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Affaire du Mediator

L'affaire du Mediator est une affaire sanitaire et judiciaire concernant les personnes victimes de la prise de benfluorex, commercialisĂ© sous le nom de Mediator par les laboratoires Servier de 1976 Ă  2009[1]. Le Mediator est accusĂ© d’avoir causĂ© la mort de 1 500 Ă  2 100 personnes en France, sans compter celles qui souffrent des consĂ©quences des effets secondaires.

portrait en noir et blanc d'une femme.
Irène Frachon, lanceuse d'alerte dans l'affaire du Mediator.
Un tube de médicament
Un tube de Mediator

L'affaire Ă©clate en , lorsqu'est publiĂ© chez l'Ă©diteur Dialogues le livre Mediator 150 mg : combien de morts ? de la pneumologue Irène Frachon (centre hospitalier universitaire de Brest) : elle devient ainsi lanceuse d'alerte sur ce scandale de santĂ© publique qui touche des milliers de victimes ; celles-ci se porteront parties civiles lors des futurs procès[2]. Le livre retrace sa lutte pour rĂ©vĂ©ler au grand jour et dĂ©noncer l'indication fallacieuse, la nature amphĂ©taminique cachĂ©e et les risques pourtant dĂ©jĂ  connus de ce mĂ©dicament commercialisĂ© par les laboratoires Servier, et dĂ©noncĂ©s en vain par la revue Prescrire depuis 1997[3]. Deux jours plus tard, quatre plaintes sont dĂ©posĂ©es contre les laboratoires Servier, après le retrait du Mediator, survenu en 2009[4]. La famille d’un patient dĂ©cĂ©dĂ© et un autre patient souffrant de valvulopathie cardiaque ont dĂ©posĂ© plainte contre X au tribunal de grande instance de Nanterre pour « tromperie aggravĂ©e sur la nature, la qualitĂ© substantielle et la composition du produit », « mise en danger de la vie d’autrui », « administration de substance nuisible » et « homicide involontaire »[5]. La plainte est dĂ©posĂ©e auprès du parquet de Nanterre, car le siège social des laboratoires Servier se trouve dans les Hauts-de-Seine. Elle va ĂŞtre instruite par le pĂ´le de santĂ© publique du TGI de Paris. La FĂ©dĂ©ration nationale de la mutualitĂ© française, reprĂ©sentĂ©e par Patrick Maisonneuve, dĂ©pose plainte Ă©galement[6].

L'affaire fait par la suite l'objet d'un film, La Fille de Brest, sorti en 2016, et dont l'héroïne est la pneumologue brestoise.

Quatorze prévenus et onze personnes morales sont renvoyés en correctionnelle en et le procès s'ouvre deux ans plus tard. Parmi les personnes morales, les laboratoires Servier sont accusés de « tromperie aggravée, escroquerie, blessures et homicides involontaires par violation délibérée, et trafic d'influence » et l'Agence nationale de sécurité du médicament de « blessures et homicides involontaires par négligence »[7] - [8].

L'affaire est aussi emblĂ©matique de la protection des sources d'information, pilier du journalisme d'investigation, qui a permis au Figaro de publier le 13 octobre 2010 l'Ă©tude confidentielle de la Cnam rĂ©vĂ©lant 500 Ă  1 000 dĂ©cès[9].

En , les laboratoires Servier sont reconnus coupables de « tromperie aggravĂ©e » et condamnĂ©s Ă  verser Ă  l'État une amende de 2,7 millions d'euros, et l'Agence nationale de sĂ©curitĂ© du mĂ©dicament (ANSM), jugĂ©e pour avoir tardĂ© Ă  suspendre la commercialisation du Mediator, Ă  une amende de 303 000 euros[10] - [2]. En outre, Servier est condamnĂ© Ă  indemniser l'ensemble des victimes dĂ©clarĂ©es Ă  hauteur de 180 millions d'euros environ.

Contexte de la mise sur le marché et des ventes du Mediator

Le benfluorex, commercialisé sous le nom de Mediator par les laboratoires Servier de 1976 à 2009[1], est un principe actif pharmaceutique, chimiquement proche de la norfenfluramine, une substance toxique elle-même très proche de l'amphétamine[11]. De 1976 à 2009, près de deux millions de personnes ont fait l'objet d'une prescription de Mediator[12].

