AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Cités d'or

Le mythe des citĂ©s d'or, qui remonte au XIIe siĂšcle s'est surtout dĂ©veloppĂ© aprĂšs la dĂ©couverte de l'AmĂ©rique en 1492, lorsque les conquistadors ont commencĂ© Ă  explorer le Nouveau Monde Ă  la recherche de villes regorgeant de richesses, notamment aprĂšs la conquĂȘte de l'Empire aztĂšque par HernĂĄn CortĂ©s (1521) et la fondation de la Nouvelle-Espagne.

La lĂ©gende prend de l'ampleur en 1539, avec le rĂ©cit de Marcos de Niza, frĂšre franciscain envoyĂ© en exploration dans les rĂ©gions situĂ©es au nord-ouest de la vice-royautĂ©. À son retour Ă  Mexico, il prĂ©tend alors avoir dĂ©couvert sept riches citĂ©s, qui n'ont jamais Ă©tĂ© retrouvĂ©es, bien qu'une expĂ©dition militiaire ait eu lieu dĂšs 1540.

Le mythe a ensuite Ă©voluĂ© en engendrant plusieurs autres lĂ©gendes qui ont inspirĂ© de nombreuses Ɠuvres de fiction et durablement marquĂ© l'imaginaire collectif notamment en interfĂ©rant avec le mythe d'Eldorado, inspirĂ© de la mythologie et des traditions chibchas d'AmĂ©rique du Sud).

Les origines du mythe : la lĂ©gende des sept Ă©vĂȘques de MĂ©rida

Le mythe apparaĂźt aux alentours de 1150, lorsque les Almohades conquiĂšrent la ville de MĂ©rida en Espagne[1].

Selon la lĂ©gende, sept Ă©vĂȘques auraient alors quittĂ© la ville, non seulement pour sauver leurs vies mais aussi pour mettre Ă  l'abri des reliques religieuses. Ils se seraient rĂ©fugiĂ©s dans un lieu situĂ© loin dans la Mer OcĂ©ane et auraient fondĂ© les villes de CĂ­bola et de Quivira[2]. Ces deux citĂ©s seraient devenues trĂšs prospĂšres, principalement grĂące Ă  la dĂ©couverte d'or et de pierres prĂ©cieuses.

Cette idée donna lieu à de nombreuses expéditions ayant pour but la découverte des cités mythiques au cours des siÚcles suivants.

Évolution du mythe en AmĂ©rique

AprĂšs l'arrivĂ©e des Espagnols dans le Nouveau Monde[3] (1492 : dĂ©couverte de Cuba et d'Hispaniola ; 1493 : dĂ©but de la colonisation d'Hispaniola ; 1509 : conquĂȘte de la JamaĂŻque ; 1511 : conquĂȘte de Cuba ; 1521 : conquĂȘte du Mexique ; 1532 : conquĂȘte du PĂ©rou), la recherche de l'or et autres richesses est un des objectifs que se fixent nombre des premiers conquistadors et colons, souvent déçus par ce qu'il trouvent effectivement dans les Ăźles des CaraĂŻbes.

La légende de Cibola et de Quivira grandit à tel point que, dans la culture populaire, elles deviennent sept cités entiÚrement faites d'or.

Le retour de l'expédition de Pånfilo de Narvåez (1528-1536)

Le mythe est alimentĂ© par les histoires colportĂ©es au retour de l'expĂ©dition (infructueuse) de PĂĄnfilo de NarvĂĄez, qui partie de la Floride en 1528 disparaĂźt presque totalement au cours de son long pĂ©riple : seuls quatre survivants rentrent en Nouvelle-Espagne en 1536 : Alonso del Castillo Maldonado, AndrĂ©s Dorantes de Carranza, Álvar NĂșñez Cabeza de Vaca et un esclave maure, Estevanico[4] (Esteban de Dorantes).

Cabeza de Vaca écrit ensuite un ouvrage intitulé Naufragios (« Naufrages »), dans lequel il décrit son aventure à pied depuis la cÎte de Floride jusqu'à la cÎte de Sinaloa au Mexique, qui n'évoque pas les Sept Cités de Cibola.

C'est Estevanico qui a un rĂŽle majeur et suscita l'intĂ©rĂȘt pour les citĂ©s d'or[4].

Le mythe des sept citĂ©s d'or mena les conquistadors en direction du nord Ă  travers le Jornada del Muerto oĂč ils dirent avoir dĂ©couvert une « mer d'herbe » et enfin jusqu'aux positions des colons français qui rĂ©sistĂšrent Ă  leur avance.

L'expédition de Marcos de Niza (1539)

AprÚs avoir entendu les rumeurs de l'existence de villes à la richesse infinie au nord de la Nouvelle-Espagne, le vice-roi Antonio de Mendoza confie au moine franciscain Marcos de Niza [5] une mission d'exploration pacifique[6]. Marcos part avec Estevanico pour guide. Ils sont accompagnés par de nombreux serviteurs indiens non armés.

