Balma de Na Cristiana
La Balma de Na Cristiana est un dolmen situé dans le département français des Pyrénées-Orientales.
Balma de Na Cristiana | ||||
Vue de l'entrée du dolmen | ||||
Présentation | ||||
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Type | dolmen | |||
Période | néolithique (2000 av. J. C.) | |||
Caractéristiques | ||||
Matériaux | granite | |||
GĂ©ographie | ||||
Coordonnées | 42° 29′ 07″ nord, 2° 53′ 09″ est | |||
Pays | France | |||
RĂ©gion | Occitanie | |||
Département | Pyrénées-Orientales | |||
Commune | L'Albère | |||
Géolocalisation sur la carte : Pyrénées-Orientales
GĂ©olocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Pyrénées
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Toponymie
Balma est un toponyme d'origine celte[1]. Il est souvent utilisé en Catalogne et dans le Sud de la France pour désigner des grottes ou des lieux proches de grottes, mais aussi parfois pour des dolmens, comme celui-ci ou la Balma del Moro[2] à Laroque-des-Albères, à quelques kilomètres de là . Le mot est passé en catalan et signifie « grotte peu profonde » ou « abri sous roche »[3].
Le mot catalan Na vient du latin Domina, « Dame ». Il s'agit d'un article destiné à marquer la politesse ou le respect et placé devant le prénom d'une personne de sexe féminin[4]. Cristiana (ou Crestiana[5]) signifie « Chrétienne »[6].
Jacques Freixe, en 1903, rapporte que la dénommée Cristiana était une ancienne propriétaire du terrain où se situe le dolmen. Comme souvent dans la région, le nom de ce dolmen est probablement tiré d'une légende concernant la personne supposément inhumée à cet endroit, comme d'autres dolmens de la région qui sont censés abriter des restes de Maures (il existe plusieurs Balma del Moro par exemple, ou une Caixa de Rotllan, « tombeau de Roland »). « Cristiana » pourrait être une christianisation de la légende[7].
Situation
Le massif des Albères constitue la partie la plus orientale des Pyrénées, entre le col du Perthus et la mer Méditerranée. Relativement peu élevé (son point culminant, le puig Neulós atteint 1 256 m) mais étroit et escarpé, il sépare la plaine du Roussillon, au nord, de celle de l'Empordà , au sud. Le Roussillon fait partie du département français des Pyrénées-Orientales alors que l'Empordà est rattaché à l'Espagne.
Les dolmens recensés dans les Pyrénées-Orientales, y compris ceux qui sont attestés par des sources anciennes mais n'ont pas été retrouvés, sont tous situés dans les zones accidentées ou montagneuses du département, généralement sur un col, une ligne de crête ou une hauteur[8].
Le dolmen de Na Cristiana ne fait pas exception : il est situé sur le flanc sud du puig de Sant Cristau, à 650 m d'altitude, sur un petit replat d'une ligne de crête, au pied d'un chaos rocheux, non loin du col du Perthus, dans l'Ouest du massif des Albères. Il est accessible à pied depuis le hameau Saint-Jean de L'Albère en suivant sur trois cents mètres la route départementale 17 qui mène au Perthus, puis par un sentier balisé qui monte assez sévèrement dans la forêt. Un parcours plus long est également possible en véhicule tout terrain par un sentier d'exploitation qui a été ouvert dans le but de donner accès au dolmen, à 500 m du village[9] - [10].
- La route menant à Saint-Jean de l'Albère.
- Le chaos rocheux au-dessus du dolmen.
- Le dolmen dans son environnement.
Dolmen et tumulus
- Dalle en place.
- Dalle replacée lors de la restauration.
- Cale ajoutée lors de la restauration.
La Balma de Na Cristiana est un dolmen à couloir orienté, comme beaucoup des dolmens des Pyrénées-Orientales, vers le sud-est. Il est constitué de sept dalles verticales formant trois murs en rectangle sur lesquelles repose une large pierre plate, appelée dalle de couverture[9].
- Le dolmen vu du nord. Sur la droite, la dalle de chevet, fendue.
- Vue de l'est.
