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Origine du SARS-CoV-2

L'origine du SARS-CoV-2 renvoie Ă  l'ensemble des enquĂȘtes menĂ©es sur les causes et l'Ă©mergence de la maladie Ă  coronavirus 2019. L'origine du SARS est encore incertaine. Le rĂ©servoir animal initial se trouve chez la chauve-souris chinoise Rhinolophus affinis. Son adaptation Ă  l'humain pourrait rĂ©sulter d’un passage direct des chauves-souris aux humains ou d’une transmission impliquant un hĂŽte intermĂ©diaire, via un mĂ©canisme de saut de la barriĂšre des espĂšces. L'hypothĂšse d'un accident de laboratoire de virologie, vigoureusement Ă©cartĂ©e par les premiĂšres enquĂȘtes sur l'origine du Covid-19 chez l'humain coordonnĂ©es par l'OMS, fait pourtant partie des scĂ©narios possibles[1], d'autant que le virus n'a Ă©tĂ© trouvĂ© nulle part dans la nature[2]. L'identitĂ©, le lieu, le temps et le mĂ©canisme de transmission au « patient zĂ©ro » doivent encore ĂȘtre Ă©lucidĂ©s[3] - [4].

Le National Intelligence Council et quatre autres agences estiment n'avoir « qu'une faible confiance dans la probabilitĂ© que le virus soit apparu par transmission naturelle Ă  partir d'un animal infectĂ©, sans pour autant considĂ©rer qu'il soit certain que l'hypothĂšse de la fuite de laboratoire soit la bonne »[5]. En fĂ©vrier 2023, le DĂ©partement de l'Énergie des États-Unis considĂšre la thĂ©orie de l'accident de laboratoire ("lab leak theory") comme la source la plus probable de l'origine du Covid-19[6]. Le Federal Bureau of Investigation (FBI) considĂ©rait cette hypothĂšse comme la plus probable depuis novembre 2021[7]. En revanche, d'autres agences de renseignement amĂ©ricaines ne privilĂ©gient pas cette hypothĂšse.

Histoire

Wuhan comme Ă©picentre

En dĂ©cembre 2019 et janvier 2020, une Ă©pidĂ©mie Ă  pneumopathie Ă©clate en Chine et touche surtout la province du Hubei. Le marchĂ© de gros de fruits de mer de Huanan, Ă  Wuhan, est dĂ©signĂ© comme Ă©picentre de l'Ă©pidĂ©mie par les autoritĂ©s locales le [8]. Il est fermĂ© le lendemain mĂȘme, le . Le marchĂ© de Huanan a la particularitĂ© d'offrir une grande diversitĂ© de produits issus de la faune sauvage[9]. Les premiers symptĂŽmes attribuables a posteriori au SARS-CoV-2 seraient toutefois apparus dĂšs le chez un patient n'ayant pas frĂ©quentĂ© ce marchĂ©[10].

Le premier cas exporté hors de la Chine continentale est découvert le en Thaïlande[11]. La situation se dégrade rapidement au niveau mondial, et l'épidémie est déclarée urgence de santé publique de portée internationale par l'OMS le [12]. C'est la sixiÚme fois seulement que l'OMS déclenche ce niveau d'alerte dans son histoire[13]. Dans les premiÚres semaines de l'épidémie de 2019-2020, le virus se propage via des voyageurs vers différents pays d'Asie[14] - [15] - [16], le 21 janvier en Amérique du Nord[17], le , en Australie[18], en Europe[19] - [20], le 16 février en Afrique[21] et le en Amérique du Sud[22]. Il s'agit là des premiers cas recensés, en réalité le virus est probablement arrivé plus tÎt sur chacun de ces territoires, en y passant inaperçu. Le SARS-CoV-2 circulait probablement en France dÚs novembre 2019[23].

Mi-fĂ©vrier 2020, le plus important foyer hors de Chine est le paquebot de croisiĂšre Diamond Princess, en quarantaine dans le port de Yokohama[24]. Dans la troisiĂšme semaine de fĂ©vrier des foyers secondaires d'importance Ă©mergent en CorĂ©e du Sud, en Italie et en Iran[25], faisant craindre une installation durable de l'Ă©pidĂ©mie au niveau mondial[26]. Cette crainte se confirme dĂ©but mars : le , le directeur gĂ©nĂ©ral de l'OMS dĂ©clare que « la COVID-19 peut ĂȘtre qualifiĂ©e de pandĂ©mie »[27].

