Histoire naturelle
Le terme dâhistoire naturelle est apparu en français au XVIe siĂšcle pour dĂ©signer les livres dĂ©crivant les objets de la nature. Au XXIe siĂšcle, le MusĂ©um national d'histoire naturelle[1] propose une dĂ©finition du terme « histoire naturelle » :
« Historiquement, c'est l'enquĂȘte, la description de tout ce qui est visible dans le monde naturel : animal, vĂ©gĂ©tal, minĂ©ral. »
Le Manifeste du MusĂ©um (2017)[2] prĂ©cise que l'Ă©tude de la diversitĂ© des sociĂ©tĂ©s humaines fait partie intĂ©grante de l'histoire naturelle : le musĂ©e de l'Homme, musĂ©e d'anthropologie, fait d'ailleurs partie du MusĂ©um national d'histoire naturelle, qui dispose de plusieurs chaires d'anthropologie. Le MusĂ©um signale que les conceptions de l'histoire naturelle nâont cessĂ© dâĂ©voluer au cours du temps, en citant Ă tour de rĂŽle des savants tels que Carl von LinnĂ©, Georges-Louis Leclerc de Buffon, Jean-Baptiste de Lamarck et Charles Darwin, pour conclure que :
« Lâhistoire naturelle aujourdâhui, câest lâĂ©tude de la diversitĂ© du monde vivant et du monde minĂ©ral et de ses interactions avec l'homme. Câest comprendre comment cette diversitĂ© sâest construite et quelle est sa dynamique. »
François Terrasson, professeur au MusĂ©um, ajoute quâ« en histoire naturelle comme en mĂ©decine, les gĂ©nĂ©ralistes, avec leur vision dâensemble, câest-Ă -dire les naturalistes, sont aussi indispensables que les spĂ©cialistes, avec leur capacitĂ© dâexpertise chacun dans son domaine »[3].
Origines du terme
Traduction littĂ©rale de lâHistoria naturalis de Pline, le terme dâ« histoire naturelle » apparaĂźt en français dans la seconde moitiĂ© du XVIe siĂšcle, mais la dĂ©marche dâobservation et de description systĂ©matique de la nature date de lâAntiquitĂ© avec Aristote, ThĂ©ophraste, Antigone de Karystos et Pline l'Ancien. Il convient ici d'entendre « histoire » dans son sens antique de « enquĂȘte, recherche »[2].
Ăvolutions du terme
Selon la dĂ©finition quâen donne Herman Boerhaave (1668-1738) dans la prĂ©face du Botanicon Parisiense de SĂ©bastien Vaillant (1669-1722)[4] :
« On appelle histoire naturelle la connaissance des choses, qui sont produites dans lâUnivers, et que les hommes peuvent dĂ©couvrir par les sens. Entre toutes les sciences qui ont Ă©tĂ© cultivĂ©es par lâindustrie des hommes celle-ci a toujours passĂ© avec raison pour une des principales. »
Au XVIIe et plus encore au XVIIIe siĂšcle, lâexpression sert Ă dĂ©signer lâĂ©tude des objets observables, tant en astronomie, quâen botanique, en zoologie ou en gĂ©ologie. Ă lâĂ©poque, le spĂ©cialiste de lâhistoire naturelle est un naturaliste.
Avec le dĂ©veloppement des connaissances, lâhistoire naturelle se divise en nombreuses spĂ©cialitĂ©s, au point que la dĂ©marche « naturaliste » et le mĂ©tier de « naturaliste » (gĂ©nĂ©raliste) disparaissent dans le courant du XXe siĂšcle. SimultanĂ©ment, sous lâinfluence de lâidĂ©ologie de la « lutte de lâHomme civilisĂ© contre la nature sauvage »[3] les mots mĂȘmes « histoire naturelle » prennent une connotation archaĂŻsante, tandis que biologiste et sciences naturelles acquiĂšrent par contraste une aura de modernitĂ©.