Ils partent de San Miguel de Culiacan en Nouvelle-Galice le [6]. ArrivĂ© Ă  un endroit nommĂ© Vacapa, probablement dans l'actuel État de Sonora, Marcos envoie Estevanico en reconnaissance avec 400 Indiens[6]. Un peu plus tard, Estevanico rencontra un moine qui lui affirma avoir entendu les autochtones Ă©voquer des citĂ©s dĂ©bordant de richesses.

Quand Marcos de Niza entendit le rĂ©cit de son Ă©claireur, il supposa que l'histoire faisait rĂ©fĂ©rence aux sept citĂ©s de CĂ­bola et Quivira. Esteban n'attendit pas que le frĂšre le rejoigne, mais choisit au contraire de continuer son chemin jusqu'Ă  atteindre HĂĄwikuh, situĂ© dans l'actuel Nouveau-Mexique, oĂč il semble qu'il fut tuĂ© par les indigĂšnes tandis que ses compagnons prenaient la fuite.

Marcos de Niza revint Ă  Mexico oĂč il dit que son expĂ©dition continua d'avancer mĂȘme aprĂšs avoir appris le dĂ©cĂšs d'Esteban. Il affirma qu'ils avaient vu une citĂ© trĂšs Ă©loignĂ©e, plus grande encore que la capitale des AztĂšques, Tenochtitlan ; dans cette citĂ©, les habitants utilisaient des plats d'or et d'argent, dĂ©coraient leurs maisons de turquoises et possĂ©daient de fabuleuses perles, Ă©meraudes et autres splendides gemmes[7].

L'expédition de Francisco de Coronado et Marcos de Niza (1540)

AprÚs avoir entendu ce récit, le vice-roi organise immédiatement une expédition militaire avec 200 fantassins et 150 cavaliers[8] et quelques centaines d'Amérindiens. Le commandement en est confié à Francisco Våsquez de Coronado, Marcos de Niza servant de guide.

Coronado part de Culiacån avec un petit groupe le , tandis que le gros de la troupe, commandé par Tristån de Arellano, avance plus lentement. Une escadre commandée par Hernando de Alarcón prend la mer afin de ravitailler réguliÚrement les troupes à terre.

VĂĄsquez de Coronado traverse l'État de Sonora et arrive dans l'actuel Arizona. LĂ , il dĂ©couvre que les histoires de Marcos de Niza n'Ă©taient que des mensonges. Il apparaĂźt Ă©galement que, contrairement Ă  ce qu'affirmait le moine, la mer n'est pas visible depuis la position que la prĂ©cĂ©dente expĂ©dition Ă©tait censĂ©e avoir atteinte et qu'il fallait marcher encore plusieurs jours pour apercevoir la cĂŽte. L'expĂ©dition arrive Ă  Cibola le [8].

D'aprÚs la chronique de Pedro de Castañeda, les soldats maudirent le moine franciscain qui leur avait menti[9].

La découverte du Grand Canyon du Colorado

Våsquez de Coronado mentionne dans ses récits une installation indigÚne dénommée « Quivira », dont l'emplacement reste indéterminé. García López de Cårdenas partit de cet endroit pour chercher une riviÚre dont les Hopis de la région lui avaient parlé.

Quand García López arriva au Grand Canyon et au fleuve Colorado, le fleuve avait déjà été découvert et baptisé à son embouchure, située à plusieurs centaines de kilomÚtres de distance, par Francisco de Ulloa qui, en nomma le delta Ancón de San Andrés. En outre, Hernando de Alarcón avait déjà parcouru plus de 80 lieues le long du fleuve et l'avait baptisé Río de Nuestra Señora del Buen Guía en .

García López fut incapable de trouver un chemin menant des hauteurs du Grand Canyon jusqu'aux berges du fleuve Colorado en contrebas. Cependant, il est considéré comme le premier européen à avoir vu le Grand Canyon.

Il subsiste aujourd'hui au Nouveau-Mexique des traces d'une installation d'assez grande taille dénommée Gran Quivira (« Grande Quivira »). Durant la période de la colonisation espagnole, l'endroit s'appelait Pueblo de Las Humanas.

Mythes analogues

La soif d'or des conquistadors donna naissance Ă  d'autres mythes du mĂȘme genre, comme celui d'Eldorado, celui d'Antillia, celui de La Canela, celui de la CitĂ© des CĂ©sars, celui de la Sierra de la Plata ou encore celui de PaĂŻtiti.

L'évolution du mythe lui a permis de rester profondément ancré dans l'imaginaire collectif. Des explorateurs tels que Thierry Jamin sont d'ailleurs toujours, à l'heure actuelle, en train de chercher certaines de ces villes mythiques.

ƒuvres de fiction inspirĂ©es du mythe

Le mythe des citĂ©s d'or est un thĂšme qui a Ă©tĂ© trĂšs souvent exploitĂ© dans les Ɠuvres de fiction, et continue de l'ĂȘtre.

