Juan VilĂĄ Reyes
Juan VilĂĄ Reyes (Barcelone, 1925 â ibidem, 2007) est un ingĂ©nieur textile et chef dâentreprise espagnol.
Président du RCD Espanyol | |
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Josep Fusté Noguera (d) Josep Fusté Noguera (d) |
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(Ă 81 ans) Barcelone |
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MarĂa ConcepciĂłn Costa Oller |
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Direction dâentreprise |
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Carta de Exportador |
Au milieu de la dĂ©cennie 1950, il cofonda lâentreprise Matesa, productrice de machines textiles dâun type innovant, et ambitionna dâen faire, par le dĂ©veloppement de ses exportations, la premiĂšre multinationale espagnole. Ă cet effet, il abusa frauduleusement du systĂšme de crĂ©dits Ă lâexportation (par le biais de la banque publique BCI) mis en place par le rĂ©gime franquiste, alors prĂ©occupĂ© avant tout de restaurer la balance des paiements. La mise en Ă©vidence de la fraude (basĂ©e sur des exportations fictives) en 1969 dĂ©clencha une campagne de presse, tolĂ©rĂ©e sinon orchestrĂ©e par les ministres « bleus » en exercice (tenants de lâidĂ©al autarcique phalangiste, mais de plus en plus Ă©cartĂ©s de la prise de dĂ©cision Ă©conomique), avides dâĂ©clabousser par un scandale leurs rivaux, les ministres « technocrates » ayant tutelle sur la BCI, tous proches de lâOpus Dei et partisans dâune plus grande ouverture sur lâextĂ©rieur, accusĂ©s Ă prĂ©sent dâincurie et de favoritisme envers un entrepreneur â VilĂĄ Reyes â appartenant Ă leur milieu et auparavant encensĂ© par eux. VilĂĄ Reyes, bien que protestant de son innocence, fut condamnĂ© dans un premier temps Ă plusieurs fortes amendes, pour lesquelles il fut graciĂ© par Franco en , puis Ă plus de 200 ans dâemprisonnement et dâune nouvelle amende, peines pour lesquelles il fut amnistiĂ©, cette fois par Juan Carlos I, en , au bout de plus de six ans de dĂ©tention prĂ©ventive. En , la Matesa fut relancĂ©e sous forme de sociĂ©tĂ© coopĂ©rative, dans laquelle VilĂĄ Reyes Ă©tait Ă©galement partie prenante.
Biographie
Origines familiales
Pendant la Guerre civile espagnole, la famille de Juan VilĂĄ Reyes, aprĂšs sâĂȘtre dâabord rĂ©fugiĂ©e en France et en Italie, finit par sâinstaller Ă Zarauz, en Guipuscoa (Pays basque), oĂč le pĂšre entreprit de remettre en marche une modeste usine textile. La Guerre civile terminĂ©e, VilĂĄ Reyes acheva son baccalaurĂ©at Ă Barcelone en 1945, puis obtint le titre dâingĂ©nieur technique industriel textile. En 1942, la famille VilĂĄ mit sur pied Ă Pampelune un atelier dâapprentissage, converti quatre ans plus tard en Manufacturas Arga. Ă lâĂąge de 25 ans, VilĂĄ Reyes contracta mariage avec MarĂa ConcepciĂłn Costa Oller, avec qui il eut sept enfants.
VilĂĄ Reyes passait pour ĂȘtre trĂšs proche des milieux de lâOpus Dei[1].
Ă la tĂȘte de la Matesa (1956-1969)
Au dĂ©but des annĂ©es 1950, VilĂĄ Reyes fonda sa propre entreprise, dĂ©nommĂ©e Iwer, qui se vouait Ă la recherche et dĂ©veloppement dans le domaine de la technologie textile et produisait des brevets qui Ă©taient ensuite vendus en Espagne et Ă lâĂ©tranger.
