Grégoire Palamas
GrĂ©goire Palamas (1296 - 1359), saint de l'Ăglise orthodoxe, a dĂ©veloppĂ© dans sa pensĂ©e un adage des PĂšres, selon lequel Dieu s'est fait homme, pour que l'homme devienne Dieu. Il rĂ©sume une longue tradition Ă ce sujet, Ă laquelle il se veut fidĂšle et qui touche Ă une question fondamentale du christianisme, celle du salut ou de la dĂ©ification de l'homme. La synthĂšse de GrĂ©goire Palamas est l'une des plus remarquables Ă ce sujet[1].
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La vie et lâĆuvre
La vie de GrĂ©goire Palamas[2] nous est connue par ses Ă©crits, mais aussi par lâĂloge de Palamas composĂ© peu de temps aprĂšs sa mort par son disciple et ami PhilothĂ©e Kokkinos, qui fut patriarche de Constantinople.
Son enfance et le début de sa vocation
GrĂ©goire Palamas est nĂ© Ă Constantinople en 1296. Ses parents Ă©taient des nobles dâAsie mineure qui, en raison de lâinvasion des Turcs, se rĂ©fugiĂšrent Ă Constantinople. Son pĂšre, Constantin Palamas, Ă©tait sĂ©nateur et faisait partie de lâentourage de lâempereur Andronic II PalĂ©ologue. Il mourut peu de temps aprĂšs la naissance de GrĂ©goire. LâEmpereur prit alors en charge son Ă©ducation et ses Ă©tudes classiques Ă lâuniversitĂ© impĂ©riale jusquâĂ lâĂąge de vingt ans environ. GrĂ©goire choisit, probablement avant le terme du cycle de ses Ă©tudes qui le destinait au service de lâĂtat, de devenir moine et de renoncer alors aux sciences hellĂ©niques. Le jeune homme avait Ă©tĂ© prĂ©parĂ© Ă sa vocation monastique par la piĂ©tĂ© familiale. Ses parents connaissaient la priĂšre du cĆur, ils frĂ©quentaient les moines athonites et leur avaient confiĂ© lâĂ©ducation spirituelle de leurs enfants. Câest ainsi que GrĂ©goire bĂ©nĂ©ficia de la paternitĂ© spirituelle dâun maĂźtre rĂ©putĂ© de la priĂšre du cĆur, ThĂ©olepte de Philadelphie.
Son départ au Mont Athos
Câest peut-ĂȘtre sous son conseil que Palamas se retira, vers 1316, au Mont Athos. Il y fut suivi par ses deux frĂšres. Quant Ă sa mĂšre et ses deux sĆurs, elles menĂšrent aussi une vie monastique, mais Ă Constantinople. Au Mont Athos, GrĂ©goire devint durant trois ans le disciple de NicodĂšme, un moine hĂ©sychaste qui lâinitia Ă la vie dâermite. AprĂšs le dĂ©cĂšs de ce dernier, Palamas dĂ©cida de rejoindre la communautĂ© de la Grande Lavra, fondĂ©e par Athanase l'Athonite. Il y demeura en tant que chantre pendant trois ans, puis il opta Ă nouveau pour la vie solitaire. Il prit GrĂ©goire le SinaĂŻte pour pĂšre spirituel et alla sĂ©journer parmi les hĂ©sychastes de lâermitage de Glossia. Vers 1325, il fut obligĂ© de fuir, en raison dâincursions de pirates turcs. Câest alors Ă Thessalonique quâil rĂ©sida durant quelques mois en compagnie des disciples de GrĂ©goire le SinaĂŻte, parmi lesquels se trouvaient deux futurs patriarches de Constantinople, Isidore (Boukharis) et Calliste. Ă Thessalonique, il fut ordonnĂ© prĂȘtre en 1326. Ensuite, GrĂ©goire partit, accompagnĂ© de dix moines, fonder un ermitage Ă BerrhĂ©e, oĂč il suivit le style de vie adoptĂ© par les hĂ©sychastes, en consacrant cinq jours de la semaine Ă la priĂšre pure dans la solitude et le samedi et le dimanche aux services liturgiques avec les autres moines de lâermitage. Vers 1331, il dut une nouvelle fois fuir Ă cause dâincursions. GrĂ©goire retourna Ă la Sainte Montagne, Ă lâermitage de Saint-Sabbas. Câest lĂ quâil commença Ă Ă©crire ses premiers ouvrages. Un peu plus tard, il accepta la charge dâhigoumĂšne ou de supĂ©rieur au MonastĂšre d'Esphigmenou.
La querelle du filioque
Vers 1335, de retour Ă l'ermitage Saint-Sabbas, GrĂ©goire Palamas Ă©crivit, Ă lâoccasion de pourparlers dâunion des Ăglises, ses TraitĂ©s apodictiques sur la procession du Saint-Esprit, un ouvrage sur la TrinitĂ© destinĂ© Ă repousser toute tentative de compromis doctrinal avec les Latins sur le thĂšme de la procession de lâEsprit. Ce faisant, GrĂ©goire ne refusait pas vraiment lâunion des Ăglises, il dĂ©sirait surtout Ă©viter une union doctrinale factice, dont lâenjeu vĂ©ritable nâĂ©tait pas thĂ©ologique, mais politique. En effet, certains de ses contemporains Ă©taient prĂȘts Ă sacrifier la foi orthodoxe pour sâunir Ă lâOccident latin et bĂ©nĂ©ficier ainsi de son soutien militaire pour repousser lâinvasion des Turcs.
La controverse théologique avec Barlaam
Ă partir de 1336-1337, il entra en conflit avec les idĂ©es dâun moine et philosophe italien, nommĂ© Barlaam le Calabrais. Ce dernier Ă©tait professeur Ă lâuniversitĂ© impĂ©riale et un spĂ©cialiste du Pseudo-Denys. Sa renommĂ©e Ă©tait grande Ă Constantinople et beaucoup le consultaient en diffĂ©rents domaines du savoir. Palamas rĂ©digea, entre 1336-1337 et 1341, quelques Lettres, les Triades pour la dĂ©fense des saints hĂ©sychastes, et un Tome hagioritique, Ćuvres qui tĂ©moignent de la controverse avec Barlaam.
Le conflit portait sur la question de la connaissance de Dieu : peut-on connaĂźtre Dieu autrement que par une dĂ©monstration, autrement que par le seul raisonnement Ă partir de ce que Dieu a crĂ©Ă© et qui conserve son empreinte ? Pour Barlaam, il nâexistait pas de meilleure approche que celle-lĂ pour connaĂźtre Dieu, qui en lui-mĂȘme est absolument inconnaissable, comme le disait Denys. LâĂ©tude des Ăcritures Ă©tait Ă ses yeux de moindre importance. Il se mit Ă critiquer violemment les pratiques des moines hĂ©sychastes, pratiques sur lesquelles il sâĂ©tait renseignĂ© et qui supposaient une autre forme de connaissance de Dieu, une connaissance plus intime et personnelle, par lâintervention dâune grĂące incrĂ©Ă©e de lâEsprit. Pour Barlaam, ces pratiques tĂ©moignaient dâune ignorance de la part des hĂ©sychastes et il le fit savoir autour de lui non sans ironie. Les moines demandĂšrent alors Ă Palamas dâĂȘtre leur porte-parole dans ce conflit oĂč leur spiritualitĂ© Ă©tait rĂ©duite Ă nĂ©ant. GrĂ©goire connaissait bien Barlaam, il entretenait une correspondance avec lui. Il mit au point, Ă partir dâune lecture attentive des PĂšres grecs, une distinction en Dieu entre son essence imparticipable et les Ă©nergies participables, distinction soulignant que Dieu est effectivement inconnaissable en lui-mĂȘme, en son essence, comme le rappelle Barlaam, mais que lâhomme nâest pas contraint pour autant Ă lâignorance, parce que Dieu dans sa bontĂ© se rĂ©vĂšle Ă lui tel quâil est, dans son Ă©nergie, oĂč il est totalement prĂ©sent et agissant. Barlaam nâaccepta pas cette distinction. Il tenta de la rĂ©futer avec toute lâintelligence dont il Ă©tait capable. La question fut finalement dĂ©battue publiquement le , lors dâun concile prĂ©sidĂ© conjointement par lâempereur, Andronic III, et le patriarche de Constantinople, Jean XIV KalĂ©kas. Le concile condamna Barlaam, lequel quitta Constantinople pour retourner en Italie. Cependant, le document conciliaire ne fut pas signĂ© par lâempereur, en raison de son dĂ©cĂšs, survenu cinq jours aprĂšs le concile.
Lâopposition Ă la thĂ©ologie de Palamas nâĂ©tait pas terminĂ©e. Le relais fut pris par GrĂ©goire Akindynos, qui fut peut-ĂȘtre le disciple de Palamas, en tout cas son ami et un mĂ©diateur dans les premiers temps de la controverse avec Barlaam. Pour sa part, il acceptait la spiritualitĂ© hĂ©sychaste tout en refusant radicalement la distinction en Dieu entre lâessence et les Ă©nergies. Le nouveau rĂ©gent, Jean VI CantacuzĂšne, qui fut au service du dĂ©funt empereur Andronic III, rĂ©unit alors un deuxiĂšme concile traitant de la mĂȘme question en . Akindynos y fut condamnĂ© Ă son tour. Le Tome synodal fut officiellement publiĂ©, mais le patriarche Jean KalĂ©kas, qui contestait farouchement lâautoritĂ© politique de Jean CantacuzĂšne, accepta de signer le document tout en empĂȘchant le nouveau rĂ©gent, mais Ă©galement le fils mineur de lâempereur, Ă savoir Jean V PalĂ©ologue, dâen faire autant. Ce document ne tranchait donc pas encore dĂ©finitivement la question.