Arbre phylogénétique

Le SARS-CoV-2 a des similitudes avec les Betacoronavirus trouvés chez les chauves-souris et les pangolins[28] - [29]. L'arbre phylogénétique de la branche des coronavirus apparentés au SARS-CoV-2, tel qu'obtenu sur la base du gÚne RdRp, est le suivant[30] - [31] - [32] :



Rc-o319, proche à 81 % du SARS-CoV-2, Rhinolophus cornutus, Iwate, Japon (récolté en 2013, publié en 2020)[33]





SL-ZXC21, 88 %, Rhinolophus pusillus, Zhoushan, Zhejiang (récolté en 2015, publié en 2018)[34]



SL-ZC45, 88 %, Rhinolophus pusillus, Zhoushan, Zhejiang (récolté en 2017, publié en 2018)[34]





SL-CoV-GX, 89 %, Manis javanica, Asie du Sud-Est (récolté en 2017, publié en 2020)[35]




SL-CoV-GD, 91 %, Manis javanica, Asie du Sud-Est[36]





RacCS203, 91,5 %, Rhinolophus acuminatus, Chachoengsao, Thaïlande (métagénome de 4 coronavirus collectés en juin 2020, publié en 2021)[31]






RmYN02, 93,3 %, Rhinolophus malayanus, Mengla, Yunnan (récolté en juin 2019, publié en 2020)[37]



RpYN06, 94.4 %, Rhinolophus pusillus, Mengla, Yunnan (récolté en mai 2020, publié en 2021)[30]





RshSTT182, 92,6 %, Rhinolophus shameli, Stoeng Treng, Cambodge (récolté en 2010, publié en 2021)[32]



RaTG13, 96,1 %, Rhinolophus affinis, Mojiang, Yunnan (récolté en 2013, publié en 2020)[38]





SARS-CoV-2 (100 %)










SARS-CoV-1, proche Ă  79 % du SARS-CoV-2


En matiĂšre d'homologie, le SARS-CoV-2 est :

De maniĂšre surprenante, il a Ă©tĂ© observĂ© en laboratoire que le coronavirus RaTG13 est incapable de se fixer sur les rĂ©cepteurs ACE2 des chauves-souris censĂ©es ĂȘtre son hĂŽte naturel. En revanche, RaTG13 reconnaĂźt trĂšs bien les rĂ©cepteurs ACE2 des souris et rats, et dans une moindre mesure ceux des humains. À partir de constat, il a Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© que l’échantillon fĂ©cal qui a permis de sĂ©quencer RaTG13 pourrait ĂȘtre en fait celui d’un rongeur et non d’une chauve-souris[46] - [47].

HÎte intermédiaire

Il est gĂ©nĂ©ralement admis que la transmission zoonotique des coronavirus de la chauve-souris Ă  l'humain passe par une espĂšce animale intermĂ©diaire. Cet hĂŽte intermĂ©diaire serait un prĂ©requis : les rĂ©cepteurs comme l'ACE2 sont diffĂ©rents entre un humain et une chauve-souris[48]. Ainsi il est suggĂ©rĂ© que le SARS-CoV-1 a passĂ© la barriĂšre inter-espĂšce via la civette. Le taux d’identitĂ© entre le gĂ©nome du SARS-CoV-1 humain et celui de la souche de civette la plus proche Ă©tait de 99,52 %[48]. Concernant le MERS-CoV, il est suggĂ©rĂ© que la transmission s'est faite via le dromadaire.

De nombreuses hypothÚses ont émergé concernant l'hÎte intermédiaire du SARS-CoV-2. Une premiÚre hypothÚse, reprise par la presse, a suggéré deux espÚces de serpents, Bungarus multicinctus et Naja atra[49], mais cette hypothÚse a rapidement été écartée[50] - [51]. Aucun coronavirus n'est connu à ce jour chez les animaux à sang froid : ils infectent des oiseaux ou plus souvent des mammifÚres[52].

Des experts[53] - [54] ont avancĂ© l'hypothĂšse d'un pangolin, un mammifĂšre en danger d'extinction qui fait l'objet d'une consommation illĂ©gale en Chine, et qui Ă©tait en vente sur le marchĂ© de Wuhan. On trouve chez le pangolin javanais Manis javanica des coronavirus quasiment identiques, en particulier pour leur spicule protĂ©ique[43] - [44] - [45]. NĂ©anmoins, le taux d’identitĂ© des nuclĂ©otides des pangolins dans la rĂ©gion RBD atteint Ă  peine 89 %, un pourcentage bien infĂ©rieur aux taux observĂ©s entre les souches de virus isolĂ©es chez l’humain et celles infectant les derniers intermĂ©diaires animaux lors des prĂ©cĂ©dentes transmissions zoonotiques comme le SARS-CoV-1[48].