En 1956 vit le jour la firme Maquinaria Textil del Norte de España SA (connu sous lâacronyme Matesa ou MATESA), oĂč il fut actif comme membre dĂ©lĂ©guĂ© du conseil dâadministration. La Matesa se consacrait Ă la fabrication, Ă lâaide de piĂšces importĂ©es des Ătats-Unis[2], dâun nouveau modĂšle de mĂ©tier Ă tisser mĂ©canique ayant la particularitĂ© de se passer dâune navette et pour lequel la firme avait acquis en 1957 le brevet français Ancet-Fayolle en vue de son exploitation commerciale dans le monde entier, Ă lâexception de la France, des Pays-Bas et des anciennes colonies de ces pays. Le siĂšge central et les bureaux dâĂ©tude Ă©taient situĂ©s Ă Barcelone, tandis que les ateliers de montage se trouvaient Ă Pampelune, qui Ă©tait alors lâun des centres vitaux de lâOpus Dei[3] - [4]. En 1967, le capital social de lâentreprise se montait Ă 600 millions de pesetas et Ă©tait Ă partir de cette date en totalitĂ© aux mains de la famille VilĂĄ Reyes, qui dĂ©jĂ dans les annĂ©es antĂ©rieures en avait Ă©tĂ© lâactionnaire majoritaire. Depuis 1967, il nâexistait plus de conseil d'administration, la firme Ă©tant en effet dĂ©sormais dirigĂ©e par trois administrateurs solidaires : les frĂšres Juan et Fernando VilĂĄ Reyes, et Manuel Salvat Dalmau, beau-frĂšre des prĂ©cĂ©dents[3] - [5] - [6].
La Matesa avait entamĂ© ses activitĂ©s dâexportation en 1964 et avait dĂ©crochĂ© par deux fois le Brevet de lâexportateur (Carta de Exportador) de premiĂšre catĂ©gorie (respectivement en et )[3] - [4], et en outre, le ministĂšre de lâĂducation et des Sciences lui avait dĂ©cernĂ© la grand-croix de lâOrdre d'Alphonse X le Sage en reconnaissance de son Ćuvre de « recherche industrielle »[7]. Ce succĂšs obtenu en pleine Campagne nationale pour lâexportation, avait valu une popularitĂ© notable Ă Juan VilĂĄ Reyes, alors premier responsable de lâentreprise[3] - [note 1].
VilĂĄ Reyes faisait figure dâentrepreneur dâune espĂšce nouvelle, qui se plaisait Ă se donner le genre du « manager amĂ©ricain »[8], douĂ© « dâagressivitĂ© exportatrice »[7], se dĂ©plaçait dans son avion privĂ©, et Ă©tait dotĂ© dâun entregent hors de lâordinaire (il sâĂ©tait notamment liĂ© dâamitiĂ© avec ValĂ©ry Giscard d'Estaing et apporta son concours financier Ă la campagne Ă©lectorale de Richard Nixon, etc.). En somme, la Matesa Ă©tait devenue le navire-amiral dâun nouveau type dâentreprenariat, ouvert au marchĂ© international, que les autoritĂ©s Ă©conomiques franquistes, oublieuses de lâancien idĂ©al autarcique, sâappliquaient dĂ©sormais Ă mettre en avant. Une marque symptomatique de la bienveillance des diffĂ©rents secteurs de lâadministration franquiste envers la Matesa fut la sentence indulgente prononcĂ©e en 1967 par le Tribunal des dĂ©lits monĂ©taires Ă lâencontre de lâentreprise pour dĂ©lit dâĂ©vasion de capitaux portant sur une somme de 103 millions de pesetas[8].
Le gouvernement espagnol, prĂ©occupĂ© par le dĂ©ficit chronique de la balance des paiements, avait mis en place une politique dâaide aux exportations, notamment par le biais de crĂ©dits accordĂ©s par la Banque de crĂ©dit industriel (BCI), nationalisĂ©e quelques annĂ©es auparavant[9] - [10]. Juan VilĂĄ Reyes avait trouvĂ© dans ce systĂšme la source de financement dont il avait besoin pour rĂ©aliser les objectifs fixĂ©s par son entreprise, câest-Ă -dire, en particulier, de se hisser en peu dâannĂ©es au rang de premiĂšre multinationale industrielle espagnole[11]. Lâexpansion internationale du produit que fabriquait et commercialisait la Matesa, la machine textile IWER, dâun type inĂ©dit (car jusque-lĂ tous les mĂ©tiers mĂ©caniques comportaient une navette), capable de tisser tout type de matĂ©riau (y compris le papier et le fibre de verre), impliquait des dĂ©penses et des risques considĂ©rables, puisquâil nĂ©cessitait de mettre en place un rĂ©seau de filiales internationales appelĂ©es non seulement Ă vendre le produit, mais aussi Ă prendre en charge le service aprĂšs-vente, et que les difficultĂ©s inhĂ©rentes Ă la mise sur le marchĂ© dâun produit innovant ne pouvaient ĂȘtre surmontĂ©es quâau moyen de lâoctroi dâimportants avantages financiers aux clients. Par suite, la Matesa devint forte consommatrice de crĂ©dits, le solde dĂ©biteur de la firme Ă lâĂ©gard de la BCI sâaccroissant de 22 millions de pesetas environ en 1964 (Ă©quivalant Ă 3,3 % du total des crĂ©dits Ă la exportation accordĂ©s par la BCI) aux quelque 10 000 millions qui allaient scandaliser lâopinion espagnole en 1969[10] (Ă©quivalant Ă environ 50 % du total, et Ă 25 % du total des fonds de la banque, pour le compte dâune seule entreprise[8]).
