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Alain Le Ray

Alain Le Ray, nĂ© le Ă  Paris et mort le dans cette mĂȘme ville[1] , est un officier français. Premier Ă©vadĂ© de Colditz, grand rĂ©sistant, il sera le premier chef militaire du maquis du Vercors (1943) et le chef des FFI de l'IsĂšre (1944-1945). Il commandera par la suite la division alpine en AlgĂ©rie (1962) avant d'ĂȘtre nommĂ© gĂ©nĂ©ral de corps d'armĂ©e (1968).

Alain Le Ray
Alain Le Ray
Le Ray, prisonnier de guerre en Allemagne en 1941

Nom de naissance Alain AndrĂ© Étienne Henri Le Ray
Naissance
Paris 16e
DĂ©cĂšs
Paris 16e
Origine Drapeau de la France France
Arme Troupes de montagne (France)
Grade Général de corps d'armée
AnnĂ©es de service 1931 – 1970
Commandement 7e demi-brigade de chasseurs alpins
27e division alpine
7e division mécanisée
Conflits Seconde Guerre mondiale
Guerre d’Indochine
Guerre d’AlgĂ©rie
Faits d'armes Maquis du Vercors
Distinctions Grand-croix de la LĂ©gion d'honneur
Grand-croix de l'ordre national du MĂ©rite
Croix de guerre 1939-1945
Croix de guerre des Théùtres d'opérations extérieures
Croix de la valeur militaire
MĂ©daille de la RĂ©sistance avec rosette
Médaille des évadés
Grand-croix de l'ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne
MĂ©daille de la jeunesse, des sports et de l'engagement associatif grade argent (anciennement MĂ©daille d'argent de l’éducation physique et des sports)
Hommages 47e promotion de l’École militaire interarmes (2007-2009)
Esplanade Alain Le Ray Ă  Grenoble
Autres fonctions Préfet
Diplomate
Alpiniste
Famille Luce Mauriac (Ă©pouse)
François Mauriac (beau-pÚre)
Claude Mauriac (beau-frĂšre)
Jean Mauriac (beau-frĂšre)
Anne Wiazemsky (niĂšce)
Wiaz (neveu)

Biographie

Famille

Alain Le Ray est le fils de Vincent Le Ray, directeur des HÎpitaux de Paris, et de Valentine Beaunier. Il se marie le à Luce Mauriac, fille de l'écrivain François Mauriac. Cinq filles naissent de cette union : Christiane, Françoise, Marie-Anne, Emmanuelle et Sophie[2].

Études

Il est Ă©lĂšve Ă  l’école Saint-Jean Ă  Fribourg, au lycĂ©e de Montpellier, Ă  la facultĂ© des lettres de Paris et en sciences politiques[3]. Il est licenciĂ© Ăšs-lettres. Il est diplĂŽmĂ© de l'École militaire de l'infanterie et des chars de combat, de l’École militaire de haute montagne, de l’École supĂ©rieure de guerre, du Centre des hautes Ă©tudes militaires et de l’Institut des hautes Ă©tudes de DĂ©fense nationale[2].

Sa bonne pratique de l'allemand le conduit Ă  sĂ©journer outre-Rhin oĂč il peut observer l'ascension du nazisme[3].

Jeunesse

Alain Le Ray est nĂ© le 3 octobre 1910 Ă  Paris d’une famille bretonne, son pĂšre est alors intendant des hĂŽpitaux parisiens. C’est une famille traditionnelle de l’époque, catholique et fermement patriotique. La jeunesse d’Alain le Ray est marquĂ©e par la premiĂšre guerre mondiale. Il se souvient des « Taxis de la Marne » qui passĂšrent sous ses fenĂȘtres pour rĂ©aliser ce que l’on nommera le miracle de la Marne. Mais il nourrit surtout une admiration sans limite envers son cousin, Henri Bertho, Saint-Cyrien qui traversera les quatre annĂ©es de la Grande Guerre sur tous les champs de bataille de France. Il sera blessĂ© six fois, chevalier de la LĂ©gion d’honneur Ă  22 ans et capitaine Ă  23. Pour le jeune Alain c’est le symbole du hĂ©ros. Il obtient le baccalaurĂ©at Ă  dix-sept ans et obtient une licence d'allemand Ă  vingt ans[4].

Alpinisme

À dix-sept ans il est dĂ©jĂ  entrĂ© dans la religion montagnarde. Ses sĂ©jours Ă  Chamonix et en Suisse pour soigner sa pneumonie, vont lui permettre de se dĂ©couvrir une passion pour l’aventure et en particulier la montagne. Tout en poursuivant une licence en allemand, Alain Le Ray s’aguerrit de plus en plus Ă  la pratique sportive de la montagne, ses sĂ©jours en Allemagne dans le cadre de ses Ă©tudes lui permettent de rencontrer diffĂ©rents alpinistes allemands de renom et de s’exercer sur les massifs d'Europe[4]. En 1930 tout jeune membre du Groupe de haute montagne, avec ces amis Jacques de LĂ©piney, Lucien Devies, Jean Franco , Maurice Hertzog, Henry de SĂ©gogne, Robert TĂ©zenas du Montcel et Guido Magnone et Louis Lachenal. Il a mĂȘme grimpĂ© avec Roger Frison-Roche. Ces exploits en montagne, qui ont failli lui coutĂ© la vie plusieurs fois, sont la Meije en 1928 ou encore la face nord du pic Coolidge qui font de lui un des membres de l’élite montagnarde française de l’époque. Lors de ses sĂ©jours en Allemagne il prend conscience du pĂ©ril qui menace la France outre-Rhin et en 1931 lui qui hĂ©site encore entre l’armĂ©e et la diplomatie devient officier de rĂ©serve.

À partir de 1927, Alain Le Ray est membre du Groupe de Bleau, qui regroupe les alpinistes parisiens, dont ses amis Bobi Arsandaux, Pierre Chevalier, Jean Deudon, Raymond GachĂ©, Jean Carle, Pierre Allain, Raymond Leininger, les frĂšres Jacques Boell (alpiniste et Ă©crivain de montagne) et AndrĂ© Boell, Marcel Ichac, les sƓurs Élisabeth et Raymonde Lartigue, etc. Ce groupe est ainsi nommĂ© car ses membres se retrouvent sur les blocs de la forĂȘt de Fontainebleau pour s'entraĂźner Ă  la varappe et rĂ©alisent de nombreuses premiĂšres, notamment en Oisans[3]. Avec ses amis que ce soit du Groupe de Bleau , du Cuvier Academic Club ou celui de Haute Montagne, il participe Ă  de trĂšs nombreuses expĂ©ditions en France ou Ă  l'Ă©tranger notamment l'expĂ©dition dans le Caucase (1934), Ă  la tentative aux Hidden Peak, au Karakoram (1936), Annapurna (premier « 8 000 » vaincu par Louis Lachenal et Maurice Herzog, 1950), Fitz Roy (1952), Makalu (1955), Tour de Mustagh (1956), Chacraraju (1956), Jannu (1962), mont Huntington (1964), face nord du Huascaran (1966), pilier ouest du Makalu (1971), etc.Il fait partie de ces expĂ©ditions entre 1927 et 1979.Il continue Ă  faire des expĂ©ditions avec d'autres participants jusqu'Ă  ses 80 ans. Il commence la spĂ©lĂ©ologie en compagnie de Pierre Chevalier Ă  partir de 1934. Il utilise pour la premiĂšre fois toutes les inventions de Pierre Allain et de ses autres amis car son avis est dĂ©terminant pour connaĂźtre leurs performances afin de pouvoir les commercialiser[5].DĂšs 1934, alors qu'il a 24 ans, il entre au comitĂ© français Ă  l'Himalaya chargĂ© d'organiser l'expĂ©dition française de 1936 au Hidden Peak. En tant que membre bĂ©nĂ©vole de la direction de nombreuses associations, il participe Ă  l'organisation de nombreuses expĂ©ditions jusqu'en 1990 (Groupe de Haute Montagne (1930-1988, prĂ©sident 1945-1951), Club alpin français (1930-1986, prĂ©sident 1948-1951,1957-1963,1966-1970), FĂ©dĂ©ration française de la montagne (1942-1986, prĂ©sident 1948-1973), Union internationale des associations d'alpiniste (1948-1988, prĂ©sident 1968-1976), du SpĂ©lĂ©o-club de Paris (1936-1986), de la SociĂ©tĂ© spĂ©lĂ©ogique de France (1937-1987), FĂ©dĂ©ration française de SpĂ©lĂ©ologie (1963-1987), Ski-club alpin parisien (1935-1985) Jeunesse et montagne (1948-1988), FĂ©dĂ©ration française de ski (1945-1985), ComitĂ© olympique français (1946-1972), ComitĂ© national des sports (1946-1972), ComitĂ© national olympique et sportif français (1972-1986))[5].il tient la chronique alpine dans la revue Alpinisme publiĂ© par le Groupe de Haute Montagne (1930-1955) tout en Ă©tant son rĂ©dacteur en chef (1935-1955). ParallĂšlement il Ă©crit une chronique dans la revue La Montagne publiĂ©e par le Club alpin français de 1933 Ă  1955. Par la suite, il Ă©crit la chronique alpine dans la revue La Montagne et Alpinisme qui lui succĂšde (1955-1990) tout en Ă©tant son rĂ©dacteur en chef (1955-1974)[5].il dirige le bulletin du Groupe de Haute Montagne , Les Annales, vĂ©ritable encyclopĂ©die de l'histoire de l'Alpinisme en France et dans le monde (1955-2002)[5].Il s'implique dans la rĂ©daction de nombreux guides dont la premiĂšre Ă©dition du Guide Vallot (1933-1939), puis il rĂ©dige la deuxiĂšme Ă©dition de ce guide (1946-1979) .Il dirige la Collection Sempervivum (1949-1979) chez Arthaud[5].

