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Endométriose

L'endométriose est une maladie gynécologique chronique et inflammatoire, liée à la présence de tissu semblable à la muqueuse utérine, en dehors de la cavité utérine. Elle peut être asymptomatique, mais également provoquer des douleurs, parfois invalidantes (dysménorrhée, dyspareunie), des problèmes d'infertilité[1], ou des symptômes intestinaux (diarrhées, constipation).

Endométriose
Description de l'image Endometriosis.jpg.
Traitement
Médicament Danazol, hydroxyprogesterone, leuprorelin, noréthistérone, ethynodiol diacetate (en), desogestrel (en), nafarelin (en), acétate de goséréline (en), lévonorgestrel, étonogestrel, goséréline, ethinyl estradiol / norethindrone (d), médroxyprogestérone (en), leuprorelin et ethisterone (en)
Spécialité Gynécologie

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

On observe ce phénomène principalement dans la cavité abdominale,

  • sur le pĂ©ritoine (endomĂ©triose pĂ©ritonĂ©ale superficielle),
  • en zone sous pĂ©ritonĂ©ale (endomĂ©triose pelvienne profonde),
  • au niveau des ovaires (kyste de l’ovaire endomĂ©triosique).

Dans les cas d'endométriose pelvienne profonde, ce tissu ectopique (glandes et/ou de stroma endométrial) peut se retrouver sur les ligaments utéro-sacrés, sur le vagin, sur les organes digestifs, comme le rectum, sur la vessie, voire sur les reins, et plus rarement, sur le diaphragme, les poumons, les tissus mous, les os et le cerveau[2]. Ce tissu endométrial est hormono-sensible, comme l'endomètre et suit donc le cycle menstruel.

Si l'endométriose se situe à l'extérieur de l'utérus, elle est souvent associée à l’adénomyose, correspondant à la présence de glandes et/ou de stroma endométrial dans le myomètre[3].

L'endométriose a été observée pour la première fois au microscope par Karel Rokitansky en 1860, alors que des symptômes évocateurs de l'endométriose (dysfonctionnement menstruel, la grossesse comme remède possible, les douleurs pelviennes et l'infertilité) sont décrits depuis l'antiquité[4]. Toutefois, l'endométriose étant une maladie multifactorielle[5], son étiologie, son évolution, sa physiopathologie font encore l'objet d'investigations[6].

Épidémiologie

Fréquence

Dans le monde, 190 millions de personnes sont concernées par l'endométriose[7], soit près de 10 % des personnes menstruées[8] - [9]. Toutefois, toutes ne sont pas diagnostiquées, car l'affection peut être asymptomatique, présenter des symptômes variables, et communs à d'autres affections, et nécessite de l'imagerie médicale (cœlioscopie, IRM). La prévalence de l'endométriose est supérieure parmi les hommes transgenres par rapport aux femmes cisgenres[10].

L'endométriose est à l'origine de près de la moitié des dysménorrhées[9]. En outre, 5 à 15 % des cas d'infertilité ou de sous-fertilité sont attribués à l'endométriose[11]. L'endométriose entraînerait des difficultés de reproduction jusqu'à 50 % des cas[11].

La prévalence de l'endométriose augmente avec l'âge. Elle touche principalement les femmes autour de la trentaine, mais peut néanmoins se rencontrer dès l'adolescence. Le risque de développer une endométriose pour une fille est cinq fois plus élevé si sa mère est atteinte[5]. Elle est également plus fréquente en cas de

Sa fréquence semble augmenter dans les pays développés mais on ignore s'il s'agit d'une augmentation réelle ou d'un meilleur diagnostic. Bien que rarissimes, des cas d'endométriose ont également été rapportés chez des hommes[12] - [13] - [14].

Localisation

Localisations les plus courantes de l'endométriose.

Les lésions d'endométriose se situent essentiellement dans la cavité pelvienne, et touchent principalement les organes voisins de l'utérus. Elles peuvent également s'étendre à la cavité abdominale, au diaphragme et à la plèvre. Exceptionnellement, elles peuvent affecter des organes distants, tels le foie, les poumons ou le cerveau.
3 formes d'endométrioses sont caractérisées :

  • l'endomĂ©triose pĂ©ritonĂ©ale superficielle, affectant la surface du pĂ©ritoine,
  • l’endomĂ©triome ovarien, formant un kyste de l’ovaire endomĂ©triosique,
  • l’endomĂ©triose pelvienne profonde (ou sous-pĂ©ritonĂ©ale), affectant la musculeuse des organes abdomino-pelviens, tels que le vagin, la vessie, l’uretère ou le tube digestif[15].
Fréquence des différentes localisations de l'endométriose profonde
Localisation Fréquence (%)
ligaments utérosacrés 50
vagin (cul-de-sac postérieur) 15
rectum et sigmoĂŻde 20 - 25
vessie 10
uretères 3

Un ou plusieurs organes peuvent ĂŞtre atteints chez une mĂŞme personne.
Plus rarement, elle peut atteindre des organes, à la suite d'une intervention chirurgicale (ex : endométriose pariétale cicatricielle, suite à une césarienne), ou être diffusée par le système lymphatique ou sanguin. Des lésions d’endométriose peuvent ainsi apparaître au niveau d’organes localisés à distance de l’utérus (ex : les poumons ou le cerveau).

Étiologie

Les causes de l’endométriose sont multiples, liées à des facteurs génétiques, environnementaux et en relation avec les menstruations.

Le reflux menstruel

D'après la Haute Autorité de santé, "Le rôle du reflux menstruel dans la physiopathologie de l’endométriose est majeur et permet d’expliquer la répartition asymétrique des lésions, qui prédominent dans le compartiment postérieur du pelvis et à gauche." Cette hypothèse a été proposée dès 1921 par John A. Sampson (en) qui suggérait un reflux de tissu endométrial par les trompes utérines lors des règles. En effet, lors des menstruations, le sang menstruel peut ne pas totalement s'écouler par le vagin ; une partie de ce sang peut refluer vers les trompes et s'écouler dans la cavité pelvienne. Ce sang contient naturellement des cellules endométriales vivantes qui peuvent se greffer sur le tissu péritonéal ou sur d'autres organes, grâce à diverses enzymes (MMPs ou métalloprotéinases de la matrice).

