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Cellule souche

Pour les articles homonymes, voir Cellule souche (homonymie).

En biologie cellulaire, une cellule souche est une cellule indiffĂ©renciĂ©e capable, Ă  la fois, de gĂ©nĂ©rer des cellules spĂ©cialisĂ©es par diffĂ©renciation cellulaire et de se maintenir dans l'organisme par division symĂ©trique ou division asymĂ©trique. Les cellules souches sont prĂ©sentes chez tous les ĂȘtres vivants multicellulaires. Elles jouent un rĂŽle central dans le dĂ©veloppement des organismes ainsi que dans le maintien de leur intĂ©gritĂ© au cours de la vie.

Cellules souches embryonnaires de souris en culture.

L'étude des cellules souches animales est un domaine de recherche trÚs actif notamment en raison de leurs applications en médecine. Ce domaine d'étude a récemment connu une rapide expansion avec la mise au point de techniques permettant de générer, en culture, des cellules souches pluripotentes à partir de n'importe quelle cellule du corps, ces cellules souches sont dites induites[1]. Cependant, les cellules souches sont également présentes chez les autres formes de vie pluricellulaire comme dans les méristÚmes des plantes.

Classement selon leur potentiel

Les cellules souches peuvent se distinguer en fonction de leur potentiel de différenciation :

  • Les cellules souches totipotentes : pouvant donner tout type cellulaire, et donc un organisme entier ;
  • Les cellules souches pluripotentes : capables de donner tous les types cellulaires sauf les annexes embryonnaires ;
  • Les cellules souches multipotentes : susceptibles de donner diffĂ©rents types de cellules, mais spĂ©cifiques d'un lignage cellulaire donné ;
  • Les cellules souches unipotentes : qui ne peuvent donner qu'une seule sorte de cellule (elles peuvent cependant, comme toute cellule souche, s'auto-renouveler, d'oĂč l'importance de les distinguer des prĂ©curseurs).

Classement selon leur origine

Pour les recherches scientifiques ou mĂ©dicales, les cellules souches humaines (et plus gĂ©nĂ©ralement de mammifĂšres) peuvent aussi ĂȘtre classĂ©es par rapport Ă  leur origine : embryonnaire, fƓtale ou adulte.

Les Ă©quipes de James Alexander Thomson aux États-Unis (sur des blastocystes humains) et de Shinya Yamanaka au Japon (cellules de souris) ont rĂ©ussi en 2007 Ă  dĂ©diffĂ©rencier des cellules adultes en cellules souches embryonnaires par transformation gĂ©nĂ©tique. Ceci pourrait marquer une avancĂ©e importante, puisqu'elle permettrait la recherche sur les cellules souches embryonnaires sans utiliser d'embryons Ă  cette fin.

En 2007, le professeur Yamanaka (UniversitĂ© de Kyoto) a rĂ©ussi Ă  produire des cellules souches Ă  partir de cellules somatiques adultes, par l'introduction de facteurs de transcription dans des cellules somatiques. Un des problĂšmes, qui Ă©tait l'utilisation d'un oncogĂšne c-myc, a Ă©tĂ© levĂ© un an plus tard par la mĂȘme Ă©quipe[2]. Ces cellules peuvent sous l'action de certains facteurs (Ă©galement oncogĂšnes) se diffĂ©rencier en divers types de tissus, et on espĂšre dans un futur proche, pouvoir utiliser des cellules souches pour soigner des maladies cĂ©rĂ©brales telles que la maladie d'Alzheimer.

Embryonnaires

Aussi appelĂ©es « cellules ES » (de l'anglais embryonic stem, « souches embryonnaires »), ce sont des cellules souches pluripotentes prĂ©sentes dans l'embryon peu de temps aprĂšs la fĂ©condation jusqu'au stade de dĂ©veloppement dit de blastocyste oĂč elles constituent encore la masse cellulaire interne (les autres cellules du blastocyste sont les cellules du trophectoderme).

