Farah Hached
Farah Hached (arabe : فرح حشاد), née le 12 juillet 1975 à Tunis, est une juriste et militante tunisienne.
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Présidente du Labo' Démocratique |
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Mahmoud El Materi (grand-père) Farhat Hached (grand-père) |
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Enfance et famille
Farah Hached est la fille aînée de l'homme politique Noureddine Hached et d'Anissa El Materi, fondatrice et présidente d'une université privée ainsi que militante féministe dans les années 1970[1]. Elle est par ailleurs la petite-fille de deux figures importantes de l'indépendance tunisienne : Farhat Hached, fondateur de l'Union générale tunisienne du travail, et Mahmoud El Materi, cofondateur et premier président du Néo-Destour.
Sa famille paternelle est originaire des îles Kerkennah et ses ancêtres étaient des pêcheurs aux origines berbères et yémenites. Sa famille maternelle, quant à elle, appartient à la bourgeoisie tunisoise et a des origines diverses : gréco-turque par son grand-père et de la péninsule arabique, de Syrie, du Caucase et d'Angleterre par sa grand-mère[1].
Du fait de la profession de son père, la famille de Farah Hached vit dans différents pays : Belgique de 1981 à 1984, Algérie de 1984 à 1985, Tunisie de 1985 à 1987, Suisse en 1987. En 1988, elle rentre en Tunisie et y reste jusqu'en 1993[2].
Études
Farah Hached obtient son baccalauréat scientifique en 1993 au lycée Pierre-Mendès-France de Tunis[2]. Elle suit ensuite des études de droit à l'université Panthéon-Assas de Paris. Elle obtient son diplôme d'études approfondies (DEA) en droit public en 2001, avec une spécialisation en libertés fondamentales ; son mémoire de DEA est intitulé Les droits et libertés sous le Protectorat : l'expérience tunisienne[3].
En 2002, elle s'inscrit en doctorat de droit dans la même université et commence une thèse intitulée Les sources des droits et libertés politiques en Tunisie[4]. Cependant, elle décide en 2006 de ne pas poursuivre sa thèse.
En 2011, elle est sélectionnée pour le Leadership Scholarship for African Nationals. En 2012, elle obtient un Executive Master of Laws de l'université Northwestern[5] et un Certificate of Business Administration de l'Instituto de Empresa.
En 2016, elle est auditrice à la dixième session internationale euro-méditerranéenne de l'Institut des hautes études de Défense nationale.
Avant la révolution de 2011
Premières expériences associatives et au sein d'organisations internationales
Dès les années 1990, Farah Hached s'investit dans la vie associative. Avec un groupe d'amis, dont Skander Bouassida et Heykal Guiza (fondateurs du groupe musical Neshez), Nizar Baraket et Zohra Bellamine, ils organisent un cercle de discussion autour de sujets politiques, et notamment la politique tunisienne. À la fin des années 1990, le groupe crée un site web pour s'exprimer, à travers des analyses, sur la situation en Tunisie. En 1999, Farah Hached est bénévole au sein de l'Association de prévention pour une meilleure citoyenneté des jeunes. Elle participe à la communication de l'association et à l'« école des citoyens » créée en son sein ; celle-ci forme à la médiation sociale des jeunes originaires de cités de la banlieue parisienne, sans diplôme ni qualification, dans le cadre de l'initiative « grands frères » dans les transports publics. En 2000-2001, elle suit travaille bénévolement pour le Groupe d'information et de soutien des immigrés. Elle y apporte une assistance juridique à des étrangers installés en France, essentiellement en matière de droit d'asile et de regroupement familial[6].
En 2002, elle travaille sur le projet Separated children in Europe au sein du bureau londonien du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.
En 2004, alors qu'elle mène des recherches en Tunisie dans le cadre de son doctorat, Farah Hached travaille comme pigiste pour le magazine Réalités et suit les activités des associations militantes tunisiennes. Elle rend compte des conférences organisées par des associations comme Amnesty International, l'Association tunisienne des femmes démocrates et l'Association des femmes tunisiennes pour la recherche et le développement, et accompagne un groupe d'associations tunisiennes au Maroc afin de faire la promotion d'un plaidoyer intitulé Les chantiers de l'égalité au Maghreb[7].
