Affaire Mohammed al-Durah
Lâaffaire Mohammed al-Durah[N 1] (en arabe : Ù ŰÙ ŰŻ ۧÙۯ۱۩) dĂ©signe les controverses gĂ©nĂ©rĂ©es par la diffusion dâun reportage de France 2 et Charles Enderlin sur la mort dâun enfant palestinien de 12 ans, Mohammed al-Durah, tuĂ© par balles alors que son pĂšre tentait de le protĂ©ger, lors dâĂ©changes de tirs dans la bande de Gaza entre les Forces de sĂ©curitĂ© palestiniennes et lâarmĂ©e israĂ©lienne, le , au dĂ©but de la seconde intifada.
Le journaliste franco-israĂ©lien Charles Enderlin a Ă©tĂ© le premier journaliste Ă commenter les images Ă la suite du film des Ă©vĂ©nements pris par son camĂ©raman. Pour Charles Enderlin, dans son premier reportage puis dans son livre Ă©crit par la suite sur cette affaire, l'enfant est victime de tirs israĂ©liens. Son reportage fut diffusĂ© le soir mĂȘme sur France 2 au journal de 20 heures et repris Ă travers le monde.
Une controverse en deux temps issue de commentateurs pro-israéliens a pris corps peu aprÚs la diffusion du reportage, d'abord sur la provenance des balles tirées sur le jeune Mohammed al-Durah (ce seraient les Palestiniens qui auraient tué l'enfant, et non l'armée israélienne), ensuite sur l'allégation d'une « mise en scÚne » des Palestiniens, selon laquelle l'enfant n'aurait pas été tué. Lancée et soutenue en France par un petit nombre de personnes (Gérard Huber, Stéphane Juffa, puis Philippe Karsenty, Luc Rosenzweig), cette controverse est devenue avec le temps une polémique multiforme à rebondissements judiciaires.
L'affaire est qualifiée de diverses maniÚres de « campagne »[1] - [2] ayant des enjeux politiques et idéologiques[3] - [4] - [5] - [1] - [6]. Mediapart la présente comme « une machine sophistiquée »[7] qui « connaßt nombre de réitérations »[8].
Dans les derniĂšres annĂ©es, lâaffaire sâest polarisĂ©e autour du procĂšs en diffamation intentĂ© par France 2 et Charles Enderlin Ă Philippe Karsenty, qui, en 2004, avait dĂ©noncĂ© une « imposture mĂ©diatique ». CondamnĂ© le par le tribunal de grande instance de Paris, Philippe Karsenty a fait appel et a Ă©tĂ© relaxĂ© le . Charles Enderlin et France 2 se pourvoient en cassation et le , la Cour de cassation renvoie les deux parties vers un nouveau jugement. Le , la Cour dâappel a entendu de nouveau les parties et son arrĂȘt, rendu le , condamne cette fois Philippe Karsenty[9].
Chronologie
30 septembre 2000
Le , deux jours aprĂšs la visite dâAriel Sharon sur lâesplanade des MosquĂ©es et deuxiĂšme jour de lâIntifada Al-Aqsa, des journalistes de Reuters, dâAP, de la NHK, ainsi que Talal Hassan Abu Rahmeh, cadreur palestinien de France 2, ont pris place au carrefour de Netzarim, dans la bande de Gaza[3]. Mohammed al-Durah, un garçon de 12 ans, et son pĂšre, Jamal al-Durah sâengagent dans la rue Al-Shuhada qui les conduit au carrefour de Netzarim : c'est une journĂ©e de grĂšve et de protestation dans les territoires palestiniens, et il n'y a pas Ă©cole. Talal Hassan Abu Rahma filme par intermittence les manifestants, pendant toute la matinĂ©e, puis, lâaprĂšs-midi, les Ă©changes de feux et enregistre sur sa camĂ©ra, Ă quelques mĂštres de lui, lâenfant Mohammed al-Durah atteint mortellement par des balles alors quâil se blottissait dans les bras de son pĂšre[3].