En 2020, il est constatĂ© que de nombreux animaux peuvent ĂȘtre infectĂ©s par le SARS-CoV-2 : les singes, les fĂ©lidĂ©s (chats, tigres), les lapins, le chien viverrin, les furets et le hamster[55]. Il est suggĂ©rĂ© que l'infection est le plus souvent bĂ©nigne, voire asymptomatique[56]. Le vison d'AmĂ©rique est capable de retransmettre la Covid Ă  l'humain. Dans des Ă©levages contaminĂ©s, 68 % des personnes en contact ont Ă©tĂ© infectĂ©es au SARS-CoV-2 par des visons[57] - [58]. Pour cette raison 17 millions de visons ont Ă©tĂ© abattus au Danemark[59]. Enfin, alors qu’auparavant, le SARS-CoV-2 ne pouvait infecter que des rongeurs transgĂ©niques porteurs du rĂ©cepteur ACE2 humain, depuis 2021 avec l'apparition des variants anglais, sud-africain et brĂ©silien, il a Ă©tĂ© constatĂ© que le virus se transmet facilement aux rongeurs « sauvages », faisant craindre une accĂ©lĂ©ration incontrĂŽlable de l'Ă©volution des mutants du SARS-CoV-2[60] - [61].

En mars 2023, Florence DĂ©barre dĂ©couvre dans des donnĂ©es gĂ©nĂ©tiques en ligne que celles-ci montrent pour la premiĂšre fois que des animaux sensibles au coronavirus Ă©taient prĂ©sents sur le marchĂ© de Wuhan. ConformĂ©ment aux rĂšgles de la base de donnĂ©es Gisaid, son Ă©quipe contacte les scientifiques chinois qui ont mis en ligne les donnĂ©es gĂ©nĂ©tiques pour leur demander la permission de les analyser, ce qui, selon elle, a Ă©tĂ© accordĂ©. Un jour plus tard, ils envoient un e-mail pour partager leur dĂ©couverte de la prĂ©sence d'ADN de chien viverrin dans les sĂ©quences. Le lendemain, les dossiers sont rendus inaccessibles, apparemment Ă  la demande des chercheurs chinois, dont le virologue George Gao[62]. Cette dĂ©couverte, selon The Guardian, suscite plusieurs questions : « Pourquoi les rĂ©sultats des prĂ©lĂšvements effectuĂ©s dans les premiers mois de Covid-19 ont-ils Ă©tĂ© cachĂ©s Ă  la communautĂ© scientifique pendant plus de trois ans ? Pourquoi la premiĂšre version de l'Ă©tude chinoise affirmait-elle n'avoir trouvĂ© aucun ADN de chien viverrin ? Et pourquoi les sĂ©quences gĂ©nĂ©tiques ont-elles Ă©tĂ© discrĂštement tĂ©lĂ©chargĂ©es sur Gisaid – laissĂ©es en ligne assez longtemps pour ĂȘtre dĂ©couvertes – puis retirĂ©es de la vue du public ? »[62].

Accident de laboratoire

Selon Fox News, le virus aurait pu s'ĂȘtre Ă©chappĂ© par accident de l'Institut de virologie de Wuhan. L'hypothĂšse est Ă©voquĂ©e par Mike Pompeo, secrĂ©taire d'État des États-Unis citant une enquĂȘte en cours de leur administration[63]. Richard Ebright (en), expert amĂ©ricain en biosĂ©curitĂ©, estime que « les preuves laissent une base pour exclure que la Covid-19 soit une construction de laboratoire, mais aucune base pour exclure un accident »[64]. Des chercheurs du CNRS donnent du crĂ©dit Ă  cette hypothĂšse[65].

En janvier 2021, l'Organisation mondiale de la santĂ© envoie Ă  Wuhan une Ă©quipe pour enquĂȘter sur l'origine du virus[66]. L'enquĂȘte, placĂ©e en Chine sous surveillance Ă©troite, « n'a pu percer les origines du Covid-19 », mais « les experts de l'OMS ont toutefois jugĂ© hautement improbable l'hypothĂšse de la fuite depuis un laboratoire de la ville [de Wuhan]. ». Parmi les experts de l'OMS figure Peter Daszak. Le patron de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a nĂ©anmoins affirmĂ© le que « toutes les hypothĂšses (restaient) sur la table » pour expliquer l'origine de la pandĂ©mie[67].