Le conflit avec Grégoire Akindynos
Ce conflit Ă propos de la rĂ©gence entraĂźna tout Constantinople dans une guerre civile de 1341 Ă 1347, qui opposa Jean CantacuzĂšne Ă un gouvernement nominalement prĂ©sidĂ© par Anne de Savoie, la veuve de lâempereur Andronic III. Durant cette pĂ©riode, le patriarche Jean KalĂ©kas persĂ©cuta Palamas en raison de sa sympathie politique pour Jean CantacuzĂšne, et accorda son soutien Ă GrĂ©goire Akindynos, lequel sâempressa de rĂ©futer la thĂ©ologie palamite dans ses AntirrhĂ©tiques. Palamas fut mis en prison pour ses positions politiques en 1342 et excommuniĂ© pour ses idĂ©es religieuses en 1344. En captivitĂ©, il Ă©crivit diffĂ©rentes Lettres et ses Sept AntirrhĂ©tiques contre Akindynos. GrĂ©goire Akindynos, quant Ă lui, fut, malgrĂ© sa condamnation en 1341 et lâopposition de lâimpĂ©ratrice Anne de Savoie et de la cour impĂ©riale, ordonnĂ© prĂȘtre par le patriarche Jean KalĂ©kas, dont lâambition Ă©tait de le nommer Ă©vĂȘque, et ce, afin dâaffermir son autoritĂ© face aux partisans palamites de Jean CantacuzĂšne.
Cette pĂ©riode de crise politico-religieuse se dĂ©noua en 1347. En effet, le de cette annĂ©e, lâimpĂ©ratrice, consciente du fait que le patriarche Jean KalĂ©kas utilisait GrĂ©goire Akindynos Ă des fins purement politiques, convoqua un concile rĂ©unissant les reprĂ©sentants des deux partis en conflit. Le patriarche Jean KalĂ©kas y fut condamnĂ© et dĂ©posĂ©, et le Tome synodal de 1341 y fut confirmĂ©. En consĂ©quence, Jean CantacuzĂšne devint co-empereur avec le jeune Jean V, et ce, jusquâĂ la majoritĂ© de ce dernier, et les moines hĂ©sychastes reçurent Ă nouveau le soutien de lâĂglise. Un autre concile, prĂ©sidĂ© par Jean CantacuzĂšne et lâimpĂ©ratrice, condamna une nouvelle fois le patriarche dĂ©chu Jean KalĂ©kas, excommunia GrĂ©goire Akindynos et fit publier un autre Tome, qui confirmait celui de 1341. Ces deux Tomes furent encore une fois confirmĂ©s par un troisiĂšme concile tenu Ă Sainte-Sophie quelques semaines plus tard.
Grégoire Palamas, Métropolite de Thessalonique
Câest Isidore Boukharis, un ami de GrĂ©goire Palamas, qui devint patriarche de Constantinople. GrĂ©goire fut alors consacrĂ© mĂ©tropolite de Thessalonique en . Il ne put toutefois pas se rendre dans sa ville Ă©piscopale avant 1350, en raison de son occupation par des zĂ©lotes qui refusaient lâautoritĂ© impĂ©riale de Jean CantacuzĂšne. Câest probablement Ă cette Ă©poque quâil rĂ©digea ses 150 chapitres physiques, thĂ©ologiques, Ă©thiques et pratiques qui constituent, avec les Triades de dĂ©fense des saints hĂ©sychastes, son Ćuvre majeure. Ă peine installĂ© Ă Thessalonique, GrĂ©goire fut Ă nouveau confrontĂ© Ă une controverse avec NicĂ©phore GrĂ©goras, toujours sur les mĂȘmes questions.
Un nouveau concile, convoquĂ© en par CantacuzĂšne et le patriarche Calliste Ier de Constantinople, qui succĂ©dait depuis peu au dĂ©funt Isidore, approuva une nouvelle fois la thĂ©ologie de GrĂ©goire Palamas et la distinction entre lâessence et les Ă©nergies divines.
Un second concile fit de mĂȘme quelques jours plus tard. Le Tome synodal publiĂ© le entĂ©rina ces dĂ©cisions et excommunia dĂ©sormais tous ceux qui nâacceptaient pas la doctrine dĂ©fendue par GrĂ©goire Palamas.
GrĂ©goire Palamas put alors se consacrer Ă sa tĂąche dâarchevĂȘque tout en restant disponible envers lâempereur pour des missions de mĂ©diation. En 1354, alors quâil naviguait vers Constantinople en vue dâaccomplir lâune de ces missions, il fut fait prisonnier par les Turcs et dut rester une annĂ©e en Asie Mineure occupĂ©e. Il y eut lâoccasion de visiter diffĂ©rentes communautĂ©s chrĂ©tiennes, mais aussi de mener divers dĂ©bats avec des musulmans et des juifs convertis Ă lâislam[3].
Sa rançon ayant Ă©tĂ© payĂ©e aux Turcs, il revint en 1355 Ă Constantinople oĂč il rencontra le lĂ©gat du pape Innocent VI, Paul de Smyrne, qui, venu Ă lâoccasion de pourparlers dâunion des Ăglises, sâĂ©tait montrĂ© particuliĂšrement rĂ©ticent Ă lâĂ©gard de la thĂ©ologie palamite. Il y eut alors, en prĂ©sence de lâempereur Jean V et du lĂ©gat du pape, un nouveau dĂ©bat public entre GrĂ©goire Palamas et NicĂ©phore GrĂ©goras. Au cours de ce dĂ©bat, les autoritĂ©s byzantines cherchĂšrent Ă montrer que la doctrine palamite, conforme Ă celle des PĂšres, ne constituait pas un obstacle Ă lâunion des Ăglises. AprĂšs ce dĂ©bat, GrĂ©goire retourna Ă Thessalonique. Il sây adonna surtout Ă la prĂ©dication, mais il rĂ©digea Ă©galement entre 1356 et 1358 ses Quatre traitĂ©s contre GrĂ©goras.
Atteint dâune maladie depuis 1352, GrĂ©goire mourut le et fut, aprĂšs une vĂ©nĂ©ration populaire constante, canonisĂ© en 1368. Le culte des reliques du saint de lâĂglise byzantine sâest perpĂ©tuĂ© jusqu'Ă aujourd'hui Ă Thessalonique. Et dans lâorthodoxie, une liturgie honore sa mĂ©moire le deuxiĂšme dimanche de CarĂȘme.
La théologie spirituelle
Une grande partie de lâĆuvre de GrĂ©goire Palamas reste encore inĂ©dite et donc uniquement accessible en sa langue originale, le grec[Note 1]. GrĂ©goire ne recherchait pas en tant quâĂ©crivain religieux la beautĂ© du style, mais lâexpression des vĂ©ritĂ©s auxquelles il croyait fermement[4]. GĂ©nĂ©ralement, lorsquâil aborde des idĂ©es religieuses pour les dĂ©fendre, il le fait exhaustivement, il y revient Ă plusieurs reprises en diffĂ©rents endroits de son Ćuvre, en fonction des arguments contraires de ses adversaires et des sources bibliques et patristiques qui viennent confirmer ses opinions. Cette façon de faire enrichit considĂ©rablement son Ă©criture, mais est dĂ©routante pour le lecteur moderne, qui risque sans cesse de perdre le fil conducteur de la pensĂ©e de Palamas dans la profusion des raisonnements opposĂ©s et des rĂ©fĂ©rences[5].
Selon Palamas lui-mĂȘme, le point de dĂ©part de sa doctrine, ou plus exactement de lâapprofondissement dâune doctrine quâil a lui-mĂȘme reçue, est le fait quâil y a des personnes, comme Barlaam, qui, en raison de leur inexpĂ©rience de la grĂące et de leur incrĂ©dulitĂ© Ă lâĂ©gard de ceux qui tĂ©moignent dâune telle expĂ©rience, les saints de la Bible, les PĂšres, ainsi que les hĂ©sychastes, rejettent le caractĂšre incrĂ©Ă© des Ă©nergies communiquĂ©es par lâEsprit Saint (Tome hagioritique)[6]. Autrement dit, si une personne comme Barlaam rejette la possibilitĂ© dâavoir une connaissance surnaturelle de Dieu grĂące Ă la communication de son Ă©nergie incrĂ©Ă©e, câest parce quâil nâen a pas lui-mĂȘme fait lâexpĂ©rience[7] et quâil ne se fie pas davantage Ă ceux qui lâont faite. Or, pour Palamas, cette expĂ©rience de la grĂące est la meilleure preuve de lâexistence de Dieu et des intuitions thĂ©ologiques quâil dĂ©fend[8].
La grùce est une expérience
GrĂ©goire insiste sur cet aspect expĂ©rimental de la grĂące. Sa thĂ©ologie vise Ă dĂ©fendre ceux qui vivent dĂšs Ă prĂ©sent des Ă©nergies divines, Ă©nergies que les paroles ne dĂ©montrent pas, mais qui restent nĂ©anmoins perceptibles dans les Ćuvres, celles du Christ, mais aussi celles des saints Ă sa suite (Tome hagioritique)[6]. Palamas nous explique que, malgrĂ© la nĂ©cessitĂ© de la polĂ©mique, il a du mal Ă Ă©crire sur le thĂšme de la dĂ©ification de lâhomme, prĂ©cisĂ©ment parce quâil sâagit avant tout dâune expĂ©rience vĂ©cue et intime avec Dieu, dâune expĂ©rience qui dĂ©passe donc tout ce que lâintelligence peut comprendre et faire comprendre Ă travers les seules paroles ou les seuls raisonnements[9].