Il est membre de l'Ă©quipe française de ski (1930-1946). Il participe aux diffĂ©rentes Ă©preuves du championnat de France militaire de ski entre 1931 et 1939 et en 1942-1943 [5] . Il participe aux diffĂ©rentes Ă©preuves du championnat dÂŽEurope de ski (descente, slalom, combinĂ©) entre 1930 et 1946[5]. A Arlberg-Kandahar. Il participe aux Ă©preuves de descente, slalom et de combinĂ© entre 1931 et 1937 et en 1939 [5]. Il participe aux diffĂ©rents Ă©preuves du championnat du monde de ski (combinĂ©, slalom, descente) entre 1931 et 1939[5] . Aux Jeux olympiques d'hiver de 1932, il participe aux diffĂ©rentes Ă©preuves de combinĂ© nordique, ski de fond et de saut Ă  ski [5]. Aux Jeux olympiques d'hiver de 1936, il participe aux diffĂ©rentes Ă©preuves de combinĂ© nordique, saut Ă  ski, ski de fond, ski alpin et de patrouille militaire [5] . Il est prĂ©sident du comitĂ© d'organisation entre 1964 et 1968 des Jeux olympiques d'hiver de 1968 Ă  Grenoble[5]. Il a Ă©tĂ© membre du ComitĂ© international olympique (CIO) entre 1961 et 1985. Il est prĂ©sident du conseil d'administration de l'École nationale des sports de montagne entre 1970 et 1985. Il est Ă©lu membre de l’Academie des sports le 27 septembre 1958 ,de l’AcadĂ©mie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie le 11 juin 1963, de l’AcadĂ©mie delphinale le 8 janvier 1966, de l'AcadĂ©mie florimontane le 7 avril 1967, de l'SociĂ©tĂ© savoisienne d'histoire et d'archĂ©ologie le 31 mai 1968, de l'AcadĂ©mie salĂ©sienne le 12 juillet 1968, de l'AcadĂ©mie chablaisienne le 30 juin 1969, de l'AcadĂ©mie de la Val d'IsĂšre le 6 juillet 1972,de la SociĂ©tĂ© d'histoire et d'archĂ©ologie de Maurienne le 2 avril 1973, et de la SociĂ©tĂ© d'histoire naturelle de la Savoie le 1er mars 1974[5].Il est prĂ©sident du conseil de perfectionnement de l'École militaire de haute montagne entre 1970 et 1985. À la demande de Pierre Mazeaud, il rĂ©dige le futur projet de loi rĂ©formant la profession de GHM[5].

Entrée dans l'armée

En octobre 1931, il entre au peloton des officiers de rĂ©serve de Grenoble au sein du 6e bataillon de chasseurs alpins . Il tombe hĂ©las gravement malade et doit ĂȘtre rĂ©formĂ©, il perd ainsi six mois. DĂ©cidĂ© Ă  se prouver Ă  lui-mĂȘme ses capacitĂ©s, il rĂ©alise plusieurs ascensions dont la toute premiĂšre des 400 mĂštres de la « Grande Face » de l’aiguille Dibona, Ă  laquelle personne n’avait encore osĂ© se frotter. Il est admis en tant qu’élĂšve-officier de rĂ©serve Ă  Saint-Maixent en octobre 1932 et y reçoit ses galons de sous-lieutenant en mars 1933. Il reste sous-lieutenant peu de temps, car pour passer officier d’active il lui faut dĂ©missionner et effectuer deux annĂ©es en tant que de sous-officier. Il se rĂ©engage ainsi en mai 1933, en tant que sergent au sein du 11e bataillon de chasseurs alpins qui stationne Ă  Gap. AffectĂ© Ă  la deuxiĂšme compagnie, il aura pour tĂąche essentielle d’assurer l’instruction des chasseurs de sa section. Il sera ainsi affectĂ© Ă  la formation du peloton des officiers de rĂ©serve de Grenoble celui-lĂ  mĂȘme qu’il frĂ©quenta. Tous ses crĂ©neaux de libre il les passe en montagne et rĂ©alise Ă  cette Ă©poque un grand nombre de premiĂšres ; tel la premiĂšre hivernale Ă  la roche MĂ©ane, ou la traversĂ©e des aiguilles Mummery et Ravanel dans le massif du Mont-Blanc. A l’étĂ© 1935 il rĂ©ussit le concours d’entrĂ©e Ă  l’École Militaire d’Infanterie et des Chars de combat, commence sa formation Ă  compter de septembre 1935. Sa promotion se nomme « Verdun » et elle reçoit son baptĂȘme devant l’ossuaire de Douaumont en juillet 1936, il est promu sous-lieutenant le 1er septembre 1936[4].

De l'arrivée au 159e RIA à la guerre

Il se prĂ©sente le 15 mai 1937 au 159ee rĂ©giment d’infanterie alpine de Briançon. Son classement plus que flatteur en sortie d’école lui permet de choisir le 15/9, appelĂ© Ă©galement « RĂ©giment de la Neige ». D’abord affectĂ© dans la compagnie stationnant au fort du Randouillet au-dessus de Briançon, l’un des plus hauts forts de la ligne de dĂ©fense de la vallĂ©e, le sous-lieutenant Le Ray prend la tĂȘte d’une section d’éclaireurs skieurs en septembre 1937. Les SES sont alors les unitĂ©s d’élite des rĂ©giments alpins, elles patrouillent sans cesse en haute montagne et renseignent sur les crĂȘtes face Ă  l’Italie. Le sous-lieutenant reçoit pour mission d’occuper les baraquements d’étĂ© du col du Granon Ă  2415 mĂštres d’altitude et d’en faire une installation permanente. Ces installations reprĂ©sentent alors la premiĂšre ligne de dĂ©fense face aux Italiens. Il occupera pendant deux annĂ©es le commandement de ce poste isolĂ© face Ă  la frontiĂšre. À la tĂȘte de sa SES il a parcouru sans relĂąche les crĂȘtes et montagnes pour renseigner sur les activitĂ©s ennemies et prĂ©venir de toute intrusion. Il est promu lieutenant le 1er octobre 1938. Lui, qui sent trĂšs bien que la guerre est imminente Ă  l’étĂ© 1939, prĂ©pare sa SES Ă  la guerre, mais ce n’est pas avec elle qu’il la fera. Au cours de la bataille des Alpes en 1940 les SES alors seules face aux Alpini italiens montreront leur incomparable valeur. En aoĂ»t 1939 la France mobilise et on lui confie le commandement de la 7e compagnie du 159e RIA. Sa compagnie, qui est formĂ©e avec des mobilisĂ©s d’Embrun, est d’abord postĂ©e Ă  la frontiĂšre italienne puis courant septembre monte sur les avants de la Ligne Maginot. DĂ©placĂ©e sur des points d’appui trĂšs Ă©loignĂ©s les uns des autres, le 15/9 et le lieutenant Le Ray quittent la premiĂšre ligne au printemps 1940. Le rĂ©giment est alors placĂ© en rĂ©serve prĂšs de la frontiĂšre suisse. Il y sera maintenu jusqu’à l’offensive allemande[4].

