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Caixa de Rotllan

La Caixa de Rotllan (prononcé « cache » de Roland) est un dolmen daté de la seconde moitié du IIIe millénaire av. J.-C., situé sur le territoire de la commune d'Arles-sur-Tech, dans le département français des Pyrénées-Orientales en région Occitanie.

La Caixa de Rotllan
« la tombe de Roland »
Image illustrative de l’article Caixa de Rotllan
Vue générale de l'édifice
Présentation
Type dolmen
Protection Logo monument historique Classé MH (1889)
Caractéristiques
Matériaux granite
Géographie
Coordonnées 42° 28′ 52″ nord, 2° 36′ 04″ est
Pays Drapeau de la France France
Région Occitanie
Département Pyrénées-Orientales
Commune Arles-sur-Tech
Géolocalisation sur la carte : Pyrénées-Orientales
(Voir situation sur carte : Pyrénées-Orientales)
La Caixa de Rotllan« la tombe de Roland »
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
La Caixa de Rotllan« la tombe de Roland »

Son nom signifie « tombeau de Roland » en catalan. En effet, une légende affirme que le chevalier Roland a vécu dans la région du Vallespir et que son corps, après sa mort à la bataille de Roncevaux, y a été ramené par son cheval et inhumé à cet endroit. Si les dolmens sont bien d'anciennes sépultures, ils ont cependant été érigés bien avant les aventures réelles ou supposées du chevalier légendaire.

Le dolmen est constitué de trois pierres verticales formant un H surmontées d'une dalle, l'ensemble délimitant une chambre de forme rectangulaire. De dimensions moyennes, en plan simple (c'est-à-dire sans couloir), orienté vers le sud-est, il possède des caractéristiques fréquentes dans les dolmens de ce département. Bâtiment remarqué depuis au moins le Moyen Âge, il est classé à l'inventaire des monuments historiques mais n'a jamais fait l'objet de fouilles archéologiques.

Situation

La Caixa de Rotllan fait partie des cent quarante huit dolmens recensés dans les Pyrénées-Orientales, en comptant ceux qui sont attestés par des sources anciennes mais n'ont pas été retrouvés[1]. Ils sont tous situés dans les zones accidentées ou montagneuses du département, généralement sur un col, une ligne de crête ou une hauteur[2].

Vue du tumulus. Le dolmen, sur le centre gauche de la photo, est en partie masqué par des arbres.

Ce dolmen ne fait pas exception : il est situé sur une ligne de crête du flanc Sud du massif du Canigou, à 830 m d'altitude[3] au pied d'un chaos de rochers en granite[4], dans la région historique et géographique du Vallespir, à la limite des communes d'Arles-sur-Tech et Montbolo[3].

Deux chemins permettent d'accéder au dolmen depuis le village d'Arles. Il est possible d'emprunter une piste carrossable serpentant le long de la rivière Bonabosc, qu'il faut quitter pour suivre un petit sentier d'une soixantaine de mètres à travers bois. Une autre option est, le long d'une ligne de crête surplombant les vallées du Bonabosc et du Riuferrer, le GR 10 qu'il faut aussi quitter pour un sentier de petite randonnée balisé[3]. Cette partie du GR10 est le début d'un ancien chemin qui fut très fréquenté pour relier Arles-sur-Tech aux mines de Batère. À pied, le trajet prend environ une heure trente[4]. La piste parcourant la haute vallée du Bonabosc et qui passe à proximité de la Caixa est appelée « route forestière du dolmen »[3].

La carte IGN au 125000e le signale d'une étoile, ce qui indique une « curiosité »[3].

Répartition des principaux lieux cités dans cet article.

Description

Plan et orientation du dolmen[5].

La Caixa de Rotllan est, comme la plupart des dolmens roussillonais[6], de plan simple, c'est-à-dire sans couloir[7], ce qui le rattache à d'autres dolmens de la période du chalcolithique et début de l'âge du bronze, durant la seconde moitié du IIIe millénaire av. J.-C.[8].

Malgré des dimensions assez modestes, il offre un aspect imposant du fait de l'épaisseur des pierres qui le constituent. En très bon état, il est fait de trois dalles verticales surmontées d'une quatrième, formant une chambre grossièrement rectangulaire orientée nord-nord-ouest/sud-sud-est, l'ouverture se trouve dans la direction sud-sud-est[7], comme la majorité des dolmens du département[9]. Cette orientation suit celle de la ligne de crête sur laquelle il se trouve[10]. Le dolmen est entouré d'un tumulus d'environ dix mètres de diamètre[7], grossièrement circulaire[11] - [7]. Le matériau utilisé est du granite trouvé sur place[7].

