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Aerojet

Aerojet était l'un des principaux fabricants de moteurs-fusées et de missiles américain avant d'être fusionnée en 2013 avec Rocketdyne pour former la société Aerojet Rocketdyne. Cette société est basée à Rancho Cordova dans le Comté de Sacramento en Californie et possède diverses divisions dans les États de Washington (Redmond), de Virginie (Orange et Gainesville) et de l'Arkansas (Camden). Aerojet appartient au groupe GenCorp et est la seule entreprise américaine à produire à la fois des moteurs à propergol solide et des moteurs à propergol liquide. Sa gamme de produits comprend un vaste choix de moteurs allant de moteurs de forte poussée utilisés sur des lanceurs de satellites ou des missiles balistiques, jusqu'aux moteurs utilisés pour le contrôle d'attitude et les manœuvres orbitales utilisés par les satellites artificiels. Ces produits incluent également des propulseurs d'appoint tels que ceux utilisés par le lanceur Atlas V. Aerojet est également en pratique le seul fournisseur américain de moteurs-fusées pour missiles tactiques. À cela s'ajoute la production et le développement d'un grand nombre de moteurs aérobies de type statoréacteur ou superstatoréacteur. Aerojet mène également des travaux de recherche dans les domaines de la propulsion ionique et des moteurs à effet Hall. Aerojet est l'une des trois entreprises américaines dédiées presque exclusivement à la production de moteurs fusées ; les deux autres sont Rocketdyne pour les moteurs à ergols liquides et ATK pour les moteurs à propergols solides.

Moteur Aerojet-General LR87 au Musée national de l'United States Air Force.

Historique

Les débuts

La société trouve ses origines dans une réunion rassemblant plusieurs chercheurs qui eut lieu en 1936 au domicile de Theodore von Kármán. Ce dernier était à l'époque directeur du Guggenheim Aeronautical Laboratory au sein de Caltech. Un certain nombre d'autres professeurs et étudiants intéressés par le domaine de l'astronautique participèrent à cette réunion dont l'astrophysicien Fritz Zwicky et le physicien Jack Parsons, expert en fusées et explosifs. Ce groupe continua à se rencontrer sporadiquement, ceci uniquement à des fins de discussion et non d'expérimentation.

Les événements se précipitèrent en 1938 quand l'armée de terre des États-Unis proposa deux contrats de recherche, l'un sur le dégel des verrières d'avion, l'autre sur l'utilisation de moteurs-fusées pour l'assistance au décollage d'aéronefs (connus sous l'acronyme JATO — Jet Assisted Take-Off). Le docteur Jerome Hunsaker du MIT sollicité en premier décida de laisser la bourse concernant les moteurs-fusées au groupe de Caltech, ayant le sentiment que ce dernier projet était trop proche de la science-fiction.

Le premier démonstrateur technique du système de décollage assisté fut testé le et consistait en un petit moteur à propergol solide cylindrique attaché sous le ventre d'un avion. La distance de décollage de l'avion fut réduite de moitié lors de l'essai, ce qui déclencha une commande de l'USAAF[Note 1] pour un prototype expérimental. Le , la société fut créée à Azusa (Californie) sous le nom de Aerojet Engineering. Les fondateurs de cette entreprise étant Frank Malina, von Kármán, Jack Parsons, Forman, Martin Summerfield, et Andrew Haley[1]. En 1943, l'Armée plaça une commande ferme pour 2000 JATO à livrer avant la fin de l'année. La compagnie développa en parallèle des moteurs-fusées à ergols liquides ainsi qu'un nouveau type de propergol solide reposant sur un nouveau type de caoutchouc utilisé comme liant développé en partenariat avec General Tire. Avec la fin de la guerre, Aerojet dut réduire drastiquement ses activités, conservant tout de même une activité de production de JATO pour des avions civils décollant depuis des terrains situés en altitude et en pays chaud.