Le , 18 scientifiques américains publient dans le magazine Science un article invitant la communauté scientifique à envisager toutes les pistes, notamment celle d'une fuite d'un laboratoire de Wuhan[68].

Le professeur Renaud Piarroux considĂšre, en janvier 2022 : « Je pense qu'il faut maintenant considĂ©rer la fuite involontaire Ă  partir d'un laboratoire comme une hypothĂšse Ă  investiguer sĂ©rieusement. »[69] . En juin 2022, il rĂ©vĂšle Ă  la tĂ©lĂ©vision française que les recherches sur les coronavirus Ă  Wuhan Ă©taient faites non au niveau des laboratoires P4 mais dans les P2 oĂč la sĂ©curitĂ© est bien moindre. Il prĂ©cise qu'il y a eu des manipulations de la part de certains scientifiques, comme Peter Daszak, pour Ă©carter cette piste et refuser les investigations en profondeur[70].

Peter Daszak, qui travaille pour l'ONG EcoHealth, avait en 2018 pour projet d'inclure un site de clivage de furine sur les virus de type coronavirus pour tester leur infectiositĂ© (Le projet DEFUSE: Defusing the Threat of Bat-Borne Coronaviruses) et avait fait une demande de subvention en ce sens[2]. EcoHealth a collaborĂ© activement avec l’Institut de virologie de Wuhan[71]. En 2014, EcoHealth avait dĂ©jĂ  lancĂ© un projet visant Ă  dĂ©pister la prĂ©sence des coronavirus chez des chauves-souris en Chine, Ă  analyser en laboratoire leurs sĂ©quences gĂ©nomiques et Ă  Ă©valuer leur risque d’infecter les humains[71].

Le SARS-CoV-2 contient un site de clivage de furine, cette insertion est rĂ©cente, puisqu’aucun virus dans le reste de la famille des SARS-CoV[72], ni aucun virus connu proche de SARS-CoV-2 ne la contient[73].

Des expériences de gains de fonction sur les coronavirus ont commencé au début des années 2000 et ont ensuite impliqué le laboratoire de Wuhan (WIV)[74], bien que Peter Daszak nie que des expériences de gains de fonction (GoF) aient pu avoir lieu à l'institut de virologie de Wuhan[71].

Le plus proche parent du SARS-CoV2 est le RaTG13[75] - [76] (anciennement appelé Ra4991[77] - [78]) qui a été découvert en 2013 chez les chauves-souris du Yunnan en Chine[79]. La séquence génomique du RaTG13, issue de l'étude d'un échantillon collecté en 2013 par l'institut de Wuhan[80] - [78], a été publiée en 2020 par Shi Zhengli de l'institut virologique de Wuhan . Une partie du génome du RaTG13 avait déjà été séquencée par l'institut de Wuhan en 2016 sous le nom de Ra4991[81] - [82]. Mais des spécialistes indiquent que RaTG13 a une différence majeure avec Ra4991 au niveau de la partie du génome correspondant à la protéine spike[83], alors que Shi Zhengli avait affirmé que le RaTG13 était un virus déjà connu sous le nom Ra4991[82].

Plusieurs agences fĂ©dĂ©rales amĂ©ricaines reçoivent la mission de dĂ©terminer si la pandĂ©mie de Covid-19 a Ă©tĂ© provoquĂ©e par une fuite de laboratoire. En fĂ©vrier 2023, deux agences fĂ©dĂ©rales soutiennent que le virus s'est Ă©chappĂ© d'un laboratoire, quatre que le virus est d'origine et de transmission naturelle, et deux ne se sont pas prononcĂ©. Le DĂ©partement de l'Énergie soutient en fĂ©vrier 2023 que la pandĂ©mie a « trĂšs probablement » Ă©tĂ© provoquĂ©e par une fuite de laboratoire, ainsi que le Federal Bureau of Investigation. La Central Intelligence Agency et une autre restĂ©e anonyme n'ont pas tranchĂ©. Le National Intelligence Council soutiennent avec un « bas niveau de certitude » que l'origine est naturelle[84]. Le contenu des rapports de ces agences demeurent toutefois classifiĂ©s. Selon Guardian, la thĂ©orie des fuites de laboratoire manque de preuves tangibles, mais a Ă©tĂ© redynamisĂ©e par ces rapports selon lesquels « les agences gouvernementales amĂ©ricaines ont conclu que c'Ă©tait possible, mais avec une confiance faible Ă  modĂ©rĂ©e »[62].

Bibliographie

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Notes et références

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