Scandale Matesa
En 1969, peu aprĂšs avoir acquis la cĂ©lĂ©britĂ© grĂące Ă son passage dans lâĂ©mission dâentretiens de la TelevisiĂłn Española Ăsta es su vida, et au moment oĂč les affaires de la firme Ă©taient Ă leur apogĂ©e, il advint que la Direction gĂ©nĂ©rale des douanes le dĂ©nonça pour dĂ©tournement de fonds publics, pour un montant de dix mille millions de pesetas. La MATESA avait bĂ©nĂ©ficiĂ© de ladite somme dans le cadre dâun financement spĂ©cial de la part de la Banque de crĂ©dit industriel (BCI) en faveur dâopĂ©rations dâacquisition Ă lâĂ©tranger. SommĂ© dâexpliquer lâobjet des contrats conclus, VilĂĄ Reyes confessa avoir utilisĂ© les succursales de la firme Ă lâĂ©tranger comme entrepĂŽt pour simuler des mouvements dâexportation, avec le placet de la BCI.
Fin , le ministre du Commerce, Faustino GarcĂa-MoncĂł, eut une entrevue avec Juan VilĂĄ Reyes, oĂč celui-ci avoua quâun tiers des exportations de son entreprise Ă©taient fictives et Ă lâissue de laquelle il fut convenu dâĂ©carter VilĂĄ Reyes de la direction de la firme et dâĂ©laborer un plan de redressement dans le but de corriger la trajectoire dâune entreprise dans laquelle les autoritĂ©s continuaient malgrĂ© tout Ă mettre leurs espoirs[12].
Pendant que les suspicions sur un comportement irrĂ©gulier de la Matesa allaient sâamplifiant, il fut dĂ©cidĂ© en , Ă la suite dâun accord entre le ministre des Finances Juan JosĂ© Espinosa San MartĂn et Juan VilĂĄ Reyes, dâintĂ©grer dans le personnel de la Matesa lâingĂ©nieur Juan Ignacio Trillo y LĂłpez-Mancisidor, qui Ă©tait connu du ministre et qui fut missionnĂ© de mettre de lâordre dans lâimbroglio administratif de lâentreprise[13]. Le , les quatre actionnaires, Ă savoir Juan, Fernando et Blanca VilĂĄ Reyes et Manuel Salvat Dalmau, tinrent une rĂ©union oĂč il sâaccordĂšrent pour rĂ©voquer les administrateurs, pour transfĂ©rer leurs pouvoirs Ă Trillo et au fonctionnaire technico-commercial Lorenzo Zavala Richi, pour cĂ©der les actions de lâentreprise lâInstitut officiel de crĂ©dit (dĂ©pendant de la BCI), et pour cĂ©der Ă lâĂtat tous les biens et droits de la sociĂ©tĂ© et la totalitĂ© des patrimoines personnels des actionnaires. Le plan envisageait, dans une deuxiĂšme Ă©tape, la mise sous sĂ©questre de lâentreprise par lâĂtat et la confirmation de Trillo et de Zavala en qualitĂ© de curateurs, qui auraient Ă tĂąche dâacquitter les dettes et de redimensionner la firme en fonction de ses possibilitĂ©s vĂ©ritables. Les curateurs sâavisĂšrent bientĂŽt que la situation Ă©tait bien pire que ce quâils soupçonnaient ; ainsi p. ex., les exportations fictives ne se montaient pas Ă un, mais aux deux tiers. Ce constat incita le directeur des douanes Ă saisir le Tribunal spĂ©cial des dĂ©lits monĂ©taires, tandis que les ministres des Finances et du Commerce soumettaient au Conseil des ministres leur plan de mise sous sĂ©questre de la Matesa[14].