La participation de l'homme à la divinité
L'approche spirituelle de Palamas veut s'inscrire dans lâhistoire de la rĂ©vĂ©lation judĂ©o-chrĂ©tienne. Dans le Tome hagioritique[6], il montre, en effet, que Dieu s'est rĂ©vĂ©lĂ© et se rĂ©vĂšle encore d'une façon progressive Ă lâhumanitĂ©. En effet, Palamas compare le cheminement de lâAncien Testament vers le Nouveau Testament au cheminement actuel qui part du Nouveau Testament vers son accomplissement dans la vie future. Il dit en substance[Note 2] : de mĂȘme quâauparavant seuls les prophĂštes, et ceux qui les Ă©coutaient, avaient vu dans lâEsprit les mystĂšres de la loi de MoĂŻse, la prĂ©existence du Verbe et de lâEsprit de Dieu, avant quâils ne soient manifestĂ©s dans la rĂ©vĂ©lation de la TrinitĂ©, tandis que les autres se bouchaient les oreilles ; de mĂȘme, Ă prĂ©sent, seuls les saints et ceux qui les Ă©coutent voient dans lâEsprit les mystĂšres de lâĂvangile avant quâils ne deviennent pleinement Ă©vidents dans la vie future, tandis que certains chrĂ©tiens ne veulent pas en entendre parler.
Mais quels sont ces mystĂšres Ă©vangĂ©liques vus par les saints et tous ceux qui les entourent ? Les mystĂšres sont ceux dont parlent les PĂšres, comme le Pseudo-Denys, Maxime le Confesseur et le Pseudo-Macaire, des auteurs que GrĂ©goire apprĂ©cie fortement et cite constamment[10]. Ils nous expliquent que Dieu transcende, surpasse, est au-dessus du don dĂ©ifiant quâil fait Ă lâhomme, de la divinitĂ© quâil communique Ă ceux qui en sont dignes. Il dĂ©passe ce don dĂ©ifiant, parce quâil en est lâorigine, la source, la cause Ă©ternelle. Cette grĂące dĂ©ifiante est, tout comme Dieu, incrĂ©Ă©e et Ă©ternelle. Contrairement aux ĂȘtres vivants et au monde, aux crĂ©atures et Ă la crĂ©ation, cette grĂące nâa pas de commencement dans le temps. Elle existe depuis toujours en Dieu. Par les PĂšres, nous apprenons que cette grĂące dĂ©ifiante est une lumiĂšre, celle qui rayonne autour de Dieu, des anges, mais Ă©galement des saints. Elle se manifeste aux hommes qui en sont dignes, hommes qui se sont le plus souvent longuement prĂ©parĂ©s Ă la recevoir, mais ils la reçoivent sans que lâon puisse dire que cette prĂ©disposition, aussi mĂ©ritoire soit-elle, est en quelque sorte la cause de leur illumination. LâĂȘtre humain ne dispose dâaucun moyen automatique pour obtenir et laisser transparaĂźtre en lui cette lumiĂšre Ă©manant de Dieu. Câest pourquoi elle est toujours une grĂące, une faveur que Dieu fait Ă lâhomme, sans que ce dernier ne connaisse le moment de sa manifestation. Les PĂšres nous enseignent encore que cette lumiĂšre rĂ©pand la joie en lâhomme, une joie spirituelle, profonde, ineffable, qui est lâun des signes les plus manifestes de la prĂ©sence de Dieu en lâhomme[11]. En outre, cette lumiĂšre constitue la beautĂ© du siĂšcle Ă venir, du Royaume de Dieu, de la vie Ă©ternelle. Nous rejoignons ici lâaccomplissement des mystĂšres de lâĂvangile dont parlait GrĂ©goire, Ă savoir la manifestation finale et plĂ©niĂšre de la gloire incrĂ©Ă©e, de la lumiĂšre Ă©ternelle. Câest lĂ le signe de la prĂ©sence de Dieu en tous les ĂȘtres auxquels il a donnĂ© la vie. Câest la transfiguration de toute la crĂ©ation. Le saint dans cette perspective eschatologique est celui qui dans lâEsprit apprĂ©hende dĂ©jĂ , ici et maintenant, mais pas encore complĂštement, cette rĂ©alitĂ© future. Et tous ceux qui se mettent Ă son Ă©coute et suivent ses conseils en sont Ă©galement les bĂ©nĂ©ficiaires (Tome hagioritique)[6].
Dieu inaccessible en son essence mais manifesté
Nous avons ici les bases de cette distinction en Dieu qui posa tant de problĂšmes Ă GrĂ©goire ou plutĂŽt Ă ses contradicteurs[12] : Dieu sâest rĂ©vĂ©lĂ© comme TrinitĂ©, PĂšre, Fils et Esprit, mais aussi, et câest paradoxal, comme un Dieu inaccessible en lui-mĂȘme et pourtant partout et toujours accessible dans le don quâil nous fait de lui-mĂȘme, de sa propre vie. Ce paradoxe est le fondement de la thĂ©ologie de Palamas, la distinction en Dieu entre son essence (ÎżáœÏία, ousia) imparticipable et son Ă©nergie (áŒÎœÎÏγΔÎčα, enĂ©rgeia) participable, entre ce que Dieu est en lui-mĂȘme, dĂšs lâorigine, sans les ĂȘtres crĂ©Ă©s par lui, et ce que Dieu est pour la crĂ©ation et les crĂ©atures, pour lâunivers et les ĂȘtres vivants, les hommes en particulier, avec lesquels il veut depuis toujours entrer en relation.
Il faut sâarrĂȘter quelques instants sur cette thĂ©ologie. Pour Palamas, il y a en rĂ©alitĂ© une triple distinction en Dieu : la TrinitĂ©, lâessence et les Ă©nergies [13], mais ces distinctions nâaffectent en rien son unitĂ©, car il nây a quâun seul Dieu trinitaire, vivant et agissant en son essence comme dans son Ă©nergie. Cette triple distinction sâexplique par le fait que lâessence de Dieu ne sâidentifie ni aux trois hypostases ou personnes divines, PĂšre, Fils et Esprit, qui la partagent tout en gardant une primautĂ© existentielle par rapport Ă elle[14], ni Ă lâĂ©nergie, parce quâelle en est la cause transcendante. Lâessence de Dieu, en tant que cause transcendante de lâĂ©nergie, possĂšde, rĂ©sume et unifie en elle-mĂȘme une multitude dâĂ©nergies, elle est capable de se multiplier sans se diviser en autant de rĂ©alitĂ©s participables quâil y a de participants[15], que ce soit pour crĂ©er le monde dans toute sa diversitĂ©[16] ou pour dĂ©ifier les hommes prĂ©disposĂ©s Ă la rĂ©ception de la grĂące[17]. LâĂ©nergie incrĂ©Ă©e, comme activitĂ© de Dieu en dehors de lui-mĂȘme, est absolument insĂ©parable de lâessence, elle en procĂšde et nâa pas dâexistence autonome par rapport Ă elle[18]. Puisque Dieu est indivisible, il est totalement prĂ©sent dans chacune de ses Ă©nergies. Le moindre atome dâĂ©nergie nous donne donc accĂšs Ă la totalitĂ© de Dieu et nous permet de le connaĂźtre et de le nommer[19]. Comme lâessence divine, dont elle provient et quâelle nous manifeste, lâĂ©nergie est omniprĂ©sente[20], il nây a pas par consĂ©quent un seul endroit dans tout lâunivers oĂč lâon ne puisse la trouver et par elle Dieu lui-mĂȘme. Enfin, cette Ă©nergie ne sera pleinement visible quâĂ la fin des temps, comme rayonnement de Dieu en toutes choses. LâĂ©nergie divine, câest au fond la communication que Dieu fait de lui-mĂȘme, afin que dâautres ĂȘtres, les ĂȘtres crĂ©Ă©s, les ĂȘtres humains en particulier, puissent exister et bĂ©nĂ©ficier de sa vie en abondance. En ce sens, lâĂ©nergie incrĂ©Ă©e est un effet Ă©ternel de la bontĂ© de Dieu Ă notre Ă©gard[21].
La synergie entre la volonté de Dieu et de l'homme dans le salut
Ce dĂ©veloppement appelle une question, celle de savoir comment, selon les mots de Palamas, ĂȘtre dignes dâune telle grĂące. Ou formulĂ©e autrement : quels sont les moyens qui peuvent nous prĂ©disposer Ă la rĂ©ception consciente de lâĂ©nergie dĂ©ifiante ? Il existe diffĂ©rents moyens qui vont ensemble et qui sont constitutifs de la vie chrĂ©tienne. Mais avant de les Ă©numĂ©rer, il faut insister sur le fait que ce ne sont jamais que des moyens mis en Ćuvre par lâactivitĂ© humaine. Or, lâhomme, par lui-mĂȘme, est incapable de se dĂ©ifier. Il a besoin de lâactivitĂ© de Dieu, de son intervention rĂ©pĂ©tĂ©e dans lâhistoire comme en tĂ©moigne lâĂcriture, de lâincarnation du Fils et de la communication de lâĂ©nergie de lâEsprit. En sens contraire, lâactivitĂ© salutaire de Dieu ne suffit pas non plus, car lâhomme a Ă©tĂ© crĂ©Ă© libre et Dieu se refuse Ă le contraindre mĂȘme au salut, câest tout Ă fait librement quâil doit y consentir. Mais, si ni lâactivitĂ© humaine ni lâactivitĂ© divine ne suffisent au salut, comment sortir de l'impasse ? Par une activitĂ© commune de lâhomme et de Dieu : il faut que lâhomme veuille ĂȘtre sauvĂ© et que Dieu veuille le sauver, il faut en lâhomme une synergie de son activitĂ© et de celle de Dieu par le biais du don permanent de la grĂące, de lâĂ©nergie, de lâEsprit rĂ©pandu en lui. Câest uniquement par cette collaboration humaine et divine que les diffĂ©rents moyens deviennent salutaires pour lâhomme.