La diversification

En 1950, les progrès dans les recherches sur les liants Ă  base de caoutchouc permirent Ă  Aerojet de dĂ©velopper des moteurs plus puissants puis de dĂ©velopper la fusĂ©e-sonde Aerobee. Cette fusĂ©e fut la première aux États-Unis Ă  pouvoir atteindre l'espace (sans pour autant permettre une mise en orbite) et rĂ©alisa plus de 1 000 vols jusqu'Ă  son retrait en 1985. L'ArmĂ©e de l'Air amĂ©ricaine qui venait juste d'ĂŞtre crĂ©Ă©e en tant qu'entitĂ© autonome, choisit Aerojet comme fournisseur principal d'un grand nombre de missiles balistiques des familles Titan et Minuteman. Aerojet fut Ă©galement le maĂ®tre d’œuvre du missile balistique Polaris pour le compte de la Marine de guerre amĂ©ricaine. Aerojet a Ă©galement conçu et produit un total de 1 182 moteurs fusĂ©es utilisĂ©s pour la propulsion des fusĂ©es Titan (dĂ©rivĂ© du missile Ă©ponyme), mises en Ĺ“uvre dans le cadre des vols habitĂ©s du programme Gemini ainsi que pour le lancement des sondes spatiales Viking, Voyager, ou encore Cassini-Huygens[2]. Pour rĂ©pondre Ă  ces demandes croissantes une usine fut construite Ă  Sacramento tandis que les locaux d'Azusa retournèrent Ă  leur vocation première de bureau d'Ă©tudes. L'un des principaux programmes de recherche ayant eu lieu Ă  Azusa portait sur le dĂ©veloppement des capteurs infrarouges utilisĂ©s par les satellites d'alerte avancĂ©e DSP. Une nouvelle branche de recherche fut Ă©galement crĂ©Ă©e sous l'appellation Aerojet Electronics, et après l'acquisition d'un certain nombre d'usines de munitions une branche Aerojet Ordnance (en français « Munition Aerojet ») fut Ă©galement fondĂ©e. Une sociĂ©tĂ© mère nommĂ©e Aerojet General fut crĂ©Ă©e pour superviser l'action de ces trois branches.

Le lancement du programme Apollo par le président Kennedy au début des années 1960 conduisit à une forte augmentation des activités civiles d'Aerojet. Après avoir perdu à plusieurs reprises des appels d'offres portant sur les moteurs des premiers étages des fusées Saturn et Nova, généralement gagnés par son rival Rocketdyne, la société fut sélectionnée pour développer et construire le moteur principal du module de commande et de service Apollo. En 1962, Aerojet fut également sélectionnée pour développer un nouvel étage supérieur pour le lanceur Saturn V qui devait être utilisé à l'issue des missions Apollo en remplacement des cinq moteurs J-2 du deuxième étage. Mais les travaux sur cet avant-projet nommé M-1 furent arrêtés en 1965 quand l'appui politique dont bénéficiait le programme spatial commença à s'estomper.

Dans les annĂ©es 1970, Aerojet dĂ©veloppa le système propulsif du deuxième Ă©tage du missile MX, les moteurs OMS (en) utilisĂ©s pour les manĹ“uvres orbitales par la navette spatiale amĂ©ricaine ainsi que les bombes Ă  sous munitions BLU-97 amĂ©ricaines. Un contrat très important pour la fabrication des munitions de 30 mm de l'avion d'attaque au sol A-10 Thunderbolt II obligea la compagnie Ă  crĂ©er deux nouveaux centres de production Ă  Downey et Chino Hills en 1978. Aerojet acquit Ă©galement durant cette pĂ©riode d'autres sociĂ©tĂ© tandis que son usine de Jonesborough dans le Tennessee dĂ©veloppa les munitions en uranium appauvri. En 2012 la sociĂ©tĂ© est toujours le principal fournisseur de ce type d'armement. Les divisions d'Ă©lectronique et de munitions d'Aerojet ont Ă©galement collaborĂ© sur les obus d'artillerie de 8 pouces anti-blindage SADARM (en) mais cette munition ne dĂ©passa par le stade du prototype.

Le ralentissement de l'activité

Les années 1980 virent une brève progression de l'activité grâce au programme de bouclier anti-missile IDS du président Reagan, mais le chiffre d'affaires d'Aerojet déclina à la fin des années 1980 et au cours des années 1990.

Les annĂ©es 1990 virent l'activitĂ© d'Aerojet atteindre son point bas, beaucoup de ses usines Ă©tant arrĂŞtĂ©es faute de commandes, par consĂ©quent la sociĂ©tĂ© chercha un moyen de rentabiliser ses actifs. Ses capacitĂ©s importantes en Ă©quipements de mĂ©langes chimiques furent louĂ©es Ă  d'autres entreprises, notamment Ă  l'industrie pharmaceutique, sous le nom d'Aerojet Fine Chemicals. La division fut plus tard vendue. Une sociĂ©tĂ© immobilière, Aerojet Real Estate, fut Ă©galement fondĂ©e pour louer les bâtiments inoccupĂ©s ou les terrains inutilisĂ©s. Aerojet possĂ©dait en effet plus de 52 km2 de terrain Ă  24 km du centre ville de Sacramento.