  • La chambre dolménique.
    La chambre dolménique.
  • Le dolmen dans son environnement, depuis le sud.
    Le dolmen dans son environnement, depuis le sud.
  • Le dolmen depuis le nord, on aperçoit les roches constituant le tumulus au premier plan.
    Le dolmen depuis le nord, on aperçoit les roches constituant le tumulus au premier plan.

Les montants latéraux sont deux blocs d'épaisseur irrégulière (entre 20 et 57 cm) de 2,40 m de long et de 1,30 m de hauteur hors-sol. La dalle du fond (appelée dalle de chevet) mesure 1,20 m de haut, 1,25 m de large pour 20 cm d'épaisseur moyenne. La dalle de couverture fait 2,60 m de long pour 1,50 m de large. Son épaisseur varie de 20 cm à 45 cm. L'irrégularité des dalles de soutien ne lui apporte que trois points d'appui. L'ensemble délimite une chambre rectangulaire de m sur 1,30 m environ[7]. L'ensemble donne un plan en forme de H : la dalle de chevet étant encadrée par les dalles latérales. Ce plan est suivi par la plupart des dolmens du département. Il suggère que la dalle de chevet a été placée en premier, les dalles latérales ensuite[6].

  • La dalle latérale du nord-est.
    La dalle latérale du nord-est.
  • La dalle de chevet.
    La dalle de chevet.
  • La dalle latérale du sud-ouest.
    La dalle latérale du sud-ouest.

Toponymie et légende

Mort de Roland (Jean Fouquet, XVe siècle).

Le nom catalan du dolmen, signifiant « le tombeau de Roland », montre que son utilisation en tant que sépulture était connue des habitants de la région[7]. Les mégalithes des Pyrénées-Orientales portent souvent des noms de personnages mythiques comme Roland ou ses ennemis les « Maures »[12]. D'autres lieux tout proches portent le même nom légendaire de Roland.

À 1 500 m au nord de la Caixa en suivant la ligne de crête se trouve le Palet de Rotllan. Le jeu de palets est un ancien jeu de quilles qui consistait à faire tomber un objet (souvent un bâton) fiché dans le sol en lançant un palet contre celui-ci. Selon la légende, Roland utilisait d'énormes rochers à la place du palet et s'amusait à détruire les châteaux du Vallespir plutôt que d'atteindre des quilles[13].

Plus au nord encore, l'abeurador del cavall de Rotllan (« abreuvoir du cheval de Roland ») est un bassin où le chevalier légendaire aurait fait boire son cheval. La Cova d'en Rotllan (« grotte de Roland ») est un autre dolmen, situé sur la commune voisine de Corsavy[13], où Roland aurait eu l'habitude de se reposer[12].

Selon La Chanson de Roland, les corps de Roland, du chevalier Olivier et de Turpin, tous morts à la bataille de Roncevaux, furent transportés par Charlemagne et inhumés dans la basilique Saint-Romain de Blaye, à Blaye, en Gironde. Une autre légende rapporte que le cheval de Roland a emporté le corps de son maître jusque dans le Vallespir, à l'endroit où il avait l'habitude de jouer au palet. Là, un tombeau lui fut élevé : c'est la Caixa de Rotllan. Plusieurs toponymes de la région font référence aux empreintes de pas qu'aurait laissées le cheval fantastique[14].

Historique

Le dolmen de la Caixa de Rotllan est élevé au chalcolithique ou au début de l'âge du bronze, durant la seconde moitié du IIIe millénaire av. J.-C..

Il est utilisé depuis le Moyen Âge comme borne pour marquer la séparation des territoires des villages d'Arles et de Montbolo[7]. La limite actuelle de ces deux communes passe tout près du dolmen[3].

« Dolmen sur l'ancienne route d'Arles à Batera », planche publiée dans Ratheau 1866. On peut remarquer que les dalles sont plus régulières que dans la réalité.
« Dolmen au pied du Canigou », gravure parue dans La création de l'Homme et premiers âges en 1887.