L'altération de l'image de Dieu en l'homme
Parmi ces moyens, il y a dâabord et avant tout les mystĂšres ou sacrements de lâĂglise, principalement le baptĂȘme et lâeucharistie. Selon GrĂ©goire, notre salut tout entier en dĂ©pend[Note 3]. Pour comprendre cette affirmation, il faut faire un dĂ©tour par la doctrine de la corruption de la nature humaine par le pĂ©chĂ© et de sa rĂ©novation par lâincarnation du Verbe de Dieu[22]. Cette doctrine repose sur le rĂ©cit de la GenĂšse et sur lâĆuvre du Christ dâaprĂšs le Nouveau Testament. Le pĂ©chĂ© dâAdam, comme figure biblique et originelle de lâĂȘtre humain[Note 4], est la premiĂšre manifestation de la dĂ©sobĂ©issance Ă Dieu. Il est pour Palamas la cause dâune corruption de lâhumanitĂ©, dans les deux sens du terme : psychique et physique. Par son irruption, le pĂ©chĂ© occasionne une mort de lâĂąme avant mĂȘme celle du corps, un dĂ©sordre psychique et une dĂ©chĂ©ance du corps. En effet, Palamas envisage le pĂ©chĂ© comme une altĂ©ration de lâimage de Dieu en lâhomme, altĂ©ration par laquelle lâhomme devient incapable dâĂȘtre Ă la ressemblance de son CrĂ©ateur, de participer Ă la vie mĂȘme de Dieu (Chapitres 39)[23]. Or, cette altĂ©ration de lâimage divine en lâhomme est en rĂ©alitĂ© une dĂ©naturation de son intelligence (ÎœÎżáżŠÏ, noĂ»s), comprise comme Ă©tant la facultĂ© spirituelle la plus haute de lâĂąme, facultĂ© qui permet Ă lâhomme de connaĂźtre, de faire librement des choix et dâorienter toute sa vie en consĂ©quence. Cette dĂ©naturation a pour effet de priver lâhomme dâune facultĂ© qui Ă©tait la sienne Ă lâorigine, celle de voir Dieu[24] et donc de sâunir Ă lui. Si par le pĂ©chĂ© lâhomme perd cette ressemblance, la vie divine, et cette capacitĂ© visuelle de lâintelligence qui lâunissait Ă Dieu, il nâest pas pour autant abandonnĂ© Ă son sort. Il y a bien sĂ»r toutes les interventions divines dans lâhistoire biblique, mais il y a aussi et surtout la venue annoncĂ©e de JĂ©sus-Christ. Pour Palamas, câest prĂ©cisĂ©ment pour offrir la possibilitĂ© Ă lâhomme de retrouver son Ă©tat[25]originel et plus encore par la dĂ©ification, que le Verbe de Dieu sâest fait chair[26]. En effet, par lâunion hypostatique ou personnelle du Fils de Dieu Ă la nature humaine, celle-ci participe de nouveau et totalement Ă la vie divine. En sâincarnant, en devenant un homme Ă part entiĂšre, le Fils a pu unir notre humanitĂ© dĂ©chue Ă sa Personne divine et la restaurer en lui-mĂȘme par la communication de sa propre divinitĂ© : ce qui est prĂ©figurĂ© dans la Transfiguration et accompli dans la RĂ©surrection. Nous retrouvons en la Personne mĂȘme du Christ cette collaboration humaine et divine pour le salut. Selon lâimage de saint Paul, le Christ est le nouvel Adam, câest-Ă -dire le nouvel homme, celui qui transmet non plus le pĂ©chĂ© et la mort, mais la vie mĂȘme de Dieu, parce quâil est Dieu lui-mĂȘme. Comment fait-il cela ? PrĂ©cisĂ©ment par les mystĂšres ou sacrements de l'Ăglise, principalement le baptĂȘme et lâeucharistie, qui permettent une incorporation et une communion rĂ©elle au Corps dĂ©ifiĂ© et dĂ©ifiant du Christ, Corps qui contient la plĂ©nitude de la divinitĂ© et qui, selon Palamas, est la source de la lumiĂšre incrĂ©Ă©e, qui jaillit dans le cĆur du croyant[27] et illumine Ă nouveau son intelligence, ouvre Ă nouveau les yeux de lâĂąme[28] pour contempler Dieu, si lâhomme a foi en lui[29]. Par les mystĂšres ou sacrements, lâĂ©nergie de lâEsprit opĂšre en nous, si nous le croyons et le voulons, ce que le Fils a accompli une fois pour toutes en lui-mĂȘme, en sa propre chair pour nous. Dans cette perspective, lâĂglise, Corps du Christ, nâest donc rien de moins quâune communautĂ© dâhommes animĂ©e par la foi en JĂ©sus-Christ et en voie de dĂ©ification par la grĂące ou lâĂ©nergie de lâEsprit.
Le rétablissement de la maßtrise de l'intelligence sur les passions
Les mystĂšres ou sacrements ne sont pas les seuls moyens de dĂ©ification, mĂȘme sâils demeurent fondamentaux et incontournables pour le chrĂ©tien. La doctrine de la corruption de lâimage divine en lâhomme, lâintelligence, et de la possibilitĂ© offerte Ă lâhomme de retrouver la ressemblance Ă Dieu par la grĂące dĂ©bouche Ă©galement sur une perspective Ă©thique. Le pĂ©chĂ© est perçu par Palamas comme un bouleversement du fonctionnement originel et naturel des puissances de lâĂąme, bouleversement par lequel ce nâest plus la partie raisonnable de lâĂąme (les facultĂ©s de connaissance, de jugement et de raisonnement) qui gouverne la partie passionnĂ©e (le dĂ©sir et lâemportement), mais lâinverse. De cette façon, lâhomme se dĂ©tourne du bien, Dieu lui-mĂȘme, et se laisse conduire par ses passions, comme la cupiditĂ©, lâambition et la vanitĂ©, etc. Pour remĂ©dier Ă ce dĂ©sordre psychique et corporel, le moine hĂ©sychaste recherche lâimpassibilitĂ© (áŒÏΏΞΔÎčα, apathĂ©ia)[30], qui ne signifie nullement ici lâinsensibilitĂ© (ou selon l'Ă©tymologie le fait de ne plus souffrir et donc ressentir), ou encore une mise Ă mort de la partie passionnĂ©e de lâĂąme, qui en soi est bonne, mais le rĂ©tablissement des forces psychiques dans leurs fonctions premiĂšres, celles dâavant la chute occasionnĂ©e par le pĂ©chĂ© dans lâĂąme. Ce retournement sâopĂšre sous la direction de lâintelligence en synergie avec la grĂące et permet Ă lâhomme dâembrasser les vertus et les passions bienheureuses, dâacquĂ©rir de nouvelles et meilleures dispositions. Ce retournement offre la possibilitĂ© Ă lâhomme dâaccomplir progressivement les commandements Ă©vangĂ©liques dans lâamour du prochain et de Dieu. Lorsque lâhomme parvient Ă cet amour, il parvient selon GrĂ©goire Ă un Ă©tat proprement divin[31].
Palamas dira dans ce contexte[32] : « Par cette autoritĂ© (celle de l'intelligence en synergie avec la grĂące), nous fixons sa loi Ă chaque puissance de l'Ăąme et Ă chaque membre du corps ce qui lui convient : aux sens nous fixons l'objet et la limite de leur exercice ; cette Ćuvre de la loi s'appelle « tempĂ©rance » ; Ă la partie passionnĂ©e de l'Ăąme, nous procurons la meilleure maniĂšre d'ĂȘtre qui porte nom « amour » ; et nous amĂ©liorons aussi la partie raisonnable (de l'Ăąme) en rejetant tout ce qui empĂȘche l'intellect de s'Ă©lever vers Dieu : cette partie de la loi, nous la nommons « sobriĂ©tĂ© » (ÎœáżÏÎčÏ, nĂȘpsis). Celui qui a purifiĂ© son corps par la tempĂ©rance, celui qui, par l'amour divin, a fait de ses volontĂ©s et de ses dĂ©sirs une occasion de vertu, celui qui prĂ©sente Ă Dieu un esprit purifiĂ© par la priĂšre, acquiert et voit en lui-mĂȘme la grĂące promise Ă ceux qui ont le cĆur purifiĂ©. »
L'oraison hésychaste : faire l'expérience de Dieu
Si la grĂące reçue par les mystĂšres ou sacrements de lâĂglise ouvre la vie chrĂ©tienne sur une perspective Ă©thique qui culmine dans la capacitĂ© dâaimer comme Dieu aime, elle offre encore une autre possibilitĂ© en cette vie, celle de « voir » Dieu. Il ne saurait s'agir d'une connaissance extĂ©rieure. Il nâest pas question ici, par exemple, de la contemplation naturelle, par laquelle lâintelligence humaine parvient Ă dĂ©celer la marque de Dieu dans ce monde, c'est-Ă -dire Ă apprĂ©hender la raison des ĂȘtres crĂ©Ă©s par Dieu, la trace intelligible laissĂ©e par Dieu en chaque chose et qui permet de le reconnaĂźtre comme crĂ©ateur de lâunivers. Cette contemplation naturelle est certes une forme de connaissance de Dieu qui n'est pas sans valeur, mais ce nâest pas lĂ encore une connaissance vĂ©ritable de Dieu. Il en va de mĂȘme de tout ce que lâon peut apprendre sur Dieu par les Ăcritures, les dogmes ou les confessions de foi[33]. Toutes ces connaissances sont bonnes, mais elles restent extĂ©rieures Ă Celui dont elles parlent. La thĂ©ologie, au sens Ă©tymologique de discours sur Dieu, nâest pas encore la vision de Dieu. Dire quelque chose sur Dieu, ce nâest pas encore faire lâexpĂ©rience intime et personnelle de Dieu[34], expĂ©rience Ă laquelle lâhomme peut se prĂ©disposer par la priĂšre pure ou mĂ©thode dâoraison hĂ©sychaste.
Le mot grec hesychia (áŒĄÏÏ Ïία), qui est Ă lâorigine du terme hĂ©sychasme (áŒĄÏÏ ÏαÏÎŒÏÏ), signifie « tranquillitĂ©, calme, repos », et qualifie tout Ă la fois un Ă©tat de vie du moine hĂ©sychaste, la rĂ©clusion dans la solitude dâune cellule, et un Ă©tat correspondant de lâĂąme, le silence obtenu lorsque lâactivitĂ© des sens, de lâimagination et de lâintelligence sâapaise pour faire place Ă lâactivitĂ© de lâEsprit Saint.
