Ollanta Humala
Ollanta Moisés Humala Tasso, né le à Lima, est un militaire et homme d'État péruvien.
Membre fondateur et président du Parti nationaliste péruvien, il est président de la République du Pérou de 2011 à 2016. Devenu impopulaire, il se présente à l’élection présidentielle de 2021, où il obtient 1,6 % des voix.
Situation personnelle
Origines familiales
Ollanta Moisés Humala Tasso appartient, par son père Isaac Humala Núñez, à une famille quechua andine d'Ayacucho et par sa mère Elena Tasso Heredia, à une branche immigrée au Pérou de la famille italienne Tasso[1]. Son père, avocat « laborista » de formation marxiste-léniniste, est le fondateur de l'ethnocacérisme, mouvement indigéniste et socialiste faisant référence d'une part à l'Empire inca et au droit des peuples indigènes et d'autre part à Andrés Avelino Cáceres, président de la République péruvienne de 1886 à 1890 puis de 1894 à 1895 et héros de la résistance à l'occupation chilienne durant la Guerre du Pacifique.
Formation
Ollanta Humala fait ses études aux collèges franco-péruvien et japonais-péruvien La Union de Lima et les poursuit en 1982 à l'école militaire de Chorrillos. En 1983, toute sa promotion se rend à l'École des Amériques au Panama, un centre de formation militaire des États-Unis[1].
En 2001, il est diplômé en maîtrise de sciences politiques à l'Université pontificale catholique du Pérou[1]. En 2002, il étudie également le droit international à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne[2] - [3] durant son séjour à Paris, et entame un doctorat à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine[1].
Carrière militaire
En 1991, c'est en tant que capitaine qu'il combat Ă Tingo MarĂa, dans la province de Huanuco, la guĂ©rilla du Sentier lumineux. Il est engagĂ© dans l’opĂ©ration de contre-insurrection « Cuchara », qui a mobilisĂ© plusieurs centaines d'hommes dans la rĂ©gion du Alto Huallaga et donnĂ© lieu, en mars 1992, Ă plusieurs massacres dans les villages de Pozo Rico et BambĂş, soupçonnĂ©s d’être favorables Ă la rĂ©bellion maoĂŻste[4]. En 1995, il est mutĂ© dans une base militaire près la frontière avec l’Équateur durant la guerre du Cenepa, Ă laquelle il ne participe pas.
Le à Toquepala, c'est avec le grade de lieutenant-colonel qu'il se soulève avec son frère Antauro et 62 personnes contre le régime du président Alberto Fujimori[1]. La rébellion échoue et les deux frères sont emprisonnés. Quand Fujimori, accusé de corruption, fuit le pays, ils sont amnistiés par le nouveau président Alejandro Toledo. Réhabilité au sein de l'armée, Ollanta est ensuite affecté en tant qu'attaché militaire à l'ambassade du Pérou à Paris puis à Séoul[5]. Mis en retraite forcée en 2004, il qualifie cette décision d'« injuste » et met en cause le nouveau commandant en chef de l'armée, Luis Alberto Muñoz[6].
Le , son frère Antauro Humala Tasso, représentant du mouvement ethnocacériste, attaque le commissariat d'Andahuaylas pour demander la démission d'Alejandro Toledo. Ollanta condamne la prise d'otages[5] qui fait quatre morts[note 1].
En 2006, Ollanta Humala est accusĂ© de violations des droits de l'homme (enlèvement, torture et exĂ©cution extra-judiciaire) qui auraient Ă©tĂ© commises par des soldats placĂ©s sous ses ordres en 1992 sur trois habitants du hameau de Pucayacu, alors qu'il commandait la base militaire de Madre Mia[7] - [5] - [8]. Le dossier est classĂ© en , après rĂ©tractation d'un tĂ©moin ayant reçu 4 000 dollars du sergent AmĂlcar GĂłmez AmasifuĂ©n, camarade et collaborateur d’Ollanta Humala[9]. Le nom d'Humala n'est toutefois jamais citĂ© dans le rapport de la Commission vĂ©ritĂ© et rĂ©conciliation, qui impute Ă l’armĂ©e pĂ©ruvienne une moitiĂ© des exactions du conflit[10].
