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Philosophie byzantine

La philosophie byzantine est constituĂ©e des Ɠuvres et des courants philosophiques qui se sont exprimĂ©s en grec dans l’Empire byzantin Ă  partir du IXe siĂšcle, prenant leur essor au siĂšcle suivant pour se terminer avec la chute de l’empire au XVe siĂšcle. De trĂšs forte inspiration aristotĂ©licienne, platonicienne et nĂ©oplatonicienne, elle se dĂ©marque Ă  l’occasion difficilement de la thĂ©ologie, car elle s’est voulue une redĂ©couverte, une continuation et une rĂ©interprĂ©tation de la philosophie grecque antique Ă  la lumiĂšre de la foi chrĂ©tienne telle que transmise par l’Église orthodoxe.

Le patriarche Photios considéré comme le plus grand intellectuel de son temps et celui qui donna un vif élan à la philosophie byzantine.

Origine et définition

L’éducation dans l’Empire byzantin

ThĂ©odose II crĂ©ateur du premier Ă©tablissement d’études supĂ©rieures de Constantinople.

L’éducation Ă©tait fort rĂ©pandue chez les Byzantins et le pourcentage d’hommes et mĂȘme de femmes, phĂ©nomĂšne rare en ce temps[1], sachant lire et Ă©crire plus Ă©levĂ© qu’en Europe ou dans les pays arabes. L’instruction primaire (propaideia) gratuite Ă©tait aisĂ©ment disponible, mĂȘme dans les villages; l’éducation secondaire (paideia – Ă©lĂšves de 10 Ă  17 ans), payante, se faisait dans une Ă©cole oĂč le maitre avec quelquefois l’aide d’un assistant enseignaient le trivium (grammaire/gĂ©omĂ©trie/astronomie) et les rudiments du quadrivium (arithmĂ©tique/gĂ©omĂ©trie/astronomie et musique) grĂące Ă  l’assimilation de textes de l’AntiquitĂ© classique [2].

Le domaine des Ă©tudes supĂ©rieures comprenait gĂ©nĂ©ralement la rhĂ©torique, la philosophie et le droit. Son but Ă©tait de former des fonctionnaires compĂ©tents tant pour l’État que pour l’Église, du moins jusqu’à ce que cette derniĂšre crĂ©e sa propre universitĂ© (École patriarcale) consacrĂ©e Ă  la formation du clergĂ©[3] - [4].

Le premier Ă©tablissement consacrĂ© aux Ă©tudes de haut niveau fut fondĂ© en 425 par l’empereur ThĂ©odose II (r. 402 – 450) sous le nom de Pandidakterion (en grec byzantin: ΠαΜΎÎčΎαÎșÏ„ÎźÏÎčÎżÎœ). Il comprenait trente-et-une chaires consacrĂ©es au droit, Ă  la philosophie, Ă  la mĂ©decine, Ă  l’arithmĂ©tique, Ă  la gĂ©omĂ©trie, etc., quinze d’entre elles enseignĂ©es en latin, seize en grec[5].

Le conflit entre foi chrétienne et philosophie païenne

Jean DamascÚne, théologien et un des fondateurs de la philosophie byzantine chrétienne.

Lorsque les Ă©lites grecques converties au christianisme se mirent Ă  l’étude des classiques grecs, une confrontation Ă©tait inĂ©vitable entre la « vraie philosophie » i.e. chrĂ©tienne et la « fausse philosophie » i.e. paĂŻenne. Toutefois, et contrairement Ă  ce qui se produira en Occident, ni les philosophes, ni les thĂ©ologiens byzantins ne rejetteront complĂštement les Anciens, mais tĂącheront plutĂŽt de les utiliser Ă  leurs fins. La meilleure illustration de cette approche est sans doute le traitĂ© de Basile de CĂ©sarĂ©e (330-379) « Discours aux jeunes gens sur la meilleure façon de tirer profit des auteurs paĂŻens » [6]. Cette modĂ©ration (economia) ne fut toutefois pas l’apanage de tous. Au dĂ©but de la christianisation, l’empereur Julien (r. 360-363) tentera non seulement de restaurer la culture grecque antique, mais Ă©galement la religion ancestrale, alors qu’au Ve siĂšcle le prĂ©fet de Constantinople, Kyros Panopolites, sera banni de Constantinople parce que trop « hellĂšne »[7]. Peu Ă  peu toutefois, se produira une sorte d’osmose, si bien qu’au dĂ©but du VIIIe siĂšcle, Jean DamascĂšne (vers 676 – 749), moine et thĂ©ologien d’origine syriaque mais de langue grecque, pourra dĂ©finir la philosophie comme :

  1. la connaissance des choses (onta) qui existent,
  2. la connaissance des choses divines et humaines,
  3. la préparation (melete) à la mort,
  4. l’assimilation à Dieu,
  5. l’art (techne) de l’art et la science des sciences et
  6. l’amour de la sagesse.

Ces dĂ©finitions Ă©taient tirĂ©es d’Aristote (1) et (5), des StoĂŻques (2) et de Platon (3) et (4); elles avaient Ă©tĂ© rassemblĂ©es par des nĂ©oplatoniciens de l’école d’Alexandrie comme Ammonios d’Alexandrie (mystique chrĂ©tien du IIIe siĂšcle ) , Davit Anhaght (philosophe armĂ©nien des VIe siĂšcle et VIIe siĂšcle) et Élias d’Alexandrie (philosophe de l’École d’Alexandrie VIe siĂšcle). Jean DamascĂšne rĂ©sumait lui-mĂȘme cette pensĂ©e en termes simples : « La philosophie est amour de la sagesse mais la vraie sagesse est Dieu. L'amour de Dieu est donc la vraie philosophie. » [8].

Quoique de façon arbitraire, on peut diviser l’évolution de la philosophie byzantine en trois pĂ©riodes, chacune commençant par l’établissement ou la refondation d’une grande Ă©cole : fin de la dynastie amorienne, dĂ©but de la dynastie macĂ©donienne (842-959); fin de la dynastie macĂ©donienne, dĂ©but de la dynastie comĂ©nienne (1042-1143), et dĂ©but de la dynastie palĂ©ologienne (1259-1341)[8]. De façon tout aussi arbitraire, on pourrait dire que la premiĂšre pĂ©riode fut consacrĂ©e surtout Ă  colliger et Ă  recopier les auteurs anciens, la deuxiĂšme Ă  commenter, paraphraser et critiquer ceux-ci, alors que la troisiĂšme marquĂ©e par les tentatives de rapprochement entre les Églises de Constantinople et de Rome, verra chez la plupart des philosophes une certaine distanciation permettant la critique des auteurs antiques lorsqu’ils s’écartent du dogme officiel, ou au contraire chez certains, l’adoption des Anciens aux dĂ©pens de la doctrine de l’Église.