En 2005 et 2006, elle représente la Ligue arabe au Conseil exécutif de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture[8] - [9]. Par ailleurs, en 2005, elle adhère au Club XXIe siècle qui vise à expliquer la réalité de la diversité en France, changer les perceptions et permettre aux personnes issues de la diversité de bénéficier d'une véritable égalité des chances. Dans ce cadre, elle s'investit dans le groupe chargé de la structuration du club[10] puis dans un projet sur l'histoire de l'immigration et des immigrés.
Enseignement universitaire
À partir de 2000, Farah Hached enseigne plusieurs matières de droit public dans plusieurs institutions universitaires, les universités Panthéon-Assas puis Panthéon-Sorbonne à Paris, ainsi que l'École nationale d'administration à Tunis ; elle enseigne également en 2014 le droit des affaires à la Mediterranean School of Business[11].
Juriste d'affaires
En 2006, Farah Hached s'inscrit au barreau de Tunis et se réoriente vers une carrière dans le secteur privé[4]. Après une expérience dans des cabinets d'avocat puis dans un grand groupe à Dubaï, elle rentre à Tunis en novembre 2009[2] et devient la directrice juridique d'Africinvest Group, un fonds d'investissement basé en Tunisie et travaillant sur le continent africain[12]. En 2012, du fait de ses activités associatives, Farah Hached préfère fonder son propre cabinet de conseil juridique, Hached & Associés[13].
Tournant de 2011 et le Labo' Démocratique
En 2011, avec la révolution tunisienne de 2011, Farah Hached fonde à Tunis le Labo' Démocratique, une association à but non lucratif à caractère scientifique qu'elle préside. Le think tank se réclame des principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme et a pour but de « contribuer à l'instauration et à l'enracinement d'une démocratie innovante et vivante »[14].
Travaux en matière de réforme du secteur de la sécurité et de justice transitionnelle
Au sein du Labo' Démocratique, Hached lance le projet « police politique » au printemps 2011, après la chute du régime de Zine el-Abidine Ben Ali, avec pour objectif de créer le débat, initier des recherches sur le sujet, proposer des réformes et créer une plateforme en ligne[15].
C'est ainsi qu'entre 2011 et 2014, Farah Hached pilote l'organisation d'événements de sensibilisation, d'ateliers de travail et de voyages d'étude en Allemagne et en Pologne autour des thèmes des archives sécuritaires de la dictature et de leur nécessaire traitement[16], de la justice transitionnelle et de la reddition des comptes, notamment avec le premier Festival de la mémoire en Tunisie[17], de la transparence et de la protection des données personnelles, du cadre juridique régissant les fichiers de police et de la réforme des services de sécurité et de renseignements. Par ailleurs, elle publie des articles et intervient dans plusieurs conférences autour de ces sujets, ainsi que dans les médias, et lance la production par le Labo' Démocratique d'un documentaire, Memory at Risk, portant sur les méthodes de surveillances de la police politique en Tunisie. Le projet « police politique » et les activités du Labo' Démocratique et de sa présidente trouvent un écho dans les médias tunisiens et étrangers[4] - [18] - [19]. Au printemps 2012, le magazine Jeune Afrique cite Farah Hached parmi les cinquante personnes qui font la nouvelle Tunisie[20].
À partir de 2013, elle participe au groupe de travail sur la justice transitionnelle lancé par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme[21].
Le 29 juillet de la même année, elle réagit à l'assassinat de Mohamed Brahmi par une tribune intitulée Nous voulons la démocratie et nous la méritons[22] dans laquelle elle met l'accent sur la nécessité de réformer de secteur de la sécurité.
Le 5 décembre, à la suite de la publication du livre noir par le président de la République, Moncef Marzouki, elle boycotte ce dernier, refusant de se rendre à la commémoration officielle de l'assassinat de son grand-père et publie une tribune, Le livre noir est un cadeau empoisonné, pour exprimer sa déception[23] - [24]. Le livre noir fait alors l'objet d'une grande polémique et l'acte de Farah Hached est commenté dans les médias[25].
Le 13 décembre, elle réunit 36 associations et organisations de la société civile tunisienne autour d'un communiqué de presse commun[26] exhortant les décideurs politiques à engager un processus en vue de mettre en place un cadre juridique pour le traitement des archives de la dictature[27].
Elle lance, toujours en 2013, un projet de livre qu'elle codirige avec Wahid Ferchichi intitulé Révolution tunisienne et défis sécuritaires[28] dont les éditeurs sont l'Institut de recherche sur le Maghreb contemporain et les éditions Med Ali. Dans le cadre de sa rédaction, elle gère l'organisation de plusieurs consultations avec la société civile et les universitaires d'une part et des représentants des administrations publiques, dont le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice, d'autre part.