1940, l’épreuve du feu

« La rĂ©sistance, je l’ai commencĂ© sous sa forme la plus concrĂšte : la guerre. » Le 4 mai 1940 sont cĂ©lĂ©brĂ©es, Ă  Paris, les noces du lieutenant Le Ray et de mademoiselle Luce Mauriac, fille du grand Ă©crivain. La fĂȘte est de courte durĂ©e, car six jours plus tard est dĂ©clenchĂ©e l’offensive de la Wehrmacht. Il la quitte alors pour 11 mois, aprĂšs seulement quatre jours passĂ©s ensemble. Il rejoint in extremis son rĂ©giment avant son transfert Ă  ChĂąteau-Thierry. De lĂ  commence une succession de dĂ©placements au rythme des contre-ordres. Le 3 juin, il dĂ©bute une contre-attaque, sans les chars promis, avant de recevoir un Ă©niĂšme ordre de repli et doit s’installer en mĂŽle de rĂ©sistance avec le rĂ©giment au sud de l’Aisne. AprĂšs une nuit Ă  creuser les positions de combat, les chasseurs sont harassĂ©s mais l’ordre de dĂ©crocher est donnĂ©. S’ensuivent deux jours de repli sous les bombardements des Stukas, la compagnie subit ses premiĂšres pertes. L’ordonnance du lieutenant est tuĂ©e prĂšs de lui et il est lui-mĂȘme blessĂ© par un Ă©clat d’obus au pied. Le 8 juin le rĂ©giment reçoit sa mission dĂ©finitive est devra s’installer en dĂ©fense ferme sur la rive sud de l’Ourcq. Ceci est la tactique du gĂ©nĂ©ralissime Maxime Weygand, appelĂ©e hĂ©risson, dont le but est de rĂ©sister quoiqu’il advienne Ă  l’ennemi. Ainsi aprĂšs trois journĂ©es de marches harassantes la compagnie Le Ray reçoit donc l’ordre de dĂ©fendre « sans esprit de repli » le village de BrĂ©ny/Ourcq. Le village est atteint en fin d’aprĂšs midi du 8. La compagnie est au bord de l’épuisement mais doit Ă©riger ses dĂ©fenses. A la tombĂ©e de la nuit le pont sur l’Ourcq est dĂ©truit, la compagnie est maintenant seule et entourĂ©e d’un vide de 3 kilomĂštres, entre elle, le PC bataillon et les unitĂ©s voisines. La compagnie totalement isolĂ©e ne doit s’attendre Ă  aucun secours, c’est une mission de sacrifice chacun le sait bien. À l’aube du 9 juin, les premiers Ă©lĂ©ments motorisĂ©s allemands se prĂ©sentent aux abords du village et sont repoussĂ©s. À partir de 14 heures, les Allemands s’infiltrent pour prendre pied de l’autre cĂŽtĂ© de l’Ourcq, mais sont contenus. Les assaillants montent alors une manƓuvre de grande ampleur, avec deux bataillons d’infanterie soutenus par un rĂ©giment de chasseurs de chars. MalgrĂ© les pertes, la pression se fait plus forte. A 19 h 40, deux groupes d’assaut prennent pied dans le village. Le combat se termine au corps Ă  corps, maison par maison, le chef des unitĂ©s d’assaut allemandes est tuĂ© lors de l’assaut sur le PC du lieutenant Le Ray.

Puis vient le dernier assaut, les grenades claquent, c’est le coup de grĂące, la compagnie Le Ray se bat depuis treize heures. Tout est perdu. RĂ©sister n’a plus de sens. Le chef commande le cessez-le-feu en levant le bras droit au milieu des combats. Le lieutenant blessĂ© et sa poignĂ©e d’alpins rescapĂ©s prennent le chemin de la captivitĂ©. Le jour de l’armistice, sur un effectif initial de 3510 hommes, le RĂ©giment de la Neige ne compte plus 489 hommes. Il a fait son devoir[4].

Captivité et évasions

Le 16 juin 1940, le lieutenant Le Ray est jetĂ© dans l’Oflag II-D de Westphalenhof en PomĂ©ranie. Ce camp Ă  la frontiĂšre polonaise, regroupe prĂšs de 8000 officiers affamĂ©s et hagards par la dĂ©faite. Les premiers temps sont marquĂ©s par la faim et les privations, l’arrivĂ©e des premiers colis fait rĂ©apparaitre la vigueur chez les soldats et rapidement le lieutenant Le Ray ne supporte plus l’avilissement. La vision des colonnes de prisonniers de milliers d’hommes acceptant la servitude, la rĂ©volte et le dĂ©cide Ă  briser les chaĂźnes de l’enfermement. Il est dĂ©cidĂ© et les 800 kilomĂštres le sĂ©parant de la France ne l’arrĂȘtent pas. Pour lui seul le geste compte, un geste gratuit lui permettant de se prouver Ă  lui-mĂȘme ses capacitĂ©s. Il Ă©chafaude un plan avec un camarade du nom de Tournon. Ils se feront « la belle » lors d’une corvĂ©e de bois. Le 18 janvier 1941, ils profitent donc du surnombre provoquĂ© par deux complices, lors de la corvĂ©e de bois pour se cacher dans la neige et ainsi Ă©chapper Ă  la surveillance des soldats allemands. Leur Ă©vasion les conduira Ă  la frontiĂšre de la France par un enchainement de trains et de pĂ©ripĂ©ties avec policiers et contrĂŽleurs de trains, mais 9 jours plus tard ils furent repris Ă  la frontiĂšre française et de nouveau enfermer au camp de Westphalenhof. Mis Ă  l’écart des autres prisonniers et enfermĂ©s en cellule, ils furent ensuite envoyĂ©s Ă  l’Oflag IV-C de la forteresse de Colditz. Cette prison Ă©tait la geĂŽle des officiers prisonniers rĂ©calcitrants et ayant dĂ©jĂ  tentĂ© de s’évader. Il Ă©tait admis que l’on ne s’évadait pas de Colditz. Pourtant il ne lui faudra que deux mois pour s’en Ă©vader ! En effet dĂšs son arrivĂ©e le lieutenant Le Ray recherche toutes les possibilitĂ©s possibles pour s’évader. Un jour, au cours d’une des rares promenades strictement encadrĂ©es par les Allemands, il dĂ©couvre qu’une petite porte au pied d’une façade en travaux est ouverte. De lĂ  il Ă©chafaude toutes les hypothĂšses pour s’échapper. Ce sera au cours d’une des promenades, il lui faudra aller vite. Le 11 avril 1941, en ce jour Saint, il est dĂ©cidĂ© Ă  s’enfuir. À 15 heures va commencer la promenade, il a revĂȘtu, sous sa tenue de prisonnier, la tenue civile qu’il a confectionnĂ©e. Il est prĂȘt. Au retour de la promenade dans le corridor qui reconduit les prisonniers Ă  leurs cellules il scrute le moment propice. Les gardes sont rĂ©partis en tĂȘte, le long et Ă  la queue de la colonne de prisonniers. Son timing est court, arrivĂ© dans le virage qui le dissimule Ă  la vue des gardiens, il bondit et va s’engouffrer dans la porte entre-ouverte qu’il avait repĂ©rĂ©e.

Ses camarades mis dans la confidence au dernier moment ne bronchent pas. Ils organiseront une bousculade, au moment du comptage, pour duper les gardiens sur le nombre de prisonniers. Le reste est une succession d’escalades et de jeux d’équilibristes sur les murs et contreforts du chĂąteau pour en sortir. Par une audace inouĂŻe le voici devenu le premier Ă©vadĂ© de Colditz. Au cours de la promenade quotidienne, il rejoint la Suisse en trois jours, assis en « figure de proue » sur la plateforme entre les lanternes d'une locomotive Ă  vapeur pour redevenir libre[4].

Les désillusion de l'armée d'armistice

Il rejoint le 19 juin 1941, le 153e RIA aprĂšs deux mois passĂ©s avec sa femme Ă  Nice. AffectĂ© dĂšs le mois de septembre au 159e RIA de Grenoble, il prend rapidement ses distances avec la mentalitĂ© marĂ©chaliste et trop attentiste Ă  son goĂ»t. Le colonel qu’il rencontre Ă  son retour de captivitĂ© le 18 avril lui dit d’ailleurs qu’il ne devait pas s’évader ! Il est dĂ©terminĂ© et s’il s’est Ă©vadĂ©, c’est pour reprendre la lutte. Il prend ainsi les premiers contacts avec la RĂ©sistance dĂšs septembre 1941. En novembre 1942, les Allemands envahissent la zone libre de la France (opĂ©ration Anton) et l’armĂ©e d’armistice est dĂ©mobilisĂ©e. Le Ray comme beaucoup de cadres choisit de continuer la lutte dans la clandestinitĂ©. MalgrĂ© sa dissolution l’armĂ©e continue d’administrer ses personnels, c’est ainsi que le 25 mars 1943 le lieutenant Le Ray est promu capitaine[4].