Différents éléments appuient cette hypothèse de la transplantation par reflux tubaire, parmi lesquels le fait de trouver à la laparoscopie du sang dans le cul-de-sac de Douglas lors de menstruations, ainsi que l'apparition de cellules endométriales dans le liquide de dialysat péritonéal chez les femmes en dialyse péritonéale[8] - [16].

Cependant, le reflux menstruel apparaissant chez quasiment toutes les femmes, il faut trouver un facteur plus spécifique. Deux hypothèses sont discutées : un endomètre pathologique à la suite d'une prédisposition génétique, un défaut dans le système immunitaire. La génétique ne permet pas, en l'état actuel des connaissances, de définir un gène ou une combinaison de gènes[17] qui serait impliqué, en raison de la trop grande variété des causes et des effets de la maladie. Pour ce qui concerne l'immunité, par contre, il est bien établi que les mécanismes de défense du corps humain jouent un rôle important. -[18].

L'écoulement des règles déclenche en effet des inflammations, donc une réponse du système immunitaire. On trouve des correspondances entre des pathologies de ce système et l'endométriose. On postule que l'organisme serait en défaut pour reconnaitre des lésions qu'il aurait lui-même déclenchées, vu que le système immunitaire est orienté pour protéger le non-soi. Différentes perturbations de ce système, telles que peuvent en produire des infections microbiennes, ou certains médicaments comme le tristement célèbre distilbène (voir Diéthylstilbestrol), risquent d'induire l'endométriose. Tout ce qui dans l'environnement perturbe le système immunitaire, comme les pesticides, est suspecté. -[18].

Les facteurs génétiques

Les causes génétiques sont envisagées depuis de nombreuses années. En effet, la probabilité de développer une endométriose est cinq fois plus élevé pour les filles ayant une mère atteinte, que dans la population générale[19] De nombreuses publications ont mis en évidence des variants génétiques plus fréquents dans le cas des patients atteints d'endométriose. En août 2021, une équipe de chercheurs britanniques affirment avoir identifié un gène spécifique responsable d'une augmentation du risque d'endométriose[20].

Une mutation sur le gène Kras (gène stimulant la croissance et la prolifération tissulaire) au niveau des let-7 augmenterait le risque de survenue d'une endométriose[21]. Des mutations sur d'autres gènes interviendraient de façon analogue[22]. Tout cela suggère que certains variants génétiques jouent un rôle facilitateur ou inhibiteur au développement de l'endométriose.

Hypothèse métaplasiques

La deuxième série d'hypothèses envisage une métaplasie à partir de cellules étrangères à l'endomètre. L'hypothèse métaplasique coelomique suppose une transformation des tissus du péritoine qui recouvre les organes présents dans la cavité abdominale, tissus qui dériveraient d'un tissu embryologique appelé cœlomique et posséderait des cellules pluripotentes. Ces cellules auraient la capacité de se différencier et de suivre une transformation métaplasique en d'autres tissus, comme du tissu endométrial. Les stimuli capables d'engendrer cette différenciation restent inconnus[8].

Une hypothèse très proche est celle de l'induction, qui envisage une transformation de cellules du péritoine sous l'effet de facteurs hormonaux ou immunologiques[8].

Une troisième hypothèse s'appuie sur une métaplasie à partir des vestiges du canal de Müller sous l'effet d'œstrogènes[8].

La découverte de cas d'endométriose chez des femmes dépourvues d'endomètre et chez des hommes traités avec de fortes doses d'œstrogènes a conduit à imaginer plus récemment une quatrième voie, celle d'une métaplasie à partir de cellules-souches extra-utérines ou de cellules progénitrices issues de la moelle épinière[8].

Hypothèse de la métastase

La dernière hypothèse évoquée est la théorie de la transplantation ou de l'induction. Elle suggère que lors des menstruations, les différents vaisseaux (artérioles spiralées, vaisseaux lymphatiques…) aspirent des cellules endométriales dans la circulation systémique et provoquent l'essaimage dans tout l'organisme. Cette hypothèse a le bénéfice d'expliquer l'apparition de l'endométriose dans une pluralité de localisations[8] - [23].

Aucune hypothèse ne pouvant expliquer à elle seule toutes les localisations, il est probable que ces trois mécanismes puissent jouer de façon conjointe[8].

Les trois facteurs importants qui jouent un rĂ´le sont :

  • la prĂ©sence d'un reflux de sang menstruel dans la cavitĂ© pĂ©ritonĂ©ale ;
  • la prĂ©sence de macrophages inefficaces (non- immuno-incompĂ©tents) ou dĂ©passĂ©s par les quantitĂ©s Ă  rĂ©sorber ;
  • le fait d'ĂŞtre rĂ©glĂ©e, donc d'avoir des menstruations.

Hypothèse auto-immunitaire

Malgré la mise en évidence de nombreuses anomalies du système immunitaire (facteur de nécrose tumorale, interleukines…)[8] il n’a jamais été retrouvé d’anticorps spécifiques de l’endométriose ni aucune relation avec une grande pathologie immunitaire connue comme la Thyroïdite de Hashimoto, la polyarthrite rhumatoïde, le syndrome des anti-phospholipides… Et même s'il existe des anomalies dans l’immunité locale, rien ne permet de dire s’il s’agit d’une cause ou d’une conséquence.

Hypothèse toxique

Les perturbateurs endocriniens, notamment la dioxine, les PCB, les phtalates, ont été accusés avec certains arguments[24] - [25]. Toutefois, en 2017, la HAS ne constatait aucune preuve directe de leur responsabilité dans la survenue de l’endométriose.