Le benfluorex a été commercialisé notamment comme médicament indiqué dans le traitement du diabète de type 2, dit « gras » (car associé à une surcharge pondérale). Il a également été prescrit, hors indications thérapeutiques remboursables, aux patients désireux de perdre du poids[13]. Une conséquence de la prescription hors AMM est que la remontée des informations de pharmacovigilance (effets indésirables) s'en trouve réduite, les médecins pouvant craindre — s'agissant de prescriptions hors AMM — l'engagement de leur responsabilité[14].

Les laboratoires Servier ont vendu du au « un total de 134 458 828 unitĂ©s de Mediator en France. Ces ventes ont gĂ©nĂ©rĂ© un chiffre d’affaires de près de 500 millions d’euros. Le nombre de patients traitĂ©s entre 1976 et 2009 est estimĂ© Ă  5 millions, avec une durĂ©e moyenne de prise du produit d’environ dix-huit mois. Trois millions de mois de traitement ont Ă©tĂ© dĂ©livrĂ©s entre 2002 et 2007. Plus de 300 000 patients s'en voyaient prescrire chaque annĂ©e. Sept millions de conditionnements ont Ă©tĂ© vendus chaque annĂ©e[15]. »

Chronologie de l'affaire

Le 15 fĂ©vrier 2010, la pneumologue Irène Frachon (centre hospitalier universitaire de Brest) et cinq co-auteurs soumettent un article Ă  la revue PLoS ONE, acceptĂ© pour publication le 15 mars et publiĂ© le 12 avril, suggĂ©rant que le benfluorex (la molĂ©cule commercialisĂ©e sous le nom de Mediator par Servier) cause des rĂ©gurgitations mitrales (pathologie cardiaque la plus frĂ©quente chez l'humain)[16]. Dans la foulĂ©e, Frachon publie un livre chez l'Ă©diteur Dialogues, Mediator 150 mg : combien de morts ?, qui sort en juin et marque le dĂ©but du retentissement mĂ©diatique de l'affaire.

Mi-, deux informations judiciaires contre X ont été confiées à trois juges d'instruction du pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Paris : Anne Marie Bellot, Pascal Gand et Franck Zientara. Le , le procureur de la République annonçait l'ouverture de deux informations judiciaires. La première visait les chefs de « tromperie aggravée par la mise en danger de l'homme », ainsi que ceux d'ingérence et de prise illégale d'intérêt pour la période du (date de la demande d'AMM) et jusqu'au (date du retrait définitif du marché). La seconde information concernait des faits présumés « d'homicides involontaires par violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement et de blessures involontaires aggravées ayant entraîné une incapacité »[17].

Le Jacques Servier est mis en examen pour tromperie et escroquerie en raison de la commercialisation d'un médicament présenté comme un antidiabétique, alors qu'il s'agissait essentiellement d'un anorexigène de nature amphétaminique, ce qui permettait de bénéficier de la prise en charge par l'Assurance maladie et les mutuelles. Cette commercialisation est susceptible de constituer une escroquerie.

Le , la Cour de cassation suspend deux instances, dans l'attente que soit réglée une demande de Servier de regroupement à Paris : la citation directe déposée à Nanterre et l'instruction menée par les juges d'instruction du pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Paris. Si la demande avait dû aboutir, le premier procès pénal du Mediator, prévu à Nanterre dans six mois, eut été annulé, dans l'attente d'un procès à Paris d'ici plusieurs années[18].

Fin 2011, la Cour de Cassation rejette le regroupement des procédures concernant le Mediator ; fin , les juges parisiens se sont déclarés compétents pour instruire le dossier.

Lors du premier procès pénal devant le tribunal correctionnel de Nanterre, le , la défense de Jacques Servier demande l'annulation ou le renvoi de l'audience, notamment via deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC)[19] - [20].

Le , la Cour de cassation décide de ne pas transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée par la défense des laboratoires Servier (qui avait entraîné en mai le report du premier procès pénal). Cette décision devrait permettre de fixer de nouvelles dates de procès, lors d’une audience de procédure prévue le devant le tribunal correctionnel de Nanterre[21].

Le , une victime du Mediator (benfluorex) saisit la Cour de justice de la République (CJR) d'une plainte visant quatre anciens ministres de la Santé (1993-2007)[22].

Le , Jacques Servier est mis en examen pour homicides et blessures involontaires dans le cadre d'un des volets de l'enquĂŞte sur le Mediator conduite Ă  Paris[23].