En février 2015, Farah Hached présente le livre Révolution tunisienne et défis sécuritaires pour la première fois, en présence du ministre tunisien de la Justice et de nombreux militants historiques[29]. En novembre, elle élabore un rapport d'identification des besoins en formation des décideurs civils en matière de contrôle démocratique du secteur de la sécurité[30] et, en 2016, lance l'Observatoire de la justice transitionnelle au sein du Labo' Démocratique, qui publie plusieurs rapports de suivi du processus de justice transitionnelle en Tunisie durant l'année 2017.
Revue Argos
En juin 2015, elle lance la revue en ligne Argos[31] - [32]. La revue est toutefois suspendue en 2016 par manque de moyens, un nouveau comité de rédaction décidant de la relancer en 2020.
Positions à l'international
En mars, elle est invitée à un petit déjeuner avec Alain Juppé, organisé pour la société civile arabe à l'occasion d'un colloque intitulé « Printemps arabe, printemps des femmes ? ». À la suite d'un discours du ministre à propos de la transition démocratique et de la justice transitionnelle dans le monde arabe, elle l'interpelle sur l'ouverture des archives concernant l'assassinat de son grand-père, expliquant que les Tunisiens attendent de la France qu'elle réalise aussi sa justice transitionnelle de l'époque coloniale[4].
Le 4 mars 2014, elle est invitée à rencontrer le président du Conseil italien, Matteo Renzi, au cours de son voyage en Tunisie, avec quatre autres membres de la société civile tunisienne, et profite de cette rencontre pour insister « sur l'idée que les préoccupations sécuritaires de l'Europe ne doivent pas sacrifier l'élan démocratique en Tunisie »[33]. Le 8 septembre, elle est invitée à rencontrer le Premier ministre français, Manuel Valls, lors de son déplacement en Tunisie, pendant un déjeuner organisé avec une dizaine de personnalités de la société civile tunisienne. Au cours de cette rencontre, elle aborde certains points relatifs à la transition tunisienne mais aussi la question palestinienne et les attentes des Tunisiens concernant le rôle que peut jouer la France[34].
Comité de pilotage de la réforme du secteur de la sécurité
En novembre 2018, Farah Hached est nommée par le chef du gouvernement tunisien comme membre du comité de pilotage du programme d'appui à la réforme et modernisation du secteur de la sécurité, en tant que représentante de la société civile, un programme mis en place dans le cadre d'une coopération entre l'État tunisien et l'Union européenne. La première réunion se tient en février 2019[35].
Université Mahmoud El Materi
En octobre 2016, Farah Hached intègre l'université privée Mahmoud El Materi, qu'elle développe au niveau national et international. À ce titre, elle propose trois axes de recommandations lors du Tunisian African Empowerment Forum organisé le 23 août 2017 et durant lequel elle intervient dans le panel sur les recommandations relatives à la relation de la Tunisie avec les États d'Afrique subsaharienne en matière d'éducation et d'enseignement[36] :
- la création de bourses panafricaines, sachant que l'université Mahmoud El Materi a déjà mis en place de telles bourses à son niveau ;
- les partenariats entre universités tunisiennes publiques et privées pour créer des synergies et être des interlocuteurs solides à l'international ;
- la mise en place d'une plateforme panafricaine intégrée pour les appels d'offres en matière de formation continue.
Publications
Ouvrage
- Farah Hached (dir.), Wahid Ferchichi (dir.), Hana Ben Abda, Khansa Ben Tarjem et Khaled Mejri, Révolution tunisienne et défis sécuritaires, Tunis, Institut de recherche sur le Maghreb contemporain/Éditions Mohamed Ali, (ISBN 978-9-973-33433-6).
Articles
- « La laïcité : un principe à l'ordre du jour de la IIe République tunisienne ? », Confluences Méditerranée, no 77, , p. 29-36 (ISSN 1148-2664).
- « Les défis de la législation sur l'accès aux archives : la question du secret d'État », Les archives et le droit de savoir (actes de la Journée de réflexion organisée par l'Unesco et les Archives nationales de Tunisie), , p. 40-44.
- « L'internet comme instrument de stratégie politique dans la Tunisie post-révolution », dans E-révolutions et révolutions, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Espaces politiques », (ISBN 978-2-757-41789-8), p. 159-175.
Tribunes
- « Nous voulons la démocratie et nous la méritons », sur mag14.com, (consulté le ).