Hypothèse environnementale

Parmi les hypothèses envisagées figurent le rôle d'une exposition à certains produits toxiques ou polluants de l'environnement. En particulier l’alimentation et/ou une exposition (éventuellement in utero, lors de l'enfance ou lors de l'adolescence) à des perturbateurs endocriniens pourrait être en cause, mais aucune de ces hypothèses n'a à ce jour fait l'objet d'une preuve scientifique forte (notamment d'hypothèse de la pilule contraceptive un temps évoquée comme agent provocateur a été invalidée). Des études sur d'éventuels liens entre phtalates (ou leurs métabolites), fertilité, anomalies de l'appareil reproducteur féminin, puberté précoce ou endométriose laissent suspecter un lien entre taux plasmatiques ou urinaires de phtalates ou de leurs métabolites et endométrioses.

  • Une Ă©tude a fortement suggĂ©rĂ© que l'exposition aux phtalates, notamment prĂ©sents dans les tampons hygiĂ©niques, pourrait conduire Ă  l'endomĂ©triose[26].
  • En Italie, Cobellis et coll. (2003) ont comparĂ© les taux sanguins de deux phtalates (DEHP et MEHP) chez 35 femmes victimes de lĂ©sions endomĂ©triosiques et 24 femmes sans endomĂ©triose diagnostiquĂ©e ayant consultĂ© pour des kystes ovariens ou de douleurs pelviennes rĂ©gulières (mais sans difficultĂ© a priori de reproduction). Le DEHP et le MEHP Ă©taient prĂ©sent dans le sang de la majoritĂ© des femmes, avec un taux mĂ©dian de DEHP plus de 3 fois plus Ă©levĂ© chez celles victimes d’endomĂ©triose (0,57 mg/l) par rapport au groupe-tĂ©moin (0,18 mg/l). Aucune diffĂ©rence n'a Ă©tĂ© notĂ©e pour le MEHP[27] - [28].
  • En Inde, Reddy et coll. (2006) ont Ă©tudiĂ©[29] les taux sanguins de phtalates de 49 patientes infertiles victimes d’endomĂ©triose pelvienne (diagnostiquĂ©e sous cĹ“lioscopie), en les comparant Ă  de 38 femmes infertiles et de 21 femmes fertiles (ayant Ă©galement subi une cĹ“lioscopie mais pour d’autres motifs gynĂ©cologiques). Les taux moyens de DEHP, DNOP, BBP et DBP Ă©taient plus Ă©levĂ©s chez les patientes ayant une endomĂ©triose (2,44, 3,32, 0,66 et 0,44 mg/l respectivement) que dans les 2 groupes de femmes sans endomĂ©triose, avec des taux tendant Ă  ĂŞtre d'autant plus Ă©levĂ©s que l'endomĂ©triose Ă©tait sĂ©vère[28].
  • Itoh et al. ont recherchĂ© en 2009 une Ă©ventuelle corrĂ©lation entre phtalates urinaires et sĂ©vĂ©ritĂ© des endomĂ©trioses chez 137 Japonaises connaissant des problèmes d'infertilitĂ© et diagnostiquĂ©es sous cĹ“lioscopie. Les 6 mĂ©tabolites quantifiĂ©s dans les premières urines du matin (MEP, MBP, MEHP, MEHHP, MEOHP, MBzP) Ă©taient retrouvĂ©s dans presque tous les Ă©chantillons (97 % pour le MBzP). Les niveaux mĂ©dians les plus Ă©levĂ©s de ces mĂ©tabolites Ă©taient observĂ©s chez les patientes atteintes d’endomĂ©triose les plus sĂ©vères[30] mais les analyses prenant en intĂ©grant les variabilitĂ©s individuelles de dilution urinaire (avec la crĂ©atinine) ne montraient pas de relation dose-rĂ©ponse[28].

Les 3 premières études sont descriptives et n'éliminent pas certains facteurs de confusion, et elles sont en outre limitées par le fait que la demi-vie des phtalates dans le sang est courte (moins d'une heure pour le DEHP) et ne traduit donc pas l'exposition réelle du moment et encore moins l'exposition passée (l'exposition intra-utérine ou adolescente pourrait éventuellement être en cause aussi). En outre dans certains cas le matériel utilisé pour les prélèvements de sang aurait éventuellement pu contenir lui-même des phtalates contaminant l'échantillon soumis à analyse. Par contre, Itoh et al. ont utilisé un questionnaire standardisé conçu pour traiter différents facteurs de confusion. Les preuves de l’existence possible d’un lien entre phtalates et endométriose sont à ce jour très limitées[28].

Hypothèse infectieuse

Bien que jamais démontrée, l’étiologie infectieuse reste plausible. Elle serait alors plutôt liée à des phénomènes viraux ou de type prion pathogène.

Aspect

L'endométriose peut prendre des aspects très divers en fonction du type de lésions, de leur extension ou des organes atteints. Ces différences font l'objet d'une classification propre[31].

Types de lésions

  • Les lĂ©sions nodulaires superficielles sont des lĂ©sions relativement bleutĂ©es, rouges ou blanches Ă  la surface du pĂ©ritoine ou des ovaires. Elles mesurent quelques millimètres et n'envahissent pas en profondeur.
  • Les kystes ovariens ou endomĂ©triomes se constituent par l'inclusion progressive de lĂ©sions superficielles dans l'ovaire. Ces kystes se constituent car l'endomĂ©triose (comme l’endomètre) saigne au moment des règles. Ces kystes, dits parfois « chocolat »[32] pour leur couleur brune, sont remplis d'un liquide dĂ©rivĂ© de ce vieux sang. Ils peuvent mesurer de 15 mm Ă  plus de 10 cm.
  • Les nodules profonds : ce sont des lĂ©sions qui envahissent en profondeur soit un organe soit la zone sous-pĂ©ritonĂ©ale. Il existe encore de grandes incertitudes quant Ă  savoir si ces nodules profonds sont une Ă©volution des nodules superficiels ou se crĂ©ent d'emblĂ©e sous cette forme. Tout laisse nĂ©anmoins penser que les deux types de formation sont possibles. Les localisations privilĂ©giĂ©es de ces nodules profonds sont les ligaments utĂ©ro-sacrĂ©s (ligament reliant l'utĂ©rus au sacrum en arrière), la zone recto-vaginale, le vagin, le rectum, la fossette ovarienne et les ligaments larges, plus rarement la vessie ou le cĂ´lon sigmoĂŻde et encore plus rarement tout autre organe abdominal. La taille de ces nodules va de quelques millimètres Ă  5 ou 6 centimètres.
  • Les adhĂ©rences entre organes : l'endomĂ©triose tend Ă  « coller » les organes entre eux par des phĂ©nomènes inflammatoires. Ă€ l'inverse des adhĂ©rences post-infectieuses, il s'agit d'adhĂ©rences très serrĂ©es et très vascularisĂ©es. Les localisations les plus frĂ©quentes sont sous les ovaires en arrière de l'utĂ©rus et entre utĂ©rus et ovaire, mais toutes les localisations sont possibles.