Parcours politique
DĂ©buts et ascension
Ollanta Humala se prĂ©sente en en tant que chef du Parti nationaliste pĂ©ruvien (PNP) Ă la prĂ©sidence Ă l'Ă©lection de 2006, mais ne peut s'inscrire faute d'avoir donnĂ© Ă temps sa feuille de campagne ; il s'allie donc au parti UniĂłn por el PerĂş. ArrivĂ© en tĂŞte au premier tour, il participe au second tour oĂą il est opposĂ© Ă l'ancien prĂ©sident Alan GarcĂa PĂ©rez. Il est durant la campagne attaquĂ© par les mĂ©dias qui font courir des rumeurs sur un « complot vĂ©nĂ©zuĂ©lien » visant Ă provoquer des violences afin de favoriser sa candidature, le prĂ©sentent comme antisĂ©mite, militariste ou populiste et lui prĂŞtent des financements par les FARC ou Chávez[10]. Au premier tour, Ollanta Humala obtient 30,62 % des voix devant Alan Garcia (social-dĂ©mocrate) avec 24,33 % et Lourdes Flores (droite) avec 23,80 %. Il est toutefois battu au second tour par Alan GarcĂa, regroupant sur son nom 6 270 080 suffrages (47 %) contre 6 965 017 pour son adversaire (53 %)[11]. Le , Ollanta Humala reconnaĂ®t sa dĂ©faite, mais appelle ses partisans Ă former un nouveau parti, le Front national dĂ©mocratique, rassemblant des partis si radicaux comme la Patria roja ou le Movimiento Nueva Izquierda que son vice-prĂ©sident Carlos Torres Caro dĂ©missionne, ainsi que plusieurs autres membres.
Ollanta Humala Tasso se présente de nouveau au poste de président lors des élections générales de 2011, sous l'étiquette de la coalition Gana Perú, qui regroupe le PNP ainsi que d'autres forces politiques. Ses principaux adversaires sont Pedro Pablo Kuczynski, Keiko Fujimori, Alejandro Toledo et Luis Castañeda Lossio. Ollanta Humala arrive en tête des suffrages avec 31,5 %, suivi par Keiko Fujimori avec 23,5 % des votes. Durant la campagne pour le second tour, il est soutenu par l’écrivain et prix Nobel Mario Vargas Llosa[12] ainsi que par l'ancien président Alejandro Toledo[13], ce qui a provoqué une grave scission au sein des courants conservateurs. La gauche péruvienne fit également campagne en sa faveur, après avoir longtemps nourri des réserves à son égard. Comme l’a relevé une de ses figures intellectuelles, Oscar Ugarteche, « pour nous tous, Humala est une interrogation et Fujimori une certitude »[14]. Le , Ollanta Humala Tasso est élu au second tour avec 51,4 % des suffrages : cette victoire repose notamment sur des résultats importants dans les zones andines à forte population indigène (plus de 77 % à Puno). L’échec de la favorite des marchés Keiko Fujimori provoque ce que les médias qualifient de « Lundi noir », la Bourse du Pérou perdant 12,5 % en une séance[15]. Son alliance Gana Perú ne dispose toutefois que de 47 sièges sur 130 au Parlement, ce qui le contraindra à forger des alliances pour gouverner après sa prise de fonctions en juillet[16].
Président de la République
Le , il prend ses fonctions de chef de l'État et succède Ă Alan GarcĂa. Le , les membres du gouvernement prĂ©sentent leur dĂ©mission afin qu'il procède Ă un remaniement ministĂ©riel[17] - [18].
Le , à Chimbote, il assiste devant trente-mille personnes à la cérémonie de béatification de Zbigniew Strzałkowski, Michal Tomaszek et Alessandro Dordi, assassinés par le Sentier lumineux en 1991[19].
En 2016, il est accusé par police fédérale du Brésil d'avoir reçu des pots-de-vin du géant brésilien Odebrecht, impliqué dans le scandale de corruption autour de Petrobras. Un rapport de la police fédérale brésilienne l'accuse d'avoir reçu trois millions de dollars du groupe brésilien de BTP, dont le président, Marcelo Odebrecht, est emprisonné pour corruption et blanchiment d'argent. Le rapport précise qu'il existe des « preuves significatives » que le paiement a été effectué, révélant « des pratiques criminelles qui n'avaient pas encore été découvertes »[20].