Lâaffaire provoqua un remue-mĂ©nage sans prĂ©cĂ©dent dans toute la presse espagnole de lâĂ©poque[15] et donna lieu, avec pour le moins lâassentiment tacite des ministres « bleus » (hĂ©ritiers du phalangisme) Manuel Fraga et JosĂ© SolĂs, Ă une vĂ©ritable campagne de presse, qui allait assurer au scandale une ample rĂ©percussion tant en Espagne que dans le monde et en faire lâoccasion dâun rĂšglement de comptes politique, en Ă©claboussant les ministres dits « Ă©conomiques » du gouvernement, tous affiliĂ©s ou sympathisants de lâOpus Dei. En effet, dans la classe gouvernante espagnole couvait depuis au moins une lutte de tendances entre dâun cĂŽtĂ© les bleus (en perte de vitesse), incarnĂ©s par les ministres Fraga et SolĂs, rejoints occasionnellement par le ministre des Affaires Ă©trangĂšres Fernando MarĂa Castiella, et de lâautre les technocrates (partisans du libĂ©ralisme, en ascension), reprĂ©sentĂ©s par les ministres « Ă©conomiques » (Navarro Rubio et Espinosa San MartĂn et GarcĂa-MoncĂł), emmenĂ©s par le prĂ©sident de facto du Conseil des ministres, Carrero Blanco, et dont LĂłpez RodĂł faisait figure de chef de file[16] - [17].
VilĂĄ Reyes pour sa part protestait de son innocence dans une lettre Ă son avocat datĂ©e du et publiĂ©e par tous les journaux Ă la fin du mois, dont lâhebdomadaire Mundo (revue de politique Ă©trangĂšre de lâagence officielle EFE), qui assurait que tout « lâargent parvenu dans ses coffres avait Ă©tĂ© investi, selon ce quâont assurĂ© des sources gĂ©nĂ©ralement bien informĂ©es, dans des travaux dâinfrastructure, de recherche et dâamĂ©lioration des rĂ©seaux commerciaux et du service aprĂšs-vente »[18], lettre oĂč Vila Reyes insistait[19] :
« En vingt ans de dur travail, nul nâa pu nous accuser, ma famille ou moi-mĂȘme, dâamoralitĂ© professionnelle ; cependant si, malgrĂ© cela, jâavais Ă©tĂ© un individu sans vergogne capable dâavoir fait ce quâils disent, ils ne mâauraient pas attrapĂ© ici. SincĂšrement, ce sont lĂ les deux choses que me dĂ©rangent le plus : de passer pour un malhonnĂȘte et pour un imbĂ©cile. »
Lâauteur et journaliste CĂ©sar Vidal affirme que le stratagĂšme utilisĂ© par VilĂĄ Reyes constituait une pratique gĂ©nĂ©ralisĂ©e Ă cette Ă©poque, et va jusquâĂ conjecturer que lâactivitĂ© de la Matesa, dans lâhypothĂšse oĂč elle nâait pas Ă©tĂ© interrompue, aurait pu ĂȘtre viable[20].
Procédure pénale et condamnation
Ă lâissue des diffĂ©rents procĂšs intentĂ©s contre Juan VilĂĄ Reyes furent prononcĂ©es les condamnations suivantes :
- Amende de 21 000 000 de pesetas infligĂ©e en par le Tribunal spĂ©cial des dĂ©lits monĂ©taires pour un dĂ©lit dâĂ©vasion de devises dâun montant avĂ©rĂ© de 103,5 millions de pesetas[21].
- Amende de 1 658 millions et peine dâemprisonnement de trois ans imposĂ©es par le mĂȘme Tribunal en et confirmĂ©es, aprĂšs que le condamnĂ© eut interjetĂ© appel, par le Tribunal Ă©conomico-administratif central en [21] - [22]. Aux termes de la grĂące de accordĂ©e par Franco, il fut dispensĂ© de sâacquitter de lâamende et de purger un quart de la peine de prison. La grĂące lui fut octroyĂ©e avant mĂȘme la confirmation de la sentence.