Le , dans le cadre d'une information judiciaire pour tromperie et conflits d'intérêts, Jean-Michel Alexandre est mis en examen. Jean-Michel Alexandre a été président de la commission d'AMM à l'Agence du médicament de 1985 à 1993, puis directeur de l'évaluation des médicaments de 1993 à 2000 et président du comité des médicaments de l'Agence européenne du médicament de 1995 à 2000[24] - [25].

En , Jean-Philippe Seta est mis en examen pour « obtention indue d'autorisation », « tromperie sur les qualités substantielles du Mediator avec mise en danger de l'homme » et « escroquerie », ainsi que pour « trafic d'influence » sur des soupçons d’intervention dans la rédaction du rapport sénatorial de (instruction menée au pôle santé publique de Paris)[26].

Le le tribunal correctionnel de Nanterre a décidé de reporter à nouveau le procès du Mediator d'au moins un an, après avoir ordonné un supplément d'information. La date d'une reprise du procès, qui vise Servier pour « tromperie aggravée », pourrait être fixée lors d'une audience le [27]. Jacques Servier répond à Nanterre de faits de « tromperie aggravée », dans le cadre d'une citation directe. Mais en parallèle, deux juges spécialisés dans les affaires de santé publique instruisent au tribunal de Paris les mêmes faits, leur saisine étant plus étendue. En conséquence, pour les avocats du Laboratoire, Nanterre doit « lâcher l'affaire pour Paris ». Effectivement, la présidente de la 15e chambre, Isabelle Prévost-Desprez, a jugé que le tribunal était dans l'impossibilité de prendre une décision en l'état, demandant que « la totalité du dossier » de l'instruction en cours à Paris lui soit transmise, une fois terminée.

Le , une Poitevine de 59 ans, dont une pathologie cardiaque a été liée à l'usage du médicament Mediator, a renoncé à poursuivre les laboratoires Servier, avec lesquels elle avait passé un accord portant sur une transaction importante, une des premières du dossier[28].

Le , la justice espère clore l'enquête sur l'affaire Mediator mi-. Les deux procédures en cours seront jointes, afin de permettre la tenue d'un grand procès en 2015 et d'étudier la responsabilité de l'ensemble des acteurs de l'affaire. Pour accélérer l'enquête, le procureur de Paris a décidé de se concentrer sur 328 victimes pour lesquelles « toutes les investigations, notamment médico-légales, étaient terminées sans soulever de contestations de la part de la défense ». Pour 49 de ces victimes, un lien de cause à effet a pu être mis en évidence entre les pathologies observées et la prise de Mediator[29].

Le , parmi les 15 personnes mises en examen à ce jour, 8 sont des experts ou des dirigeants de l’agence du médicament qui ont eu des activités de conseil pour Servier[30].

Le , treize victimes du Mediator obtiennent la reconnaissance par la justice de la responsabilité de l’État, le tribunal administratif jugeant que son retrait aurait dû être ordonné par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) dès que le premier cas de valvulopathie cardiaque a été imputé au médicament[31].

Le , le tribunal de grande instance de Nanterre reconnaît la responsabilité civile des laboratoires Servier, pour avoir laissé sur le marché un médicament « défectueux », dont ils ne pouvaient « pas ignorer les risques ». Le tribunal a estimé qu'en 2003 et 2006, « l'état des connaissances scientifiques ne permettait pas d'ignorer les risques d'hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) et de valvulopathies induits par le benfluorex », et « la seule suspicion de ces risques » obligeait le laboratoire « à en informer les patients et les professionnels de santé », notamment dans la notice d'utilisation[32]. Le jugement est confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Versailles, le [33], puis par un arrêt de la Cour de cassation du [34].

Le , le parquet de Paris, demande le renvoi du groupe Servier devant le tribunal correctionnel pour « tromperie aggravée, escroquerie, blessures et homicides involontaires et trafic d'influence »[35]. Dans son réquisitoire, le parquet estime que les laboratoires Servier ont mis en place une stratégie pour dissimuler le caractère anorexigène du médicament et n'ont pas signalé les risques d'hypertension artérielle pulmonaire et ceux de lésions des valves cardiaques qui lui sont imputables[36]. Outre l’entreprise Servier, le parquet a demandé que soient jugées l'Agence du médicament, dix autres personnes morales et quatorze personnes physiques[37]. Fin , les juges d'instruction ont renvoyé les Laboratoires Servier et l'Agence du médicament devant le tribunal correctionnel de Paris[38] - [39].