Description de la méthode
La mĂ©thode dâoraison hĂ©sychaste suppose pour sa mise en pratique un lieu tranquille, solitaire, Ă lâĂ©cart de toute agitation, la position assise et les yeux fermĂ©s. Mais on peut aussi garder les yeux ouverts et fixer son regard sur la poitrine ou sur le nombril comme sur un point dâappui. Elle implique encore et surtout un Ă©tat de vigilance ou de sobriĂ©tĂ© (ÎœáżÏÎčÏ, nĂȘpsis) et un apprentissage Ă la maĂźtrise du souffle. Il est Ă noter, dans cette perspective, qu'il y a une Ă©troite correspondance entre le souffle et l'Esprit, comme le signifie dĂ©jĂ la Bible et l'usage d'un mĂȘme mot grec pour dĂ©signer chacune des deux rĂ©alitĂ©s (ÏÎœÎ”áżŠÎŒÎ±, pneĂ»ma). Il sâagit en fait de recueillir et dâapaiser lâintelligence (et de se libĂ©rer des pensĂ©es mauvaises)[Note 5] au rythme de lâinspiration et de lâexpiration.
Dans un premier temps, lâintelligence doit suivre le mouvement de lâinspiration qui descend jusquâau cĆur et y ĂȘtre retenue en mĂȘme temps que le souffle. Si lâon a les yeux ouverts, la fixation du regard sur la poitrine est une aide supplĂ©mentaire pour faire descendre lâintelligence dans le cĆur. Quant Ă la fixation du regard sur le nombril, elle vise plutĂŽt la lutte contre les mauvaises passions de lâĂąme[35], le ventre Ă©tant, avant de parvenir Ă la maĂźtrise de soi et selon cette anthropologie, le lieu d'une manifestation d'un dĂ©sordre psychique et corporel (c'est un effet de la loi du pĂ©chĂ© selon Palamas)[36]. Dans un second moment, lâexpiration permet un certain relĂąchement de lâattention jusquâĂ la reprise du souffle.
Cet exercice respiratoire sâaccompagne dâune invocation, de la rĂ©citation mentale et continue dâune formule, telle que « Seigneur JĂ©sus-Christ, Fils de Dieu, aie pitiĂ© de moi, pĂ©cheur »[Note 6] ou sous une forme brĂšve « Seigneur, aie pitiĂ© »[37]. Il faut un certain temps pour que cette invocation devienne tout Ă fait spontanĂ©e.
Cette mĂ©thode d'oraison (raillĂ©e par Barlaam, le premier adversaire de Palamas) n'est pas propre Ă GrĂ©goire Palamas, mais Ă toute une tradition spirituelle, celle prĂ©cisĂ©ment de l'hĂ©sychasme, et on en retrouve quelques Ă©lĂ©ments dans d'autres traditions spirituelles de l'humanitĂ©[Note 7] et mĂȘme en psychothĂ©rapie[Note 8]. La particularitĂ© ici est que l'hĂ©sychaste s'adresse directement et personnellement au Christ. C'est ce qui, dans la foi, importe le plus Ă ses yeux, beaucoup plus que la mĂ©thode elle-mĂȘme (qui est un moyen humain, dont l'efficacitĂ© dĂ©pend dans ce contexte de la grĂące divine).
Le but de cette oraison
Quel est le but de cette mĂ©thode assez simple dans sa description ? Il sâagit pour le moine hĂ©sychaste de purifier lâintelligence, de lui faire trouver le repos, lâhĂ©sychie, en la dĂ©tournant de toutes sensations, images ou conceptions mentales[38], ce qui la prĂ©dispose Ă la participation aux Ă©nergies divines[39]. Pourquoi faire descendre lâintelligence dans le cĆur en suivant le mouvement du souffle inspirĂ© ? Parce que le cĆur, dĂ©jĂ dans la Bible, est le siĂšge, le lieu propre, de lâintelligence[40], le lieu oĂč la grĂące du Christ se manifeste[27] et oĂč elle peut Ă son contact se surpasser elle-mĂȘme dans lâextase, lâunion Ă Dieu[41]. Pourquoi enfin invoquer continuellement JĂ©sus-Christ en le suppliant dâavoir pitiĂ© ? Dâune certaine façon, câest toute lâhistoire judĂ©o-chrĂ©tienne de la rĂ©demption qui se trouve rĂ©capitulĂ©e dans cette formule dont se souvient continuellement lâhĂ©sychaste en prĂ©sence du Christ. Son intelligence acquiert dans un effort soutenu une prise de conscience ininterrompue Ă la fois de lâimperfection de sa nature[Note 9] et de la misĂ©ricorde divine, de la promesse de la grĂące communiquĂ©e par le Fils dans lâEsprit. Tout ce qui vient le dĂ©tourner de cette rĂ©alitĂ© salvifique est Ă©cartĂ© par le souvenir de cette rĂ©alitĂ© qui sans cesse revient Ă la conscience jusquâĂ ce que lâĂ©nergie de lâEsprit fasse une irruption soudaine dans le cĆur et accomplisse effectivement ce quâil avait en mĂ©moire. Il sâagit lĂ dâune dĂ©marche de foi, oĂč lâintelligence, convaincue de sa faiblesse se rassemble et se tourne vers le Christ, en attendant de lui le salut comme accomplissement dâune promesse faite Ă lâhumanitĂ©. Ce faisant, lâintelligence ne le contraint pas Ă agir, mais se dĂ©tourne consciemment de tout ce qui pourrait lâempĂȘcher dâagir. Libre alors Ă lâEsprit dâintervenir dans ce cĆur purifiĂ©, prĂ©parĂ© Ă sa venue, câest-Ă -dire digne de lui[Note 10].
Lorsque Dieu rĂ©pond Ă cet appel, lorsque lâĂ©nergie divine apparaĂźt dans le cĆur, lâintelligence purifiĂ©e devient Ă son contact spirituelle et lumineuse, les facultĂ©s crĂ©Ă©es se transforment et la grĂące est transmise de lâĂąme au corps, qui lui aussi participe au salut. Les hommes dĂ©ifiĂ©s parviennent alors Ă voir avec les sens et lâintelligence ce qui les dĂ©passe[42]. Il se produit paradoxalement une sensation dĂ©passant les sens et une intellection dĂ©passant lâintellection[43]. Câest pour le saint la vision ou contemplation de Dieu. Lâintelligence retrouve cette capacitĂ© originelle de voir son CrĂ©ateur.
Le corps comme demeure de l'Esprit
Il y a, dans cette mĂ©thode d'oraison, par son attention portĂ©e au corps, une rupture radicale avec la philosophie grecque (platonisme et nĂ©oplatonisme), lorsqu'elle enseigne que l'intelligence devrait s'Ă©vader du corps (en suivant le mouvement d'une sortie ou extase), corps qui est perçu dans cette perspective comme une entrave et mĂȘme une prison. Pour Palamas, il s'agit d'une conception erronĂ©e, dans la mesure oĂč le corps est bon en soi (car crĂ©Ă© par Dieu) et le lieu mĂȘme du salut. Comme le dit saint Paul, le corps est "le temple de l'Esprit Saint" (1 Co 6, 19). Il insiste sur le fait, par exemple dans son traitĂ© Sur les saints hĂ©sychastes[44], que l'on ne doit aucunement chercher Ă faire sortir l'intelligence en dehors du corps, mĂȘme s'il est vrai que l'intelligence est par nature incorporelle, mais bien au contraire s'efforcer avec vigilance de l'y maintenir (c'est le mouvement mĂȘme de l'incarnation) et ce en vue de se libĂ©rer de l'esclavage de la loi du pĂ©chĂ©, dont parle Ă©galement saint Paul (Rm 7, 25), de s'unir au Christ dans le cĆur et par lui d'ĂȘtre dĂ©ifiĂ© tout entier, c'est-Ă -dire Ăąme et corps[Note 11].
L'union de l'homme Ă Dieu
S'agissant de la vision de Dieu ou de la contemplation de Dieu, le don dĂ©ifiant accordĂ© par lâEsprit constitue pour le voyant Ă la fois lâorgane et lâobjet de sa vision lumineuse[45]. Il est ce qui permet de voir et ce qui est vu, la lumiĂšre incrĂ©Ă©e de Dieu. Palamas dira que le voyant contemple ce qui est semblable Ă son mode de contemplation[46], quâil connaĂźt Dieu en Dieu[47] ou, en sens inverse, que câest Dieu lui-mĂȘme qui se contemple Ă travers lâĂąme et le corps transformĂ©s[48]. Ce quâil veut dire Ă chaque fois, câest que seule la lumiĂšre, lâĂ©nergie ou la grĂące, parce quâelle vient de Dieu et quâelle est Dieu lui-mĂȘme, peut nous faire connaĂźtre Dieu. Cette vision de la lumiĂšre par la lumiĂšre rĂ©alise lâunion de lâhomme Ă Dieu[49] et lui permet de retrouver la ressemblance qui existait entre eux Ă lâorigine. La progression dans cette contemplation de Dieu est infinie[Note 12], mĂȘme dans la vie future, non seulement parce que le dĂ©sir de lâhomme est sans limites Ă son Ă©gard, mais aussi parce que Dieu qui se laisse contempler est lui-mĂȘme infini[50]. Câest une façon dâexpliquer que lâhomme est mis en prĂ©sence dâune plĂ©nitude. Tout ce que lâhomme recherche de meilleur en cette vie ou est Ă jamais capable de dĂ©sirer dans lâautre vie sây trouve en abondance.