Ces cellules sont Ă  l'origine de tous les tissus de l'organisme adulte et sont ainsi pluripotentes. Elles peuvent ĂȘtre isolĂ©es et cultivĂ©es in vitro Ă  l'Ă©tat indiffĂ©renciĂ©. Dans des conditions de cultures prĂ©cises (mise en suspension, facteurs de croissance particuliers...), on peut orienter leur diffĂ©renciation vers un type cellulaire donné :[3]

Les cellules souches embryonnaires ont été isolées et cultivées chez la souris à partir du début des années 1980 et ont permis de mettre au point la technique d'invalidation de gÚne par recombinaison homologue (ou knock-out) qui permet, aprÚs réintroduction de ces cellules mutées dans un embryon receveur et des croisements, d'obtenir des souris homozygotes pour une mutation dans un gÚne donné.

Elles sont en pratique prĂ©levĂ©es Ă  partir des cellules de la masse interne du blastocyste (un embryon faisant moins de 150 cellules), ce qui nĂ©cessite la destruction de l'embryon. Elles peuvent ĂȘtre obtenues Ă  partir d'embryons surnumĂ©raires congelĂ©s, issus d'une fĂ©condation in vitro, ou par clonage (par transfert du noyau d'une cellule dans un ovule prĂ©alablement privĂ© du sien).

Ces cellules pourraient permettre la mise au point d'une thérapie cellulaire à de nombreuses pathologies dégénératives (par exemple régénération des neurones à dopamine lésés dans la maladie de Parkinson aprÚs réintroduction dans le cerveau, réparation du tissu musculaire cardiaque endommagé aprÚs un infarctus...)Voir Cellule souche (médecine).

FƓtales

Une cellule souche fƓtale est un type de cellule souche multipotente d'origine fƓtale. Elles peuvent ĂȘtre prĂ©levĂ©es sur des fƓtus issus d'une interruption volontaire de grossesse. Les cellules souches fƓtales ont la particularitĂ© d'ĂȘtre dĂ©jĂ  orientĂ©es vers un type cellulaire particulier.

Adultes

Article connexe : cellule somatique.

Les cellules souches adultes sont des cellules indifférenciées que l'on trouve au sein de tissus qui sont composés en majorité de cellules différenciées dans la plupart des tissus et organes adultes. Ce sont généralement des cellules multipotentes. Elles sont capables de donner naissance à différentes lignées cellulaires d'un tissu donné. Elles sont la base du renouvellement naturel d'un tissu et de sa réparation à la suite d'une lésion.

Elles sont qualifiĂ©es de « somatiques » (du grec σωΌα sƍma = le corps), par opposition aux cellules germinales, et peuvent ĂȘtre trouvĂ©es non seulement chez les adultes, mais aussi chez les enfants et mĂȘme dans le cordon ombilical.

Caractéristiques

Un zygote : spirogyra sp.(zygnematales).
Colonie de cellule souche humaine en culture avec des fibroblastes murins.

Les cellules souches sont souvent capables d'effectuer deux types de division cellulaire : une, classique, elle est dite symétrique (la cellule se divise en 2 cellules souches) et une asymétrique, qui donne d'un cÎté un progéniteur, cellule plus différenciée, et de l'autre une cellule souche. Ainsi, c'est l'utilisation de la division symétrique qui permet à une population souche de maintenir son nombre plus ou moins constant lors de la production de cellules différenciées.

Il existe deux étapes dans la création d'une cellule différenciée :

  • la diffĂ©renciation, durant laquelle une cellule subit un changement qualitatif de phĂ©notype. Par exemple, l’apparition de nouvelles protĂ©ines membranaires, due Ă  l’activation de l’expression d’un gĂšne donnĂ©. Une diffĂ©renciation stricto sensu est donc un Ă©vĂ©nement ponctuel ;
  • la maturation oĂč la cellule subit un changement quantitatif de phĂ©notype. Cela correspond Ă  l’augmentation de la production de certaines protĂ©ines, et donc nĂ©cessairement plus ou moins long.

On pourra ainsi distinguer trois phases lors de la formation d'un tissu différencié :

  1. Une premiÚre dans laquelle les cellules souches se divisent et soit se renouvellent, soit créent des cellules déterminées. Cette phase ne comprend que des divisions mitotiques.
  2. Dans la phase suivante, qualifiĂ©e d’intermĂ©diaire, les cellules dĂ©terminĂ©es sont des cellules de transit, elles subissent Ă  la fois des mitoses et une maturation/diffĂ©renciation. Elles deviennent donc de plus en plus mĂ»res, tout en continuant Ă  se diviser.
  3. La derniĂšre phase est une phase de maturation : les cellules ne se divisent plus mais ne font plus que se diffĂ©rencier et mĂ»rir, jusqu’à donner des cellules mĂ»res, dotĂ©es de tout le matĂ©riel nĂ©cessaire Ă  leur fonction.