Organes atteints

La particularité de l'endométriose est son polymorphisme. L'endométriose peut se limiter à quelques nodules superficiels millimétriques sur les ligaments utéro-sacrés mais peut aller jusqu'à des kystes bilatéraux associés à des nodules profonds et à des adhérences englobant tout le pelvis et réalisant ce que l'on appelle un pelvis gelé. Tous les intermédiaires sont possibles, y compris des atteintes unilatérales isolées.

Extension des lésions et classifications

L'extension des lésions tant en profondeur qu'en nombre d'organes concernés a conduit logiquement à proposer des classifications. La première fut proposée par Kistner vers 1960, une deuxième par Da Costa en 1973. Elles ont disparu au profit de la classification de l'AFS (American Fertility Society) publiée en 1978 et révisée en 1995[33].

Cette classification (r-AFS) permet d'attribuer des points selon la localisation des lésions sur le péritoine, les trompes, les ovaires, le cul-de-sac de Douglas en fonction de leur extension en taille et en profondeur. Elle prend en compte de la même manière les adhérences en fonction de leur extension, de leur type et de l'extension pour chaque organe. Ces points sont additionnés pour donner un score global. En fonction de ce score, l'endométriose est classée en quatre stades :

  • stade 1 ou minime pour les scores de 1 Ă  5 ;
  • stade 2 ou lĂ©ger pour les scores de 6 Ă  15 ;
  • stade 3 ou modĂ©rĂ© pour les scores de 16 Ă  42 ;
  • stade 4 ou sĂ©vère pour les scores supĂ©rieurs Ă  42.

Il a été proposé un temps de créer un stade 5 ou extensif pour les scores au-delà de 70.

Un score et un stade peuvent correspondre à des lésions très différentes, ce qui rend ce score d'un intérêt assez limité. De plus, ce score n'a qu'une valeur descriptive relative, et non une valeur pronostique. Le lien entre l'intensité des signes douloureux et le score est limité. En matière d'infertilité, sa valeur prédictive est encore plus faible, hormis le stade extensif. Malgré cette valeur relative, toutes les publications se réfèrent à ce score.

Signes cliniques

L’endométriose peut n’entraîner aucun symptôme[34]. Sinon les deux signes cliniques sont les douleurs et l’infertilité. Ils peuvent être associés. Les complications graves de l’endométriose sont rares.

Les douleurs

Les douleurs les plus caractéristiques sont les dysménorrhées (règles douloureuses). L’intensité est très variable mais elle peut aller jusqu’à la nécessité de prendre des antalgiques puissants, voire dans les cas les plus sévères à l’impossibilité de travailler. Elles apparaissent avec les règles et durent de 12 à 72 heures selon les cas. Ce sont des crampes ou des douleurs sourdes du pelvis qui peuvent irradier vers le dos, les cuisses, l’anus. La plupart des personnes décrivent des douleurs qui ont commencé vers l’âge de 16 ans, puis qui ont disparu ou, au moins, fortement diminué avec la prise de la pilule. À l’arrêt de celle-ci, les douleurs sont réapparues après quelques mois. Ces douleurs peuvent aller de pair avec des signes digestifs (constipation) ou urinaires (envie fréquente d’uriner) laissant craindre une atteinte du rectum ou de la vessie. Elles peuvent aller d’une simple gêne à un véritable handicap social pour les personnes interrompant toutes activités professionnelles et sociales au moment de leurs règles.

Le deuxième type de douleur est la dyspareunie (douleurs pendant et après les rapports sexuels). Elle peut être constante ou simplement à certains moments du cycle. Elle est plus fréquente lors de certaines positions. Son intensité est également très variable allant d’une gêne modérée à une quasi-incapacité d’avoir des rapports, ce qui retentit fortement sur le plan psychologique.

L'infertilité

30 à 50 % des femmes atteintes d'endométriose ont des problèmes de fertilité[35]. Les mécanismes n'en sont pas clairs et sont parfois multiples.

Les complications

Les complications sont rares et de gravité variable. Les ruptures de kystes endométriosiques se traduisent par une douleur brutale et intenable qui oblige à une intervention en urgence. Les atteintes vésicales peuvent entraîner des hématuries (sang dans les urines).

Les atteintes urétérales peuvent entraîner une symptomatologie du type colique néphrétique a minima, mais peuvent évoluer vers un blocage complet avec hydronéphrose. Les atteintes rectales ou intestinales peuvent occasionner la présence de sang dans les selles, des constipations rebelles, exceptionnellement des occlusions.

En janvier 2020, Endofrance a réalisé une enquête aux côtés du laboratoire Gedeon Richter et de l'institut Ipsos. L'enquête révèle que 65% des femmes atteintes d'endométriose estiment que leur maladie affecte leur bien-être au travail[36].

Diagnostic

Le diagnostic peut être posé avec une quasi-certitude :

  • si l’examen clinique (toucher vaginal) retrouve un nodule recto-vaginal ;
  • si l’échographie vaginale met en Ă©vidence un kyste endomĂ©triosique (endomĂ©triome) dans un ovaire.

Dans tous les autres cas, on parle de suspicion d’endométriose et des examens complémentaires sont nécessaires.