Historique

Les précurseurs

On peut trouver les fondements de la philosophie byzantine chez Proclus, philosophe nĂ©oplatonicien, nĂ© Ă  Constantinople en 412 dans une riche famille, ce qui lui permit d’aller Ă©tudier la philosophie Ă  Alexandrie, puis Ă  AthĂšnes auprĂšs de Plutarque le jeune, fondateur de l’école nĂ©oplatonicienne de cette ville. Il deviendra le troisiĂšme recteur de cette mĂȘme Ă©cole en 438 et entreprendra la plus vaste synthĂšse philosophique de la toute fin de l'AntiquitĂ© grecque[9]. Avec son disciple, Ammonios qui fonda sa propre Ă©cole Ă  Alexandrie, ils fixeront le curriculum philosophique et y apporteront d’importantes contributions dont la thĂ©orie sur la structure et la rĂ©alitĂ© [8].

PremiÚre période : 843-959

PremiÚre page de la Souda, ouvrage illustrant la transformation de la philosophie en « savoir encyclopédique » à la fin de la premiÚre période.

Au sortir de la crise iconoclaste (726-843), alors que la vie intellectuelle revenait Ă  la normale et laissait prĂ©sager la Renaissance macĂ©donienne, l’empereur Michel III (r. 842-867) laissa pendant dix ans les commandes du pouvoir Ă  son oncle, le cĂ©sar Bardas[10]. Lui-mĂȘme intellectuel compĂ©tent, le cĂ©sar dĂ©cida entre 855 et 866 de crĂ©er une institution d’enseignement qu’il logea dans le palais de la Magnaure et dont il confia la direction Ă  LĂ©on le philosophe aussi connu comme LĂ©on le mathĂ©maticien[11].

DouĂ© d’une grande soif de connaissance, LĂ©on s’était initiĂ© dans sa jeunesse Ă  toutes les sciences connues, c’est-Ă -dire « « la philosophie et ses sƓurs, Ă  savoir l'arithmĂ©tique, la gĂ©omĂ©trie et l'astronomie, et mĂȘme la musique (c'est-Ă -dire les disciplines du quadrivium)[12]», avant d’ouvrir Ă  Constantinople son Ă©cole, installĂ©e dans une maison particuliĂšre, oĂč il enseignait toutes les disciplines intellectuelles Ă  des fils de riches familles qui se destinaient Ă  des carriĂšres de fonctionnaires. Sa rĂ©putation de savant Ă©tait telle qu’elle parvint aux oreilles du calife al-Mamun Ă  Bagdad, lequel pria l’empereur ThĂ©ophile de permettre Ă  LĂ©on de venir Ă  sa cour[13]. Par patriotisme ou par prudence, LĂ©on refusa la proposition et fut nommĂ© vers 840 mĂ©tropolite de Thessalonique. DĂ©posĂ© en 843 parce qu’iconoclaste avec Jean le Grammairien lors du rĂ©tablissement du culte des images, il fut choisi par le cĂ©sar Bardas pour diriger son Ă©tablissement d’éducation. On sait peu de choses sur cette institution[N 1] qui devait donner une impulsion nouvelle Ă  l’étude des auteurs antiques, sinon que LĂ©on devait y enseigner la philosophie aristotĂ©licienne avec l’aide de trois collĂšgues dont on ne connait que les noms et les fonctions : ThĂ©odore (ou Serge), spĂ©cialisĂ© en gĂ©omĂ©trie, ThĂ©odĂšgios, en arithmĂ©tique et en astronomie, et KomĂštas, en grammaire[14] - [15] - [10].

Avec LĂ©on Ă©merge la figure d’une personnalitĂ© plus soucieuse de philosophie et de science que de belles-lettres comme en tĂ©moigne sa bibliothĂšque : Platon pour la philosophie, un traitĂ© de mĂ©canique dĂ» Ă  Kyrinos et Markellos pour les mathĂ©matiques et des volumes de ThĂ©on, Paul d’Alexandrie et PtolĂ©mĂ©e pour l’astronomie alors indissociable de l’astrologie [16].

Le deuxiĂšme grand personnage de cette gĂ©nĂ©ration fut le patriarche de Constantinople, Photios Ier, une des plus importantes figures des Ă©tudes classiques de l’histoire byzantine [17] - [18]. D’un savoir encyclopĂ©dique[N 2], et probablement autodidacte, il avait commencĂ© sa carriĂšre comme enseignant avant d’ĂȘtre nommĂ© vers 850 prĂŽtoasĂškrĂštis, c'est-Ă -dire chef de la chancellerie impĂ©riale. C’est la fonction qu’il occupait lorsqu’il fut nommĂ© patriarche en 858 bien que laĂŻc. Il reçut l’ensemble des ordres ecclĂ©siastiques en six jours, contrairement aux prescriptions du droit canonique, ce qui lui valut d’ĂȘtre dĂ©savouĂ© par le pape Nicolas Ier[19]. La querelle entre les Églises de Constantinople et de Rome prit de l’ampleur aprĂšs l’assassinat du cĂ©sar Bardas par Basile le MacĂ©donien (r. 867-886). Photios convoqua Ă  l'Ă©tĂ© 867 un synode qui dĂ©clara la papautĂ© et l'Église latine hĂ©rĂ©tiques[20]. Mais la mĂȘme annĂ©e Basile faisait assassiner Michel III, renvoyait Photios et le remplaçait par Ignace qui retrouvait son trĂŽne. ExilĂ© au monastĂšre de Stenos, il finit par se rĂ©concilier avec l’empereur qui en fit le prĂ©cepteur de son hĂ©ritier, le futur LĂ©on VI (r. 886 – 912), dont les relations avec son pĂšre Ă©taient exĂ©crables. Aussi, dĂšs que LĂ©on eut pris le pouvoir, il se hĂąta de se dĂ©faire de Photios dont la carriĂšre fut brisĂ©e. DĂ©mis de ses fonctions, Photios fut envoyĂ© en exil oĂč il devait mourir[21].

Sa pensĂ©e se retrouve dans trois Ɠuvres principales : le Lexicon, Ɠuvre de jeunesse dans laquelle il explique le sens de mots que l’on retrouve chez les orateurs et auteurs de prose de l’AntiquitĂ© ainsi que le vocabulaire d’auteurs chrĂ©tiens qui exige une explication[22] - [23]; la Bibliotheca ou Myriobiblos, Ɠuvre Ă©norme comportant 280 chapitres correspondant Ă  1600 pages dans l’édition moderne, Ă©crite Ă  l’intention de son frĂšre Tarasios et rĂ©sumant la littĂ©rature grecque ancienne qu’il avait lue en l’absence de celui-ci envoyĂ© en ambassade [24] - [25]; les lettres dont certaines seront reprises dans le Amphilochia, adressĂ©es Ă  Amphilohios, mĂ©tropolitain de Kyzikos, traitant de diverses questions thĂ©ologiques et laĂŻques : outre des commentaires sur les CatĂ©gories d’Aristote, on y retrouve des discussions sur l’admiration profĂ©rĂ©e par l’empereur Julien Ă  l’endroit de Platon[26].

Un des disciples de Photios, fut l’archevĂȘque de CĂ©sarĂ©e, ArĂ©thas (vers 850-932/944) qui commenta les CatĂ©gories d’Aristote et l’Isagogē de Porphyre, surtout connu pour avoir colligĂ© et fait recopier de nombreux textes aussi bien de l'AntiquitĂ© classique que d’auteurs chrĂ©tiens de l'Ă©poque patristique, notamment le corpus de Platon.