Il faut savoir toutefois que, pour Palamas, si lâĂ©nergie de lâEsprit est effectivement une plĂ©nitude qui nous est offerte dĂšs Ă prĂ©sent, personne en dehors du Christ nâest en mesure de la contenir totalement. La participation Ă cette Ă©nergie omniprĂ©sente par une intelligence purifiĂ©e, semblable Ă un combustible pour le feu divin, est toujours partielle et variĂ©e[20]. Cette Ă©nergie de lâEsprit se manifeste indivisiblement en autant dâĂ©clats quâil y a dâhommes dignes de la recevoir et se laisse participer en fonction de la capacitĂ© rĂ©ceptive de chacun dâentre eux. La mĂȘme et unique Ă©nergie de lâEsprit est communiquĂ©e Ă des hommes diffĂ©rents, qui ne sont pas en mesure dâen bĂ©nĂ©ficier entiĂšrement, mais bien en fonction Ă la fois de leur personnalitĂ© et de leur activitĂ© propres. Ce qui signifie que lâĂ©nergie divine ne supprime pas ce qui fait la singularitĂ© dâun homme, lorsquâelle le dĂ©ifie, elle sây adapte sous la forme notamment des charismes de lâEsprit dont parle saint Paul (1 Co 12, 4-11)[17].
Dieu vient tout entier habiter dans l'homme tout entier
Si lâhomme ne peut participer Ă la totalitĂ© de lâĂ©nergie de lâEsprit, il nâen reste pas moins vrai quâil sâagit dâun don par lequel Dieu tout entier vient demeurer en lâhomme tout entier[51]. Comment comprendre cette inhabitation de Dieu en lâhomme ? Pour lâexpliquer, Palamas se sert dâun terme empruntĂ© Ă la christologie. Ce terme est lâenhypostasie (ÎÎœÏ ÏÎżÏÏαÏία)[Note 13], qui dĂ©signe le fait dâinclure dans lâhypostase, dâintĂ©grer en sa personne mĂȘme. En sâincarnant, le Verbe de Dieu a assumĂ© la nature humaine en sa Personne divine, il lâa enhypostasiĂ©e. En sens inverse et grĂące Ă cette incarnation de Dieu, la personne humaine peut assumer non pas la nature de Dieu qui est imparticipable, mais son Ă©nergie. La dĂ©ification est une enhypostasie de lâĂ©nergie de lâEsprit, Ă©nergie qui est envoyĂ©e dans lâhypostase de lâhomme pour y ĂȘtre contemplĂ©e[52] en permanence[53]. Par ce don dĂ©ifiant permanent, la sagesse et la vie Ă©ternelle sont en lâhomme sans ĂȘtre sĂ©parĂ©es de Dieu[54]. Le saint acquiert par grĂące un nouveau mode dâexistence, par lequel sa personne est dĂ©sormais composĂ©e dâun nouvel Ă©lĂ©ment permanent qui vient sâajouter Ă lâĂąme et au corps et qui est lâĂ©nergie incrĂ©Ă©e de lâEsprit[55]. Si bien quâon peut dire de lui, en raison de la prĂ©sence de lâEsprit, quâil est incrĂ©Ă© par la grĂące[56], quâil est sans commencement ni fin[57]. LâintĂ©gration de ce nouvel Ă©lĂ©ment, devenu constitutif de la personne humaine dans la dĂ©ification, nâa pas pour effet la suppression de notre humanitĂ©. En devenant Dieu, nous ne cessons pas dâĂȘtre homme, psychique et corporel. Au contraire, pour Palamas, en devenant Dieu, nous devenons pleinement homme. Par la grĂące divine, notre nature humaine est menĂ©e progressivement Ă sa perfection : lâĂąme peut dĂšs Ă prĂ©sent voir Dieu, ĂȘtre animĂ©e par sa sagesse et sa bontĂ©, et le corps reçoit le gage de son incorruptibilitĂ© future, un avant-goĂ»t de la RĂ©surrection.
Au terme de ce parcours, le saint hĂ©sychaste acquiert donc un nouveau mode de vie caractĂ©risĂ© par la prĂ©sence permanente de lâĂ©nergie de lâEsprit en lui. Cette expĂ©rience est pour lui une initiation aux mystĂšres Ă©vangĂ©liques. Mais cette initiation nâest pas donnĂ©e pour lui seul. Le saint hĂ©sychaste sera respectĂ©, il recevra la confiance et lâaffection dâautres hommes, tous ceux qui viendront Ă lui pour ĂȘtre initiĂ©s Ă leur tour Ă ces mystĂšres, jusquâĂ ce que lâexpĂ©rience de ces mystĂšres eux-mĂȘmes constitue pour eux lâinitiation (Tome hagioritique)[6]. La paternitĂ© spirituelle, par laquelle un saint est capable de transmettre ce quâil a lui-mĂȘme reçu, y compris la grĂące (Chapitres 121)[58], Ă dâautres hommes qui suivent ses conseils et son enseignement, est primordiale dans ce contexte. Câest par elle que Palamas fut, dans cette chaĂźne de transmission spirituelle, le fils spirituel des maĂźtres de lâhĂ©sychasme byzantin, comme celui avant eux des PĂšres et de tous les saints de la littĂ©rature biblique.
Ăcrits
Grégoire Palamas, hiéromoine, ermite au Mont Athos, fut un authentique spirituel et un théologien influent[59].
Commentaire selon Lc 18, 9-14
- Il pense ne pas avoir besoin de Dieu
« La vertu peut relever et rĂ©tablir ceux qui sont tombĂ©s dans l'abĂźme des maux, et les conduire facilement Ă Dieu par le repentir et l'humilitĂ©. La parabole nous le fait comprendre suffisamment. Le publicain, bien qu'il soit publicain et passe sa vie dans ce que j'appellerai l'abĂźme du pĂ©chĂ©, s'unit par une simple priĂšre Ă ceux qui mĂšnent une vie conforme Ă la vertu. GrĂące Ă cette courte priĂšre il se sent lĂ©ger, il s'Ă©lĂšve, il triomphe de tout mal, il est agrĂ©gĂ© au chĆur des justes et justifiĂ© par le Juge impartial. Le pharisien, lui, est condamnĂ© sur ce qu'il dit, bien qu'il soit pharisien et se considĂšre comme quelqu'un d'important. Car il n'est pas vraiment juste, et de sa bouche sortent beaucoup de paroles d'orgueil qui, toutes, provoquent la colĂšre de Dieu.
Pourquoi l'humilité élÚve-t-elle l'homme à la hauteur de la sainteté, tandis que la présomption le précipite dans le gouffre du péché ? Voici. Celui qui se prend pour quelqu'un d'important devant Dieu est à juste titre abandonné par Dieu, puisqu'il pense ne pas avoir besoin de son secours. L'autre reconnaßt son néant et, de ce fait, se tourne vers la miséricorde divine. Il trouve à juste raison la compassion, l'assistance et la grùce de Dieu.
Car l'humilité est semblable à une nuée : elle prend corps dans le repentir, elle fait jaillir des yeux un torrent de larmes, elle rend dignes les indignes, elle conduit et unit à Dieu ceux qui, en raison de leur volonté droite, sont justifiés par la grùce. »
â GrĂ©goire Palamas. HomĂ©lie 2, trad. dir. par H. Delhougne, Les PĂšres de lâĂglise commentent lâĂvangile, Turnhout, Brepols, 1991, n° 200.
Quelques citations
- Sur lâessence imparticipable et lâĂ©nergie participiale
« DĂšs lors quâil y a trois caractĂšres de Dieu, lâessence, lâĂ©nergie, les hypostases divines de la TrinitĂ©, ceux qui ont Ă©tĂ© rendus dignes dâĂȘtre unis Ă Dieu jusquâĂ ĂȘtre avec lui un seul Esprit, comme lâa dit le grand Paul : « Celui qui sâattache au Seigneur est avec lui un seul Esprit » (1 Cor. 6, 17), car il a Ă©tĂ© montrĂ© plus haut que ceux qui en sont dignes ne sâunissent pas Ă Dieu dans son essence, et tous les thĂ©ologiens, attestent que Dieu nâest pas participable dans son essence. Lâunion selon lâhypostase se trouve ĂȘtre le fait du seul Verbe, le Dieu-Homme. Ceux qui ont Ă©tĂ© rendus dignes de sâunir Ă Dieu sâunissent donc par lâĂ©nergie. Et lâEsprit suivant lequel celui qui sâattache Ă Dieu est un avec Dieu, est et est appelĂ© Ă©nergie incrĂ©Ă©e de lâEsprit, mais non essence de Dieu, mĂȘme si cela dĂ©plaĂźt Ă ceux qui pensent le contraire. Car Dieu lâa prĂ©dit par le ProphĂšte : ce nâest pas mon Esprit, mais « de mon Esprit, que je rĂ©pandrai sur ceux qui croient » (Jl 3, 1) (trad. J. Touraille, Chapitre 75)[13].
- Sur l'Incarnation, la communion eucharistique et l'illumination du cĆur
« Puisque le Fils de Dieu, dans son incomparable amour pour les hommes, ne sâest pas bornĂ© Ă unir son Hypostase divine Ă notre nature, en endossant un corps animĂ© et une Ăąme douĂ©e dâintelligence, pour apparaĂźtre sur terre et vivre avec les hommes, mais puisquâil sâunit, ĂŽ miracle dâune incomparable surabondance, aux hypostases humaines elles-mĂȘmes, en se confondant lui-mĂȘme avec chacun des fidĂšles par la communion Ă son saint Corps, puisquâil devient un seul corps avec nous et fait de nous un temple de la DivinitĂ© tout entiĂšre, car dans le Corps mĂȘme du Christ habite corporellement toute la plĂ©nitude de la DivinitĂ©, comment nâilluminerait-il pas ceux qui communient dignement au rayon divin de son Corps qui est en nous, en Ă©clairant leur Ăąme comme il illumina les corps mĂȘmes des disciples sur le Thabor ? Car alors ce corps, source de la lumiĂšre de la grĂące, nâĂ©tait pas encore uni Ă nos corps : il illuminait du dehors ceux qui en approchaient dignement et envoyaient lâillumination Ă lâĂąme par lâintermĂ©diaire des yeux sensibles ; mais aujourdâhui, puisquâil est confondu avec nous et existe en nous, il illumine lâĂąme justement de lâintĂ©rieur » (trad. J. Meyendorff, Triades, 1, 3, 38).