Les arguments en faveur d’une endométriose sont d’abord cliniques : dysménorrhée, dyspareunie, spotting prémenstruel (petites pertes de sang précédant les règles), constipation ou diarrhée au moment des règles, douleurs déclenchées au toucher vaginal en arrière de l’utérus, relative fixité de l'utérus… L'examen peut être cependant strictement normal et reste moins sensible et spécifique que l'échographie trans-vaginale ou l'imagerie par résonance magnétique (IRM)[37].

Les examens paracliniques sont d’un apport assez limité pour établir le diagnostic[38] :

  • l’échographie par voie trans vaginale ne permet de bien visualiser que les endomĂ©triomes ou l’adĂ©nomyose[39], permettant leur caractĂ©risation[40]. Elle permet aussi de visualiser les localisations rectales ou sigmoĂŻdiennes de l'endomĂ©triose[41]. Elle ne dĂ©tecte pas les lĂ©sions superficielles et mal les nodules plus importants ;
  • l’IRM est très performante;
  • de nombreux marqueurs biologiques dans le sang ont Ă©tĂ© proposĂ©s. Le taux de CA 125 peut ĂŞtre Ă©levĂ© mais sa spĂ©cificitĂ© et sa sensibilitĂ© sont mĂ©diocres[42].

À la fin, la question se pose toujours de réaliser une cœlioscopie pour traiter chirurgicalement. La décision de la cœlioscopie dépend de l’importance de la suspicion mais également des contextes de douleurs et d’infertilité, de l’âge… Cette opération chirurgicale permet de visualiser les lésions d'endométriose sous forme de taches brunâtres ou de petites vésicules.

Un test diagnostique salivaire appelĂ© Endotest a Ă©tĂ© mis au point par la sociĂ©tĂ© française Ziwig[43] - [44]. Le test s'appuie sur l'analyse par un logiciel d'apprentissage automatique de 109 biomarqueurs (fragments d'ARN). Le prĂ©lèvement salivaire est pratiquĂ© par la patiente ; l'analyse s’effectue en laboratoire[45]. Cependant il faut rester prudent, car ce test s'appuie sur peu d'Ă©tudes, mĂŞme si elles sont encourageantes et pertinentes. Il manque une validation des biomarqueurs par un laboratoire indĂ©pendant, et il n'est pas prouvĂ© que ces biomarqueurs sont spĂ©cifiques Ă  l'endomĂ©triose. La dĂ©couverte de tels biomarqueurs reste hypothĂ©tique, tant que la dĂ©rĂ©gulation biologique qui provoque la maladie n'est pas identifiĂ©e. -[18].

Évolution

L'endométriose est une maladie avec une évolution spontanée relativement imprévisible, avec parfois des régressions spontanées[46].

L'âge d'apparition de l'endométriose se situe entre la puberté et 35 ans, mais le délai entre le début de la maladie et son diagnostic est en moyenne de 7 ans.

Après traitement chirurgical conservateur, la récidive est assez fréquente après un délai qui peut aller de quelques mois à quelques années.

Lors de la grossesse, il y a régression de l'endométriose et les femmes ayant été enceintes ont deux fois moins de risque de récidiver que celles qui ne l'ont pas été.

L'endométriose tend à régresser naturellement vers l'âge de 40 à 45 ans et disparaît de façon presque certaine à la ménopause ou en cas d'hystérectomie avec ovariectomie (ablation de l'utérus et des ovaires).

Il y a peu de relations entre l'évolution de l'endométriose et le stade de découverte.

Le risque de survenue d'un cancer de l'ovaire est légèrement augmenté[47].

Traitement

La prise en charge de l'endométriose a fait l'objet de publications de recommandations de l'« European Society of Human Reproduction and Embryology » datant de 2005[48] et mis à jour en 2014[49]. La qualité des 17 études ayant fait l'objet d'une revue en 2014 par Cochrane est qualifiée de très basse à modérée[50].

Il n’existe pas à proprement parler de traitement de l’endométriose si on entend par traitement une méthode thérapeutique ne laissant pas de séquelles et offrant une probabilité de guérison de plus de 90 %.

Il est donc plus rationnel de parler de moyens thérapeutiques et de stratégie thérapeutique. Cette stratégie thérapeutique dépend du contexte et en particulier de la doléance principale qui peut être la douleur ou l’infertilité (ou plus exceptionnellement d’une complication).

MĂ©dicaments

Le principe des traitements médicaux relève de quatre principes :

  1. les lésions de l’endométriose arrêtent d'évoluer après la ménopause, d’où l’usage des analogues de la GnRH qui bloquent l’hypophyse et créent une ménopause artificielle ;
  2. l’endométriose régresse fortement pendant la grossesse sous l’effet de la progestérone d’où l’idée de donner des progestatifs en continu et à dose élevée ;
  3. les douleurs de l’endométriose sont principalement présentes pendant les règles d’où le concept de bloquer les règles par des analogues de la GnRH, des progestatifs en continu mais aussi simplement par la classique pilule prise sans interruption ;
  4. les douleurs dues à l’endométriose sont dues à une libération excessive de prostaglandines d’où la prescription d’anti-inflammatoires non stéroïdiens qui bloquent leur libération.
Analogues de la GnRH

Les analogues de la GnRH bloquent la sĂ©crĂ©tion d’œstrogènes par les ovaires. La croissance de l’endomètre et de l’endomĂ©triose est bloquĂ©e. Mais Ă  l’arrĂŞt des traitements, le processus d’endomĂ©triose reprend le plus souvent. Il s’agit de prescription longue le plus souvent pour 3 Ă  6 mois sous forme injectable retard : 1 injection par mois ou par trois mois. Les effets secondaires de ces produits sont importants : bouffĂ©e de chaleur, tendance dĂ©pressive, petites pertes de sang et risque d’ostĂ©oporose en cas de prescription au-delĂ  de douze mois. Durant leur utilisation, le blocage de l’hypophyse et de l’ovulation rend une grossesse peu probable. Les produits les plus couramment utilisĂ©s en France sont le DĂ©capeptyl mg ou 11 mg et l’Enantone (liste non exhaustive).

Les bénéfices attendus par rapport à un placebo ou à l'absence de traitement sont d'un niveau de preuve faible[50].