Le , une audience fixe le procès du à . Les débats durent six mois et sont interrompus par la pandémie de coronavirus[40]. Le procès s'achève le 6 juillet 2020[41].

Le jugement est prononcé par le tribunal de Paris en .

Rapports officiels

L'affaire du Mediator a fait l'objet d'une mission parlementaire du Sénat[42] et d'un rapport de l'Igas (dirigé par Anne-Carole Bensadon, Étienne Marie et Aquilino Morelle)[43]. Le rapport de l’Igas ne souligne que la dissimulation par Servier de la nature amphétaminique du Mediator, les autorités sanitaire n’étant, selon lui, que les victimes de l’industriel[44]. Xavier Bertrand, ministre de la Santé au moment où éclate le scandale, en 2010, avait choisi Aquilino Morelle comme inspecteur Igas pour cette mission. Celui-ci est un « vieil ami de Didier Tabuteau », directeur de l’Agence du médicament durant ces années, avec qui il a écrit un ouvrage intitulé La Santé publique (2010) et tous les deux enseignent à Sciences Po au sein de la chaire santé, dont le responsable est Didier Tabuteau. C’est le rapport Igas qui servira de canevas à l’information judiciaire[44]. Selon Le Figaro, le rapport de l’Igas rendu public le 15 janvier 2011 fait l’impasse sur la période Tabuteau à l’Agence et, d'une manière générale, exonère les autorités sanitaires comme les politiques de toute responsabilité[44].

Procès et condamnations

Le procès pĂ©nal s'ouvre le , devant durer six mois. Selon l’ordonnance de renvoi, la prise de Mediator a entraĂ®nĂ© « entre 3 100 et 4 200 hospitalisations pour insuffisance valvulaire », « entre 1 700 et 2 350 chirurgies de remplacement valvulaire » et, finalement, « entre 1 520 et 2 100 dĂ©cès »[45].

Le procès regroupe près de 4 129 victimes, 376 avocats et 25 prĂ©venus (dont 11 personnes morales)[46]. Les laboratoires Servier doivent rĂ©pondre de « tromperie aggravĂ©e, escroquerie, blessures et homicides involontaires et trafic d’influence » et l’Agence nationale de sĂ©curitĂ© du mĂ©dicament (ANSM) de « blessures et homicides involontaires » devant le tribunal correctionnel de Paris[47].

Le procès, devant se terminer fin , est suspendu de mars à juin à cause de la pandémie de Covid-19[48].

Le procès terminĂ© en , la dĂ©cision des juges sur la responsabilitĂ© des prĂ©venus, ainsi que sur les demandes d'indemnisation des victimes et des organismes de protection sociale, est reportĂ©e en [49] - [50]. Le , les laboratoires Servier sont condamnĂ©s Ă  2,7 millions d'euros d'amende pour « tromperie aggravĂ©e » et « homicides et blessures involontaires », l'Agence nationale de sĂ©curitĂ© du mĂ©dicament (ANSM), jugĂ©e pour avoir tardĂ© Ă  suspendre la commercialisation du Mediator, est condamnĂ©e Ă  une amende de 303 000 euros[2] - [51]. En outre, sur les 6 500 parties civiles qui s'Ă©taient constituĂ©es, celles dĂ©clarĂ©es recevables se voient attribuer plus de 180 millions d'euros de dommages et intĂ©rĂŞts[2]. NĂ©anmoins, Servier est relaxĂ© du chef d'escroquerie pour cause de prescription[2] - [51].

Le parquet de Paris fait appel de la relaxe partielle des laboratoires Servier ("obtention indue d’autorisation de mise sur le marché » et d’« escroquerie »)[52]. Les laboratoires Servier font appel de leur condamnation[53]. Le procès en appel s'ouvre le 9 janvier 2023, pour une durée de 6 mois. La fin des débats est prévue le 28 juin 2023[54].

Une instruction pour « homicides et blessures involontaires » devait donner lieu à un second procès[52].

Personnes et institutions mises en cause

Personnes physiques

Douze personnes physiques sont jugées[55].