Chef du maquis du Vercors

Alain Le Ray entre dans la RĂ©sistance Ă  la fin de l'annĂ©e 1942, pour devenir en mars 1943 le premier chef militaire du maquis du Vercors, sous les noms de « Rouvier » ou de « commandant Ferval ». Il est l'un des fondateurs du maquis du Vercors, avec l'architecte Pierre Dalloz, le commandant Marcel Pourchier (ancien commandant de l'EMHM), l'Ă©crivain Jean PrĂ©vost et le journaliste Yves Farge. « Il a crĂ©Ă© le comitĂ© clandestin de combat du Vercors et a Ă©tĂ© le premier chef militaire du massif, dont il ne voulait certes pas faire une citadelle mais une plateforme pour des parachutages d’oĂč auraient rayonnĂ© des commandos[6]. ». Le comitĂ© clandestin de combat du Vercors, rĂ©cemment crĂ©Ă© pour permettre Ă  de jeunes Français d'Ă©chapper au service du travail obligatoire (STO) instituĂ© par le gouvernement de Vichy. Alain Le Ray se charge de tous les aspects du maquis : incorporation des volontaires, encadrement, rĂ©partition des stationnements, de l’armement, de l’habillement, l’instruction, le financement, l’alimentation, les plans d’engagements et les liaisons avec le commandement Ă  Lyon. Il transforme des camps sĂ©dentaires en camps mobiles pour leur Ă©viter une tutelle locale et ainsi Ă©pargner la population de reprĂ©sailles. Ainsi il fait appel aux cadres de l’école d’Uriage, dissoute le 27 dĂ©cembre 1942, pour encadrer les volontaires[4]. Cette prĂ©paration militaire se double bientĂŽt d'une Ă©ducation politique et spirituelle. Celle-ci est assurĂ©e par des « Ă©quipes volantes » issues de l'Ă©cole des cadres d'Uriage, que Le Ray a lui-mĂȘme frĂ©quentĂ©e avant sa fermeture fin 1942. Hubert Beuve-MĂ©ry, le futur fondateur du Monde, en fait partie. Les quelques centaines d'hommes qui vivent Ă  l'Ă©poque dans les camps du Vercors sont encouragĂ©s Ă  Ă©tudier l'art de la guĂ©rilla et Ă  Ă©couter des confĂ©rences sur le sens de la guerre et la nĂ©cessitĂ© de bĂątir une France nouvelle[7]. Le projet « Montagnards », conçu par Alain Le Ray et Pierre Dalloz, vise Ă  faire de cette « forteresse naturelle » des PrĂ©alpes grenobloises une base aĂ©roterrestre offensive d'oĂč pourrait ĂȘtre lancĂ©es, le moment venu, des actions commando notamment sur les lignes de communication ennemies en vallĂ©e du RhĂŽne dans l'Ă©ventualitĂ© d'un dĂ©barquement alliĂ©[4]. Pour le mettre en Ɠuvre, Alain Le Ray a besoin d'hommes sĂ»rs et compĂ©tents[7]. Ce projet sera successivement approuvĂ© par Jean Moulin, le gĂ©nĂ©ral Charles Delestraint et enfin par Londres. Il fait cacher sa famille en Seine-et-Oise, et prend comme couverture la profession d'ingĂ©nieur. Le gĂ©nĂ©ral Delestraint viendra lui-mĂȘme inspecter les troupes maquisards du Vercors. Le RhĂŽne-Alpes, qui est occupĂ© par les Italiens, subit la traque de l’OVRA, homologue italien de la Gestapo. L'organisation du Vercors est lourdement frappĂ©e par cette traque[4].

DĂšs la fin juin, aprĂšs les arrestations du gĂ©nĂ©ral Delestraint et Jean Moulin, Alain Le Ray s'emploie Ă  reconstituer une Ă©quipe pour le Vercors. Le second « ComitĂ© de combat du Vercors » est crĂ©Ă© (l'Ă©crivain Jean PrĂ©vost renforce l'Ă©quipe en remplacement de Pierre Dalloz qui a rejoint Londres)[8]. Le lieutenant Le Ray est promu capitaine le , au lendemain mĂȘme de l'entrĂ©e des Allemands dans le DauphinĂ©, Ă  la suite de la capitulation italienne. Malheureusement, le capitaine Le Ray est rendu responsable, lors d’une rĂ©union Ă  l’état-major de Lyon fin 1943, du dĂ©sordre qui a rĂ©gnĂ© lors du parachutage d’armes du 13 novembre 1943 sur le plateau du Vercors. ProfondĂ©ment blessĂ© d’ĂȘtre ainsi injustement critiquĂ© il donne sa dĂ©mission au commandant Marcel Descour (« Bayard »), le chef d'Ă©tat-major[4].

Toutefois, avant de quitter officiellement le Vercors le , Alain Le Ray participe, le Ă  MĂ©audre, Ă  une rĂ©union clandestine du comitĂ© de l'IsĂšre de la France combattante. C'est la rĂ©union de Monaco, au cours de laquelle il est dĂ©cidĂ© que le comitĂ© prendra dĂ©sormais le nom de « ComitĂ© DĂ©partemental de l'IsĂšre de la LibĂ©ration Nationale » (CDLN). C'est donc sans lui que se jouera la derniĂšre phase, la plus terrible, de l'histoire du maquis, dĂ©finitivement anĂ©anti aprĂšs les terribles offensives allemandes de juillet 1944[7]. Il rejoint Paris et le mouvement du capitaine Dunoyer de Segonzac, ancien chef de l’École des cadres d’Uriage prĂšs de Grenoble. Cette Ă©cole, qui formait les cadres de l’armĂ©e d’armistice devint en fait trĂšs vite un vivier de cadres pour la rĂ©sistance. Le capitaine de Segonzac recherche alors des anciens de l’École pour faire un mouvement autonome liĂ© Ă  la France libre. C’est ainsi qu’Alain Le Ray devient le responsable « action » du mouvement. Il organise Ă  ce titre en avril 1944, une rĂ©union pour informer et inciter les militants parisiens Ă  entrer dans la lutte. Il s’oppose ainsi Ă  cette Ă©poque Ă  Hubert Beuve-MĂ©ry, fondateur du journal Le Monde, et responsable « ordre » du mouvement de Segonzac, qui ne veut pas sacrifier cette jeunesse qui pourrait manquer au pays aprĂšs guerre. Le Ray outrĂ© par ce raisonnement attentiste et timorĂ©, a toujours Ă©tĂ© au contraire un partisan de l’action[4] - [3].

Un Ă©missaire du CDLN de l'IsĂšre vient lui apporter la requĂȘte des responsables dĂ©partementaux pour qu'il accepte de prendre la relĂšve au poste de commandant des Forces françaises de l'intĂ©rieur (FFI) de l'IsĂšre Ă  partir du pour succĂ©der Ă  Albert de Seguin de ReyniĂšs disparu quelques jours plus tĂŽt entre les mains de la Gestapo[3]. Il rejoint aussitĂŽt le dĂ©partement. Voici ce qu’il dit de ce moment, oĂč il va reprendre le flambeau du commandant de ReyniĂšs : « Une longue carriĂšre de montagnard et de soldat dans ce pays, neuf mois avec Chavant Ă  la tĂȘte du Vercors, avaient fait de moi un homme connu, fichĂ©, recherchĂ© ; pensant Ă  ma femme et Ă  ma fille j’hĂ©sitais Ă  replonger dĂ©libĂ©rĂ©ment au cƓur de l’orage, en ces lieux que je venais de quitter ; l’image de ReyniĂšs, l’éclat de son exemple pesĂšrent puissamment sur ma dĂ©cision. »

Le commandant des FFI de l'IsĂšre

Le 16 mai 1944, il est promu chef de bataillon. Il rĂ©ussit Ă  rassembler sous son autoritĂ© l'ensemble des rĂ©sistants jusqu'aux Francs-tireurs et partisans français (FTPF)[7]. Cette union est loin d'avoir Ă©tĂ© rĂ©alisĂ© dans tous les dĂ©partements français face Ă  un ennemi bien supĂ©rieur notamment aider par la Gestapo et la Milice[7]. Cependant les Allemands qui ont repris par la force le Sud-Est de la France aux Italiens, ont menĂ© une vĂ©ritable rĂ©pression dans les rangs de la RĂ©sistance. La RĂ©sistance est en outre trĂšs affaiblie par la pauvretĂ© de son armement, pas d’armes lourdes et trĂšs peu de munitions. Il rĂ©dige une note importante dans laquelle il prĂ©conise l’utilisation de la guĂ©rilla par des attaques brusques et ciblĂ©es sans se laisser fixer et accrocher. Son systĂšme est basĂ© sur la mobilitĂ©. Il fait d’incessants dĂ©placements Ă  vĂ©lo ou Ă  moto dans tout le dĂ©partement pour prendre contact avec les reprĂ©sentants locaux. Son PC ne reste d’ailleurs pas plus de 10 jours au mĂȘme endroit.