Entre la premiÚre phase (prolifération sans différenciations) et la troisiÚme (différenciations sans prolifération), la phase intermédiaire est trÚs flexible, permettant des périodes de maturation plus ou moins longues, différent selon les lignées cellulaires.

Les cellules souches existent durant toute la vie de l'organisme, mais on peut distinguer, chez les mammifĂšres notamment, les cellules souches embryonnaires et les cellules souches adultes.

Fonctions

Articles détaillés : cellule souche animale et méristÚme.

DĂ©veloppement embryonnaire

Les cellules souches embryonnaires sont les cellules centrales du développement, puisqu'elles vont générer progressivement toutes les autres cellules de l'organisme, grùce à des étapes de différenciation et de prolifération finement orchestrées pour créer, finalement, un individu pluricellulaire viable.

Organisme adulte

Cellules souches embryonnaires humaines :
A : cellules souches humaines encore indifférenciées.
B : cellules nerveuses.

Les cellules souches adultes sont beaucoup plus rares, puisqu'une fois le développement terminé, la nécessité de proliférer peut devenir dangereuse. Les cellules souches perdurent donc en des endroits restreints dans chaque tissu ; ces niches ont des mécanismes de maintien complexes et sont régulées pour ne produire que les cellules nécessaires au maintien d'un organisme fonctionnel.

Ces cellules souches sont moins « pluripotentes » que celles constituant l'embryon : elles ne peuvent produire que des cellules spécifiques de leur tissu. Par exemple, chez les mammifÚres adultes, les cellules souches hématopoïétiques régénÚrent en continu les cellules du sang. Il existe également des cellules souches intestinales ainsi que des cellules souches neurales. Ces derniÚres ne sont présentes que dans deux régions distinctes du cerveau : l'hippocampe et la zone sous-ventriculaire (zone bordant les ventricules latéraux).

La présence de cellules souches peut servir différents mécanismes en fonction du tissu :

  • Les cellules souches seraient en partie responsables de la rĂ©gĂ©nĂ©ration des membres chez certains animaux. Ce phĂ©nomĂšne existe ainsi chez certains vertĂ©brĂ©s (comme le lĂ©zard, le triton ou la salamandre).
  • l'organe contenant le tissu doit grandir soit durant la croissance, soit pour pouvoir assurer une fonction, par exemple le cƓur des athlĂštes est plus gros, l'utĂ©rus grossit durant la grossesse, etc.
  • les cellules vieillissent et meurent (par exemple les globules rouges, cellules sans noyau et privĂ©es d'ADN, dont la durĂ©e de vie est de 120 jours ou encore les kĂ©ratinocytes de la surface de la peau) et celles-ci doivent se renouveler.
  • un traumatisme, une ischĂ©mie, ou d'autres phĂ©nomĂšnes peuvent crĂ©er la mort de cellules qui doivent ĂȘtre rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©es ; cette rĂ©gĂ©nĂ©ration est parfois imparfaite soit par manque de cellules souches, soit parce que l'architecture du tissu est trop bouleversĂ©e (ce qui dĂ©pend Ă  la fois du tissu et du dommage qu'il a subi).

DĂ©couvertes

Article détaillé : Cellules souches embryonnaires.

En 1981, les cellules souches embryonnaires ont Ă©tĂ© identifiĂ©es chez la souris par Martin Evans, Kaufman et Martin[4],[5], et en 1998 chez l’homme par les Ă©quipes de l'AmĂ©ricain James Alexander Thomson, de Joseph Itskovitz-Eldor et de l'IsraĂ©lien Benjamin Reubinoff[6],[7]. En 2000, ce dernier transforme des cellules ES en neurones[8].

En 2006, les cellules souches pluripotentes induites (CSPi) sont dĂ©couvertes indĂ©pendamment par Shinya Yamanaka et James Alexander Thomson[9]. Ces cellules iPS sont des cellules matures qui permettent ainsi de donner naissance Ă  tous types de cellules de l'organisme. Cette technique passe par ailleurs par la reprogrammation gĂ©nĂ©tique en laboratoire[10]. En outre, la manipulation gĂ©nĂ©tique permet d’obtenir de telles lignĂ©es cellulaires sans destruction d’embryons. Cette dĂ©couverte a Ă©tĂ© rĂ©compensĂ©e par le prix Nobel de mĂ©decine en 2012 pour Shinya Yamanaka.