La première publication mentionnant ce dolmen est un article intitulé « Monument druidique (entre Arles et Batère) », par Jean-Baptiste Renard de Saint-Malo, en 1837. Mais Renard de Saint-Malo confond la Caixa avec le palet de Roland, tout proche[13]. Louis Companyo dans son Histoire naturelle du département des Pyrénées-Orientales (1861), précise que le palet n'est pas un dolmen et met en garde le lecteur contre la confusion fréquente entre les dolmens et certains amas naturel de roches qui peuvent leur ressembler[15] - [16]. La première description scientifique de la Caixa est due à Alexandre-Félix Ratheau en 1866, dans une « Note sur un monument celtique du département » parue dans le Bulletin de la Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales. À cette époque, l'élévation des dolmens est attribuée aux Celtes[13]. Dans cet ouvrage, Ratheau, officier du génie et auteur d'ouvrages sur l'architecture militaire, donne les dimensions du dolmen, son orientation par rapport au Nord et réalise un plan du site avec trois plans de coupe[17]. Il signale que le palet est en fait constitué de meules de granite abandonnées et précise la correction de Companyo. En effet, l'ouvrage de Companyo pouvait laisser penser qu'il n'existait pas de dolmen nommé Caixa de Rotllan[16]. En 1887, une gravure du dolmen, réalisée d'après une photographie, est publiée dans La création de l'Homme et premiers âges, d'Henri Raison du Cleuziou[13]. Le dolmen a été classé à l'inventaire des monuments historiques dès 1889[18].

Le dolmen est mentionné dès le XIXe siècle dans différents guides touristiques en France[19] et en Angleterre[20].

Au XIXe siècle, il est nommé sous la forme francisée Caxa de Roland[4] - [19].

Aucune fouille scientifique approfondie du dolmen n'a été menée[13].

Notes et références

  1. Abélanet 2011, p. 21 en recense 147, auxquels il faut ajouter le dolmen de Castelló découvert en 2011. Voir Oriol Lluis Gual, « Le dolmen de Castelló », Association de Sauvegarde du Patrimoine de Prats de Mollo Velles Pedres i Arrels pour ce dernier.
  2. Abélanet 2011, p. 35.
  3. « Situation de la Caixa de Rotllan » sur Géoportail.
  4. Ratheau 1866, p. 169.
  5. D'après Abélanet 2011, p. 206
  6. Abélanet 2011, p. 38
  7. Abélanet 2011, p. 206.
  8. Valérie Porra-Kuteni, « Françoise CLAUSTRE : 30 ans d'Archéologie préhistorique en Roussillon », ARCHÉO 66, Bulletin de l'Association archéologique des Pyrénées-Orientales, no 24, , p. 129-130 (lire en ligne)
  9. Abélanet 2011, p. 39
  10. Ratheau 1866, p. 171-172
  11. Philippe Soulier, La France des dolmens et des sépultures collectives, 4500-2000 avant J.-C., Editions Errance, coll. « Archéologie aujourd'hui », , 335 p. (ISBN 978-2-87772-157-8), p. 162.
  12. Abélanet 2011, p. 22.
  13. Abélanet 2011, p. 207
  14. Abélanet 2008, p. 67.
  15. Companyo 1861, p. 145.
  16. Ratheau 1866, p. 170.
  17. Voir Ratheau 1866, p. 168 ou l'illustration ci-dessus.
  18. « Dolmen », notice no PA00103962, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  19. Par exemple, dans le Guide national et catholique du voyageur en France : avec notices religieuses, historiques et biographiques, pèlerinages, stations balnéaires, renseignements divers, cartes, plans et gravures, tables alphabétiques, etc., t. 2, Paris, maison de la bonne presse, 1900-1901 (lire en ligne), p. 1006
  20. Augustus Hare, South-western France, Londres, Georges Allen, (lire en ligne), p. 517

Annexes

Ouvrages récents

  • Jean Abélanet, Lieux et légendes du Roussillon et des Pyrénées catalanes, Canet, Trabucaire, coll. « Mémoires de pierres, souvenirs d'hommes », , 189 p. (ISBN 978-2-84974-079-8)
  • Jean Abélanet, Itinéraires mégalithiques : dolmens et rites funéraires en Roussillon et Pyrénées nord-catalanes, Canet, Trabucaire, , 350 p. (ISBN 9782849741245)
  • (ca) Enric Carreras Vigorós et Josep Tarrús Galter, « 181 anys de recerca megalítica a la Catalunya Nord (1832-2012) », Annals de l'Institut d'Estudis Gironins, no 54, , p. 31-184 (lire en ligne)

Ouvrages anciens

  • Jean-Baptiste Renard de Saint-Malo, « Monument druidique (entre Arles et Batère) », Le Publicateur des Pyrénées-Orientales, vol. 46,
  • Louis Companyo, Histoire naturelle du département des Pyrénées-Orientales, t. 1, Perpignan, Imprimerie de J.-B. Alzine, (lire en ligne)
  • Alexandre-Félix Ratheau, « Note sur un monument celtique du département », Bulletin de la Société agricole, scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales, vol. 14, , p. 168-173 (lire en ligne)
  • Henri Raison Du Cleuziou, La création de l'homme et les premiers âges de l'humanité, Paris, C. Marpon et E. Flammarion, , 840 p. (lire en ligne)

Article connexe

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