- Vue du dolmen et de son tumulus depuis le sud.
- Face ouest du dolmen. Les dalles sont en bon Ă©tat.
Historique
La Balma de Na Cristiana est érigée au Néolithique final. Il est pillé très tôt. Une dalle est renversée, sans doute volontairement, au Moyen Âge, peut-être au XIIIe siècle. Il sert d'abri à de nombreuses époques[11].
Selon Jean Abélanet, le premier à mentionner ce dolmen est Paul Pallary en 1887[12]. Cependant, le 27 février 1847, Prosper Mérimée donne lecture, devant le Comité historique des arts et monuments, à Paris, d'une lettre écrite par François Jaubert de Passa qui fait un bilan des anciens monuments païens des Pyrénées-Orientales et mentionne[13] :
« Vers l'extrémité occidentale des Alberas, avant le col de Bellegarde, est un dolmen très-dégradé, appelé roc de la Christiana. »
Le dolmen est décrit par Jacques Freixe en 1903[14]. Selon une critique de 1904[15] :
« M. Freixe recherche à qui il faut en attribuer la construction et discute les documents susceptibles d'indiquer quelles furent les anciennes populations du Roussillon. Il conclut, peut-être un peu rapidement, que ce sont les Sordes, ancêtres des Volques Tectosages, et laisse entendre que les dolmens du pays « étaient destinés à offrir des asiles aux dieux, afin de s'attirer leur bienveillance ». »
Freixe, qui a procédé à des fouilles, n'a trouvé aucun ossement et en déduit que le dolmen n'a pas servi de sépulture[16], de plus, il confond l'espace laissé au sud par la dalle déplacée avec une ouverture du dolmen[14]. Il décrit lui aussi un monument en très mauvais état. En effet, les deux dalles adjacentes à la dalle de chevet sont manquantes, la dalle la plus à l'est est renversée et les deux restantes, au nord, sont si érodées qu'elles ne soutiennent plus la dalle de couverture, qui n'est plus horizontale[14].
Jean Abélanet visite le dolmen en 1964, puis le fouille en 1970. En septembre 1988, le dolmen est à nouveau fouillé, puis restauré[17]. La restauration consiste à replacer les deux dalles adjacentes à la dalle de chevet, à relever la dalle de couverture en la calant avec des pierres du côté nord[14] et à couler une dalle de béton sur le sol afin de décourager les fouilles clandestines[16].
Fouilles et inventaire du mobilier
Les fouilles menées par Jean Abélanet en 1970 permettent de retrouver des tessons de poterie médiévale ainsi que les deux dalles adjacentes à la dalle de chevet, qui avaient été renversées, l'une vers l'extérieur (dalle sud) l'autre vers l'intérieur du dolmen (dalle nord)[14].
Les fouilles de 1988 donnent du mobilier datant du Néolithique final jusqu'au XIXe siècle, mais aucun ossement. Les documents préhistoriques sont rares. L'industrie lithique est représentée par un seul petit galet de quartz dont il n'est pas certain qu'il ait été taillé intentionnellement. Plusieurs tessons de poterie modelée sont révélés, dont deux sont décorés d'un cordon lisse, de culture vérazienne. Cela les date d'avant l'apparition du cuivre dans la région, et fait d'eux les plus anciens objets découverts dans la partie nord des Pyrénées catalanes[18].
Lors des fouilles, les archéologues relèvent la dalle nord sans avoir le temps d'approfondir leurs recherches. Quelques jours plus tard, les propriétaires du terrain découvrent à cet endroit trois pièces de monnaie espagnoles en argent de cinq pesetas : deux datées de 1870 et une, datée de 1875, montrant le portrait du roi d'Espagne Alphonse XII. Elles trouvent également une médaille, elle aussi en argent, montrant d'un côté une scène de guerre, de l'autre l'inscription[11] :
Ils furent ici moins de soixante
Opposés à toute une armée.
Sa masse les Ă©crasa.
