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Oxyde de phosphine

Les oxydes de phosphine sont des composés phosphorés de formule OPX3. Lorsque X est un alkyle ou un aryle, on parle alors d'oxydes d'organophosphine, avec l'oxyde de triphénylphosphine comme exemple ; le trichlorure de phosphoryle (Cl3PO) est un oxyde de phosphine inorganique.

Formule générale des oxydes d'organophosphine.

Les oxydes de phosphine sont des composés thermostables, ne se décomposant qu'au-dessus de 450 °C[1].

Le terme « phosphoryle Â» rĂ©fĂšre au groupe fonctionnel avec une liaison double phosphore-oxygĂšne.

Composé parent

ModÚle ball-and-stick du composé parent des oxydes de phosphine.

Le composĂ© parent de cette famille est l'oxyde de phosphine (H3PO), un composĂ© instable. Il a Ă©tĂ© dĂ©tectĂ© par spectromĂ©trie de masse comme produit de la rĂ©action entre le dioxygĂšne et la phosphine[2], par spectroscopie infrarouge Ă  transformĂ©e de Fourier dans la rĂ©action entre la phosphine et l'ozone[3] et par isolement de matrice dans la rĂ©action entre la phosphine, l'oxytrichlorure de vanadium et le chlorure de chromyle[4]. Sa prĂ©sence a aussi Ă©tĂ© rapportĂ©e, dans un Ă©tat relativement stable, dans une solution d'eau-Ă©thanol par oxydation Ă©lectrochimique du phosphore blanc, oĂč il se dismute lentement en phosphine et acide hypophosphoreux[5].

L'oxyde de phosphine est un tautomĂšre de l'acide phosphineux (H2POH).

L'oxyde de phosphine a été rapporté comme intermédiaire réactionnel à température ambiante dans la polymérisation de la phosphine et de l'oxyde nitrique en PxHy solide[6].

Liaisons

Selon la théorie de l'orbitale moléculaire, la liaison courte P-O s'explique par le don d'une paire d'électrons non liante de l'orbitale p de l'oxygÚne vers l'orbitale anti-liante phosphore-carbone ; cette hypothÚse, qui résultait de calculs ab initio, fait à présent consensus dans la communauté des chimistes[7].

La nature de la liaison phosphore-oxygĂšne a longuement Ă©tĂ© dĂ©battue, car l'implication des orbitales d liantes du phosphore n'est pas Ă©tayĂ©e par les analyses computationnelles. En termes de structure simple de Lewis, cette liaison est reprĂ©sentĂ©e de façon plus prĂ©cise comme une liaison covalente de coordination (« liaison dative »), comme c'est le cas pour les « oxydes d'amine Â».

SynthĂšse

Les oxydes de phosphine sont en général des sous-produits de la réaction de Wittig :

R3PCR'2 + R"2CO → R3PO + R'2C=CR"2.

Une autre voie commune de synthÚse des oxydes de phosphine est la thermolyse des hydroxydes de phosphonium. En laboratoire, les oxydes de phosphine sont en général produits par oxydation, souvent accidentelle, de phosphines tertiaires :

R3P + 1/2 O2 → R3PO.

Utilisations

Les oxydes de phosphine sont des ligands utilisés dans diverses catalyses homogÚnes.