- En , lâAuditorat provincial de Madrid le condamna pour dĂ©lits dâescroquerie sur un montant de 8 933 et de 590 millions de pesetas respectivement (Ă©quivalant Ă 1 263 millions dâeuros au cours de 2013)[21] - [note 2], pour 417 dĂ©lits de faux en Ă©criture dans le cadre dâopĂ©rations commerciales, et pour quatre dĂ©lits de corruption active[21]. VilĂĄ Reyes fut condamnĂ© Ă une peine dâemprisonnement de plus de 223 annĂ©es et Ă 9 600 millions de pesetas dâindemnisations et dâamendes, verdict ensuite confirmĂ© en par le Tribunal suprĂȘme. Ces dĂ©cisions judiciaires restĂšrent cependant sans effet attendu que VilĂĄ Reyes, dĂ©fendu alors par le dirigeant historique de la CEDA, JosĂ© MarĂa Gil-Robles, fut graciĂ© par le roi Juan Carlos I, nouvellement intronisĂ©, et remis en libertĂ© le , aprĂšs six ans et demi de dĂ©tention prĂ©ventive[23] - [24].
La mesure de grĂące dĂ©cidĂ©e par Franco en septembre 1971 peut sâinterprĂ©ter comme rĂ©sultant de sa volontĂ© de couper court Ă la tournure trop politique quâavait prise lâaffaire, mais pour lâhistorien Stanley Payne, elle serait Ă examiner Ă la lumiĂšre de la menace profĂ©rĂ©e par VilĂĄ Reyes dans une lettre Ă©crite le en prison (oĂč il se trouvait dans lâattente de son recours en appel) Ă lâattention de Carrero Blanco, oĂč il prĂ©vint celui-ci sans ambages que si le gouvernement ne trouvait pas le moyen de lâinnocenter, il rendrait publique une vaste documentation en sa possession apportant les preuves dâun trafic gĂ©nĂ©ralisĂ© de devises vers lâĂ©tranger dans les annĂ©es de 1964 Ă 1969. La lettre comportait un « appendice documentaire » rĂ©pertoriant les diffĂ©rents documents susceptibles de servir de preuve dâactivitĂ©s de cette nature exercĂ©es par 453 personnalitĂ©s et entreprises commerciales de premier plan, dont un grand nombre Ă©taient Ă©troitement liĂ©es au rĂ©gime[25] - [22].
RÎle dans le destin ultérieur de la Matesa
La Commission de liquidation, mise sur pied pour tenter de recouvrer les 9 800 millions de pesetas accordĂ©s au titre de crĂ©dits et les 1 300 millions redevables par la Matesa au titre dâintĂ©rĂȘts Ă la BCI â montants tels quâils sâĂ©tablissaient au moment de lâĂ©clatement du scandale â, ne parvint Ă rĂ©cupĂ©rer que 6 900 millions de pesetas (au cours de 1983), provenant essentiellement des entitĂ©s dâassurances. On ne put rien rĂ©cupĂ©rer de la Matesa elle-mĂȘme, ni quasiment rien de VilĂĄ Reyes. Comme quelque 4 000 millions de pesetas furent prĂ©levĂ©s sur un organisme autonome du ministĂšre des Finances (le Consorcio de CompensaciĂłn de Seguros) et les 326 millions restants sur CrĂ©dito y CauciĂłn, sociĂ©tĂ© relevant majoritairement du secteur public et seulement en minoritĂ© du secteur assurantiel privĂ©, câest en fait Ă lâĂtat espagnol quâil revenait dâĂ©ponger le dĂ©ficit[21].
La Matesa, mise sous sĂ©questre en 1969, poursuivit ses activitĂ©s industrielles sous la tutelle dâun administrateur judiciaire jusquâen , date Ă laquelle elle fut publiquement offerte Ă la vente et adjugĂ©e pour un montant de 66 000 pesetas Ă une sociĂ©tĂ© coopĂ©rative formĂ©e dâanciens employĂ©s de la firme, qui allait entreprendre sous le parrainage du mĂȘme VilĂĄ Reyes de commercialiser un nouveau mĂ©tier Ă tisser dĂ©nommĂ© Iwer de Navarra[26].