Sans ĂȘtre lui-mĂȘme un philosophe, Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte (r. 913-959) utilisera les leviers de l'État pour stimuler les initiatives des lettrĂ©s, notamment par des copies et compilations d'Ɠuvres anciennes issues de l'AntiquitĂ© [27]. On assiste alors Ă  l’essoufflement du renouveau philosophique et Ă  sa transformation en une vaste mĂ©moire encyclopĂ©dique dont l’illustration la plus complĂšte est la Suda, Ă  la fois dictionnaire prĂ©sentant des dĂ©finitions de mots rares en grec ancien et des formes grammaticales complexes et encyclopĂ©die commentant des personnes, des lieux ou des institutions.

DeuxiÚme période : 1042-1143

Michel Psellos (Ă  gauche) avec son Ă©tudiant, l'empereur Michel VII Doukas.

La deuxiĂšme pĂ©riode s’ouvre avec l’arrivĂ©e au pouvoir de Constantin IX Monomaque (r. 1042-1055), sĂ©nateur devenu empereur aprĂšs avoir Ă©pousĂ© l’impĂ©ratrice ZoĂ© (r. 1028-1050). EntourĂ© d’intellectuels comme Jean Mavropous, Constantin LichoudĂšs, et Jean Xiphilin, son rĂšgne sera l'incarnation de ce que l'historien Paul Lemerle a qualifiĂ© de « gouvernement des philosophes »[28]. Comme la premiĂšre, cette seconde pĂ©riode dĂ©butera par la crĂ©ation d’une nouvelle Ă©cole, consacrĂ©e celle-lĂ  au droit. Constantin VII avait voulu donner une nouvelle vie Ă  l’école du cĂ©sar Bardas. À cette fin, il avait nommĂ© le protospathaire Constantin alors mystikos (dignitĂ© importante de la fonction publique dont la fonction exacte est inconnue) comme chargĂ© de la philosophie, le mĂ©tropolite de NicĂ©e Alexandre comme chargĂ© de la rhĂ©torique, le patrice NicĂ©phore de la gĂ©omĂ©trie et l’asĂšcrĂštis GrĂ©goire de l’astronomie. Une discipline manquait toutefois, essentielle dans l’empire qui se centralisait et se bureaucratisait de plus en plus, celle du droit, enseignĂ© jusque-lĂ  dans des Ă©coles privĂ©es. En 1047, Constantin IX crĂ©a une nouvelle Ă©cole qu’il confia au nomophylax ou « gardien des lois » et qu’il logea Ă©galement au palais de la Magnaure restaurĂ© [29].

Toutefois, parmi les sciences enseignĂ©es, la philosophie gardait sa position privilĂ©giĂ©e comme l’atteste le juge et historien Michel AttaleiatĂšs : « [Constantin Monomaque] donna vigueur Ă  une Ă©cole de juristes et nomma un nomophylax. Mais il s’occupa aussi de l’enseignement de la haute philosophie et nomma proĂšdre [N 3] des philosophes un homme qui nous surpassait tous par ses connaissances[30]».

Cet homme Ă©tait Michel Psellos (1018 – probablement 1078)[N 4]. Grand Ă©rudit, c’est Ă©galement un grand polygraphe, Ă©crivant sur de sujets aussi divers que l’étymologie, la mĂ©decine, la tactique, le droit, etc. Pendant ses Ă©tudes, il fit la connaissance d’hommes qui se retrouveront par la suite Ă  des postes clĂ©s de l’empire : le futur Michel VII Doukas, Jean Mavropous, Constantin LichoudĂšs, futur « premier ministre », Jean Xiphilin, futur patriarche de Constantinople. Il dut toutefois abandonner ses Ă©tudes, car sa famille Ă©tait de revenus modestes, pour aller occuper une position de juge Ă  Philadelphie en Asie mineure. À son retour Ă  Constantinople, il reprend ses Ă©tudes et enseigne la philosophie Ă  l’école Saint-Pierre (enseignement secondaire). Puis, sous Constantin IX il intĂ©gra la chancellerie impĂ©riale et devint ministre dans tous les gouvernements de Constantin IX jusqu’à Michel VII. DisgraciĂ©, il mourut dans une relative obscuritĂ©[31].

Sa pensĂ©e philosophique est contenue dans sa Chronographie relatant les Ă©vĂšnements de 976 Ă  1078, ainsi que dans les quelque 500 lettres qu’il Ă©crivit en rĂ©ponse Ă  des questions posĂ©es par ses correspondants ou Ă©tudiants puisqu’il continua Ă  enseigner mĂȘme aprĂšs ĂȘtre devenu ministre. Bien qu’il y porte une grande attention Ă  l’Ɠuvre d’Aristote, ses prĂ©fĂ©rences vont sans nul doute vers Platon et les NĂ©oplatoniciens et on reconnait qu’il fut une figure-clĂ© de la transmission de l’hĂ©ritage platonicien Ă  travers le Moyen Âge. Ses Ɠuvres montrent qu’il a lu et assimilĂ© Plotin, Porphyre, Jamblique et spĂ©cialement Proclius qu’il considĂšre comme une autoritĂ© parmi les anciens. Il trouve entre autres chez lui un systĂšme mĂ©taphysique pouvant ĂȘtre adaptĂ© au christianisme. Toutefois ses thĂ©ories, par exemple celles contenues dans les Oracles chaldaĂŻques, seront souvent vues comme contraires Ă  la thĂ©ologie orthodoxe et il dut faire une confession de foi publique pour sa dĂ©fense[32] - [33].

Son successeur comme « consul des philosophes » sera Jean Italos (nĂ© vers 1020 – mort aprĂšs 1080). NĂ© vers 1020, il s’installe Ă  Constantinople vers 1050 oĂč il suit les cours de Michel Psellos. SpĂ©cialiste de Platon, d'Aristote, de Porphyre et de Jamblique, il commence alors une carriĂšre de professeur au monastĂšre de la ThĂ©otokos de PĂšgĂš. Sa renommĂ©e augmentant sous le rĂšgne de Michel VII, il fut nommĂ© pour succĂ©der Ă  son ancien maitre comme « consul des philosophes ». AprĂšs un sĂ©jour en Italie comme ambassadeur auprĂšs des Normands, il rentre Ă  Constantinople, mais en 1076/1077 un synode condamne ses thĂ©ories qui auraient mĂ©connu les limites imposĂ©es Ă  la raison naturelle et le juste rapport entre philosophie et thĂ©ologie[N 5]. MontĂ© sur le trĂŽne, Alexis Ier entreprit de combattre l’hĂ©rĂ©sie Ă  tous les niveaux et, contre l’avis du patriarche, fit Ă  nouveau condamner Italos Ă  la suite d’un procĂšs que Kaplan qualifie de « stalinien ». Interdit d’enseignement, il fut exilĂ© [34] - [33].

