanges de chromatides sƓurs anormalement frĂ©quents, tant chez l’homme que chez l’animal de laboratoire[2].

Phases de progression clinique de la maladie

En 1956 le professeur Eugenia Andreeva-Galanina a dĂ©veloppĂ© une premiĂšre classification des pathologies induites par les vibrations des mains et de l’avant-bras ; elle a Ă©tĂ© affinĂ©e et est devenue un outil important pour la mĂ©decine du travail[10].

La progression de la maladie dite vibroacoustique qui correspond, elle à une exposition chronique de tout le corps, est lente et insidieuse. Elle est source directe ou indirecte de lésions ou troubles de nombreux systÚmes dans le corps[10].

Sur la base du temps d’apparition des signes et symptĂŽmes les plus frĂ©quents (pour 140 patients atteints et en fonction du temps nĂ©cessaire Ă  50 % de la population pour acquĂ©rir le signe ou le symptĂŽme en question, Castello distinguait, en 1999, 3 stades :

  1. Stade I : signes lĂ©gers comportementaux ; trouble de l’humeur et infections rĂ©pĂ©tĂ©es des voies respiratoires (bronchite chronique
) ;
  2. Stade II : signes modérés (dépression et agressivité, épaississement du péricarde[24] et autres ; troubles neurovasculaires discrets) ;
  3. Stade III : signes sévÚres tels qu'arythmie cardiaque[25], infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, malignité, épilepsie et suicide[2]).

Reconnaissance de la maladie, législation

Aux États-Unis, l'OSHA n'a pas Ă©dictĂ© de limites spĂ©cifiques pour l'exposition humaine aux infrasons, mais l’American National Standards Institute (ANSI) a produit un guide (1979) pour l’évaluation du degrĂ© d’exposition du corps humain entier aux vibrations[26], puis a Ă©mis en 2006 une recommandation sur l’exposition aux vibrations lors du travail : ne pas dĂ©passer des valeurs d’accĂ©lĂ©ration de 2,5 m/s2 d’exposition des mains aux vibrations (5 Ă  1 400 Hz, pour trois axes de mouvement orthogonaux) pendant des journĂ©es de travail de 8 heures[27].

Castelo Branco & Alves-Pereira (2004) reprochent Ă  la mĂ©decine du travail, dans les situations Ă  risques, de ne pratiquement jamais Ă©valuer l’exposition des employĂ©s aux infrasons Ă©mis Ă  haute intensitĂ©[2]. Ils en concluent que la lĂ©gislation en vigueur en matiĂšre d’évaluation du bruit dans le monde ne protĂšge donc pas adĂ©quatement les travailleurs, ni d'ailleurs les citoyens Ă©ventuellement exposĂ©s Ă  ce syndrome, lequel ne pourra ĂȘtre reconnu comme « maladie professionnelle et environnementale » tant que l'agent de la maladie ne sera pas correctement Ă©valuĂ© lors de la vie professionnelle et non professionnelle[2]. « Dans le monde la souffrance des personnes exposĂ©es Ă  ce problĂšme est trĂšs importante, et il est Ă©thiquement insoutenable de maintenir ce statu quo » concluent ces deux spĂ©cialitĂ©s portugais de la maladie[2].

En 2000 Alves-Pereira & Castelo Branco, les deux spĂ©cialiste de ce syndrome, estiment possible d'empĂȘcher l'Ă©volution de la maladie vers des stades cliniquement graves ou mortels, Ă  condition de la dĂ©tecter prĂ©cocement, ce qui implique pour les personnes Ă  risque un Ă©chocardiogramme annuel et un suivi mĂ©dical par des mĂ©decins du travail bien informĂ©s, ainsi que la participation active du patient et de son employeur le cas Ă©chĂ©ant[28].

Exposition de la population générale

L’exposition de la population gĂ©nĂ©rale n’a jamais Ă©tĂ© mesurĂ©e ni Ă©valuĂ©e, hormis pour quelques populations d'ouvriers ou une partie des habitants de l'Île de Vieques (utilisĂ©e comme base de la marine et de l'aviation amĂ©ricaine depuis plus d'un demi-siĂšcle). Un problĂšmes scientifique est que, dans ce domaine, il faudrait pouvoir faire des Ă©tudes randomisĂ©es et en double aveugle, avec une population tĂ©moin, or dans les pays occidentalisĂ©s il est devenu impossible de trouver un panel de tĂ©moins non exposĂ©s Ă  des infrasons ou sons de basse frĂ©quence d'origine artificielle. Et ailleurs jusqu’en pleine jungle, la pĂ©nĂ©tration des avions, hĂ©licoptĂšres, quads, fusils, tronçonneuses et moteurs hors-bord fait qu’il est Ă©galement devenu difficile de trouver des zones habitĂ©es et des populations indemnes de toute exposition aux ondes basse frĂ©quence et de forte intensitĂ©[2].