Romans

  • Dans Le FlĂ©au de Stephen King, Randall Flagg - incarnation du mal apparaissant dans plusieurs Ɠuvres de King - ordonne Ă  l'un des protagonistes de le rejoindre Ă  Cibola, qui plus tard s'avĂšre ĂȘtre en fait Las Vegas.
  • Dans le roman Thunderhead (en) (Les sortilĂšges de la vallĂ©e perdue) coĂ©crit en 1990 par Lincoln Child et Douglas Preston, Quivira est dĂ©couverte cachĂ©e dans une anfractuositĂ© rocheuse et une expĂ©dition se rend sur place. L'or tant recherchĂ© s'avĂšre ĂȘtre de la poterie Ă  base de mica.
  • Dans le livre de Scott O'Dell, La route de l'or ("The king's fifth"), il est fait plusieurs fois rĂ©fĂ©rence aux citĂ©s d'or, ainsi qu'Ă  Cibola. Le personnage principal est appelĂ© Esteban et un Mendoza apparaĂźt Ă©galement.
  • Voir aussi Les sept citĂ©s de Cibola de LĂ©onard Francis Clark, traduction de LĂ©o Lack, (1954, rĂ©Ă©ditĂ© 1959).

Bande dessinée

Cinéma

Télévision

Jeux vidéo

  • Le jeu vidĂ©o The Seven Cities of Gold, sorti en 1984 et mettant en scĂšne la conquĂȘte espagnole, tire son nom de cette lĂ©gende.
  • Dans le jeu vidĂ©o d'inspiration western Gun, Quivira est un Ă©lĂ©ment essentiel de l'histoire alors que le mĂ©chant du jeu, Thomas Magruder, cherche une croix d'or dont il pense qu'elle le mĂšnera Ă  la citĂ©. La sĂ©quence de prologue du jeu est censĂ©e montrer Francisco VĂĄsquez de Coronado Ă  la recherche de Quivira lors de ce qui est appelĂ© la Seconde ExpĂ©dition de Coronado. NĂ©anmoins, dans cette scĂšne, Coronado et tous ses hommes sont massacrĂ©s par les Wichitas, AmĂ©rindiens de l'actuel Kansas.
  • Dans le jeu Colonization de MicroProse, sorti en 1994, on peut dĂ©couvrir une citĂ© de Cibola en investiguant des tumuli.
  • Le jeu vidĂ©o Uncharted : Golden Abyss, de Sony qui appartient Ă  la sĂ©rie Uncharted, a pour thĂšme la recherche des citĂ©s d'or par le protagoniste principal, Nathan Drake, et ses ennemis.
  • Le trait de caractĂšre principal du leader Isabella (Espagne) dans le jeu Civilization V se nomme « Seven Cities of Gold Â».
  • Le jeu vidĂ©o Sid Meier's Pirates ! de MicroProse inclut quatre citĂ©s d'or (aztĂšques, inca, maya, olmĂšques) que le joueur peut dĂ©couvrir en allant sur la terre ferme aprĂšs avoir rĂ©cupĂ©rĂ© les cartes au trĂ©sor de chaque citĂ©.

Sources

Notes et références

  1. (en) Raymond Friday Locke, The Book of the Navajo, Los Angeles, Holloway House Publishing, , 6e Ă©d., 496 p. (ISBN 978-0-87687-500-1, lire en ligne), p. 143
  2. (es) Manuel Lucena Giraldo, A los cuatro vientos : las ciudades de la América hispånica, Madrid, Marcial Pons, coll. « Historia », , 245 p. (ISBN 978-84-96467-17-0, LCCN 2006410261, lire en ligne), p. 198
  3. La formule « Nouveau Monde » est attestĂ©e en 1503 ; le nom d'« AmĂ©rique » en 1507 ; mais le nom d'« Indes » donnĂ© par Christophe Colomb, qui pensait ĂȘtre arrivĂ© en Asie, reste usuelle : « Indiens », « Conseil des Indes », « Indes occidentales ».
  4. Bennassar 2001, p. 212
  5. Marc de Nice. Son patronyme est inconnu, mais il est probablement originaire de Nice, ville appartenant alors aux ducs de Savoie.
  6. Bennassar 2001, p. 213
  7. Le récit de Marcos de Niza, intitulé Descubrimiento de las siete ciudades, est conservé à l'Archivo General de Indias de Séville et a été publié en ligne par la Fundación Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes.
  8. Bennassar 2001, p. 219
  9. SĂĄnchez 1996, tome 1, pp.369-377.

Sources primaires

  • Marcos de Niza, Descubrimiento de las siete ciudades, Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes, FundaciĂłn Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes.
  • Pedro de Castañeda de NĂĄjera, Relation du voyage de Cibola, A. Bertrand, (lire en ligne).

Sources secondaires

  • Jean-Pierre SĂĄnchez, Mythes et LĂ©gendes de la ConquĂȘte de l'AmĂ©rique, Presses Universitaires de Rennes, .
  • BartolomĂ© Bennassar, CortĂ©s. Le conquĂ©rant de l’impossible, Paris, Payot, , 356 p. (ISBN 2-228-89475-3)
  • (es) Juan Carlos GarcĂ­a Regalado, Tierras de Coronado, Barcelone, Abraxas, coll. « Milenio », , 414 p. (ISBN 978-84-95536-21-1, OCLC 47632890)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.