En fait, les positions d’Italos n’étaient pas tellement Ă©loignĂ©es de celles de Psellos; ce qui semblait inacceptable aux yeux des autoritĂ©s politiques et religieuses de l’époque Ă©tait son approche rationaliste de doctrines que l’Église orthodoxe considĂ©rait se situer au-delĂ  de la comprĂ©hension humaine et que seule l’Église avait pouvoir de dĂ©terminer. En d’autres termes, Italos suivait la conception des Anciens selon laquelle la thĂ©ologie Ă©tait une partie intĂ©grante de la philosophie et non une discipline autonome [35].

Le deuxiĂšme successeur de Psellos, nommĂ© probablement aprĂšs la dĂ©position de Jean Italos, devait ĂȘtre ThĂ©odore de Smyrne (milieu du XIe siĂšcle – aprĂšs 1112). On sait peu de choses sur ce haut fonctionnaire de l’administration byzantine sauf qu’il exerça la fonction de juge, puis de prƍtoproedros et enfin de curopalate. De son activitĂ© littĂ©raire, qui dut ĂȘtre importante, ne subsistent que des vestiges dont des commentaires sur Aristote et un traitĂ© contre l'Église latine sur les azymes et la procession du Saint-Esprit.

Érudite et historienne, Anne ComnĂšne contribua Ă  l’essor de la philosophie en commanditant une sĂ©rie de commentaires sur certaines Ɠuvres d’Aristote, jusque-lĂ  peu connues. Deux des auteurs qui apportĂšrent leur contribution Ă  ce travail furent Eustratios de NicĂ©e et Michel d’ÉphĂšse. Eustratios de NicĂ©e fut un disciple de Jean Italos; il Ă©chappa de justesse Ă  la condamnation d’Italos qui englobait maitre et disciples en souscrivant Ă  cette condamnation. Il put alors conserver son poste de directeur de l’école de Saint-ThĂ©odore, Ta SphĂŽrakiou. Il s'assura par la suite la faveur de l'empereur Alexis ComnĂšne en dĂ©fendant dans deux traitĂ©s sur les icĂŽnes le point de vue du souverain contre les accusations d'iconoclasme portĂ©es par le mĂ©tropolite LĂ©on de ChalcĂ©doine et fut nommĂ© mĂ©tropolite de NicĂ©e. L’empereur dĂ©sirant convertir la minoritĂ© armĂ©nienne (monophysite) de Bulgarie, il composa un « discours dialectique sur les deux natures du Christ », puis le schĂ©ma de deux traitĂ©s sur le mĂȘme sujet. Mais comme dans le cas de Psellos et d’Italos l'imprudence de son langage de « dialecticien » scandalisa les bien-pensants [36]. Un long procĂšs s’ensuivra au cours duquel l’empereur et le patriarche Jean IX AgapĂštos tentĂšrent de plaider en sa faveur; mais le procĂšs se termina par sa condamnation. Eustratios devait mourir quelques annĂ©es plus tard.

Dans les commentaires Ă  Aristote qui sont parvenus jusqu’à nous, Eustratios suit manifestement les anciens NĂ©oplatoniciens, bien que sur certains sujets, comme la connaissance des principes premiers, il appuie des thĂšses plus proches de la doctrine chrĂ©tienne. Contrairement Ă  Platon et Ă  Aristote, il ne croit pas que l’ñme humaine se rĂ©approprie la connaissance qu’elle avait Ă  l’origine, ni qu’elle ne possĂšde qu’une connaissance virtuelle qui se concrĂ©tise progressivement. Selon lui, l’ñme humaine telle que crĂ©Ă©e par Dieu est dĂ©jĂ  parfaite, c’est-Ă -dire qu’elle a pleine connaissance des principes premiers et des concepts immĂ©diatement Ă©vidents, mais que l’ĂȘtre humain en perd progressivement la connaissance et la comprĂ©hension en raison des instincts de son corps [37].

On ne sait Ă  peu prĂšs rien de la vie de Michel d'ÉphĂšse sauf qu’il enseignait la philosophie Ă  l’universitĂ© de Constantinople et qu’avec Eustratios de NicĂ©e, il faisait partie du cercle mis sur pied par Anne ComnĂšne pour poursuivre l’étude des Ɠuvres moins connues d’Aristote[38]. Toutefois sa renommĂ©e comme commentateur d’Aristote Ă©tait bien Ă©tablie et on a comparĂ© sa mĂ©thode d’exposition et d’interprĂ©tation Ă  celle d’ Alexandre d'Aphrodise, commentateur d’Aristote au IIe siĂšcle. Ses commentaires sur plusieurs ouvrages d’Aristote, en particulier la MĂ©taphysique, les Parties des Animaux et GĂ©nĂ©ration des Animaux s’inscrivent dans la ligne des nĂ©oplatoniciens et dans la tradition d’Étienne d’Alexandrie [39].

Au siĂšcle suivant, ThĂ©odore Prodromos (vers 1100 – vers 1170) continua la tradition des commentaires dĂ©taillĂ©s sur les Ɠuvres d’Aristote, notamment sur les Seconds Analytiques oĂč se sent l’influence dĂ©terminante d’Eustratios de NicĂ©e. Auteur prolifique, il Ɠuvra surtout dans les domaines de la poĂ©sie et de la rhĂ©torique, mais on lui doit sur le plan philosophique un autre commentaire sur les Seconds Analytiques d'Aristote, Ă©galement fortement influencĂ© par Eustratios de NicĂ©e[40].

Tous les Ă©rudits de l’époque n’étaient pas de fervents admirateurs d’Aristote, de Platon et des NĂ©oplatoniciens. Ce fut le cas entre autres de Nicolas de MĂ©thone, Ă©vĂȘque de cette ville vers 1150, lequel au nom du christianisme orthodoxe, rĂ©digea une rĂ©futation dĂ©taillĂ©e des ÉlĂ©ments de thĂ©ologie de Proclus. Selon lui et les thĂ©ologiens orthodoxes conservateurs, les influences nĂ©oplatoniciennes sur le dogme chrĂ©tien ne pouvaient que dĂ©tourner les fidĂšles de la vraie foi. Ainsi, il s’élĂšve systĂ©matiquement contre les propositions de Proclus tentant de dĂ©montrer que le premier principe de l’Univers est « un », considĂ©rant cette proposition comme contraire au dogme de la TrinitĂ© [41].

Le sac de Constantinople par les CroisĂ©s en 1204 devait s’avĂ©rer catastrophique pour les institutions d’enseignement. Nombre d’intellectuels durent s’expatrier, certains vers l’Italie, d’autres vers l’Empire de NicĂ©e oĂč ThĂ©odore II (r. 1254 – 1258) Ă©tait lui-mĂȘme un lettrĂ©, auteur de deux ouvrages sur la philosophie naturelle, le Kosmikē dēlƍsis (Exposition cosmique) et le Peri phusikēs koinƍnias (Sur la communautĂ© physique) dans lesquels il s’appuie sur des schĂ©mas mathĂ©matiques simples pour comprendre la thĂ©orie des Ă©lĂ©ments et la cosmologie[42].

TroisiÚme période : 1259-1341

La querelle du Filioque devait ĂȘtre au cƓur des dĂ©bats thĂ©ologiques sur la rĂ©union des Églises et influencer durablement la philosophie byzantine de l’époque.