Comme le fait remarquer Yves Delange du MusĂ©um national d'histoire naturelle, Ă Paris, il y a trop souvent eu opposition entre « naturaliste » (professionnel ou amateur) et « biologiste ». En français contemporain, le terme « sciences naturelles » (qui n'est pas un synonyme stricto sensu de science de la nature), remplace Ă peu prĂšs la dĂ©nomination « histoire naturelle ». Celle-ci est parfois perçue Ă tort comme vieillotte malgrĂ© la modernitĂ© des recherches pluri-disciplinaires menĂ©es, par exemple, au MusĂ©um national d'histoire naturelle. En fait, le terme « histoire » renvoie Ă son sens Ă©tymologique : « histoire » vient du grec ancien ጱÏÏÎżÏία / historĂa, signifiant « enquĂȘte, connaissance acquise par l'enquĂȘte », qui lui-mĂȘme vient du terme ጔÏÏÏÏ / hĂstĆr, « qui sait, qui connaĂźt (la loi), juge ». Ainsi, l'« histoire naturelle » est une enquĂȘte approfondie sur la nature, pour continuer Ă acquĂ©rir des donnĂ©es. Ce terme, « histoire », peut aussi ĂȘtre interprĂ©tĂ©, Ă la lumiĂšre de l'approche actuelle de cette discipline, comme l'histoire de notre planĂšte, de la vie (palĂ©ontologie) et de la lignĂ©e humaine (anthropologie). Selon cette vision rĂ©cente de ce que serait l'« histoire naturelle », le terme « naturelle » renverrait alors Ă la biodiversitĂ© actuelle de notre planĂšte. Au XXIe siĂšcle, l'« histoire naturelle » est ainsi plus que jamais d'actualitĂ© en tant qu'approche systĂ©mique pluridisciplinaire, englobant sans les opposer aussi bien l'humain que la nature, l'environnement que le dĂ©veloppement, la prĂ©servation que la valorisation[5].
Pour simplifier, on peut estimer que les sciences naturelles englobent les disciplines suivantes :
- géologie, minéralogie, pétrologie, paléontologie ;
- botanique, zoologie, mycologie, anatomie ;
- physiologie, biologie, génétique, microbiologie ;
- Ă©cologieâŠ
En revanche, les Sciences naturelles se différencient nettement des sciences formelles et des sciences humaines et sociales telles que :
- physique ;
- astronomie, cosmologie ;
- mathématiques, logique, algorithmique ;
- informatique ;
- linguistique ;
- chimie ;
- climatologie ;
- géographie, géonomie ;
- médecine, pharmacologie ;
- sociologie, psychologie, ethnologie ;
- archéologie, paléonthologie ;
- etc.
Le besoin dâune vision globale et interdisciplinaire subsiste nĂ©anmoins, ce qui dĂ©veloppe, dans le dernier quart du XXe siĂšcle, de nouvelles approches comme la gĂ©onomie (dont lâapparition date du dĂ©but du XXe siĂšcle, mais qui avait Ă©tĂ© occultĂ©e par lâĂ©volution prĂ©cĂ©dente). Avec les progrĂšs de la gĂ©nĂ©tique, lâinterconnexion des savoirs, lâapproche gĂ©onomique et la popularitĂ© du « dĂ©veloppement durable » (quelles quâen soient les interprĂ©tations, les instrumentalisations ou les degrĂ©s de comprĂ©hension), lâhistoire naturelle devient progressivement une « histoire globale » de lâUnivers, du systĂšme solaire et surtout de la planĂšte Terre, une histoire interdisciplinaire Ă la fois cosmogonique, physique, chimique, biologique et humaine. Des livres comme The richness of Life[6] (sous la direction de Stephen Jay Gould), Les Mondes disparus d'Ăric Buffetaut et Jean Le Loeuff, Classification phylogĂ©nĂ©tique du vivant de Guillaume Lecointre et HervĂ© Le Guyader ou encore le Guide critique de l'Ă©volution de Guillaume Lecointre, Corinne Fortin, GĂ©rard Guillot et Marie-Laure Le Louarn-Bonnet, relĂšvent de cette nouvelle « histoire naturelle globale ». Ă ce sujet, Jean-RenĂ© Vanney[7] Ă©crit :
« [cette relation] ne devrait pas ĂȘtre un Ă©grĂšnement d'Ă©vĂ©nements dans le temps, ni une chronique de tel ou tel phĂ©nomĂšne, plutĂŽt une gerbe liant les faits dans leur globalitĂ©. »
â Jean-RenĂ© Vanney, MystĂšre des abysses (p. 54)
Ăvolution des informations visuelles en histoire naturelle
Exemple des oursins :
- Planche d'oursins de lâEncyclopĂ©die (vol. 5).