Ce qui subsistait des activités de recherche et développement d'Aerojet fut rassemblé au sein de la division Aerospace and Defense (ADS). Celle-ci continue de développer et de produire des moteurs-fusées solides, liquides et également des moteurs aérobies pour les missiles tactiques, stratégiques ainsi que les missiles guidés de précision ou les intercepteurs du bouclier antimissile. Ces moteurs sont à la fois des moteurs principaux ou des moteurs d'attitude et de contrôle. À cette gamme de produits s'ajoutent des charges utiles de missiles offensifs ou intercepteurs, ainsi que des éléments de structures aérodynamiques pour le chasseur F-22 Raptor ou encore des systèmes d'extinction des incendies équipant les véhicules civils ou militaires. Leurs activités spatiales incluent des moteurs liquides et solides pour des lanceurs réutilisables ou non, pour les satellites et pour des propulseurs d'appoint.

Aerojet a qualifiĂ© avec succès un moteur Ă  effet Hall de 4,5 kW basĂ© sur les technologies de la sociĂ©tĂ© Busek Corporation[3] - [4]. Aerojet est Ă©galement sous-traitant de Lockheed Martin pour le programme Advanced Extremely High Frequency de l'ArmĂ©e de l'Air amĂ©ricaine[5] - [6]. La sociĂ©tĂ© a Ă©galement procĂ©dĂ© Ă  des Ă©tudes sur des systèmes mono-ergols Ă©cologiques avec un succès mitigĂ© mĂŞme si les moteurs HAN produits pour l'Air Force ont dĂ©montrĂ© que le concept Ă©tait viable[7] - [8] - [9] - [10].

Aerojet de nos jours

Depuis le dĂ©but du XXIe siècle, Aerojet a connu une pĂ©riode de croissance entre 2002 et 2008. Fin 2008, Aerojet employait plus de 3 500 collaborateurs. DĂ©veloppĂ© par la sociĂ©tĂ©, le moteur du deuxième Ă©tage du lanceur Delta II, dont le vol inaugural a eu lieu en 1960, a Ă©tĂ© utilisĂ© sans rencontrer d'Ă©chec au cours de 268 missions au . Avec le programme Constellation, la NASA dĂ©cida de dĂ©finir comme objectif sur le long terme de retourner sur la Lune puis d'envoyer de missions vers Mars. Dans ce contexte Aerojet fut choisi pour produire et dĂ©velopper le système propulsif du vaisseau Orion mais le programme est abandonnĂ© en 2010.

Aerojet possèdent alors des établissements dans les villes suivantes :

En 2012, Aerojet appartient au groupe GenCorp. GenCorp était connue jusqu'en 1984, sous l'appellation General Tire & Rubber Company et est basée à Rancho Cordova.

En , la NASA a pré-sélectionné Aerojet comme fournisseur de systèmes de lancement lourd et le développement des technologies propulsives dans le domaine de la propulsion[11].

Fusion avec Rocketdyne

La société Aerojet a été fusionnée en 2013 avec l'autre grand motoriste américain historique Rocketdyne rachetée à Pratt & Whitney par GenCorp pour former la société Aerojet Rocketdyne.

Le complexe et canal de Floride

Au milieu des annĂ©es 1960, la technologie de propulsion solide d'Aerojet Ă©tait Ă  l'Ă©tude pour le premier Ă©tage du lanceur Saturn V. Le moteur ainsi conçu Ă©tait constituĂ© d'un pain de propergol d'une seule pièce de 6,4 mètres de diamètre qui ne pouvait ĂŞtre transportĂ© par rail. Un complexe a Ă©tĂ© construit dans les Everglades pour que les moteurs puissent ĂŞtre testĂ©s et assemblĂ©s puis transportĂ©s par barge jusqu'Ă  Cape Canaveral. Un canal fut creusĂ© — le canal C-111 — qui constitue le canal d'eau douce le plus au sud de la Floride du Sud Est. Un pont basculant a Ă©galement Ă©tĂ© mis en place sur l'autoroute U.S. Route 1 au mile 116. Ce canal a Ă©tĂ© surnommĂ© le « canal Aerojet ». La proposition d'Aerojet pour Saturn V n'ayant pas Ă©tĂ© retenue et les propulseurs d'appoint de la navette spatiale utilisant une architecture en segment, le terrain et les installations furent rendus Ă  l’État de Floride et forment Ă  prĂ©sent une rĂ©serve naturelle. Les bâtiments et les Ă©lĂ©ments de signalisation des routes et voies navigables sont toujours visibles bien qu'endommagĂ©s par les intempĂ©ries. Plusieurs documentaires tels que Space Miami[12] ou Aerojet Dade: An unfinished journey[13] portent sur l'histoire de ces installations.