Le , Ă  l'heure oĂč les AlliĂ©s dĂ©barquent sur les plages de Normandie, EugĂšne Chavant, chef civil du Vercors, revient d'Alger porteur de promesses qui se veulent encourageantes pour le maquis : le plan « Montagnards » conçu par Pierre Dalloz et Alain Le Ray est bien valide. Alain Le Ray se tiendra en Ă©troite liaison avec le chef d'escadron François Huet (« Hervieux »), commandant en chef du Vercors, tant pendant l'attaque allemande de Saint-Nizier, les 13 et , que pendant l'offensive gĂ©nĂ©rale menĂ©e contre le Vercors, du 21 au , par prĂšs de 13 000 Allemands parfaitement entraĂźnĂ©s et armĂ©s[8]Le Vercors n’est plus sous sa responsabilitĂ©, mais il lance une guĂ©rilla sĂ©vĂšre sur les arriĂšres de l’ennemi pour soulager l’étreinte du maquis. Malheureusement le maquis est submergĂ© le 24 juillet. Le 15 aoĂ»t les AlliĂ©s dĂ©barquent en Provence, et les Allemands dĂ©clenchent l’OpĂ©ration « Hochsommer » pour s’attaquer aux zones semi-libres dĂ©tenues par les FFI. Pendant tout le mois d’aoĂ»t 1944, le commandant Le Ray dirige les combats des FFI contre l’occupant. Les derniers combats sont menĂ©s conjointement avec les AlliĂ©s comme Ă  Vizille, oĂč maquisards et AlliĂ©s montent ensemble Ă  l’assaut de l’ennemi. Le 22 aoĂ»t 1944, c’est lui qui accueille le chef des forces amĂ©ricaines Ă  Grenoble, qui viennent d’entrer dans la ville sans avoir eu Ă  combattre. MalgrĂ© la chute du Vercors, il apparaĂźtra dĂ©sormais que l'Allemagne allait perdre la guerre. Il est alors dĂ©cidĂ© d'intensifier l'action de harcĂšlement des forces ennemies. Pour autant, le capitaine Le Ray rejettera le projet d'une bataille de Grenoble tant que le gĂ©nĂ©ral Karl Pflaum y maintiendra des forces capables de mettre la ville Ă  feu et Ă  sang[8]. Grenoble, « capitale de la RĂ©sistance », compagnon de la LibĂ©ration par dĂ©cret du , a bien mĂ©ritĂ© de la patri Le 23 aoĂ»t, il est promu lieutenant-colonel[4]

La bataille des Alpes

Le 1er octobre 1944 il est chargĂ© de former la 3e demi-brigade de chasseurs alpins qui prend place au sein de la 1re division alpine. Sa demi-brigade se compose du 6e BCA, bataillon du Vercors, du 11e BCA, bataillon de l’Oisans, du 15e BCA, bataillon de Belledonne, d’un escadron de reconnaissance et d’un groupe d’artillerie. Il favorise l’amalgame des diffĂ©rentes origines de ses soldats. Pour lui l’homme prime sur les convictions. Pendant les deux premiers mois il se focalise sur l’armement, l’équipement et l’entraĂźnement. Le gĂ©nĂ©ral de Gaulle viendra lui-mĂȘme inspecter les troupes du lieutenant-colonel Le Ray. Le 7 novembre, au lendemain de cette visite, la 3e demi-brigade est affectĂ©e dans sa zone de dĂ©ploiement opĂ©rationnelle : le Haute-Maurienne. Pendant cinq mois ses patrouilles parcourent le « no man’s land » entre les lignes françaises et allemandes. Les accrochages sont frĂ©quents et meurtriers, l’altitude et les conditions hivernales rendent encore plus pĂ©nibles les engagements. La prĂ©occupation du commandement est aux prĂ©paratifs des offensives du printemps 1945. Les Allemands restent ainsi, tout l’hiver, maĂźtres des crĂȘtes frontiĂšres entre la France et l’Italie. Pendant cette pĂ©riode d’innombrables exploits sportifs et militaires sont rĂ©alisĂ©s comme notamment le 10 mars 1945, oĂč le lieutenant-colonel Le Ray, le capitaine StĂ©phane, et son ami Jacques BoĂ«l rĂ©alisent Ă  eux trois une premiĂšre hivernale sur la pointe de Ronce Ă  3611 mĂštres d’altitude, afin de pouvoir conduire une patrouille d’observation des lignes de dĂ©fense allemande. Selon ses propres mots il put de la sorte : « Avoir sous ses yeux tout le revers des positions allemandes du plateau du Mont-Cenis avec tracĂ©s dans la neige, les points d’appui dĂ©fensifs Ă  attaquer. » À la redescente ils font prisonnier un Allemand qui marchait isolĂ© dans la montagne, se croyant seul. Celui-ci profite d’une pause pour se saisir de l’arme du capitaine StĂ©phane et se jette dans le vide sur plusieurs centaines de mĂštres. Il se relĂšvera miraculeusement vivant et ira se faire soigner chez ses compatriotes. Plus tard alors qu’Alain Le Ray sera en poste en Allemagne ils se retrouveront et contribueront Ă  la rĂ©conciliation et au rapprochement franco-allemand. Le 5 avril 1945, sa demi-brigade qui est devenue entre-temps la 7e DBCA, passe Ă  l’offensive en Haute-Maurienne avec pour objectif de prendre le plateau du Mont-Cenis qui commande l’accĂšs Ă  l’Italie. C’est en fait toute la division qui passe Ă  l’offensive. Le but Ă©tant de retenir les Allemands dans les Alpes, pour les empĂȘcher de se renforcer en Italie dans la plaine du PĂŽ face Ă  la progression alliĂ©e, mais Ă©galement pour faire en sorte que la France participe Ă  la victoire finale sur l’Axe. Le Ray donne comme objectif premier et prioritaire Ă  ses troupes, la conquĂȘte des points hauts du saillant nord-ouest du plateau oĂč sont retranchĂ©s les Allemands. Le mont Froid Ă  2820 mĂštres et Bellecombe Ă  2755 mĂštres sont enlevĂ©s le premier jour des combats comme la quasi-totalitĂ© des objectifs fixĂ©s par Le Ray. Les combats trĂšs violents sont menĂ©s dans des conditions climatiques affreuses et toutes les positions prises, souvent jusqu’au corps Ă  corps, doivent ĂȘtre aussitĂŽt dĂ©fendues face Ă  d’innombrables contre-attaques. La situation des Français est critique car il n’y a pas de rĂ©serve en hommes. Les positions sont dĂ©garnies au profit du mont Froid qui rĂ©siste Ă  toutes les contre-attaques pendant 7 jours et 6 nuits. Le 11 avril le lieutenant-colonel Le Ray est lui-mĂȘme au sommet du mont Froid pour diriger la manƓuvre de ses troupes. Le 12 avril 1945 les Allemands reprennent le mont Froid, mais les chasseurs ont fait leur devoir, et les renforts nĂ©cessaires Ă  la reprise du plateau ont manquĂ©s en Italie pour faire face aux alliĂ©s. Pour rĂ©pondre aux critiques du gĂ©nĂ©ral Paul Doyen sur l’échec de l’offensive il dira plus tard : « Je n’ai jamais eu sous mes ordres une troupe aussi ardente, aussi vigoureuse au combat que ces trois bataillons du groupement Maurienne
 Le gĂ©nĂ©ral Doyen qui Ă  ma connaissance, n’est jamais venu dans nos secteurs, ne s’était aucunement rendu compte de ce que reprĂ©sentait une attaque, en hiver, Ă  ces altitudes, conduites de bas en haut, avec des dĂ©nivelĂ©s de 600 mĂštres, sans aucun moyen de portage, sans rĂ©serve et sans appui d’aviation. » À partir du 14 avril sa demi-brigade est affectĂ©e Ă  l’arriĂšre du front et reprendra sa progression avec le dĂ©but du retrait allemand le 28 avril 1945. Le 3 mai, ses hommes et lui sont Ă  Turin, le lendemain les troupes d’Italie dĂ©posent les armes, c’est la victoire. La fin de la guerre[4].