Techniques de production

Il existe plusieurs types de techniques pour obtenir des cellules souches pluripotentes :

  • Ă  partir d'embryons (cellules souches embryonnaires),
  • Ă  partir d'Ɠufs non fĂ©condĂ©s,
  • Ă  partir de cellules souches embryonnaires modifiĂ©es en laboratoire,
  • Ă  partir d'une cellule mature reprogrammĂ©e gĂ©nĂ©tiquement (voir CSPi),
  • Ă  partir d'une cellule diffĂ©renciĂ©e et mature puis cultivĂ©es en laboratoire.

Applications médicales

Article détaillé : cellule souche (médecine).

En mĂ©decine, les cellules souches animales et humaines font l'objet de nombreuses recherches depuis les annĂ©es 1990, avec l'espoir de rĂ©gĂ©nĂ©rer des tissus, voire d'en crĂ©er de toutes piĂšces, et idĂ©alement de reconstruire des organes (thĂ©rapie cellulaire) de la mĂȘme façon que les opozones[11], inventĂ©es par Auguste LumiĂšre. Ces avantages potentiels ont suscitĂ© des expĂ©rimentations de clonage thĂ©rapeutique pour en maĂźtriser la fabrication en grand nombre.

Le premier médicament fabriqué à base de cellules souches est approuvé en par les autorités canadiennes. Il s'agit du Prochymal, une préparation obtenue à partir de cellules souches adultes mésenchymateuses[12].

Notes et références

  1. (en) Takahashi et al., « Induction of Pluripotent Stem Cells from Adult Human Fibroblasts by Defined Factors », Cell, vol. 131, no 5,‎ , p. 861-872. (DOI ) .
  2. (en) Shinya Yamanaka, « Generation of induced pluripotent stem cells without Myc from mouse and human fibroblasts », Nature Biotechnology, Nature Publishing Group, vol. 26, no 1,‎ , p. 101–106 (ISSN , DOI , lire en ligne, consultĂ© le ) .
  3. Purves 2018, p. 501.
  4. (en) Nature, 1981, Vol. 292:154-6, Evans and Kaufman, Establishment in culture of pluripotential cells from mouse embryos
  5. (en) Proc Natl Acad Sci U S A. 1981, 78:7634-8., Martin GR, Isolation of a pluripotent cell line from early mouse embryos cultured in medium conditioned by teratocarcinoma stem cells
  6. (en) Thomson JA et al. Science 1998, 282:1145-7 Embryonic stem cell lines derived from human blastocysts.
  7. (en) Nat Biotechnol. 2000, 18:399-404, Reubinoff BE et al. Embryonic stem cell lines from human blastocysts: somatic differentiation in vitro.
  8. Cellules souches : elles repoussent les limites de la vie !, Science et Vie, n°1070, novembre 2006, page 57.
  9. Avec la collaboration de Mathilde Girard, Les cellules pluripotentes induites (IPS), www.inserm.fr, consulté le 7 février 2014.
  10. Reprogrammation: Comment changer n'importe quelle cellule du corps en une cellule souche pluripotente, www.eurostemcell.org, 5 Oct 2010.
  11. Auguste Lumiùre, Mes travaux et mes jours, autobiographie, Éd. La Colombe, Lyon, 1953, p. 129.
  12. (en) Andrew Pollack, A Stem-Cell-Based Drug Gets Approval in Canada, The New York Times

Voir aussi

Bibliographie

  • Max de Ceccatty, Conversations cellulaires, Ă©d. du Seuil, Paris, 1991 (Ă©puisĂ©, mais disponible dans les bibliothĂšques ; ne parle pas des cellules souches en elles-mĂȘmes, mais dĂ©taille les processus de communication qui les rendent utiles)
  • Dale Purves, George J. Augustine, David Fitzpatrick, William C. Hall, Anthony-Samuel LaMantia, James O. McNamara et S. Mark Williams, Neurosciences, Bruxelles, De Boeck UniversitĂ©, coll. « Neurosciences & Cognition », , 6e éd., 811 p. (ISBN 978-2-8073-1492-4, lire en ligne) .

Articles connexes