- Sur la vision de la lumiÚre incréée et l'union à Dieu
« La contemplation de cette lumiĂšre est une union, bien quâelle ne dure pas chez les imparfaits. Mais lâunion avec la lumiĂšre est-elle autre chose quâune vision ? Et puisquâelle sâaccomplit avec lâarrĂȘt de lâactivitĂ© intellectuelle, comment sâaccomplirait-elle, sinon par lâEsprit ? Car câest dans la lumiĂšre quâapparaĂźt la lumiĂšre et câest dans une lumiĂšre semblable que se trouve la facultĂ© visuelle ; puisque cette facultĂ© nâa dâautre moyen dâagir, ayant quittĂ© tous les autres ĂȘtres, câest quâelle devient elle-mĂȘme tout entiĂšre lumiĂšre et sâassimile Ă ce quâelle voit ; elle sây unit sans mĂ©lange, Ă©tant lumiĂšre. Si elle se regarde elle-mĂȘme, elle voit la lumiĂšre ; si elle regarde lâobjet de sa vision, câest aussi de la lumiĂšre ; et si elle regarde le moyen quâelle emploie pour voir, câest lĂ encore de la lumiĂšre ; câest cela lâunion : que tout cela soit un, de sorte que celui qui voit nâen puisse distinguer ni le moyen, ni le but, ni lâessence, mais quâil ait seulement conscience dâĂȘtre lumiĂšre et de voir une lumiĂšre distincte de toute crĂ©ature » (trad. J. Meyendorff, Triades, 2, 3, 36).
- Sur la vision de Dieu comme preuve réelle de son existence et finalité de la priÚre pure
« Cette contemplation dĂ©passant les activitĂ©s intellectuelles est le seul moyen, le moyen le plus clair, le moyen par excellence pour montrer lâexistence rĂ©elle de Dieu et le fait quâil transcende les ĂȘtres. Comment, en effet, lâessence de Dieu nâexisterait-elle pas, puisque la gloire de cette nature divine se fait voir aux hommes qui ont surpassĂ© par la priĂšre pure tout ce qui, dans la lumiĂšre mĂȘme, est sensible et intelligible ? » (trad. J. Meyendorff, Triades, 2, 3, 38).
Ćuvres
(Liste non exhaustive)
- GrĂ©goire Palamas, DĂ©fense des saints hĂ©sychastes, introduction, texte critique, traduction et notes par J. Meyendorff, coll. âSpicilegium sacrum Lovaniense : Ă©tudes et documentsâ, volumes 30-31, Louvain, 1973 (sans doute l'Ćuvre la plus importante).
- GrĂ©goire Palamas, De la dĂ©ification de l'ĂȘtre humain, traduit par M.-J. Monsaingeon et J. Paramelle, coll. "Sophia", L'Ăge d'Homme-Lausanne, 1990, p. 13-41 (contenu : De la divine et dĂ©ifiante participation ou de la divine et surnaturelle simplicitĂ©).
- Grégoire Palamas (trad. du grec ancien par Yvan Koenig), Les Cent cinquante chapitres, Cerf, , 198 p.
- GrĂ©goire Palamas, TraitĂ©s dĂ©monstratifs sur la procession du Saint-Esprit, introduction par Jean-Claude Larchet, traduction et notes par Yvan Koenig, coll. "Cerf-Patrimoines", Les Ăditions du Cerf, Paris, 2017.
- Joie de la Transfiguration d'aprÚs les PÚres d'Orient, coll. "Spiritualité Orientale" 39, Abbaye de BelleFontaine, 1985, p. 237-256 (contenu : Deux homélies sur la Transfiguration du Seigneur).
- Philocalie des PĂšres neptiques. Ă l'Ă©cole mystique de la priĂšre intĂ©rieure, tome B, volume 3 : De GrĂ©goire Palamas Ă Calliste et Ignace Xanthopouloi, notices et traduction par Jacques Touraille, Abbaye de Bellefontaine, 2005, p. 435-541 (contenu : Lettre Ă la moniale XĂ©nĂ©e, DĂ©calogue, Sur les saints hĂ©sychastes, Sur la priĂšre et la puretĂ© du cĆur, 150 chapitres physiques, thĂ©ologiques, Ă©thiques et pratiques, Tome hagioritique sur les saints hĂ©sychastes).
- Saint GrĂ©goire Palamas (trad. JĂ©rĂŽme Cler), HomĂ©lies : Le cycle des douze fĂȘtes majeures, Bagnolet, Lis & Parle, coll. « Patrimoine orthodoxe », , 432 p. (ISBN 978-2915387124)Dans ses homĂ©lies sur les douze fĂȘtes majeures, vingt-quatre en tout, GrĂ©goire Palamas se rĂ©vĂšle non seulement un grand spirituel, mais aussi un pasteur et un enseignant attentif Ă sa communautĂ©. Sans doute parmi les plus beaux du monde byzantin, ces sermons sont un vĂ©ritable bijou de spiritualitĂ©, de pastorale, d'exĂ©gĂšse patristique et de poĂ©sie lyrique.
Notes et références
Notes
- La synthĂšse proposĂ©e ici repose principalement, mais non pas exclusivement, sur le travail de Jean Meyendorff, Ă savoir surtout son Ă©tude et sa traduction critique de la DĂ©fense des saints hĂ©sychastes de GĂ©goire Palamas (voir la bibliographie). Comme le prĂ©cise donc Meyendorff, cette Ćuvre de Palamas, sans doute la plus importante, se subdivise en trois triades, chacune composĂ©e (donc) de trois traitĂ©s, eux-mĂȘmes divisĂ©s en plusieurs paragraphes. Les rĂ©fĂ©rences donnĂ©es ci-dessous sont alors aussi prĂ©cises qu'un numĂ©ro de page pour retrouver le texte citĂ© ou auquel il est fait explicitement allusion. Par exemple, Triades 1, 2, 3 signifie dans l'ordre des chiffres : DĂ©fense des saints hĂ©sychastes (= Triades), premiĂšre triade (= 1), deuxiĂšme traitĂ© (= 2), troisiĂšme paragraphe (= 3), ce qui correspond, pour le lecteur qui dispose de cet ouvrage, aux pages 78-79 (en raison du vis-Ă -vis du texte grec et de sa traduction) du premier volume (n° 30) de la DĂ©fense des saints hĂ©sychastes de GrĂ©goire Palamas. L'avantage de cette rĂ©fĂ©rence par rapport Ă un numĂ©ro de page est de pouvoir Ă©galement se situer aisĂ©ment dans une autre Ă©dition de cette mĂȘme Ćuvre (par exemple, dans The Triads, voir la bibliographie de l'article WikipĂ©dia intitulĂ© : "Gregory Palamas"). Sur le plan des Triades, voir l'introduction de Jean Meyendorff donnĂ©e dans ce mĂȘme volume, p. XLIII.
- Ses vues sont évidemment fortement éloignées de celles de l'exégÚse actuelle.
- Cette considĂ©ration sur les "saints mystĂšres" est surtout dĂ©veloppĂ©e dans ses homĂ©lies. Voir GrĂ©goire Palamas, Douze homĂ©lies pour les fĂȘtes.
- Adam n'était pas encore considéré comme un personnage mythique.
- Le contexte est donc celui de la lutte contre les logismoĂŻ ou pensĂ©es (mauvaises), objet inĂ©vitable de la pratique du moine, contexte qui est commun Ă toute la tradition spirituelle dans laquelle s'inscrit Palamas. Une grande figure ici, en raison Ă la fois de sa fine analyse de ces huit pensĂ©es gĂ©nĂ©riques (gourmandise, luxure, avarice, tristesse, colĂšre, acĂ©die, vaine gloire et orgueil) et de sa grande influence, mĂȘme en Occident Ă travers Jean Cassien (IVeâââVe siĂšcles4), est celle d'Ăvagre le Pontique (IVe siĂšcle), que Palamas connaĂźt sous le nom de saint Nil.
- La formule est souvent dĂ©composĂ©e en deux parties et rĂ©partie alors sur lâinspiration et l'expiration.
- Sans pouvoir entrer ici dans le dĂ©tail, disons qu'on retrouve certains Ă©lĂ©ments au moins dans le taoĂŻsme, l'hindouisme, le bouddhisme et le soufisme. Quelques points communs, variables selon les traditions : le renoncement au monde et la solitude, l'attention Ă soi-mĂȘme et la concentration de l'esprit, l'apaisement des pensĂ©es et Ă©motions nĂ©gatives, le rĂŽle fondamental du corps et en particulier du cĆur, la maĂźtrise du souffle et de l'Ă©nergie vitale, l'invocation et la rĂ©pĂ©tition d'un nom divin, la recherche d'une illumination, d'un Ă©veil, d'une libĂ©ration, etc. C'est l'effort humain ou cette tension de l'homme vers un au-delĂ de la conscience ordinaire et limitĂ©e de la Vie qui est soulignĂ© ici, Ă travers la mise en Ćuvre de ces divers moyens Ă disposition de chacun, de par le simple fait d'ĂȘtre humain.
- Par exemple dans les thĂ©rapies fondĂ©es sur la pleine conscience, qui s'inspirent du bouddhisme. La notion de pleine conscience trouve une correspondance avec la vigilance ou la sobriĂ©tĂ© (nĂȘpsis) des hĂ©sychastes (selon la LXX : "garde-toi toi-mĂȘme et veille attentivement sur ton Ăąme", voir Dt 4, 9). C'est ce que le bouddhisme appelle, quant Ă lui, l'attention juste (sammÄ sati), l'un des membres du noble sentier octuple).
- Il n'y a pas ici de jugement moral posé sur l'homme, mais le simple constat d'un inaccomplissement.
- C'est une liturgie du cĆur.