Progestatifs

Leur utilisation est ancienne. Initialement, on utilisait surtout les progestatifs du type norstéroïdes (Norluten, Lutometrodiol) pour des périodes de trois à six mois. Mais leur effet androgénique et anabolisant fait qu’ils ne sont plus guère utilisés car ils occasionnaient parfois des prises de poids et un hirsutisme. Le Danazol est un produit assez similaire, mais il n’est plus guère utilisé pour les mêmes raisons. La progestérone naturelle (Utrogestan et autre) est relativement peu efficace. Aussi on lui préfère les progestatifs de type pregnane comme le Lutényl, la Surgestone ou le Lutéran. Ils ont moins d’effets secondaires de type anabolisant (prise de poids). Durant leur prise en continu, il n’y a pas de possibilité de grossesse car ils bloquent l’ovulation. En revanche, une alerte est lancée concernant un risque accru de méningiome associé à l’utilisation d’acétate de nomégestrol (Lutényl ou génériques) ou d’acétate de chlormadinone (Lutéran ou génériques)[51]. Les progestatifs peuvent également être utilisés sous la forme de stérilet à la progestérone (Mirena) qui libère en continu au niveau pelvien une dose infime de progestérone.

Pilule Ĺ“stroprogestative

La pilule œstroprogestative peut être prise en continu, c’est-à-dire en ne respectant pas l’arrêt classique de 7 jours entre deux plaquettes. L’effet est double. Cette prescription entraîne une atrophie de l’endomètre (et donc de l’endométriose) et empêche la survenue de règles douloureuses. Ceci n’a aucune conséquence délétère supplémentaire par rapport à la prise classique de la pilule. Sous ce type de traitement, la survenue de petites pertes de sang peut se produire qui ne doit pas entraîner l’arrêt. On préfère dans cette indication les pilules dites de première ou de deuxième génération comme le Minidril ou l’Adepal. Bien sûr il n’y a pas de possibilités de grossesse avec ce traitement. La maladie peut cependant continuer à progresser sous pilule en continu et des contrôles réguliers sont conseillés.

Anti-inflammatoires non stéroïdiens

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) inhibent la sécrétion de prostaglandines ce qui réduit la douleur. Ils sont d’autant plus efficaces qu’ils sont pris tôt dès les premiers symptômes. Les principaux AINS prescrits sont le Ponstyl, l’Antadys, le Biprofenid (liste non exhaustive). Les principaux effets secondaires des AINS sont les brûlures digestives et les problèmes rénaux ; il est recommandé d'éviter ce traitement au long cours[52].

La supériorité d'un traitement AINS par rapport aux placebos est indéterminée selon une méta-revue de Cochrane[50].

Autres médicaments en cours de test

La mélatonine réduit les scores de douleur quotidiens avec une amélioration de la qualité du sommeil[53].

Traitements non médicamenteux

  • Ultra-sons : En 2017, un essai clinique, conduit Ă  l'HĂ´pital de la Croix Rousse ( Lyon) vise Ă  tester l'efficacitĂ© des ultrasons dans le traitement de l'endomĂ©triose. Les mĂ©decins ont expĂ©rimentĂ© avec succès le traitement par ondes HIFU (Ultrasons FocalisĂ©s de Haute IntensitĂ©) sur 4 patientes, en utilisant un outil initialement conçu pour traiter par voie endorectale le cancer de la prostate. C'est une 1ère mondiale et l’essai clinique se poursuit actuellement[54] ; Le procĂ©dĂ© dĂ©veloppĂ© avec l'INSERM (laboratoire pour les Ultra-sons ThĂ©rapeutiques, LabTau de l'UniversitĂ© Claude Bernard Lyon 1) pourrait bientĂ´t bĂ©nĂ©ficier d'une sonde amĂ©liorĂ©e, plus adaptĂ©e Ă  la morphologie fĂ©minine[55].

Chirurgie

Il existe deux modalités du traitement chirurgical : le traitement radical et le traitement conservateur.

Traitement radical

En enlevant l’utérus et les ovaires on crée une ménopause. L’intervention se pratique soit par cœlioscopie soit par laparotomie (ouverture de l’abdomen). Ce traitement radical rend impossible toute grossesse ultérieure. Malheureusement il ne garantit pas la disparition des symptômes.

L’ablation de l’utérus (hystérectomie), en conservant les ovaires, entraîne une disparition des douleurs dans 70 % des cas mais n’induit pas une ménopause, et l'endométriose peut cependant continuer à progresser.

Traitement conservateur

Il vise à supprimer les lésions d’endométriose et à lever les adhérences, tout en conservant l’utérus et les ovaires. Les types d’intervention varient en fonction du type de lésions. Ces interventions se font par cœlioscopie dans presque tous les cas.

Lésions superficielles de l’ovaire et du péritoine

Elles peuvent être enlevées au ciseau, coagulées à l’électricité ou vaporisées au laser. Depuis plusieurs années, la technologie Plasma donne des résultats très satisfaisants tout en préservant la fertilité des patientes.

Kystes ovariens d’endométriose ou endométriomes

Il existe deux principes : soit l’ablation du kyste (kystectomie) soit la destruction de la paroi interne du kyste par électrocoagulation, par Laser ou par Plasma-jet. La durée opératoire est sensiblement la même. Les études comparant la destruction (laser ou électricité) à la kystectomie plaident plutôt en faveur de la kystectomie car il y a moins de récidives, plus de grossesse par contre un risque plus élevé d’endommager la réserve ovarienne d’ovocytes. Le Plasma-jet (jet d’argon ionisé) est trop récent pour avoir fait l’objet d’études suffisantes.

Lésions d’endométrioses profondes

Leur simple destruction par laser ou électrocoagulation est impossible ou insuffisante. Il est donc nécessaire d’en faire l’exérèse. La chirurgie des lésions profondes est difficile à résumer en quelques lignes tant elle peut prendre des aspects divers du fait des organes impliqués et de la sévérité de l’atteinte. Nous ne ferons que citer les gestes possibles et insister sur des points importants.