HypothĂšse prion

Purdey au dĂ©but des annĂ©es 2000 pose l’hypothĂšse que des vagues intenses d’infrasons auraient pu jouer un rĂŽle (conjoint Ă  d’autres facteurs de dĂ©clenchement, Ă©galement « environnementaux ») dans l’apparition du prion pathogĂšne de la maladie de la vache folle en Europe vers 1996[29]

Références

  1. Alves-Pereira M., de Melo J.J & Branco N.A.C (2005) Low frequency noise exposure and biological tissue: reinforcement of structural integrity ? In Recent Advances in Multidisciplinary Applied Physics (p. 961-966)|résumé.
  2. Branco N.C & Alves-Pereira M (2004) « Vibroacoustic disease ». Noise and Health, 6(23), 3.
  3. Mendes J, Martins dos Santos J, Oliveira P, da Fonseca J, Aguas A, et Castelo Branco A (2007) « Low frequency noise effects on the periodontium of the Wistar rat - a light microscopy study ». European Journal of Anatomy 11 (1): 27-30
  4. Laird DA. (1928) Experiments on the physiological cost of noise. Journal of the National Institute of Industrial Psychology, 4: 251-58
  5. Izmerov NF, Suvorov GA, Kuralesin NA, and Ovakimov VG. (1997) Infrasound: body's effects and hygienic regulation. Vestn Ross Akademie Medizina Nauk 7: 39-46
  6. Marciniak W, Rodriguez E, Olsowska K, Botvin I, Araujo A, Pais F, Soares Ribeiro C, Bordalo A, Loureiro J, Prazeres de Sa E, Ferreira D, Castelo Branco MSNAA, and Castelo Branco NAA. (1999) Echocardiography in 485 aeronautical workers exposed to different noise environments. Aviation, Space and Environmental Medicine, 70 (3, Suppl): A46-53
  7. Matoba T (1983) Increased left ventricular function as an adaptive response in vibration disease. American Journal of Cardiology, 15: 1223-6
  8. Castelo N.B & Rodriguez E (1999) « The vibroacoustic disease--an emerging pathology ». Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), A1-6 (résumé)
  9. Torres R, Tirado G, Roman A, Ramirez R, Colon H, Araujo A, Pais F, Marciniak W, Nobrega J, Bordalo e Sa A, Lopo Tuna JMC, Castelo Branco MSNAA, Alves-Pereira M, and Castelo Branco NAA. (2001) Vibroacoustic disease induced by long-term exposure to sonic booms. Internoise 2001, The Hague, Holland: 1095-98
  10. Castelo, N. B. (1999). The clinical stages of vibroacoustic disease. Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), mars, A32-9 (résumé)
  11. Castro, A. P., Aguas, A. P., Grande, N. R., Monteiro E & Castelo N.B (1999) Increase in CD8+ and CD4+ T lymphocytes in patients with vibroacoustic disease. Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), A141-4.
  12. Torres, R., Tirado, G., Roman, A., Ramirez, R., Colon, H., Araujo, A., ... & Lopo Tuna, J. (2001, August). Vibroacoustic disease induced by long-term exposure to sonic booms. In INTER-NOISE and NOISE-CON Congress and Conference Proceedings (Vol. 2001, No. 3, pp. 2278-2281). Institute of Noise Control Engineering)
  13. Dalins, I., McCarty, V. M., Kaschak, G., & Donn, W. L. (1974). Investigations of acoustic‐seismic effects at long range: early‐arriving seismic waves from Apollo 16. The Journal of the Acoustical Society of America, 56(5), 1361-1366
  14. Maschke C (2004) « Introduction to the special issue of low frequency noise ». Noise and Health 6: 1-2.
  15. Branco N.C & Alves-Pereira M (2004) Vibroacoustic disease | Noise and Health, 6(23), 3.
  16. Dacher J.N, Caudron J, Fares J & Germain P (2010) « Comment je fais une IRM pour péricardite chronique constrictive ? ». Journal de radiologie, 91(5), 623-629.
  17. Martinho Pimenta AJF and Castelo Branco NAA. (1999b) Epilepsy in vibroacoustic disease - A case report. Aviation, Space and Environmental Medicine, 70 (3, Suppl): A1227
  18. Martinho Pimenta AJF and Castelo Branco NAA. (1999) Facial dyskinesia induced by auditory stimulation. A report of four cases. Aviation, Space and Environmental Medicine, 70 (3, Suppl): A119-21
  19. Reis Ferreira J, Mendes CP, Antunes M, Martinho Pimenta J, Monteiro E, Alves-Pereira M and Castelo Branco NAA. (2003) « Diagnosis of vibroacoustic disease - preliminary report ». Proceedings 8th International Congress of Noise as a Public Health Problem, Rotterdam, Holland: 112-114