La vie plutĂ´t que le courage
Abandonna ces soldats Français
30 avril 1863
Camerone
Cette médaille commémore la bataille de Camerone, qui a eu lieu de 30 avril 1863. Lors de cet épisode de l'intervention française au Mexique, à Camarón de Tejeda, une soixantaine de soldats de la Légion étrangère ont combattu deux mille soldats mexicains. Ce combat, considéré comme héroïque, est encore, au XXIe siècle célébré tous les ans, en France, par la Légion. Un monument a été érigé, au Mexique, avec cette même inscription.
Annexes
Notes et références
- Basseda 1990, p. 42
- Basseda 1990, p. 120
- (ca) « Balma », dans Diccionari de la llengua catalana, Institut d'Estudis Catalans (lire en ligne)
- (ca) « Na », sur L'Enciclopèdia.cat, Gran Diccionari De La Llengua Catalana, Barcelone, Edicions 62
- Jean Sagnes (dir.), Le pays catalan, t. 2, Pau, Société nouvelle d'éditions régionales, , 579-1133 p. (ISBN 2904610014)
- Basseda 1990, p. 296
- TarrĂşs 2002, p. 99
- Abélanet 2011, p. 35.
- Abélanet 2011, p. 178
- Carte IGN no 2549 OT « Banyuls — Col du Perthus — Côte Vermeille » au 1/25000e, « Accessible en ligne » sur Géoportail (consulté le 15 janvier 2012).
- Abélanet 2000, p. 22
- Abélanet 2000, p. 19, voir Pallary 1887.
- Bulletin archéologique publié par le Comité historique des arts et monumens, vol. 4, Paris, Comité historique des arts et monuments, 1847-1848 (ISSN 1256-3803, lire en ligne), p. 227
- Abélanet 2000, p. 19
- Revue d'Histoire et d'Archéologie du Roussillon 1904
- Abélanet 2000, p. 21
- Abélanet 2000
- Abélanet 2000, p. 22, 23
Sources anciennes
- Paul Pallary, « Les dolmens du Puig-Noulous », Matériaux pour l'histoire primitive et naturelle de l'homme, Toulouse,‎ , p. 440-442 (lire en ligne)
- Jacques Freixe, « Les premiers habitants du Roussillon et la Balma de Na Christiana », Revue d'Histoire et d'Archéologie du Roussillon, no IV,‎ , p. 115-122, 131-146 et 191-197
- M. D., « Revue d'Histoire et d'Archéologie du Roussillon, 1903 », Annales du midi, Toulouse, Édouard Privat, no 16,‎ , p. 173 (lire en ligne)
Sources récentes
- Jean Abélanet, « Restauration du dolmen dit Balma de Na Cristiana (L'Albère) », Bulletin de l'Association Archéologique des Pyrénées-Orientales, no 8,‎ 1993a, p. 75 à 78
- Jean Abélanet, « L'Albère. Dolmen de Na Cristiana », Bilan Scientifique Régional Languedoc-Roussillon,‎ 1993b, p. 141
- Jean Abélanet, « Restauration du dolmen dit Balma de Na Cristiana (L'Albère) », Cahiers de la Rome, no 9,‎ , p. 18 à 24 (ISSN 1248-1793)
- Jean Abélanet, Itinéraires mégalithiques : dolmens et rites funéraires en Roussillon et Pyrénées nord-catalanes, Canet, Trabucaire, , 350 p. (ISBN 9782849741245)
- LluĂs Basseda, Toponymie historique de Catalunya Nord, t. 1, Prades, Revista Terra Nostra, , 796 p.
- (ca) Enric Carreras VigorĂłs et Josep TarrĂşs Galter, « 181 anys de recerca megalĂtica a la Catalunya Nord (1832-2012) », Annals de l'Institut d'Estudis Gironins, no 54,‎ , p. 31-184 (lire en ligne)
- Marie Larroumet, Mythe et images de la Légion étrangère, L'Harmattan, coll. « Histoire de la défense », , 310 p. (ISBN 978-2-296-37574-1, présentation en ligne)
- (ca) Josep Tarrús i Galter, Poblats, dòlmens i menhirs : Els grups megalitics de l'Albera, serra de Rodes i cap de Creus, Diputacio de Girona, (ISBN 84-95187-34-5)