AprĂšs la reprise de la ville par Michel VIII PalĂ©ologue, en 1261, l'enseignement officiel fut restaurĂ© par le grand logothĂšte Georges Acropolite, qui fonda une modeste Ă©cole oĂč les cours Ă©taient axĂ©s sur la philosophie d'Aristote, la gĂ©omĂ©trie d'Euclide et l'arithmĂ©tique de Nicomaque de GĂ©rase[43]. En 1266, le patriarche Germain III (patriarche 1223 – 1240) restaura l’école patriarcale. Mais ce fut sous Andronic II (r. 1282 – 1328) que devait ĂȘtre fondĂ©e une nouvelle Ă©cole impĂ©riale, la Scholeion basilikon, sous la juridiction du grand logothĂšte ThĂ©odore MĂ©tochitĂšs. Durant cette pĂ©riode qui devait ĂȘtre marquĂ©e par les tentatives de rĂ©unification des Églises catholique romaine et orthodoxe, le dĂ©bat thĂ©ologique influença profondĂ©ment les discussions philosophiques, la question de la procession du Saint Esprit (la querelle du Filioque) demeurant au cƓur de cette division.

La figure centrale du dĂ©but de la restauration palĂ©ologue fut NicĂ©phore BlemmydĂšs. NĂ© en 1197, il avait dĂ» fuir Constantinople avec sa famille et se rĂ©fugier en Bithynie oĂč il fit des Ă©tudes de mĂ©decine, physique, philosophie, thĂ©ologie, mathĂ©matiques, logique et rhĂ©torique. AprĂšs avoir fondĂ© une Ă©cole Ă  Smyrne Ă  la demande de l’empereur, puis aprĂšs avoir dirigĂ© l’école impĂ©riale de NicĂ©e de 1238 Ă  1248, il dut se retirer en butte aux tracasseries du clergĂ© de la ville. Il se fit alors moine et en 1241 fonda un monastĂšre Ă  Ématha, prĂšs d’ÉphĂšse dont l’école se consacra Ă  la formation des futurs moines et des novices[44]. Dans une note prĂ©liminaire Ă  son traitĂ© sur la logique, Ă©crite apparemment en 1237 Ă  la demande de l’empereur Jean III VatatzĂšs (r. 1222-1254), il insiste sur l’utilitĂ© de la logique en thĂ©ologie. Ses services devaient ĂȘtre requis Ă  de nombreuses reprises pour dĂ©fendre la position orthodoxe lors des dĂ©bats grĂ©co-latins de 1234 et 1250, Ă©crivant des traitĂ©s sur la procession du Saint-Esprit, et se faisant le dĂ©fenseur de la formule patristique ancienne selon laquelle le Saint-Esprit procĂšde du PĂšre « par » le Fils[N 6] - [45].

Mieux connu comme historien, Georges PachymĂšre (1242-vers 1310), enseigna Ă  l’école patriarcale et Ă©crivit un volumineux traitĂ© intitulĂ© « Philosophia », paraphrasant Aristote et traitant non seulement de logique et de philosophie naturelle, mais aussi de mĂ©taphysique et d’éthique, en plus du dernier commentaire byzantin connu sur Platon, une continuation des ParamidĂšs, commentaire incomplet de Proclus dans lequel il applique une mĂ©thode d’interprĂ©tation « logique » (c.a.d. non mĂ©taphysique). C’était Ă©galement un grand collectionneur, traducteur et Ă©diteur de manuscrits de philosophes [46].

Le rĂšgne d’Andronic II voit aussi l’apparition d’un philosophe original, NicĂ©phore Choumnos (vers 1250/1255 – 1327) qui Ă©crit sur la philosophie naturelle sans rĂ©fĂ©rence aux auteurs anciens. Premier ministre de l’empereur pendant prĂšs de onze ans, il sera Ă©vincĂ© par son grand rival intellectuel, ThĂ©odore MĂ©tochitĂšs. Il vĂ©cut alors quelque temps sur ses domaines avant d’ĂȘtre fait gouverneur de Thessalonique, la deuxiĂšme plus grande ville du pays oĂč il restera jusque vers 1326, continuant de longues polĂ©miques avec son rival politique et intellectuel[47].

L’approche de Choumnos est unique en ce sens qu’il applique une logique philosophique, c’est-Ă -dire par infĂ©rence Ă  des principes et dĂ©finitions acceptĂ©es universellement, Ă  des idĂ©es thĂ©ologales acceptĂ©es. S’il s’avĂšre un ardent dĂ©fenseur d’Aristote, il n’embrasse pas l’ensemble de son systĂšme, prĂ©fĂ©rant plutĂŽt donner une justification rationnelle et philosophique aux doctrines de la thĂ©ologie chrĂ©tienne[48]. Ses attaques contre les thĂ©ories platoniciennes de la substance et des formes ou sa rĂ©futation des thĂ©ories de Plotin sur l’ñme tendront de mĂȘme Ă  prouver la validitĂ© des enseignements chrĂ©tiens [49].

Rival de Choumnos, ThĂ©odore MĂ©tochitĂšs (1270 – 1332) parviendra Ă  remplacer ce dernier comme grand logothĂšte d’Andronic II. Durant cette pĂ©riode, il mit en place un service d'enseignement public appelĂ© MouseĂźon en souvenir de l'institution d'Alexandrie et s’avĂ©ra un grand protecteur des arts et des sciences [50]. Sa carriĂšre politique fut interrompue en 1328 lorsque l’empereur sera dĂ©trĂŽnĂ© par son petit-fils. ExilĂ© pendant quelques mois, il put revenir Ă  Constantinople oĂč il se retira au monastĂšre de la Chora qu’il avait fait restaurer[51].

Homme d’État le jour, MĂ©tochitĂšs, pĂ©nĂ©trĂ© de la culture et de la langue de l'antiquitĂ© grecque, consacrait ses temps libres aux travaux intellectuels. Écrivain versatile, il admire Aristote et surtout Platon, mais comme Choumnos, il est loin d’admettre toutes leurs opinions. Ainsi son Sēmeiƍseis gnƍmikai (MiscellanĂ©es [N 7]) est une collection de cent-vingt essais sur des sujets variĂ©s (politique, histoire, philosophie morale, esthĂ©tique, littĂ©rature grecque classique) dans lequel il n’hĂ©site pas Ă  critiquer l’obscuritĂ© d’Aristote et l’utilisation du dialogue chez Platon. Nombre de ses essais constituent des mĂ©ditations sur la fugacitĂ© de la vie humaine; d’autres des paraphrases ou commentaires sur la philosophie d’Aristote telle que contenue dans ses divers traitĂ©s[52].

Devenu trĂšs jeune orphelin, NicĂ©phore GrĂ©goras (vers 1295 – 1360) fit ses premiĂšres Ă©tudes sous la tutelle de son oncle Jean, mĂ©tropolite d’HĂ©raclĂ©e. Vers 1315, il arriva Ă  Constantinople oĂč il Ă©tudia la logique et la rhĂ©torique sous la direction du futur patriarche Jean XIII Glykys, la philosophie et l’astronomie sous celle de ThĂ©odore MĂ©tochitĂšs qui lui fit dĂ©couvrir la philosophie d’Aristote. GrĂ©goras devait devenir le successeur intellectuel de MĂ©tochitĂšs, s’installant au monastĂšre de la Chora oĂč il dirigeait une Ă©cole[53].