Bien qu'il ait été considéré comme un socialiste pendant sa campagne électorale, sa présidence est marquée par la poursuite des politiques libérales développées depuis les années 1990[21], notamment de faibles dépenses publiques et peu d'impôts[22].
Alors que son électorat lui reproche ses multiples reniements, il termine son mandat avec moins de 20 % d’opinions favorables. Son parti est quant à lui décomposé et n'est pas même en mesure de proposer un candidat à la présidentielle[23]. Le , il transmet le pouvoir à son successeur, Pedro Pablo Kuczynski.
Après la présidence
Le , Ollanta Humala est placé en détention avec son épouse, Nadine Heredia, en attente de leur procès pour blanchiment d'argent présumé dans le cadre de l'affaire Odebrecht[24]. Le couple est libéré le , à la suite d'une demande d'habeas corpus[25]. Il est à nouveau jugé en 2022 pour corruption[26].
Candidat à l'élection présidentielle de 2021, il arrive en treizième position du premier tour, avec 1,60 % des suffrages exprimés[27].
Prises de position
Ollanta Humala Tasso est un des principaux opposants Ă la politique du gouvernement d'Alan GarcĂa de 2006-2011. Il revendique une rupture avec le nĂ©olibĂ©ralisme et un dĂ©veloppement fondĂ© sur le marchĂ© intĂ©rieur et non plus seulement sur les exportations et les investissements Ă©trangers.
Notes et références
Notes
- Ou six, selon TV5 Monde
Références
- (es) « BiografĂa de Ollanta Humala Tasso », sur le site « Ollanta Presidente », (consultĂ© le )
- Aline Timbert, « Pérou : Ollanta Humala devient président en obtenant 51,18 % des votes face à sa rivale Keiko Fujimori », sur Actu Latino, (consulté le )
- (en) World Economic Forum, « Ollanta Moises Humala Tasso », sur World Economic Forum (consulté le )
- Karl Laske, « Enquête sur l’escadron de la mort du président péruvien », sur Mediapart,
- « En tête de la présidentielle à Lima, Ollanta Humala demeure une énigme », sur le site du quotidien Le Figaro, (consulté le )
- (es) « Ollanta Humala califica de injusto su retiro del Ejército », sur le site du quotidien La Republica (consulté le )
- (en) « Humala facing rights abuse claims », sur le site de la BBC, (consulté le )
- (en) « Ollanta Humala formally charged in 'Madre Mia' case », sur le site de Living in Peru, (consulté le )
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- « Pérou, fidèle reflet de l'Amérique du Sud », sur risal.collectifs.net (consulté le )
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- « Pérou/présidentielles: victoire d'Ollanta Humala », https://www.streetpress.com,‎ (lire en ligne, consulté le )
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- Le gouvernement péruvien démissionne, Le Figaro, 23 juillet 2012.
- Pérou : Humala tente de donner un nouveau souffle à sa présidence, Le Point, 23 juillet 2012.
- (en) BĂ©atification de Michal Tomaszek
- Lefigaro.fr avec AFP, « Pérou: le président accusé de corruption », Le Figaro,‎ (lire en ligne , consulté le ).
- « Élections législatives au Pérou : recomposition politique dans la continuité ? », sur Le Vent Se Lève,
- (es) Diego Sánchez dela Cruz, « Ollanta Humala consolida el modelo liberal en Perú », sur Libre Mercado, (consulté le )
- Amanda Chaparro, « Au Pérou, la droite ou la droite », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne, consulté le )
- « Un ex-président péruvien placé en détention », sur Le Figaro, .
- « La justice ordonne la libération de l'ex-président accusé de corruption », sur Le Figaro,
- « Pérou: l'ex-président Humala sera jugé à partir du 21 février », sur Le Figaro,
- (es) « Elecciones Generales y Parlamento Andino 2021 », sur eleccionesgenerales2021.pe (consulté le ).