Les lésions au niveau des ligaments utérosacrés sont réséquées avec souvent la nécessité de disséquer les uretères. Il en est de même pour les lésions sous ovariennes.

Les nodules recto-vaginaux sont réséqués avec ablation éventuelle du fond vaginal. Lorsque le rectum est impliqué il est quelquefois nécessaire de faire une résection rectale en « pastille » voire de faire une résection segmentaire qui consiste à enlever une dizaine de cm de cet organe.

En cas de lésions du sigmoïde ou d’une autre partie de l’intestin une résection segmentaire digestive est nécessaire. Tous ces gestes digestifs obligent quelquefois à faire un anus artificiel temporaire (2 à 3 mois).

En cas d’atteinte vésicale, il peut être nécessaire d’enlever une partie de la vessie si la lésion d’endométriose atteinte le muscle vésical.

En cas d’atteinte d’un uretère, il peut être possible de simplement le libérer mais si l’atteinte est plus sévère, une résection de quelques centimètres peut s’avérer indispensable voire une réimplantation de l’uretère dans la vessie.

Adhérences

La levée des adhérences en cas d’endométriose fait partie du traitement. Elle est souvent difficile car il s’agit d’adhérences très serrées et vascularisées. En cas d’adhérences concernant en particulier le tube digestif, le risque de complications est non négligeable.

Ces interventions peuvent être très simples et ne durer que quelques minutes. Elles peuvent être complexes, durer plusieurs heures et nécessiter en plus du gynécologue l’intervention d’un urologue ou d’un chirurgien digestif. Cette chirurgie expose à des complications graves dans 1 à 2 % des cas : fistules urinaires ou digestives principalement. La plupart des gestes sont faits par cœlioscopie mais une laparotomie peut s’avérer utile surtout en cas de lésions digestives. L’intérêt de faire des exérèses complètes, avec en particulier des résections digestives, fait encore l’objet de controverse. Globalement on admet un risque de récidives des lésions de l’ordre de 10 à 20 % même après une chirurgie conservatrice complète. Cette chirurgie est particulièrement indiquée chez les patientes stériles et celles jeunes sans enfant présentant des douleurs invalidantes.

Après chirurgie conservatrice 80 % des patientes sont soulagées de leurs douleurs de façon complète ou partielle. Les résultats sont moins convaincants sur la stérilité avec des taux d’accouchements de 30 à 35 %.

Stimulations de l’ovulation

La stimulation de l’ovulation par FSH ou HMG a prouvé son efficacité dans la stérilité par endométriose après la chirurgie conservatrice.

Assistance médicale à la procréation

L’endométriose représente une indication majeure de l’assistance médicale à la procréation (AMP) que ce soit la fécondation in vitro (FIV) ou l’insémination intra-utérine (IIU).

La FIV donne des résultats satisfaisants dans cette indication et n’expose pas à un risque particulier de faire redémarrer l’endométriose ou de faire flamber une endométriose existante. Les IIU ne se conçoivent que dans des cas particuliers que nous verrons plus loin. La FIV simple ou avec micro-injection est possible dans tous les cas de stérilité.

Les résultats de la FIV en cas d’endométriose sont similaires à ceux obtenus pour les autres indications soit de 20 à 25 % d’accouchement par tentative. Il s’agit d’un chiffre moyen qui peut varier avec l’âge de la patiente, le nombre d’embryons transférés, la prise en compte des embryons congelés et la réserve ovarienne. Le résultat est indépendant du stade de l’endométriose. Les résultats cumulatifs après 4 tentatives de FIV sont compris entre 45 et 60 % d’accouchement.

Psychothérapie

L’endométriose n’est pas considérée comme une maladie psychosomatique dans l'état actuel des connaissances, mais les douleurs intenses et répétitives, les troubles de la sexualité dus aux dyspareunies peuvent avoir un retentissement psychologique important, qui justifie plus une aide psychologique que des drogues psychotropes. Des associations de patientes souffrant d’endométriose et prêtes à aider d’autres femmes existent.

Prise en charge thérapeutique

Elle varie selon la principale plainte (douleurs ou infertilité), l’âge et le désir ultérieur de grossesse. Les paragraphes suivants font un point sur les stratégies de prise en charge recommandées par les sociétés scientifiques.

Depuis le 13 janvier 2022, en France, l'endométriose est reconnue comme une « affection de longue durée »[56].

Prise en charge de la douleur

Souvent l’endométriose est suspectée et une cœlioscopie est pratiquée qui permettra le diagnostic et un traitement chirurgical. La question se pose alors d’un traitement complémentaire si la femme ne désire pas d’enfant immédiatement.

En cas de traitement complet l’option la plus souvent retenue est la pilule en continu, mais il n’a jamais été clairement prouvé qu’elle empêche les récidives. En tout cas elle prévient la récidive des douleurs.

En cas de traitement incomplet, deux options sont possibles : soit la mise sous progestatifs au long cours, soit la mise sous analogues de la GnRH pour une période de 3 à 6 mois (relayée soit par la pilule, soit par les progestatifs).

Dans ces cas, les chirurgies itératives sont à éviter pour ne pas compromettre les potentialités de reproduction ultérieure. Néanmoins, cette éventualité peut s’avérer indispensable dans quelques cas, surtout en cas de récidives d’endométriose recto-vaginale. Mais elle doit être prudente, en particulier pour le traitement des atteintes ovariennes (endométriomes) afin de ne pas trop affecter le stock ovocytaire.

Chez la jeune adulte voire l’adolescente présentant en particulier des dysménorrhées sévères, la question de la cœlioscopie d'emblée est discutée au profit d’un traitement d’essai avec pilule en continu.

Chez la patiente plus âgée ayant des enfants et n’en désirant plus, la mise sous progestatif ou la pose d’un stérilet à la progestérone peut être efficace. En cas d’échec, le recours à l’hystérectomie (avec ovariectomie) est la meilleure solution médicale, mais son caractère nettement invasif fait qu'elle n'est pas toujours facilement acceptée sur le plan psychologique.