Liens avec lâOpus Dei
Les attaches quâaurait supposĂ©ment eues VilĂĄ Reyes avec les ministĂšres Ă©conomiques par le biais de lâorganisation catholique Opus Dei fut un aspect important du scandale Matesa. JosĂ© MarĂa Gil-Robles, qui figura comme avocat de VilĂĄ Reyes lors de son procĂšs, fit paraĂźtre le un article dans le journal El Correo de AndalucĂa tendant Ă disculper lâOpus Dei, et dont voici un extrait :
« Ă cause de cela, au lieu dâĂ©tablir exactement ce qui sâest passĂ©, lâon sâest hĂątĂ© de limoger les âbleusâ et Ă confirmer Ă leurs postes les Ă©lĂ©ments de lâOpus [Dei], de qui il me faut dire en conscience, bien que cette entitĂ© ne me soit pas sympathique, quâaucun nâa commis dâirrĂ©gularitĂ©, et moins encore dâimmoralitĂ©. »
Il est Ă signaler que lâOpus Dei avait des membres aussi bien chez les personnes mis en cause que chez les dĂ©nonciateurs, Ă commencer par le fonctionnaire des douanes qui dĂ©voila lâaffaire, ce qui explique sans doute la dĂ©cision salomonique de Franco, car outre les mis en cause, deux ministres rĂ©putĂ©s ĂȘtre leurs adversaires durent quitter le gouvernement : Fraga et SolĂs. VilĂĄ Reyes lui-mĂȘme niait ĂȘtre membre de lâOpus Dei et rĂ©cusait tout lien de celui-ci avec son nĂ©goce[27].
R.C.D. Español
VilĂĄ Reyes Ă©tait membre du comitĂ© directeur du club RCD Español, sous la prĂ©sidence de CesĂĄreo Castilla Delgado (1962) et de Josep FustĂ© Noguera (1963-1966), avant dâaccĂ©der Ă son tour Ă la prĂ©sidence en , avec lâappui de Juan Antonio Samaranch. Sous son mandat, lâEspañol rĂ©ussit Ă attirer cinq joueurs dâexception â JosĂ© MarĂa, RĂ©, Rodilla, Amas et Marcial â, passĂ©s dans lâhistoire du football sous le surnom des « cinq dauphins ». De plus, le club emmĂ©nagea dans de nouveaux bureaux rue Villarroel Ă Barcelone, en remplacement de ceux que le club occupait rue CĂłrcega.
En , VilĂĄ Reyes dĂ©missionna de la prĂ©sidence de lâEspañol en allĂ©guant des raisons de santĂ©. Sa gestion financiĂšre donna matiĂšre Ă critique, vu quâil laissa une ardoise de 150 millions de pesetas. Dans la compĂ©tition nationale, le club rĂ©trograda vers la deuxiĂšme division, en dĂ©pit de lâĂ©quipe hors du commun que lâentrepreneur avait constituĂ©e. Ă lâĂ©poque, câĂ©tait un lieu commun que dâimputer ces mauvais rĂ©sultats sportifs Ă des interfĂ©rences politiques[28].
Notes et références
Notes
- La Carta de Exportador Ă©tait un diplĂŽme dâexcellence instituĂ© en vertu dâun dĂ©cret du . Aux dires de Navarro Rubio, il sâagissait dâ« une vĂ©ritable carte de payement nominative que le gouvernement adresse aux diffĂ©rents organes de lâadministration publique chargĂ©s dâadministrer les subsides, de sorte quâils mettent ceux-ci en Ćuvre, de façon effective, en faveur de lâentreprise qui lâexhibe [...] Seuls 36 exportateurs ont su dĂ©crocher cette distinction insigne concĂ©dĂ©e par la PrĂ©sidence du gouvernement. La Matesa lâa obtenue Ă deux reprises ».
Cf. M. Navarro Rubio (1978), p. 19. - Montants actualisĂ©s suivant les tableaux de lâInstitut national de statistique.
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Liens externes
- (es) « Muere el responsable del caso Matesa, Juan VilĂĄ Reyes », La Nueva España, Oviedo (Asturies), Editorial Prensa Asturiana, S.A.,â (ISSN 1577-5321, lire en ligne).