  • Christian Bazantay, ancien secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de Servier[56].
  • Jean-Philippe Seta, ancien directeur opĂ©rationnel de Servier[57].
  • Alain Le Ridant, pharmacien Servier.
  • Emmanuel Canet, responsable de la recherche et du dĂ©veloppement au laboratoire Servier.
  • Marie-ThĂ©rèse Hermange, ancienne sĂ©natrice, rapporteur du rapport sĂ©natorial sur le Mediator de 2011, mise en examen pour trafic d'influence[58] ou complicitĂ© de trafic d'influence[55] (selon les sources).
  • Claude Griscelli, professeur de mĂ©decine, soupçonnĂ© d'avoir fait modifier le rapport sĂ©natorial sur le Mediator de 2011 par Marie-ThĂ©rèse Hermange. Mis en examen pour trafic d'influence[55] :
    • consultant mĂ©dical au laboratoire Servier pour 90 000 euros/an[59] ;
    • crĂ©ateur et ancien prĂ©sident de la fondation Wyeth qui a commercialisĂ© l'IsomĂ©ride de Servier (dexfenfluramine) aux États-Unis[60].
  • Jean-Michel Alexandre, prĂ©sident de la commission d’autorisation de mise sur le marchĂ© (AMM) au ministère de la SantĂ© de 1985 Ă  1993, puis directeur de l’évaluation du mĂ©dicament de l’Agence du mĂ©dicament de 1993 Ă  2000. Ă€ sa retraite, il devient consultant pour Servier au travers d’une sociĂ©tĂ©-Ă©cran, rĂ©munĂ©rĂ© plus de 1,1 million d’euros pour la pĂ©riode 2001-2009[59]. Il est soupçonnĂ© d'avoir Ă©tĂ© mis sous influence financière par Servier lorsqu'il Ă©tait fonctionnaire[55].
  • Eric Abadie (dĂ©cĂ©dĂ©), directeur de l’évaluation Ă  l’Afssaps Ă  partir de 2007, chargĂ© de la pharmacovigilance, mis en cause pour avoir cachĂ© que son Ă©pouse Ă©tait l’avocate des laboratoires Servier[55].
  • Dominique Maraninchi, mis en examen pour homicides et blessures involontaires comme reprĂ©sentant lĂ©gal de l’ANSM.
  • Michel Detilleux, Jean-Roger Claude et Bernard Rouveix : experts rĂ©munĂ©rĂ©s par Servier qui siĂ©geaient simultanĂ©ment Ă  des commissions des autoritĂ©s de santĂ© statuant notamment sur des produits du groupe pharmaceutique, ils sont mis en examen pour « prise illĂ©gale d’intĂ©rĂŞts »[55].
  • Jacques Massol, ancien membre de la Haute AutoritĂ© de santĂ© et de la direction gĂ©nĂ©rale de la SantĂ©, et François Lhoste, ancien chargĂ© de mission au ministère de la SantĂ©, sont mis en examen pour « prise illĂ©gale d’intĂ©rĂŞts »[55].

Didier Tabuteau, directeur de l'Afssaps de 1993 à 1997, signataire en 1995 d'une note autorisant les laboratoires Servier à poursuivre la vente du Mediator[61] - [62] - [63], est convoqué au procès en tant que témoin.

Personnes morales

Onze personnes morales sont jugées[55].

  • Dix personnes morales du groupe Servier ; la maison-mère et neuf de ses filiales sont mises en examen, notamment pour « tromperie aggravĂ©e », « homicides et blessures involontaires », et « escroquerie » au prĂ©judice de la SĂ©curitĂ© sociale et des mutuelles[55].
  • L'Agence nationale de sĂ©curitĂ© du mĂ©dicament et des produits de santĂ© (ANSM), qui Ă©tait encore l'Agence française de sĂ©curitĂ© sanitaire des produits de santĂ© (Afssaps) au moment des faits, mise en examen pour « homicides et blessures involontaires » pour avoir tardĂ© Ă  suspendre l’autorisation de mise sur le marchĂ© (AMM) du mĂ©dicament[55].