- Palamas dira, en citant une parole (en italiques) de L'Ăchelle sainte de Jean Climaque : "L'hĂ©sychaste est celui qui s'efforce de contenir l'incorporel dans son corps : ce qu'unanimement nos pĂšres spirituels nous ont enseignĂ© Ă bon droit. Car si l'homme n'est pas capable de contenir l'incorporel au-dedans du corps, comment pourra-t-il porter en lui-mĂȘme Celui qui s'est uni au corps (= le Christ), et qui avance, comme une forme naturelle, Ă travers toute la matiĂšre organisĂ©e, dont l'extĂ©rioritĂ© et la division ne sauraient correspondre Ă l'essence de l'intelligence, si Ă la fin cette matiĂšre ne se mettait Ă vivre aprĂšs avoir suscitĂ© en elle une forme de vie accordĂ©e Ă l'union". Voir : Philocalie des PĂšres neptiques, Tome B, volume 3, p. 475.
- Cette idée est développée notamment par Grégoire de Nysse, l'un des trois PÚres Cappadociens et grand théologien mystique du IVe siÚcle. Il s'agit de la notion d'épectase (epéktasis) ou de progrÚs de l'homme vers Dieu.
- On trouve notamment ce terme dans la pensée de Léonce de Byzance, auteur byzantin des Ve et VIe siÚcles. Maxime le Confesseur l'utilise également dans sa christologie. Le contexte de la pensée de ces auteurs à ce sujet est celui de l'interprétation de la définition christologique du concile de Chalcédoine, qui s'est tenu en 451.
Références
- Sur les sources de la pensée de Grégoire Palamas et la tradition spirituelle à laquelle il appartient, voir par exemple J. Meyendorff, Saint Grégoire Palamas et la mystique orthodoxe, p. 11-53.
- Sur la vie et lâĆuvre de GrĂ©goire Palamas, voir en premier lieu Jean Meyendorff, Introduction Ă l'Ă©tude de GrĂ©goire Palamas, pp. 25-170. Voir Ă©galement un rĂ©sumĂ© dans l'introduction de Jean-Claude Larchet aux TraitĂ©s apodictiques sur la procession du Saint-Esprit, Les Ăditions de l'Ancre, Paris-Suresnes, 1995, p. 9 et suivantes (voir la bibliographie pour la nouvelle Ă©dition de cet ouvrage). On trouve aussi des indications biographiques dans la plupart des ouvrages mentionnĂ©s dans la bibliographie.
- Apostolos Kralidis 2015, p. 455-457.
- Triades 3, 1, 2.
- Sur les difficultés rencontrées à la lecture de Palamas, voir l'ouvrage de Lison, J., L'Esprit répandu. La pneumatologie de Grégoire Palamas, p. 17 et suivantes.
- Philocalie des PĂšres neptiques, Tome B, volume 3, p. 536 et suivantes.
- Triades 3, 3, 3.
- Triades 2, 3, 38.
- Triades 3, 1, 32.
- Voir l'introduction de Jean Meyendorff à Grégoire Palamas, Défense des saints hésychastes, p. XXXIV et suivantes. Citons encore parmi les sources théologiques et spirituelles de Palamas : Evagre le Pontique (cité sous le pseudonyme de Nil), Jean Climaque, Isaac de Ninive, les PÚres Cappadociens, Jean Chrysostome et les maßtres de l'hésychasme byzantin du XIVe siÚcle.
- Triades 3, 1, 36.
- Sur cette distinction entre essence et énergie en Dieu et la polémique à ce sujet (qui s'est maintenue jusqu'à nos jours), voir : Lison, J., L'Esprit répandu. La pneumatologie de Grégoire Palamas, p. 101 et suivantes.
- GrĂ©goire Palamas, 150 chapitres physiques, thĂ©ologiques, Ă©thiques et pratiques, chap. 75 ; Ćuvre reprise dans la Philocalie des PĂšres neptiques, Tome B, volume 3, p. 508-509.
- Triades 3, 2, 12.
- Triades 3, 2, 24-25.
- Triades 3, 2, 26.
- Triades 3, 2, 13.
- Triades 3, 1, 24.
- Triades 3, 2, 10-11.
- Triades 3, 1, 34.
- Triades 3, 2, 24.
- Voir par exemple : J. Meyendorff, Introduction à l'étude de Grégoire Palamas, pp.181-185.
- Philocalie des PĂšres neptiques, Tome B, volume 3, p. 495.
- Triades 1, 1, 3.
- Triades 2, 3, 21.
- Triades 1, 1, 22.
- Triades 1, 3, 38.
- Triades 1, 3, 33.
- Triades 2, 3, 40.
- Voir par exemple : Mantzaridis, G. I., La doctrine de saint GrĂ©goire Palamas sur la dĂ©ification de lâĂȘtre humain, pp. 99-107.
- Triades 2, 2, 19 et 1, 2, 2.
- Triades 1, 2, 2. Traduction de J. Meyendorff.
- Triades 1, 3, 48 et 2, 3, 18 et 40
- Triades 1, 3, 42
- Triades 1, 2, 7-8.
- Ibidem. L'obstacle est donc le péché et non le corps. Une fois que l'ordre est revenu, tout change selon Jn 7, 38-39 : "Celui qui croit en moi ( = le Christ)... des fleuves d'eau vive couleront de son ventre. Or il disait cela de l'Esprit qu'allaient recevoir ceux qui croyaient en lui".
- Cette formule se trouve déjà dans le Nouveau Testament et témoigne sans doute d'un usage liturgique des premiÚres communautés chrétiennes. Voir par exemple Mt 15, 22.
- Triades 2, 2, 15.
- Triades 2, 1, 30.
- Triades 1, 2, 3.
- Triades 1, 2, 5.
- Triades 3, 3, 10.
- Triades 3, 1, 35-36.
- Voir Philocalie des PÚres neptiques, Tome B, volume 3, pp. 471-479. Ce traité correspond à Triades 1, 2.
- Triades 3, 2, 14.
- Triades 2, 3, 31.
- Triades 2, 3, 68.
- Triades 1, 3, 37.
- Triades 2, 3, 36.
- Triades 2, 2, 11.
- Triades 3, 1, 27. L'idĂ©e que Dieu tout entier vient demeurer en l'homme tout entier se trouve dĂ©jĂ formulĂ©e chez Maxime le Confesseur (VIeâââVIIe siĂšcles), moine, thĂ©ologien exceptionnel et auteur spirituel auquel GrĂ©goire doit beaucoup.
- Triades 3, 1, 9.
- Triades 3, 1, 18.
- Triades 3, 1, 35-36 et 38.
- Triades 1, 3, 43.
- Triades 3, 1, 31.
- Triades 3, 3, 8.
- Philocalie des PĂšres neptiques, Tome B, volume 3, p. 525.
- PÚre Nikolaï Tikhonchuk, « Saint Grégoire Palamas (1296-1359) », .
Bibliographie
- Staniloae, D., La vie et la doctrine de Saint Grégoire Palamas, Sibiu, 1938. (Premier ouvrage moderne sur la théologie palamite. La monographie que Jean Meyendorff dédie à Grégoire viendra vingt ans plus tard.)
- Jean-Claude Larchet, Introduction, dans Saint GrĂ©goire Palamas, TraitĂ©s apodictiques sur la procession du Saint-Esprit, coll. âLâArbre de JessĂ©â, Paris-Suresnes, Ăditions de lâAncre, 1995, p. 9-104 (la question du Filioque Ă©tudiĂ©e de prĂšs).
- Apostolos Kralidis, « La rencontre de lâorthodoxie et de lâislam au 14e siĂšcle : les positions de GrĂ©goire Palamas et de lâempereur Jean VI CantacuzĂšne », Revue des sciences religieuses, vol. 89, no 4,â , p. 451-459 (lire en ligne).
- Jacques Lison (prĂ©f. J. M. R. Tillard), LâEsprit rĂ©pandu. La pneumatologie de GrĂ©goire Palamas, Paris, Ăditions du Cerf, coll. « Patrimoines orthodoxie », , 305 p. (prĂ©sentation en ligne) (une Ă©tude d'ensemble fouillĂ©e de la pensĂ©e de Palamas, sous l'angle de la pneumatologie).
- Mantzaridis, G. I., La doctrine de saint GrĂ©goire Palamas sur la dĂ©ification de lâĂȘtre humain, traduction par M.-J. Monsaingeon, dans Saint GrĂ©goire Palamas. De la dĂ©ification de lâĂȘtre humain, coll. âSophiaâ, LâĂge dâhomme-Lausanne, 1990, p. 43-160 (Bon dĂ©veloppement sur un thĂšme central chez Palamas).
- Jean Meyendorff, Introduction Ă lâĂ©tude de GrĂ©goire Palamas, Ăditions du Seuil, coll. « âPatristica sorbonensiaâ 3 », , 432 p. (ASIN B003MWPIR8, prĂ©sentation en ligne) (prĂ©sentation ancienne, mais dĂ©taillĂ©e de la vie et des principaux thĂšmes de la thĂ©ologie de Palamas).
- âPalamas (GrĂ©goire)â, Dictionnaire de spiritualitĂ©, 12, Paris, Beauchesne, 1984, col. 81-107 (SynthĂšse de rĂ©fĂ©rence).
- Saint Grégoire Palamas et la mystique orthodoxe, Seuil, coll. « Points Sagesses », , 143 p. (ISBN 978-2020526425, présentation en ligne) (présentation plus simple de Palamas et de la tradition spirituelle dans laquelle il s'inscrit. Bien pour commencer).
- Palamas (GrĂ©goire), thĂ©ologien byzantin, auteur spirituel, archevĂȘque de Thessalonique, 1296-1359 (canonisĂ© dans lâĂglise orthodoxe) (Dictionnaire de spiritualitĂ©), Beauchesne Ăditeur, coll. « Format Kindle », , 47 p. (ASIN B07TLP7ZKQ)
- Martin Jugie, « La controverse palamite (1346-1368). Les faits et les documents conciliaires », Ăchos d'Orient, t. 30, no 164,â , p. 397-421. (lire en ligne)
- Daniel Sternion, « Bulletin sur le Palamisme », Revue des Ă©tudes byzantines, t. 30,â , p. 231-341. (lire en ligne)