Ayant atteint une enviable renommĂ©e dans le cercle des savants et humanistes byzantins, il fut mĂȘlĂ© aux querelles entre Andronic II et son petit-fils, Andronic III, puis Ă  celles opposant Jean V PalĂ©ologue (r. 1341 - 1376, 1379 – 1390, septembre 1390 - fĂ©vrier 1391) et le futur Jean VI CantacuzĂšne (r. 1347 – 1354). Mais ce qui marqua le plus son activitĂ© philosophique fut la longue lutte qu’il mena contre le Calabrais Barlaam, en 1330 d’abord lors d’un dĂ©bat public auquel le dĂ©fia ce dernier, puis Ă  partir de 1340 lorsque Barlaam alluma Ă  Thessalonique la controverse de l’hĂ©sychasme qui devait diviser l’empire pendant dix ans. Avant tout rhĂ©teur, c’est dans cette querelle qui se continuera jusqu’à la fin de sa vie qu’il touchera divers sujets philosophiques, notamment sa critique d’Aristote dans le dialogue Phlorentius, manifestement basĂ© sur sa premiĂšre rencontre avec Barlaam[54].

GrĂ©goras devait aussi entrer en conflit avec un autre thĂ©ologien et philosophe, Ă©galement mĂȘlĂ© au conflit entre Jean V PalĂ©ologue et Jean VI CantacuzĂšne : GrĂ©goire Palamas (1296 – 1359). D’origine aristocratique, Palamas prĂ©fĂ©ra trĂšs jeune la vie monastique du Mont Athos Ă  l’administration impĂ©riale. OrdonnĂ© prĂȘtre en 1326, il commença en 1336 un Ă©change de correspondance avec Barlaam qui lui permettra de concevoir et de structurer sa doctrine, le palamisme. BientĂŽt cette querelle religieuse s’étendra Ă  la sociĂ©tĂ© civile, Jean VI, nombre de clercs importants et les moines du Mont Athos dont la spiritualitĂ© se basait sur l’hĂ©sychasme prenant le parti de Palamas. La crise politico-religieuse se dĂ©noua en 1347 lorsqu’un concile dĂ©posa le patriarche Jean KalĂ©kas et confirma l’orthodoxie des thĂšses de Palamas. Jean CantacuzĂšne devint alors co-empereur avec le jeune Jean V, Isidore devint patriarche de Constantinople et Palamas mĂ©tropolite de Thessalonique. Tout en effectuant diverses missions diplomatiques pour l’empereur, Palamas continua sa lutte contre GrĂ©goras rĂ©digeant entre 1356 et 1358 ses Quatre traitĂ©s contre GrĂ©goras[55].

Selon Palamas, si la substance (ousia) de Dieu demeure inconnue Ă  l’homme, celui-ci peut en faire directement l’expĂ©rience grĂące aux activitĂ©s (energeiai) divines visibles par l’homme. Dans ses « 150 chapitres » Palamas dĂ©nonce les vues qu’il juge erronĂ©es des philosophes anciens aussi bien tenants d’Aristote que de Platon, en consacrant les vingt-neuf premiers chapitres Ă  dĂ©finir la philosophie naturelle, mettant les faits concernant le monde dans son ensemble (par opposition aux faits particuliers comme les phĂ©nomĂšnes astronomiques) dans la mĂȘme catĂ©gorie Ă©pistĂ©mologique que les faits concernant Dieu et les hommes[56].

Au cours de cette troisiĂšme pĂ©riode, nombre de philosophes tendirent Ă  s’identifier comme « aristotĂ©liciens » ou « platoniciens » contrairement aux tentatives des Ă©poques prĂ©cĂ©dentes qui visaient essentiellement Ă  rĂ©concilier les deux tendances. DĂ©jĂ  prĂ©sents chez GrĂ©goras et MĂ©tochitĂšs les sentiments anti-aristotĂ©liciens devinrent plus Ă©vidents chez George GĂ©miste PlĂ©thon (vers 1360-1452).

NĂ© Ă  Constantinople entre 1355 et 1360, Georges Gemistos fit d'abord ses Ă©tudes au sein de l'Ă©cole platonicienne de Constantinople, puis en milieu cosmopolite Ă  Andrinople, oĂč enseignaient chrĂ©tiens, juifs et musulmans, avant de revenir enseigner Ă  Constantinople, oĂč ses cours sur Platon firent scandale et faillirent lui valoir d’ĂȘtre arrĂȘtĂ© pour hĂ©rĂ©sie. Mais l'empereur Manuel II PalĂ©ologue (r. 1391 – 1425), qui Ă©tait son ami et son admirateur, prĂ©fĂ©ra l’exiler Ă  Mistra, devenu un important centre intellectuel dans le despotat de MorĂ©e. Membre de la dĂ©lĂ©gation byzantine Ă  titre de dĂ©lĂ©guĂ© laĂŻc au concile de Florence (1437-1439) alors qu'il Ă©tait dĂ©jĂ  octogĂ©naire, il donna dans cette ville de nombreuses confĂ©rences qui firent revivre la pensĂ©e platonicienne en Europe de l’Ouest. C’est Ă  cette Ă©poque qu’il commença Ă  utiliser le pseudonyme de PlĂ©thon[N 8]. De retour Ă  Mistra, il fut nommĂ© au SĂ©nat et devint magistrat de la ville. Il passa ses derniĂšres annĂ©es Ă  enseigner, Ă  Ă©crire et Ă  poursuivre la lutte qui l'opposait Ă  Gennade II Scholarios, patriarche de Constantinople et dĂ©fenseur d’Aristote[57].

C’est Ă  la suite de ses conversations avec les intellectuels florentins qu’il devait Ă©crire son pamphlet « Sur les diffĂ©rences entre Aristote et Platon » dans lequel il cherche Ă  montrer comment Aristote est infĂ©rieur Ă  Platon, mĂȘme s’il Ă©tait plus admirĂ© en Europe de l’Ouest oĂč on avait redĂ©couvert les anciens auteurs grecs, en partie grĂące aux exilĂ©s de Constantinople ayant fui la ville aprĂšs la quatriĂšme croisade et les guerres civiles qui suivirent la restauration. Dans cet ouvrage, il compare le concept de Dieu chez Aristote et Platon, soulignant les faiblesses des thĂ©ories d’Aristote. Ceci lui valut une riposte immĂ©diate du patriarche Gennade II Scholarios, intitulĂ©e « À la dĂ©fense d’Aristote ». Ce sur quoi PlĂ©thon devait publier une RĂ©plique oĂč il soutient que le dieu de Platon ressemblait plus Ă  celui de la doctrine chrĂ©tienne que le dieu d'Aristote. La querelle devait durer trente ans et se terminer par la publication du "Contre les calomniateurs de Platon" (v. 1469) du cardinal Bessarion[58].