Autres personnes mises en cause

En outre, en 2016, Irène Frachon apporte, à l'aide de documents, la preuve des liens d’intérêts entre l’Inserm, alors dirigé par Claude Griscelli, le « relecteur officieux du rapport sénatorial », et le groupe Servier :

  • La Fondation de recherche sur l’hypertension artĂ©rielle (FRHTA), fondĂ©e par Jean-Philippe Seta, le bras droit de Jacques Servier, et animĂ©e par Alain Tedgui de l’Inserm, est financĂ©e par Servier.
  • Le centre de recherche cardiovasculaire de l’hĂ´pital europĂ©en Georges-Pompidou animĂ© par Alain Tedgui, est « sponsorisĂ© » par Servier.
  • Le professeur Philippe Ravaud, autre chercheur Inserm, appointĂ© par Servier avant le retrait du Mediator, est « Ă©pinglĂ© » par l’Igas (Inspection gĂ©nĂ©rale des affaires sociales)[64].

Indemnisations des victimes

Le Mediator est accusĂ© d’avoir causĂ© la mort de 1 500 Ă  2 100 personnes, sans compter celles qui souffrent encore dix ans après des consĂ©quences des effets secondaires[65].

Ă€ la date d', les laboratoires Servier versent plus de 115 millions d'euros aux victimes du Mediator : 3 600 patients reçoivent une offre d'indemnisation[66].

En , le laboratoire saisit le tribunal administratif pour demander à l’État le remboursement de 30 % des sommes déjà versées aux victimes pour cette indemnisation[67].

En 2020, les caisses d'assurance maladie exigent le remboursement de 450 millions d'euros par Servier[68].

À la suite de la condamnation de , les laboratoires Servier devront verser plus de 180 millions d’euros aux victimes en réparation des préjudices subis, selon les premiers calculs effectués par des avocats[65].

Conséquences institutionnelles

Adoptée en 2011 à la suite de ce scandale, la loi Bertrand vise à prévenir les conflits d’intérêts et à renforcer l’indépendance de l’expertise sanitaire publique, en obligeant les professionnels de santé et décideurs publics à publiquement déclarer leurs liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique[69].

En 2012, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l'Afssaps) a été remplacée par « l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé » (ANSM). Le fonctionnement de l'Agence du médicament est réformé. L'ANSM est financée par l'État et a exclu l'industrie pharmaceutique de son conseil d'administration qui comprend des parlementaires ou des représentants de l'ordre des pharmaciens[70].

Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

  1. Il était aussi présent dans les génériques Benfluorex 150 mg des laboratoires Mylan et Benfluorex 150 mg de Qualimed.
  2. « Scandale du Mediator : les laboratoires Servier et l'Agence du mĂ©dicament condamnĂ©s », sur lefigaro.fr, Le Figaro, (consultĂ© le ) : « Les laboratoires Servier sont reconnus coupables de tromperie aggravĂ©e et d'homicides et blessures involontaires, mais relaxĂ©s du chef d'escroquerie : l'amende pour le groupe est fixĂ©e Ă  2,7 millions d'euros. […] L'Agence nationale de sĂ©curitĂ© du mĂ©dicament (ANSM) n'Ă©chappe pas aux sanctions : une amende de 303.300 € lui est infligĂ©e […] Plus de 6.500 parties civiles s'Ă©taient constituĂ©es : celles qui sont dĂ©clarĂ©es recevables se voient attribuer plus de 180 millions d'euros de dommages et intĂ©rĂŞts pour les prĂ©judices moraux ou physiques engendrĂ©s par l'affaire. Loin, cependant, du milliard rĂ©clamĂ©. »
  3. « Au procès Mediator, de vieilles alertes sur un médicament qui « ne valait rien » », Le Point, (consulté le ).
  4. « Le laboratoire Servier dans la tourmente judiciaire », Le Figaro, (consulté le ).
  5. « Mediator : première plainte au pénal » [archive du ], Libération, (consulté le ).
  6. Magazine Challenges, « Mediator : « Servier doit être jugé pour l'ensemble de son œuvre » - Vidéo Dailymotion », entretien avec Patrick Maisonneuve, sur Dailymotion, (consulté le ).
  7. « Info France Inter. Mediator : les laboratoires Servier et l'Agence nationale de sécurité du médicament renvoyés en correctionnelle », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
  8. « Affaire Mediator : « l'espérance d'un procès, enfin. » dit Irène Frachon », sur France 3 Bretagne, (consulté le ).
  9. Le Mediator serait responsable de 500 Ă  1 000 dĂ©cès en France - Anne Jouan, Le Figaro, 13 octobre 2010.
  10. Vincent Roche, édité par Dominique Salomon, « Procès du Médiator : les laboratoires Servier coupables de « tromperie aggravée » », sur Destinationsanté.com, (consulté le )
  11. Rapport et annexes sur le Mediator, par l'IGAS, commandé par le ministre du Travail de l’emploi et de la santé et la secrétaire d'État chargée de la Santé, pour mettre en lumière la succession des évènements et des choix portant sur ce médicament afin de comprendre les mécanismes de prises de décision.
  12. « Mediator : Ce poison a permis à Servier de gagner 1 milliard d'euros », Le Point, 22 septembre 2019.
  13. « Le Mediator serait responsable de 500 Ă  1 000 morts en France », Le Monde, 13 octobre 2010.
  14. Nathalie Courret, « Mediator hors AMM : quelle est la responsabilité des médecins ? », sur santemagazine.fr, Santé Magazine, .
  15. « Laboratoires Servier, anatomie d’un système », Libération,‎ (lire en ligne)
  16. (en) Irène Frachon, Yves Etienne, Yannick Jobic, Grégoire Le Gal, Marc Humbert et Christophe Leroyer, « Benfluorex and unexplained valvular heart disease: a case-control study », PLOS One, PLoS, vol. 5, no 4,‎ , e10128 (ISSN 1932-6203, OCLC 228234657, PMID 20405030, PMCID 2853566, DOI 10.1371/JOURNAL.PONE.0010128)
  17. « Le parquet poursuit servier pour escroquerie », Le Figaro,
  18. « L'enquête mediator suspendue jusqu'en décembre pour raison de procédure », Le Monde,
  19. « Mediator : Servier comparaît pour "tromperie" », Le Monde,
  20. « Le premier procès du Mediator s'ouvre à Nanterre », Le Figaro,
  21. « Mediator : la Cour de cassation rejette la QPC de Servier », Libération,
  22. « Mediator : une victime dépose plainte contre quatre ministres », Le Parisien avec AFP, (consulté le )
  23. « Jacques Servier mis en examen pour homicides et blessures involontaires », Huffington Post,
  24. « Mediator : le système Servier dévoilé », Le Figaro, .
  25. « Mediator : l'enquête sur les conflits d'intérêts s'accélère », Le Point, .
  26. « Mediator : une ex-sénatrice UMP et le no 2 de Servier mis en examen », Le Figaro, .
  27. « Le procès du Mediator renvoyé à 2014 », Le Figaro,
  28. « Mediator : accord à l'amiable entre une victime et les laboratoires Servier », Le Monde avec AFP, .
  29. « Où en sont les poursuites dans l'affaire du Mediator ? », sur France Info, .
  30. « La justice cible des experts médicaux en plein conflit d'intérêts », sur mediapart.
  31. « Mediator : l’État reconnu responsable pour 13 victimes », L'Obs, .
  32. « Servier condamné : un jugement en demi-teinte », Le Figaro, .
  33. « Mediator : la responsabilité civile de Servier confirmée en appel », sur larep.fr, .
  34. « Mediator : la responsabilité civile de Servier validée », Le Figaro, .
  35. « Mediator : le parquet demande un procès pour les laboratoires Servier et l’Agence du médicament », Le Monde, (consulté le ).
  36. « Mediator : Servier et l'ANSM renvoyés devant le tribunal correctionnel », Le Point, (consulté le )
  37. « Le procès du Mediator aura lieu d’ici fin 2018 », Le Figaro, .
  38. « Mediator. Servier et l'Agence du Médicament renvoyés devant le tribunal correctionnel », sur larep.fr,
  39. « Mediator : Servier et l'Agence du Médicament renvoyés devant le tribunal correctionnel », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  40. « Au procès Mediator, l'heure des plaidoiries pour 4000 victimes, "sacrifiées sur l'autel du profit" »,
  41. « Fin du procès du scandale sanitaire du Mediator »,
  42. « Mission commune d'information sur le Mediator : compte rendu de la semaine du 21 mars 2011 », sur senat.fr (consulté le )
  43. « Enquête sur le Mediator (2011) », sur igas.gouv.fr (consulté le )
  44. Anne Jouan, Mediator : Didier Tabuteau, un «Kouchner boy» grand absent du dossier, lefigaro.fr, 10 mars 2017
  45. Éric Favereau, « Laboratoires Servier, anatomie d’un système », Libération, (consulté le ).
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Bibliographie complémentaire

Liens externes

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