Prise en charge de l’infertilité

Recommandations du CNGOF (collège national des gynécologues et obstétriciens français)[57] :

  • en cas de suspicion d’endomĂ©triose ou d’endomĂ©triose avĂ©rĂ©e le recours Ă  une cĹ“lioscopie est prĂ©fĂ©rable sauf s’il existe une autre indication formelle Ă  pratiquer une fĂ©condation in vitro (sperme très altĂ©rĂ©, trompes absentes ou endommagĂ©es) ;
  • lors de cette cĹ“lioscopie, un traitement chirurgical conservateur est pratiquĂ© autant qu’il ne prĂ©sente pas de risque majeur de complication ;
  • après la cĹ“lioscopie trois cas de figure se prĂ©sentent :
    • en cas de traitement chirurgical notoirement incomplet, l’orientation directe vers la FIV est prĂ©fĂ©rable,
    • en cas de traitement complet mais s’il existe des facteurs pĂ©joratifs (âge supĂ©rieur Ă  38 ans, stĂ©rilitĂ© de plus de 8 ans, atteinte tubaire, adhĂ©rences sĂ©vères, sperme notoirement altĂ©rĂ©), l’orientation directe vers la FIV est prĂ©fĂ©rable,
    • en cas de traitement complet et en l’absence de facteurs pĂ©joratifs, il est recommandĂ© de ne pas donner de traitement post-opĂ©ratoire du type analogues de la GnRH ou progestatif et d’essayer d’obtenir une grossesse immĂ©diatement. L’ajout de clomifène (Clomid) n’a pas d’intĂ©rĂŞt. Un dĂ©lai de 6 Ă  12 mois en fonction de l’âge sera respectĂ© avant d’envisager un traitement de deuxième ligne. La probabilitĂ© de grossesse durant ce temps va de 30 Ă  50 % selon l’âge.
  • Si Ă  la fin de ce dĂ©lai il n’y a pas de grossesse, deux hypothèses existent :
    • s'il y a probable rĂ©cidive de l’endomĂ©triose dĂ©pistĂ©e sur la rĂ©cidive des douleurs ou sur l’échographie ou sur l’examen clinique, l’orientation vers la FIV est prĂ©fĂ©rable,
    • s'il n’y a aucun signe en faveur d’une rĂ©cidive, le recours Ă  des stimulations de l’ovulation associĂ©es Ă  des IIU est recommandĂ© pour une sĂ©rie maximum de 3 Ă  4. Cette attitude n’est pas admise par tous.
  • S’il n’y a pas grossesse après les IIU, l’orientation vers la FIV est nĂ©cessaire ;
  • avant prise en charge en FIV et dans tous les cas oĂą persiste de l’endomĂ©triose (absence de traitement chirurgical, traitement incomplet ou rĂ©cidive) il est prĂ©fĂ©rable de traiter mĂ©dicalement l’endomĂ©triose avec des analogues de la GnRH pendant trois mois avec rĂ©alisation de la tentative de FIV lors du troisième mois (protocole ultra-long) ;
  • une rĂ©cidive d’endomĂ©triose avant ou pendant une tentative FIV n’impose ni l’arrĂŞt du protocole, ni une nouvelle chirurgie. En cas d’endomĂ©triome, l’alcoolisation peut ĂŞtre proposĂ©e mais son Ă©valuation reste aujourd’hui partielle ;
  • une rĂ©-intervention chirurgicale entre des cycles d’AMP doit ĂŞtre Ă©vitĂ©e sauf complication de l’endomĂ©triose ou douleurs invalidantes rĂ©sistant aux traitements mĂ©dicaux. En effet, il est tout Ă  fait possible entre deux FIV de traiter mĂ©dicalement la douleur en particulier par la prise de pilule en continu ;
  • une rĂ©-intervention n’est proposĂ©e qu’après deux ou trois Ă©checs de FIV en particulier avec mauvaise rĂ©ponse ovarienne en FIV (peu d’ovocytes ou ovocytes de mauvaise qualitĂ©). L’intĂ©rĂŞt n’a jamais Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© ;
  • en cas de mauvaise rĂ©ponse au traitement de stimulation et/ou de mauvais taux de fĂ©condation y compris en ICSI, le recours au don d’ovocytes peut ĂŞtre proposĂ©.

Finalement entre la chirurgie, les IIU et les FIV, deux femmes sur trois seront enceintes. Ce chiffre est à moduler vers le haut ou le bas en fonction de l’âge, de la réserve ovarienne et de la résistance psychologique à des traitements répétitifs pénibles et stressants.

Prise en charge de certaines complications

La survenue de complications graves est rare. Elle peut nécessiter des gestes en urgence ou semi-urgence :

  • la stĂ©nose d’un uretère nĂ©cessite la pose d’une sonde urĂ©tĂ©rale en urgence puis une rĂ©section ou une rĂ©implantation urĂ©tĂ©rale ;
  • l’apparition d’une stĂ©nose digestive avec des signes de sub-occlusion peut obliger Ă  la mise en place d’un anus abdominal de dĂ©rivation (ilĂ©ostomie ou colostomie) en mĂŞme temps que la rĂ©section de la zone intestinale atteinte, suivi dans un deuxième temps d’un rĂ©tablissement de la continuitĂ© digestive avec suppression de l’anus de dĂ©rivation ;
  • la rupture d’un kyste endomĂ©triosique impose une intervention rapide pour laver la cavitĂ© pĂ©ritonĂ©ale et faire l’exĂ©rèse du kyste ;
  • la surinfection d’un endomĂ©triome après ponction de FIV crĂ©e un abcès de l’ovaire qui doit ĂŞtre drainĂ© mais oblige parfois en l’ablation de l’ovaire.

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Bibliographie

  • Delphine Lhuillery, Érick Petit et Éric Sauvanet (prĂ©f. Amandine BĂ©got), Tout sur l'endomĂ©triose : Soulager la douleur, soigner la maladie, Ă©ditions Odile Jacob, coll. « O.J. MĂ©decine », , 288 p. (ISBN 978-2738146007).

Articles connexes

Voir aussi

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