Les principaux thĂšmes de la philosophie byzantine

Tout au long de son Ă©volution, la philosophie byzantine se concentra sur les vĂ©ritĂ©s premiĂšres concernant l’homme et le monde dans lequel il vit. En ce sens elle demeurait « la science de l’extĂ©rieur » alors que la thĂ©ologie Ă©tait « la science de l’intĂ©rieur ». L’une et l’autre Ă©taient dĂšs lors complĂ©mentaires alors qu’en Occident la philosophie demeurait « la servante » de la thĂ©ologie ou sa « toile de fond »[59].

En Occident, les humanitĂ©s classiques disparurent avec les invasions barbares, remplacĂ©es par une profonde mĂ©fiance face aux « idĂ©es paĂŻennes » telle qu’en tĂ©moigne la question de Tertullien : « En quoi AthĂšnes a-t-elle Ă  voir avec JĂ©rusalem ? »[60]. Les PĂšres de l’Église grecque enseigneront au contraire que Dieu peut ĂȘtre dĂ©couvert Ă  travers les philosophes grecs. « Tous ceux qui vivent en appliquant les mĂ©thodes de la raison (logos) sont des chrĂ©tiens, mĂȘme s’ils sont classĂ©s parmi les athĂ©es [
] car chacun grĂące Ă  la prĂ©sence en lui du divin logos a bien parlĂ© [
] et ce que tout homme a dit, alors qu’il Ă©tait bien guidĂ©, nous appartient Ă  nous chrĂ©tiens[61]".

L’Église grecque en arriva ainsi Ă  la conclusion que l’étude de la sagesse ancienne Ă©tait Ă  la fois utile et dĂ©sirable Ă  condition que les chrĂ©tiens en rejettent les idĂ©es erronĂ©es pour ne conserver que ce qui Ă©tait vrai et bon, tel qu’exprimĂ© dans le traitĂ© de Basile de CĂ©sarĂ©e dĂ©jĂ  mentionnĂ©, « Exhortation aux jeunes gens sur la meilleure façon de tirer profit des Ă©crits des auteurs paĂŻens » [6]. Ce faisant les PĂšres de l’Église grecque ne cherchĂšrent pas Ă  emprunter l’essence ou le contenu de la pensĂ©e antique, mais plutĂŽt Ă  adopter la mĂ©thode, les moyens techniques, la terminologie les structures logiques et grammaticales de la langue grecque pour Ă©difier la thĂ©ologie et la philosophie chrĂ©tienne[62].

Pour les Byzantins, la destinĂ©e ultime de l’homme Ă©tait de parvenir Ă  la « theosis », c’est-Ă -dire l’union, l’intĂ©gration avec la divinitĂ© (sans ĂȘtre absorbĂ©e en elle comme dans le panthĂ©isme indou). La « theosis » devint synonyme de « salut » ou de « vie Ă©ternelle en la prĂ©sence de Dieu », la damnation Ă©tant au contraire l’absence de Dieu dans la vie humaine. Et cette « theosis » s’obtenait grĂące Ă  l’expĂ©rience religieuse[63].

Ceci n’était guĂšre Ă©loignĂ© de la pensĂ©e antique grecque selon laquelle la theosis ne devait pas ĂȘtre atteinte par la thĂ©ologie, mais par la philosophie, par l’étude (paideia) et le dĂ©veloppement de l’intelligence, tel que dĂ©fini au IVe siĂšcle par le rhĂ©teur et philosophe paĂŻen ThĂ©mistios (vers 317 – vers 388) : « La philosophie n’est rien d’autre que l’assimilation en dieu en autant que la chose soit possible Ă  l’humain » [64].

De façon plus théorique les principaux thÚmes de la philosophie byzantine seront :

  • la substance ou l’essence de Dieu dans ses trois hypostases (PĂšre, Fils, Esprit Saint) ainsi que les deux natures du Fils;
  • la crĂ©ation de l’Univers par Dieu et ses limites dans le temps;
  • le processus continu de la crĂ©ation et l’intention qu’il rĂ©vĂšle;
  • le monde perçu en tant que rĂ©alisation dans le temps et dans l’espace dont l’hypostase se trouve dans l’esprit divin (nous)[65].

Autres traditions philosophiques

AverroĂšs, dernier grand reprĂ©sentant de la philosophie arabe du Moyen Âge.

La philosophie byzantine ne se dĂ©veloppa pas de façon isolĂ©e; elle Ă©tait l’une des quatre grandes traditions du Moyen Âge, les trois autres Ă©tant la philosophie arabe, la philosophie juive et la philosophie latine.

S’exprimant en arabe et quelquefois en perse, la philosophie arabe eut cours du IXe siĂšcle jusqu’à la mort d’Ibn Rushd (Averroes) en 1198, aprĂšs quoi l’intolĂ©rance religieuse ne permit plus le dĂ©veloppement d’une philosophie indĂ©pendante. DĂ©butant peu aprĂšs la philosophie arabe avec laquelle elle a des liens trĂšs profonds, la philosophie juive se dĂ©veloppa dans les colonies Ă©tablies Ă  la fois dans le monde arabe et dans l’Europe chrĂ©tienne pour s’éteindre vers le XVe siĂšcle. Dans l’Occident latin, un courant philosophique original prit naissance Ă  la cour de Charlemagne sans que l’on puisse lui attribuer une fin bien dĂ©terminĂ©e autre que la Renaissance dont le dĂ©but varia avec les pays [66].

Prises dans leur ensemble, ce sont moins les diffĂ©rences entre chacune qui frappe que ce qui les unit. Toutes quatre utilisent la philosophie grecque antique, en particulier telle qu’enseignĂ©e par les Ă©coles nĂ©oplatoniciennes comme leur hĂ©ritage commun. DeuxiĂšmement, elles se sont influencĂ©es mutuellement au cours de leur existence : les philosophes mĂ©diĂ©vaux juifs furent profondĂ©ment influencĂ©s par les philosophes arabes et la traduction de ces mĂȘmes philosophes transforma le courant philosophique de l’Occident latin Ă  partir du XIIe siĂšcle. Seule la philosophie byzantine s’appuyant sur l’hĂ©ritage antique fut moins ouverte aux autres courants bien qu’il se fit diverses traductions du latin vers la fin du Moyen Âge. Enfin, ces quatre philosophies appartenaient Ă  des cultures oĂč dominait une religion monothĂ©iste rĂ©vĂ©lĂ©e. Bien que les relations entre ces doctrines religieuses et les spĂ©culations philosophiques aient variĂ© d’une tradition Ă  l’autre, voire d’une Ă©poque Ă  l’autre au sein de chacune d’elles, les questions qu’elles posaient sur le sens de l’homme et sa relation Ă  la divinitĂ© Ă©taient sensiblement les mĂȘmes et les questions thĂ©ologiques devaient exercer une profonde influence sur le dĂ©veloppement de la pensĂ©e philosophique [67].