- Exemple d'illustration biométrique moderne d'un oursin-tortue
Notes et références
Notes
Références
- Site officiel du MNHN: voir
- Luc Abbadie, Gilles BĆuf, Allain Bougrain-Dubourg, Claudine Cohen, Bruno David, Philippe Descola, Françoise Gaill, Jean Gayon, Thierry Hoquet, Philippe Janvier, Yvon Le Maho, Guillaume Lecointre, ValĂ©rie Masson-Delmotte, Armand de RicqlĂšs, Philippe Taquet, StĂ©phanie ThiĂ©bault et FrĂ©dĂ©rique Viard, Manifeste du MusĂ©um : Quel futur sans nature ?, Paris, Reliefs/MNHN, , 80 p. (ISBN 978-2-8565-3811-1, lire en ligne).
- François Terrasson : La Peur de la nature, éd. Sang de la Terre, 1988
- Sébastien Vaillant (1727). Botanicon Parisiense ou Dénombrement par ordre alphabétique des plantes qui se trouvent aux environs de Paris, Jean & Herman Verbeek et Balthazar Lakeman (Leyde et Amsterdam) : ca 260 p. + 33 pl.
- Yves Delange, Plaidoyer pour les sciences naturelles : DĂšs l'enfance, faire aimer la nature..., Ăditions L'Harmattan, Paris, 2009, p. 39-41. (ISBN 978-2296-07991-5)
- « Table of contents for The richness of life », sur catdir.loc.gov (consulté le )
- François Carré et Loïc Ménanteau, « Jean-René VANNEY », sur Géomorphologie : relief, processus, environnement, (consulté le )
Annexes
Articles connexes
Bibliographie
- Luc Abbadie, Gilles BĆuf, Allain Bougrain-Dubourg, Claudine Cohen, Bruno David, Philippe Descola, Françoise Gaill, Jean Gayon, Thierry Hoquet, Philippe Janvier, Yvon Le Maho, Guillaume Lecointre, ValĂ©rie Masson-Delmotte, Armand de RicqlĂšs, Philippe Taquet, StĂ©phanie ThiĂ©bault et FrĂ©dĂ©rique Viard, Manifeste du MusĂ©um : Quel futur sans nature ?, Paris, Reliefs/MNHN, , 80 p. (ISBN 978-2-8565-3811-1, lire en ligne).
- Leçon inaugurale d'Armand de RicqlĂšs portant notamment sur la diffĂ©rence entre histoire naturelle et biologie, et sur le thĂšme Biologie historique et Ăvolutionnisme, lundi (14 pages, PDF)
- Dictionnaire pittoresque dâhistoire naturelle et des phĂ©nomĂšnes de la nature, contenant lâhistoire des animaux, des vĂ©gĂ©taux, des minĂ©raux⊠(publiĂ© sous la dir. de FĂ©lix Ădouard GuĂ©rin-MĂ©neville), Paris, au Bureau de souscription, 1833-1839, 12 vol. grd in-8° (lire en ligne [PDF]). â Les planches occupent trois vol.
- Ferdinand Faideau et Auguste Robin, Cours complet d'histoire naturelle à l'usage des lycées et collÚges, Larousse, Paris, 1906-1910.
- Zoologie élémentaire : Homme et classification, 1907, 171 p. lire en ligne
- Botanique élémentaire : Organographie et classification, 1907, 127 p. lire en ligne
- Géologie élémentaire : Les phénomÚnes actuels, 1906, 111 p. lire en ligne
- Conférences de Géologie : Roches, Minéraux, Terrains, 1910, 165 p. lire en ligne
- David Burnie (dir.), Histoire naturelle, Flammarion, Paris, 2011, 648 p. (ISBN 978-2-0812-5170-0)
Liens externes
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