Un Ă©pisode de la guerre filmĂ© par Marcel Ichac, son ami du Groupe de Bleau, dans le film TempĂȘte sur les Alpes en 1944-1945 (et dont une aventure de montagne vĂ©cue par Le Ray sera reprise dans le film de rĂ©fĂ©rence du cinĂ©ma de montagne Les Étoiles de midi en 1959).

L'Ă©crivain Jean Mabire Ă©crit de lui : « Sentimentalement, il serait plutĂŽt ce qu’on nomme un « progressiste » aux idĂ©es gĂ©nĂ©reuses, mais, instinctivement, il reste un grand seigneur Ă  l’autoritĂ© souveraine[9]. »

Tout au long de sa carriÚre, Alain Le Ray continuera de défendre la mémoire de ses anciens compagnons, en particulier au sein de l'association des Pionniers du Vercors.

En 1972 notamment, en pleine période de reflux d'une certaine mythologie « résistancialiste », il prendra position contre le livre de Gilbert Joseph, Combattant du Vercors, qui accuse d'incompétence les chefs militaires d'un maquis dont il ne cessera de célébrer l'utilité stratégique dans les semaines de la Libération[7].

Rencontre avec le géneral de Gaulle du 5 novembre 1944

Dans les salons de la prĂ©fecture de l'IsĂšre, Le Ray a l'honneur d'ĂȘtre prĂ©sentĂ© au chef de la France libre. C'est Yves Farge, commissaire de la RĂ©publique Ă  Lyon, qui introduit le jeune officier :

« Le commandant Le Ray a beaucoup de choses à vous dire, mon général ! » dit-il avant de s'éclipser.

« Alors, Le Ray, qu'avez-vous à me dire ? »

Le gĂ©nĂ©ral fait asseoir son visiteur Ă  cĂŽtĂ© de lui. Le visage du grand homme est blĂȘme, empreint d'une profonde lassitude.

Le jeune officier, qui vient de recevoir la croix de la Légion d'honneur, impressionné par cette froideur, hésite, ne sachant pas ce qu'il y a de plus utile à dire. Il parlera, sans le secours d'une seule question, de sa troupe qui vient de défiler et dont il est fier, et de la nature des derniers combats en coopération ou non avec les Américains, abordant avec précaution le délicat sujet du Vercors. Visiblement cela suffit.

« Je vous remercie. Au revoir, Le Ray. »

D'abord dĂ©sarçonnĂ© par ce tĂȘte-Ă -tĂȘte glacial, il mesure peu Ă  peu l'immense fatigue accumulĂ©e sur les Ă©paules du chef de la France libre depuis tant de mois et d'annĂ©es. De toute façon, ce sera pour lui un grand souvenir. Puis il repart vers les tĂąches qu'appelait le dĂ©part du surlendemain pour la Maurienne[8].

L'aprĂšs-guerre

La guerre finie, le 1er juin 1950 il rend son galon de lieutenant-colonel et devient chef de bataillon Ă  titre dĂ©finitif. Il ne s’en indigne pas malgrĂ© le fait qu’il ait commandĂ© en temps de guerre prĂšs de 5000 hommes, et que parmi les officiers FFL nombreux Ă©taient ceux qui conservĂšrent leurs galons. AprĂšs un bref passage comme chef du 3Ăšme bureau de la 27Ăšme Division Alpine, il est affectĂ© Ă  compter du 26 octobre 1945 au service social des armĂ©es[4]. Il sera ensuite chef de la section « Moral et Information » de l’État-Major des armĂ©es . Il y remplira les fonctions de porte-parole du Ministre de la DĂ©fense Nationale et celles de directeur de la Revue d’information entre 1947 et 1948[2]. Le gĂ©nĂ©ral Jean de Lattre de Tassigny fera de lui le censeur de son manuscrit sur la 1re ArmĂ©e. Il participera en outre Ă  une commission chargĂ©e d’examiner le Manuel du chef de dĂ©tachement en montagne. Le 1er avril 1950, il est affectĂ© en Autriche Ă  la 5e Demi-brigade de chasseurs, puis neuf mois plus tard le 1er janvier 1951, devient chef du 3e bureau du Commandement SupĂ©rieur en Autriche. Il quitte l’Autriche en septembre 1951, puis est affectĂ© au Service Historique de l’ArmĂ©e. Il est promu lieutenant-colonel le 1er octobre 1951. Pendant son temps au Service Historique il sera examinateur de français et PrĂ©sident de la sous-commission de culture gĂ©nĂ©rale au concours d’entrĂ©e Ă  l’ESMIA[4].

Indochine

Alain Le Ray se porte volontaire pour aller combattre en Indochine, et le 7 mai 1953 le voici qui dĂ©barque Ă  SaĂŻgon. En arrivant en Indochine il sait que la guerre est dĂ©jĂ  fortement compromise mais il y est pour faire son devoir de soldat. Il est affectĂ© dans le Tonkin en tant qu’adjoint opĂ©rationnel dans le sud du Delta du MĂ©kong Ă  Nam Dinh . Dans ce secteur le 23 juin 1953, Ă  peine arrivĂ©, il commande la dĂ©fense d’une milice attaquĂ©e par un bataillon de rebelles Vietminh en lisiĂšre de l’agglomĂ©ration de Nam Dinh. Cela lui vaudra une citation Ă  l’ordre du corps d’armĂ©e. Voici ce qu’il Ă©crit Ă  sa femme aprĂšs la bataille[4] :

« Je t’écris quelques heures aprĂšs la bagarre. J’ai dirigĂ© une opĂ©ration d’urgence entre une heure et trois heures du matin, et depuis je m’occupe de mille choses : bilan de l’opĂ©ration, Ă©tude des circonstances de l’attaque, et de la riposte, pertes, valeur des Ă©lĂ©ments agresseurs, etc. J’ai passĂ© la journĂ©e ensuite Ă  parcourir sous le soleil torride tous nos centres de rĂ©sistance. Je ne sais pas si le communiquĂ© en fera Ă©tat mais la chose a Ă©tĂ© sĂ©rieuse et j’ai eu beaucoup de travail. J’ai retrouvĂ© les impressions, pas tellement effacĂ©es d’ailleurs, des combats de naguĂšre. Les Viets ont attaquĂ© Ă  une heure du matin. À quatre heures leur bataillon d’assaut Ă©tait en fuite[4]. »

Le 10 aoĂ»t 1953 il prend le commandement du secteur des Sept Pagodes dans le nord du delta du MĂ©kong. Il s’agit d’une rĂ©gion trĂšs hostile proche de la route historique des invasions chinoises, la rĂ©bellion y est trĂšs implantĂ©e. Dans ce secteur la population est violemment anti Vietminh et d’innombrables milices viennent Ă©pauler l’action du commandant de secteur qu’il est. Alors que la majeure partie des moyens du corps expĂ©ditionnaire est consacrĂ©e au camp retranchĂ© de Dien Bien Phu, dans le delta les attaques sont presque quotidiennes. Le 8 fĂ©vrier un bataillon de rĂ©guliers rebelles attaque un poste de montagnards Nung, avec bengalores et charges creuses, il commande une intervention de dĂ©gagement appuyĂ©e par l’artillerie. Le 28 mars, son secteur rĂ©ussit Ă  dĂ©truire un bataillon viet[4].

Il Ă©prouve un vif intĂ©rĂȘt pour ce pays, et en respecte son peuple et ses coutumes. Voici ce qu’il en dit : « Il ferait bon vivre ici sans guerre avec ce peuple fin, sensible et mystique. » Et il supporte mal le laisser-aller de l’État dans cette guerre, pour lui la victoire est possible mais passe par une rĂ©elle volontĂ© politique. En mai l’offensive finale sur Dien Bien Phu est lancĂ©e et il la suit avec angoisse car d’une part le sort de la guerre en dĂ©pend et de plus il a des amis dans la cuvette comme le lieutenant-colonel AndrĂ© Lalande qui commande le centre de rĂ©sistance Isabelle. À peine 8 jours aprĂšs la chute de Dien Bien Phu, le 15 mai 1954 il est mutĂ© au cabinet du gĂ©nĂ©ral en chef. Il y sera le porte-parole du gĂ©nĂ©ral Navarre, puis du gĂ©nĂ©ral Paul Ely Ă  compter du 8 juin. Le lieutenant-colonel Le Ray est mutĂ© Ă  compter du 1er aoĂ»t 1954 au sein de la dĂ©lĂ©gation française de la commission mixte franco-vietnamienne pour le Vietnam en tant que rapporteur. Cette commission avait pour but de fixer les modalitĂ©s d’application du cessez-le-feu, elle fut rĂ©unie Ă  Trung Dia et prĂ©sidĂ©e par le gĂ©nĂ©ral de BrĂ©bisson. Les questions notamment sur la libĂ©ration des prisonniers et sur le retrait des deux armĂ©es Ă©taient au centre des nĂ©gociations. Le lieutenant-colonel Le Ray quitte dĂ©finitivement l’Indochine en janvier 1955, il a derriĂšre lui plus de 20 mois de prĂ©sence[4].