  • En chimie de coordination, ils sont connus pour avoir des effets de labilitĂ© envers les ligands CO cis par rapport Ă  eux, dans les rĂ©actions organomĂ©talliques. Ce procĂ©dĂ© est dĂ©crit par l'effet cis.
  • Typiquement, les oxydes de phosphine sont perçus comme des sous-produits inutiles de la rĂ©action de Wittig. Ils peuvent cependant ĂȘtre utilisĂ©s dans des rĂ©actions de type Wittig. Par exemple, le benzaldĂ©hyde peut ĂȘtre converti en ÎČ-mĂ©thoxystyrĂšne en utilisant l'oxyde de mĂ©thoxymĂ©thyldiphĂ©nylphosphine, dans une procĂ©dure Ă  deux Ă©tapes. Dans un premier temps, l'oxyde de phosphine est dĂ©protonĂ© Ă  −90 °C dans le THF/Ă©ther par le diisopropylamidure de lithium, puis l'aldĂ©hyde est ajoutĂ© au mĂ©lange rĂ©actionnel. AprĂšs traitement aqueux, les adduits sont isolĂ©s. Ils sont ensuite convertis en styrĂšnes Ă  tempĂ©rature ambiante par le t-butoxyde de potassium. Comme les adduits existent sous la forme d'un mĂ©lange de composĂ©s D/L sĂ©parables sous forme mĂ©so, les styrĂšnes finaux obtenus peuvent l'ĂȘtre sous forme pure E ou Z[8].
  • En 2019, Ross Denton et ses collĂšgues (UniversitĂ© de Nottingham) ont montrĂ© que l'oxyde de phosphine peut ĂȘtre utilisĂ©e comme catalyseur pour verdir la rĂ©action de Mitsunobu, une rĂ©action chimique trĂšs utilisĂ©e par l'industrie pour produire des mĂ©dicaments, pesticides et explosif, en supprimant la production de dĂ©chets toxiques et en rĂ©gĂ©nĂ©rant le seul sous-produit de la rĂ©action, ne laissant in fine que la molĂ©cule d'intĂ©rĂȘt et de l'eau[9].

Notes et références

  1. D. E. C. Corbridge, Phosphorus: An Outline of its Chemistry, Biochemistry, and Technology, 5e Ă©d., Elsevier, Amsterdam, 1995. (ISBN 0-444-89307-5).
  2. Peter A. Hamilton et Timothy P. Murrells, Kinetics and mechanism of the reactions of PH3 with O(3P) and N(4S) atoms, J. Chem. Soc., Faraday Trans. 2, 1985, 81, 1531-1541 DOI 10.1039/F29858101531
  3. Robert. Withnall, Lester. Andrews, FTIR spectra of the photolysis products of the phosphine-ozone complex in solid argon, J. Phys. Chem., 1987, 91 (4), p. 784-797, DOI 10.1021/j100288a008
  4. David A. Kayser et Bruce S. Ault, Matrix Isolation and Theoretical Study of the Photochemical Reaction of PH3 with OVCl3 and CrCl2O2, J. Phys. Chem. A., 2003, 107 (33), p. 6500-6505, DOI 10.1021/jp022692e
  5. Yakhvarov, D., Caporali, M., Gonsalvi, L., Latypov, S., Mirabello, V., Rizvanov, I., Sinyashin, O., Stoppioni, P. et Peruzzini, M. (2011), Experimental Evidence of Phosphine Oxide Generation in Solution and Trapping by Ruthenium Complexes, Angewandte Chemie, International Edition, 50: 5370–5373. DOI 10.1002/anie.201100822
  6. Yi-Lei Zhao, Jason W. Flora, William David Thweatt, Stephen L. Garrison, Carlos Gonzalez, K. N. Houk et Manuel Marquez, Phosphine Polymerization by Nitric Oxide: Experimental Characterization and Theoretical Predictions of Mechanism, Inorg. Chem., 2009, 48 (3), p. 1223–1231, DOI 10.1021/ic801917a
  7. D. B. Chesnut, « The Electron Localization Function (ELF) Description of the PO Bond in Phosphine Oxide », Journal of the American Chemical Society, vol. 121, no 10,‎ , p. 2335–2336 (DOI 10.1021/ja984314m)
  8. T. A. M. van Schaik et A. van der Gen, Synthesis of 3-(1-alkenyloxy)-1,2-propanediols, enol ethers of glycerol, by the horner-wittig reaction, Recueil des Travaux Chimiques des Pays-Bas, vol. 102, issue 10, 1983, p. 465–466, DOI 10.1002/recl.19831021009
  9. A reaction used by chemists worldwide goes green ;Thanks to a catalyst, a crucial chemical process no longer requires an explosive ingredient., Nature, publié le 13 sept 2019
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