  20. Aguas AP, Esaguy N, Castro AP, Grande NR, and Castelo Branco NAA. (1999) Acceleration of lupus erythematosus-like processes by low frequency noise in the hybrid NZB/W mouse model. Aviation Space Environmental Medicine, 70 (March, Suppl): A132-6
  21. AraĂșjo, A., Pais, F., Lopo Tuna, J., Alves-Pereira, M., & Castelo Branco, N. A. (2001, August). Echocardiography in noise-exposed flight crew. In INTER-NOISE and NOISE-CON Congress and Conference Proceedings (Vol. 2001, No. 7, pp. 71-74). Institute of Noise Control Engineering.
  22. Torres, R., Tirado, G., Roman, A., Ramirez, R., Colon, H., Araujo, A., ... & Lopo Tuna, J. (2001, August). Vibroacoustic disease induced by long-term exposure to sonic booms. In INTER-NOISE and NOISE-CON Congress and Conference Proceedings (Vol. 2001, No. 3, pp. 2278-2281). Institute of Noise Control Engineering
  23. Aguas AP, Esaguy N, Castro AP, Grande NR, and Castelo Branco NAA. (1999b) Effect low frequency noise exposure on BALB/C mice splenic lymphocytes. Aviation Space Environmental Medicine, 70 (March, Suppl): A12831
  24. Castelo N.B, Águas A.P, Sousa A.P, Monteiro E, Fragata,J.I, Tavares F & Grande N.R (1999) "The human pericardium in vibroacoustic disease ». Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), A54-62. (résumé)
  25. Lindsay-Pologne, John. « La santé et la marine à Vieques». Communauté de réconciliation. 2001. Consulté le 19/01/2007.
  26. American National Standards Institute (1979) "Guide for the Evaluation of Human Exposure to Whole-Body Vibration", ANSI S3.18-1979. New York: Acoustical Society of America.
  27. American National Standards Institute (2006) « Guide for the Measurement and Evaluation of Human Exposure to Vibration Transmitted to the Hand », ANSI S2.70-2006. New York: Acoustical Society of America.
  28. Alves-Pereira M & Castelo Branco N (2000) Vibroacoustic disease : the need for a new attitude towards noise. CITIDEP & DCEA-FCT-UNL, Lisboa.
  29. Purdey M (2003) Does an infrasonic acoustic shock wave resonance of the manganese 3+ loaded/copper depleted prion protein initiate the pathogenesis of TSE ; Medical hypotheses, 60(6), 797-820.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Alves-Pereira M & Branco N.A.C (2007) « Vibroacoustic disease: biological effects of infrasound and low-frequency noise explained by mechanotransduction cellular signalling ». Progress in Biophysics and Molecular Biology, 93(1-3), 256-279.
  • Alves-Pereira M & Castelo Branco N.A (2007) The Scientific Arguments Against Vibroacoustic Disease. In INTER-NOISE and NOISE-CON Congress and Conference Proceedings (Vol. 2007, No. 2, p. 4350-4356). , Institute of Noise Control Engineering.
  • Branco N.C & Alves-Pereira M (2004) « Vibroacoustic disease ». Noise and Health, 6(23), 3.
  • Branco N.A.C, Alves-Pereira M, Pimenta A.M, & Ferreira J.R (2015) « Clinical protocol for evaluating pathology induced by low frequency noise exposure » ; Euronoise.
  • Castelo Branco N.A.A, Araujo A, Jonaz de Melo J & Alves-Pereira M (2004) « Vibroacoustic Disease in a Ten Year Old Male » | Proceedings of the Inter-Noise 2004 Conference. |Prague: Czech Acoustical Society et l’International Institute of Noise Control Engineering
  • Castelo N.B (1999). « A unique case of vibroacoustic disease: a tribute to an extraordinary patient ». Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), A27-31.
  • Castelo Branco, Nuno A.A., JosĂ© Reis Ferreira, et Mariana Alves-Pereira. (2007) « Respiratory pathology in vibroacoustic disease: 25 years of research ». Revista Portuguesa de Pneumologia
  • Mendes J, Martins dos Santos j , Oliveira P, da Fonseca J, Aguas A Castelo Branco N (2007) « Low frequency noise effects on the periodontium of the Wistar rat - a light microscopy study ». European Journal of Anatomy 11 (1): 27-30
  • Pimenta M.G, Martinho A.P, Castelo M.B, Silva J.S & Castelo N.B (1999) « ERP P300 and brain magnetic resonance imaging in patients with vibroacoustic disease ». Aviation, space, and environmental medicine, 70(3 Pt 2), A107-14.
  • Reis Ferreira J.M, Couto A.R, Jalles-Tavares N, Castelo Branco M.S.N & Castelo Branco N.A.A (1999) « Airway flow limitation in patients with vibroacoustic disease ». Aviation, space, and environmental medicine, 70(3), A63-A69.
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.