- « Farah Hached : « Le Livre Noir est un cadeau empoisonné », sur mag14.com, (consulté le ).
- « En Tunisie, les fossoyeurs de la justice transitionnelle font fi des victimes de la dictature », sur lemonde.fr, (consulté le ).
Éditoriaux
- « L'archipel arabe : un écosystème politique en gestation », Argos, no 2, , p. 2-5 (lire en ligne, consulté le ).
- « Terrorisme, un concept à interroger », Argos, no 1, , p. 2-3 (lire en ligne, consulté le ).
Notes et références
- Anissa El Materi Hached (préf. Chedli Klibi), Mahmoud El Materi, pionnier de la Tunisie moderne, Paris, Les Belles Lettres, , 320 p. (ISBN 978-2-251-44413-0).
- Émission Ahwa animée par Racha Tounsi, Télévision tunisienne 2, 25 février 2015.
- Farah Hached, Les droits et libertés sous le Protectorat : l'expérience tunisienne, Paris, Farah Hached, (OCLC 48453226).
- Marie Verdier, « Farah Hached, sur la piste des archives de la Tunisie », sur la-croix.com, (consulté le ).
- (en) « Annual commencement », sur archive.org (consulté le ).
- Farah Hached, « « L'expérience du GISTI : le rôle crucial de la société civile dans l'évolution du droit français », sur watchingtunisia.wordpress.com, (consulté le ).
- Réalités, n°907 et 909
- Comptes rendus analytiques (de la 171e session du Conseil exécutif, 18-28 avril 2005), Paris, Unesco, , 323 p. (lire en ligne), xiv.
- Comptes rendus analytiques (de la 172e session du Conseil exécutif, 19-29 septembre 2005), Paris, Unesco, , 259 p. (lire en ligne), xiii.
- « Du côté des ateliers... », Newsletter du Club XXIe siècle, no 1, , p. 2.
- « Enseigner le droit à l'université », sur watchingtunisia.wordpress.com, (consulté le ).
- (en) « TUN INVEST - SICAR (TINV) », sur investing.com (consulté le ).
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- « Tunisie - Farah Hached : « Il faut que le peuple récupère sa mémoire » », sur tekiano.com, (consulté le ).
- Pierre Puchot, « Face à la crise, la société civile tunisienne se structure peu à peu », sur mediapart.fr, (consulté le ).
- Jeune Afrique, n°2674-2675, 8 avril 2012
- « Rapport d'activité 2014 » [PDF], sur labodemocratique.files.wordpress.com (consulté le ), p. 19.
- Farah Hached, « Nous voulons la démocratie et nous la méritons », sur mag14.com, (consulté le ).
- Farah Hached, « Farah Hached : « Le Livre Noir est un cadeau empoisonné », sur mag14.com, (consulté le ).
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- Lilia Blaise, « Les conséquences politiques du livre noir de Marzouki »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?), sur france24.com, .
- « Appel de 36 associations et organisations de la société civile pour la protection des archives de la dictature », sur webdo.tn, (consulté le ).
- « Tunisie : la presse dans le noir ? », sur atelier.rfi.fr, (consulté le ).
- Farah Hached, « Discours prononcé à l'ambassade de Tunisie à Varsovie (11 avril 2014) », sur watchingtunisia.wordpress.com, (consulté le ).
- Lilia Weslaty, « Révolution tunisienne et défis sécuritaires : ouvrage considérable du think tank Labo' Démocratique », sur webdo.tn/, (consulté le ).
- Farah Hached, « Rapport d'identification des besoins en formation en matière de gouvernance du secteur de la sécurité » [PDF], sur labodemocratique.files.wordpress.com, (consulté le )
- « Terrorisme, un concept à interroger », Argos, no 1, , p. 2-3 (lire en ligne, consulté le ).
- « L'archipel arabe : un écosystème politique en gestation », Argos, no 2, , p. 2-5 (lire en ligne, consulté le ).
- « Photo du jour : Matteo Renzi prend un thé avec 5 activistes tunisiennes », sur businessnews.com.tn, (consulté le ).
- Farah Hached, « Rencontre avec le Premier ministre Manuel Valls », sur watchingtunisia.wordpress.com, (consulté le ).
- « Première réunion du comité de pilotage du programme d'appui à la réforme et modernisation du secteur de la sécurité de la République tunisienne », sur eeas.europa.eu, (consulté le ).
- « Vice-présidente Farah Hached au Tunisian African Empowerment Forum. 23 août 2017 », sur umm-tunisie.com, (consulté le ).