Sites contaminés

Les processus de fabrication, de test, et de retraitement des déchets en vigueur chez Aerojet ont conduit à la pollution toxique des sols et des eaux de la zone de Rancho Cordova qui a été classée en site Superfund[14]. Des solvants tels que le trichloréthylène (TCE), le chloroforme et des sous produits d'ergols tels que la N-nitrosodiméthylamine (NDMA) ou encore les perchlorates ont été détectés en 1979 dans des forages destinés à l'alimentation en eau potable creusés à proximité des installations d'Aerojet. Depuis, deux agences de l’État de Californie et l'Environmental Protection Agency (EPA) ont travaillé avec Aerojet pour s'assurer que la société réalisait les opérations de dépollution de son site. Par ordre des autorités locales et fédérales, Aerojet a installé plusieurs systèmes de pompage et de traitement des eaux contaminées en bordure de son site. Aerojet a également procédé au décapage des sols et à l'enlèvement des liquides et des boues sur le site. En 2003, les prélèvements d'eau souterraine ont révélé une contamination s'étendant jusqu'à Carmichael[15].

La découverte de la contamination en TCE des eaux souterraines par ses installations de Sacramento a amené Aerojet à vérifier l'hypothèse d'une contamination des eaux souterraines de son complexe d'Azusa où beaucoup de tests de JATO et de moteurs-fusées avaient été réalisés avant le déménagement vers Sacramento. La contamination fut confirmée en 1980 par un témoignage rendu devant le Sénat de l'État de Californie présidé par le sénateur Esteben Torres. Le site fut classé Superfund par l'EPA en 1985 sous le nom de « Site Superfund de San Gabriel »[16]. En 1997, il fut également découvert que le même site était contaminé par le NDMA et le perchlorate d'ammonium. Aerojet a vendu cette installation à Northrop Grumman en 2001.

Notes et références

Notes

  1. Structure rassemblant au sein de l'Armée de Terre les forces aériennes américaines avant la création d'une Armée de l'Air autonome en 1947.

Références

  1. (en) « Malina, Frank Joseph », American National Biography
  2. « News Releases », sur aerojet.com (consulté le ).
  3. « Aerojet Qualifies High Power Electric Propulsion System »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)
  4. "Development of the BPT family of U.S.-designed Hall current thrusters for commercial LEO and GEO applications" D. King, D. Tilley, R. Aadland, K. Nottingham, R. Smith, C. Roberts (PRIMEX Aerospace Co., Redmond, WA), V. Hruby, B. Pote, and J. Monheiser (Busek Co., Inc., Natick, MA) AIAA-1998-3338 AIAA/ASME/SAE/ASEE Joint Propulsion Conference and Exhibit, 34th, Cleveland, OH, July 13–15, 1998
  5. http://pdf.aiaa.org/preview/CDReadyMJPC2003_775/PV2003_5261.pdf
  6. Aerojet Produces New Generation of Non-toxic, Fuel-Efficient Electric Propulsion Systems | SpaceRef - Your Space Reference
  7. Gencorp News Releases
  8. Meinhardt, D., et al., “Development and Testing of New HAN-Based Monopropellants in Small Rocket Thrusters,” AIAA 98–4006, 34th AIAA/ASME/SAE/ASEE Joint Propulsion Conference, Cleveland, OH, July 1998
  9. Meinhardt, D., et al., “Performance and Life Testing of Small HAN Thrusters,” AIAA 99–2881, 35th AIAA/ASME/SAE/ASEE Joint Propulsion Conference, Los Angeles, CA, June 1999.
  10. Jankovsky, R., “HAN-Based Monopropellant Assessment for Spacecraft,” AIAA 96–2863, 32nd AIAA/ASME/SAE/ASEE Joint Propulsion Conference, Lake Buena Vista, FL, July 1996.
  11. (en) « NASA Selects Companies for Heavy-Lift Vehicle Studies », NASA (consulté le )
  12. (en) Coffee and Celluloid Productions et Borscht Corp., « Space Miami »
  13. (en) « Aerojet Dade: An Unfinished Journey »
  14. (en) « EPA Proposes a Plan to Address Groundwater Contamination in the Western Area of the Aerojet Site », California Department of Toxic Substances Control,
  15. (en) « Edge of Groundwater Contamination Plume Appears in Carmichael », United States Environmental Protection Agency,
  16. (en) « San Gabriel Valley II », US EPA, Region 9

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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