Les principaux philosophes byzantins

Notes et références

Notes

  1. S’agissait-il d’une nouvelle fondation ou de la re-fondation de l’école de ThĂ©odose; Ă©tait-ce un geste personnel de mĂ©cĂ©nat de la part de Bardas ou une institution officielle ? Voir Ă  ce sujet Treadgold « The Chronological accuracy of the Chronicle of Simeon the Logothete » (dans) Dumbarton Oaks Papers 33, (1979) pp. 185-187.
  2. Nicétas de Paphlagonie dit de lui qu'il connaissait toutes les disciplines, grammaire et métrique, rhétorique et philosophie, médecine et presque toutes les autres sciences profanes, et qu'il l'emportait sur tous les autres savants de son temps (PG, vol. CV, colonne 509)
  3. LittĂ©ralement « prĂ©sident » quoiqu’ailleurs on trouve hypatos, c.Ă .d. « consul ». Il s’agissait d’un titre honorifique et non d’une fonction similaire Ă  celle de « doyen » d’une universitĂ© comme on l’a cru pendant longtemps (Kaplan (2016) pp. 249-250)
  4. Michel fut le nom qu’il prit lorsqu’il devint moine pendant une pĂ©riode de disgrĂące; son prĂ©nom Ă  sa naissance Ă©tait Constantin.
  5. Cette condamnation, rappelĂ©e chaque annĂ©e dans onze anathĂšmes du Syndikon de l’Orthodoxie stipule que « le synode condamne ceux qui tentent d’expliquer par le raisonnement l’Incarnation et l’union hypostatique, ceux qui ressuscitent les erreurs des philosophes paĂŻens sur l’ñme et sur le monde; ceux qui considĂšrent les lettres profanes, non comme de simples Ă©lĂ©ments de formation, mais comme les dĂ©positaires de la vĂ©ritĂ© [Reg. 51, no. 907, citĂ© par Cheynet 2007, p. 363-364]
  6. Voir article « Querelle du Filioque »
  7. Genre littéraire composé de textes divers, « mélangés » comportant toutefois une certaine unité.
  8. PlĂ©thon (Î Î»ÎźÎžÏ‰Îœ), est un synonyme de GĂ©miste (ΓΔΌÎčστ᜞ς), qui signifie « rempli, plein », mais Ă©voque aussi Platon.

Références

  1. Caratzas (2021) chap. II, para 4
  2. Kaplan (2016) pp. 242-246
  3. Stanford (2018) « 1.1. Byzantine Culture and Education »
  4. Browning (1962) pp. 167-202, et 33, [1963], pp. 11-40
  5. Caratzas (2021), chap. II, para 8.
  6. Patrologiae cursus completus, Series graeca, ci-aprÚs « PG ». 31, pp. 563-590)
  7. Caratzas (2021) chap. I. para. 16
  8. Kazdhan (1991) « Philosophy », vol. 3, pp. 1658 – 1660
  9. Sa vie nous est surtout connue par son successeur, Marinus (Marinus, « Proclus », 2001); sur Proclus et l’école d’AthĂšnes, voir Wilson (1983) pp. 37-40)
  10. Treadgold 1997, p. 447.
  11. Cheynet 2007, p. 351.
  12. Théophane Continué, PG 109, col. 109, 215.
  13. Wilson (1983) p. 81
  14. Ierodiakonou & Bydén (2018) « 1.1. Byzantine Culture and Education » para 2.
  15. Wilson (1983) p. 82
  16. :0 2007, p. 351.
  17. Wilson (1983) p. 89
  18. Kazhdan (1991) « Photios » vol. 3, p. 1669
  19. Treadgold 1997, p. 451-452.
  20. Treadgold 1997, p. 454.
  21. Treadgold 1997, p. 462.
  22. Wilson (1983) pp. 90-93
  23. Cheynet 2007, p. 353.
  24. Wilson (1983) pp. 93-111
  25. Cheynet 2007, p. 353-354.
  26. Wilson (1983) pp. 114-119
  27. Voir Ă  ce sujet : BĂ©atrice Beaud, « Le savoir et le monarque : Le TraitĂ© sur les Nations de l’empereur byzantin Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 1990, p. 551-564 [en ligne] https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1990_num_45_3_278857.
  28. Cité par Kaplan (2016), p. 250
  29. Kaplan (2007) pp. 247-248
  30. Michel AttaliatĂšs, Historia, Introduction
  31. Cheynet 2007, p. 361-362.
  32. Ierodiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Michae Psellos »
  33. Treadgold 1997, p. 687.
  34. Kaplan (2016) p. 284
  35. Ierodiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « John Italos »
  36. Nicétas ChoniatÚs, Trésor de l'Orthodoxie, tit. XXIII (PG, vol. CXL, col. 136-37
  37. Ierokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Eustratios of Nicea »
  38. Sorabji (1998) « Aristotle Commentators »
  39. Ierokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Michael of Ephesius »
  40. Ierokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Theodore Prodromos »
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  42. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Theodore II Doukas Laskaris »
  43. GrĂ©goire de Chypre, Éloge de Michel VIII PalĂ©ologue
  44. Kazhdan (1991) vo. 1, « Blemmydes, Nikephoros », pp. 296-297
  45. NicĂ©phore BlemmydĂšs, ƒuvres thĂ©ologiques, t. I, Paris, 2007, pp. 107-116
  46. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « George Pachymeres »
  47. Kazhdan (1991) vol. 1, « Choumnos, Nikephoros » pp. 433-434
  48. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Nicéphore Choumnos »
  49. Moutafakis (2003), pp. 204–205
  50. Théodore Hyrtakénos, Lettres, V, 738.
  51. Kazhdan (1991) vol. 2, « Metochites, Theodore », pp. 1357-1358
  52. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Theodore Metochites »
  53. Kazhdan (1991) vol. 2, « Gregoras, Nikephoros, pp. 874-875
  54. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Nikephoros Gregoras »
  55. Kazhdan (1991) vol. 3, « Palamas, Gregory » et « Palamism » pp. 1560-1562
  56. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « Gregory Palamas »
  57. Kazhdan (1991) vol. 3, « Plethon, George Gemistos », p. 1685
  58. Iereokiakonou & Bydén (2018) 1.3. People, Works, Currents, « George Gemistos Plethon »
  59. Benakis (1998) « Article Sumary » de l’entrĂ©e « Byzantine Philosophy » (dans) Routledge Encyclopedia of Philosophy)
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  61. Justin, Apologia, I. 46, II.13. Éd. Bibliotheke Hellenon Pateron, vol 3, Athens, 1955, pp. 186, 207.
  62. Constantelos (2021) chap. I, para. 11
  63. Constantelos (2021) chap. II, para. 20.
  64. Themistius, « Orationaes quae supersunt 21.32d. Éd. N. Xchenkl, G. Downey et A.F. Norman, Leipzig, 1965-1974, 43. 6-7.
  65. Benakis (1998) « Byzantine Philosophy » (dans) Routledge Encyclopedia of Philosophy
  66. Marenbon (1998) Introduction, para. 1
  67. Marenbon (1998) Introduction, para. 2

Voir aussi

Bibliographie

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  • (en) Benakis, Linos G. Texts and Studies on Byzantine Philosophy, Parousia, Athenai, 2002.
  • (en) Benakis, Linos G. Byzantine Philosophy B, Parousia, Athenai, 2013.
  • (en) Benakis, Linos G. Byzantine Philosophy - An Introductory Approach, Lambert Academic Publishing (LAP), SaarbrĂŒcken 2017, 104 pp. (ISBN 978-3-330-03021-3).
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