Algérie

Alain Le Ray est mis Ă  la disposition du gĂ©nĂ©ral commandant les Troupes aĂ©roportĂ©es Ă  Paris. Lui, qui Ă©tait officier supĂ©rieur, s’était portĂ© volontaire pour passer le brevet parachutiste dĂšs 1949, rares Ă©taient les officiers supĂ©rieurs ayant fait comme lui. En septembre 1955, il devient chef d’état-major de la 25e Division d’Infanterie AĂ©roportĂ©e Ă  Bayonne. Le 31 dĂ©cembre 1955 il y est promu colonel, il a alors 45 ans. Le 1er mai il rejoint l’AlgĂ©rie, et prend le commandement du secteur d’El-Milia Ă  la tĂȘte du GM 314 et de la 2e Demi-brigade de Chasseurs. Il passe dix mois dans cette rĂ©gion d’AlgĂ©rie, les opĂ©rations menĂ©es lĂ -bas sont le lot quotidien de toutes les unitĂ©s françaises engagĂ©es dans « cette pacification », bouclages, ratissages, embuscades mais aussi actions en faveur de la population civile avec les crĂ©ations d’écoles ou de dispensaires par exemple. Il a une vision presque clairvoyante de la situation en AlgĂ©rie comme le prouve une de ses lettres Ă  sa mĂšre[4] :

« Je suis convaincu que nous menons ici un combat aux fondements indiscutables. À l’inverse du combat indochinois, il sera gagnĂ© Ă  coup sĂ»r, si la nation cesse de douter d’elle-mĂȘme et de se donner bonne conscience. L’avenir exigera une rĂ©vision profonde de notre systĂšme [
] mais il faut avant tout imposer le silence par la force Ă  ceux qui n’on qu’un seul but, nous Ă©liminer Ă  jamais. Il est difficile de rĂȘver un racisme plus absolu, plus totalement nĂ©gatif, que celui des reprĂ©sentants du FLN. »[4]

Le 15 mars 1957 il prend le commandement du secteur de Biskra dans le massif des AurĂšs avec sa demi-brigade. Ce secteur est un secteur trĂšs exposĂ© car berceau de la rĂ©bellion du FLN. Il assume la responsabilitĂ© de ce secteur Ă  un moment oĂč la vague terroriste est la plus forte, au cƓur de l’étĂ© 1957. Le 27 octobre 1957, avec sa demi-brigade il prend la tĂȘte du secteur d’Arris au cƓur du massif de l’AurĂšs. À cette Ă©poque c’est dans cette rĂ©gion que la densitĂ© rebelle est la plus importante. En deux ans voici le bilan de ces opĂ©rations : 641 rebelles tuĂ©s, 45 prisonniers en armes, et 19 ralliĂ©s. 438 armes rĂ©cupĂ©rĂ©es parmi lesquelles 2 mitrailleuses, 2 FM, 1 mortier, 2 lance-roquettes et plusieurs tonnes de munitions[4].

Alain Le Ray quitte son poste de commandant de secteur d’Arris le 1er juin 1958 et devient pendant un mois PrĂ©fet par intĂ©rim du dĂ©partement des AurĂšs Ă  Batna. Il quitte ce poste le 26 juin 1958 et rentre en France oĂč il est affectĂ© au Centre des Hautes Études de la DĂ©fense Nationale. Le 1er septembre 1959, il devient attachĂ© de dĂ©fense en rĂ©publique fĂ©dĂ©rale d’Allemagne (Allemagne de l’Ouest). Il n’est que colonel et ce poste en d’ordinaire dĂ©volu Ă  un gĂ©nĂ©ral, qu’à cela ne tienne il est promu gĂ©nĂ©ral Ă  titre fonctionnel. Pendant presque trois ans Le Ray va Ɠuvrer pour le rapprochement franco-allemand, et notamment sur le plan militaire. Ce poste trĂšs important en Allemagne va l’amener Ă  retrouver le soldat Ă©vadĂ© de la pointe de Ronce en 1945, Anton Hörnle. De lĂ  naĂźtra une amitiĂ©, et les retrouvailles diffusĂ© sur la tĂ©lĂ© allemande seront un grand symbole pour la rĂ©conciliation des deux pays[4].

Le 1er aoĂ»t 1961, il est nommĂ© gĂ©nĂ©ral de brigade Ă  titre dĂ©finitif, puis le 3 juillet 1962 il repart pour l’AlgĂ©rie commander la 27e division d’infanterie alpine. Sa division est dans l’Est algĂ©rois en Grande Kabylie, et lĂ  encore il prend la tĂȘte d’un commandement supĂ©rieur Ă  son grade. Il se trouve alors confrontĂ© au grand problĂšme des autoritĂ©s de l’époque, le problĂšme Harkis. Face Ă  ce problĂšme il rĂ©pond avec honneur :

« Nous avons le droit, et dans les cas non contestables le devoir, d’accorder asile Ă  ceux qui nous demandent protection par suite des menaces qu’ils subissent Ă  cause de leur combat Ă  nos cĂŽtĂ©s. »[4]

Au 15 octobre 1958, le général Le Ray a recueilli 4380 réfugiés harkis dont 3375 étaient déjà transférés en France. Le 7 novembre 1962, la 27e DIA est dissoute, voici son allocution au moment du départ :

« Pour la premiĂšre fois depuis 105 ans, vous allez amener le drapeau français. Quel paradoxe douloureux que ce soient prĂ©cisĂ©ment des troupes victorieuses qui doivent consentir ce geste dĂ©cisif dont il n’est pas excessif de dire en ce lieu qu’il ferme un chapitre de l’Histoire. »

DĂ©signĂ© pour commander le 23e corps d’armĂ©e en AlgĂ©rie, alors qu’il n’est que gĂ©nĂ©ral de brigade, il rentre finalement en France le 23 dĂ©cembre 1962 le corps d’armĂ©e n’étant pas crĂ©Ă©[4].

Sa fin de carriĂšre

De retour en France il prend la tĂȘte de la subdivision de Seine-et-Oise. Il y reste du 21 mars 1963 au 1er avril 1965, date Ă  laquelle il est promu gĂ©nĂ©ral de division. Il ensuite prend la tĂȘte de la 7e divion mĂ©canisĂ©e Ă  Mulhouse[4].

À la tĂȘte de 18 000 hommes il va notamment expĂ©rimenter lors de nombreux exercices le contexte nuclĂ©aire tactique. Sa division Ă©tait celle chargĂ©e d’empĂȘcher l’invasion du territoire par l’ennemi soviĂ©tique. Le 18 aoĂ»t 1967, il devient adjoint au gĂ©nĂ©ral gouverneur militaire de Paris Ă  la 1re RĂ©gion militaire. Le 15 avril 1968, il est nommĂ© inspecteur gĂ©nĂ©ral de la DĂ©fense opĂ©rationnelle du territoire, la DOT. Le 1er dĂ©cembre 1968, il reçoit sa quatriĂšme Ă©toile de gĂ©nĂ©ral de corps d’armĂ©e[4].

Le 1er octobre 1970, il prend sa retraite et fait ses adieux Ă  l’armĂ©e d’active, devant les chasseurs du 6e bataillon de chasseurs alpins Ă  Chamrousse. Le 3 octobre il est rayĂ© des cadres de l’armĂ©e d'active[4].

Sa vie civile aprĂšs la retraite

Il est placĂ© en 2e section des officiers gĂ©nĂ©raux aprĂšs 39 annĂ©es de service, d’une carriĂšre exceptionnelle. C’est donc naturellement qu’il va continuer Ă  servir son pays mĂȘme Ă  la retraite[4].

Il prendra de nombreuses responsabilitĂ©s Ă  travers des associations d’anciens montagnards et de rĂ©sistants, ainsi il sera PrĂ©sident d’honneur de trois associations : celle des Anciens Ă©claireurs-skieurs, celle des Pionniers et combattants du Vercors, et celle de la RĂ©sistance Unie pour l'IsĂšre [2]. Cela montre encore si besoin est sa fidĂ©litĂ© Ă  ses engagements, Ă  ses anciens camarades de combats.

Alain Le Ray est administrateur du parc national des Écrins de 1973 à 1981. En 1986 il fondera l’Union des troupes de montagnes[4].

Il sera surtout pendant 12 annĂ©es le prĂ©sident de l’Association nationale des anciens officiers d’active, l’Epaulette, association d'officiers issus de recrutements autres que Saint-Cyr (semi-direct des Ă©coles de la gendarmerie, de l'armĂ©e de terre, des services communs et de l'armement, recrutĂ©s sur titres ou par concours, issus d'un recrutement interne ou provenant des officiers de rĂ©serve). Successeur du fondateur de l’association, le gĂ©nĂ©ral Gandoet, il sera au cƓur des rĂ©formes sur le statut des officiers de recrutement semi-direct et se battra pour l’unitĂ© du corps des officiers[4].

Le 15 octobre 1996 le prĂ©sident le RĂ©publique l’élevait Ă  la dignitĂ© de grand-croix de LĂ©gion d’honneur, distinction que seul deux autres gĂ©nĂ©raux de recrutement interne ont reçu, les gĂ©nĂ©raux Gandoet et Marcel Bigeard[4].Les archives d’Alain Le Ray sont conservĂ©es au Service historique de la DĂ©fense sous la cote 14 YD 2672 depuis 1992 [10].

Le gĂ©nĂ©ral Alain Le Ray meurt le . Ses obsĂšques dĂ©roulent aux Invalides Ă  Paris le 11 juin[3], avant son inhumation, le lendemain, dans le caveau des Mauriac au cimetiĂšre de VĂ©mars, oĂč il repose auprĂšs de son Ă©pouse, Luce Mauriac, dĂ©cĂ©dĂ©e en 2011, de François Mauriac, le pĂšre de cette derniĂšre, et d'autres membres de la famille Mauriac. Il Ă©tait pĂšre de 5 enfants.

Tombe d'Alain Le Ray et de sa famille.

DĂ©corations

Intitulés

Publications

  • PremiĂšre Ă  Colditz, Paris, Arthaud, , 191 p. (ISBN 2-7003-0111-0)
  • Alain Le Ray, « La RĂ©sistance du Vercors », Pionnier du Vercors, no 71,‎
  • Alain Le Ray, Maquis de l’IsĂšre, derniĂšres nouvelles, MusĂ©e de la RĂ©sistance et de la dĂ©portation de l’IsĂšre,
  • Alain Le Ray, « OpĂ©ration de dĂ©tail en haute montagne hivernale », Revue militaire d’information, nos 156,157,158,159,‎

Hommages

Parrain de Promotion

  • La 47e promotion de l'École militaire interarmes 2007-2009 a Ă©tĂ© baptisĂ©e le 19 juillet 2008 « GĂ©nĂ©ral de corps d'armĂ©e Le Ray »[11].
  • L'INSIGNE de la promotion GCA LERAY

Description héraldique:

Bouclier d’azur Ă  une porte mauresque de gueules ouverte sur un paysage de montagnes au ciel aurore, accompagnĂ©e Ă  dextre de quatre Ă©toiles d’argent (1, 2, 1).

Parti d’un taillĂ© d’azur et d’or chargĂ© en cƓur d’un Ă©cusson aux armes du 159Ăšme rĂ©giment d’infanterie alpine et en pointe d’une croix de Lorraine d’argent.

BrochĂ© d’une Ă©pĂ©e d’argent gardĂ©e d’or Ă  la lame chargĂ©e du grade et du nom en capitales de sable « GCA LE RAY ».

En pointe dextre brochant dragon indochinois d’or Ă  la queue enserrant la garde de l’épĂ©e.TimbrĂ© en chef semestre d’une plaque de grand-croix de la LĂ©gion d’honneur[12].

  • Le chant de la 47e Promotion GCA LE RAY

Soldat au coeur de la tourmente, Officier fier et insoumis, DĂ©fendez la France vaillante, Luttez sans esprit de repli. REFRAIN :

Travail, Honneur et Fidélité. Gardez nos armes, écrivez notre histoire. De ces hauteurs, Général Le Ray, Gardez nos armes pour la victoire.

Colditz pensait vous retenir, PrivĂ© de votre libertĂ©. DĂ©fiant l’ennemi sans faillir, Ouvrez la voie aux Ă©vadĂ©s.

Peuple de la nuit, levez-vous. Pour la Patrie livrez combat. Gardez la flamme jusqu’au bout. Dans le Vercors, suivez-moi !

ArmĂ©e des Alpes, recouvrez D’un blanc linceul l’ennemi. Reprenez-lui chaque sommet, Qu’il abandonne au Mont-Cenis !

En Indochine, en Kabylie, De la France portez la grandeur. Dernier hommage Ă  votre vie, La Promotion rend les honneurs

Paroles : SLT LAMBERT Guillaume, SLT KERHARO Eric, SLT DE WARREN Gautier MĂ©lodie : SLT NOUGAYREDE Guillaume[13] - [14]

Grenoble

  • Inauguration d'une Esplanade Alain Le Ray Ă  Grenoble, le 22 aoĂ»t 2008[16].
  • En 2007, exposition en mĂ©moire du gĂ©nĂ©ral Alain Le Ray Ă  Grenoble[17].
Esplanade Alain Le Ray Ă  Grenoble

Références

  1. État-civil sur le fichier des personnes dĂ©cĂ©dĂ©es en France depuis 1970
  2. « Biographie Alain Le ray – GĂ©nĂ©ral de corps dÂŽarmĂ©e (C.R.). », sur www.whoswho.fr (consultĂ© le )
  3. « Musée de la résistance en ligne », sur museedelaresistanceenligne.org (consulté le ).
  4. « EMIA 47 La vie du parrain », sur web.archive.org, (consulté le )
  5. (en-US) The Associated Press, « Alain Le Ray, Top Figure in French Resistance and Army, Dies at 96 », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consultĂ© le )
  6. Jean Mabire, La Bataille des Alpes : 1944-1945, t. 1, Presses de la Cité, , 386 p. (ISBN 978-2258017511), p. 15
  7. « Alain Le Ray, chef militaire du maquis du Vercors », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  8. Jean-Pierre Martin, Alain Le Ray : le devoir de fidélité : un officier alpin au service de la France, 1939-1945, Grenoble, Association des amis du Musée des troupes de montagne Presses universitaires de Grenoble, , 215 p. (ISBN 978-2-706-10940-9).
  9. Jean Mabire, La Bataille des Alpes : 1944-1945, t. 1, Presses de la Cité, , 386 p. (ISBN 978-2258017511), p. 16.
  10. « archives des officiers gĂ©nĂ©raux depuis l’ancien rĂ©gime au service historique de La DĂ©fense », sur francearchives.fr (consultĂ© le )
  11. « GĂ©nĂ©ral de Corps d’ArmĂ©e Le Ray », sur www.guer-coetquidan-broceliande.fr (consultĂ© le )
  12. « insigne de la promotion GCA LE RAY », sur emia47.fr (consulté le )
  13. « chant de la promotion GCA LE RAY », sur emia47.fr (consulté le )
  14. « Général Le Ray Chant de Promotion EMIA » (consulté le )
  15. « EMIA 47 Exposition GCA LE RAY au musée du souvenir ; Ouest France ; 06/11/08 », sur emia47.fr, (consulté le )
  16. « L'hommage de la ville de Grenoble au général Alain Le Ray, mon ami - Michel DESTOT », sur www.micheldestot.fr (consulté le )
  17. « exposition en mémoire du général Alain le ray », sur micheldestot.blogs.com (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Jean-Pierre Martin, Alain Le Ray : le devoir de fidĂ©litĂ© : un officier alpin au service de la France, 1939-1945, Grenoble, Association des amis du MusĂ©e des troupes de montagne Presses universitaires de Grenoble, , 215 p. (ISBN 978-2-706-10940-9)
  • Jean Mabire, La bataille des Alpes : Maurienne, novembre 1944-mai 1945, Paris, Presses de la Cite, coll. « Troupes de choc », , 2 vol. (317 p., [16] p. de pl.) (287 p., [16] p. de pl.) (ISBN 978-2-258-01751-1 et 978-2-258-03275-0)
  • Serge Douceret, Le GĂ©nĂ©ral Alain Le Ray, un patriote du XXe siĂšcle, Paris, L’Épaulette, , 318 p. (ISBN 978-2258017511)
  • GĂ©nĂ©ral Alain Le Ray, prĂ©face du livre La Guerre sans arme d’Élisabeth Rioux-Quintenelle. fĂ©vrier 1996

Films

Liens externes

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