Le vidĂ©aste palestinien fait parvenir ses images Ă Charles Enderlin, qui Ă©tait au bureau de France 2 Ă JĂ©rusalem. Celui-ci prend contact avec le service de presse de lâarmĂ©e israĂ©lienne pour lâinformer de la gravitĂ© des images dĂ©tenues. Il nâobtient pas de rĂ©ponse[3]. En application d'accords standard entre chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision le bureau de France 2 transmet alors gratuitement Ă dâautres Ă©quipes de tĂ©lĂ©vision le reportage d'Abu Rahma et du journaliste Charles Enderlin prĂ©sentant la mort dâun enfant dans les bras de son pĂšre. Cette transmission du reportage d'Enderlin Ă d'autres chaĂźnes sera par la suite vivement reprochĂ©e Ă France 2 qui se verra accusĂ©e par les personnes qui mettront en cause le reportage d'Enderlin (par exemple, et entre autres, Pierre-AndrĂ© Taguieff) d'avoir intentionnellement promu un message accusateur contre l'occupation israĂ©lienne[10] alors que lesdits accords entre chaĂźnes existent bien et s'appliquent indiffĂ©remment Ă une grande variĂ©tĂ© de reportages produits[11]. Pour sa part, France 2 diffuse, le soir oĂč les Ă©vĂ©nements eurent lieu, et aprĂšs accord de la rĂ©daction de Paris, un reportage sur le drame, commentĂ© par Charles Enderlin.
PremiÚres réactions
Ces images font rapidement le tour de la planĂšte et, dans le contexte de lâIntifada, suscitent une Ă©motion considĂ©rable. LâarmĂ©e israĂ©lienne reconnaĂźt dans un premier temps sa responsabilitĂ©, et publie des excuses officielles : le gĂ©nĂ©ral Giora Eiland dĂ©clare Ă la BBC le que « les tirs venaient apparemment des soldats israĂ©liens postĂ©s Ă Netzarim »[12], rĂ©pĂšte ces propos sur CNN (« apparemment, lâenfant a Ă©tĂ© tuĂ© par lâarmĂ©e israĂ©lienne »), et dit Ă©galement : « Autant que nous puissions savoir, lâenfant a Ă©tĂ© touchĂ© par nos tirs » citĂ© par le journal Haaretz le )[3]. Ces propos sont ensuite confirmĂ©s par le gĂ©nĂ©ral Moshe Yaâalon[3].
Contestations
La montĂ©e des rĂ©actions provoquĂ©es par les images et la crainte de leur possible instrumentalisation, Ă©crit HervĂ© Deguine[3], conduisent lâarmĂ©e Ă revenir sur ses positions. Une reconstitution de la scĂšne aurait permis de jeter une lumiĂšre sur les diffĂ©rentes hypothĂšses, mais la dĂ©molition du site par lâarmĂ©e empĂȘchera Ă tout jamais la conduite dâune enquĂȘte sĂ©rieuse[3] car selon Bernie Schechter, un expert israĂ©lien en balistique, cette destruction « Ă©limine 95 % des Ă©lĂ©ments matĂ©riels nĂ©cessaires Ă une preuve »[13].
Câest alors que des contre-rĂ©actions sâorganisent. La premiĂšre provient de Nahum Shahaf (en), physicien, qui dirige une petite entreprise travaillant pour lâarmĂ©e. Nahum Shahaf avait, quelques annĂ©es plus tĂŽt, contestĂ© (en) lâauthenticitĂ© du film vidĂ©o amateur Ă©tablissant la responsabilitĂ© dâYigal Amir dans lâassassinat dâYitzhak Rabin en 1995[8]. Le , il prend contact avec le gĂ©nĂ©ral Yom Tov Samia et tente de le persuader de la non-responsabilitĂ© de lâarmĂ©e. Selon HervĂ© Deguine[3] lâenquĂȘte de Shahaf est « totalement approximative, ne reposant sur aucune base scientifique â nul expert en balistique nâest conviĂ© Ă y participer ». Shahaf est aidĂ© par Yossef Duriel, un proche de Moshe Feiglin, extrĂ©miste du Likoud condamnĂ© pour « sĂ©dition » Ă lâĂ©poque de lâassassinat de Rabin. Le surlendemain de la mort de Mohamed al-Durah, il Ă©crit une lettre au quotidien israĂ©lien Haaretz, dans laquelle il affirme avant mĂȘme de se livrer Ă lâexamen des faits : « LâarmĂ©e doit dire que les Palestiniens ont tuĂ© lâenfant Ă des fins de propagande. » Luis Lema, ancien directeur des rubriques internationales du Journal de GenĂšve et du Temps Ă©crit que la conclusion de Shahaf est « accompagnĂ©e de diverses considĂ©rations de nature assez peu scientifique telle : [âŠ] "La croyance des militants musulmans est compatible avec le fait de dire des mensonges Ă©hontĂ©s" »[14]. Le gĂ©nĂ©ral Samia met Shahaf Ă lâĂ©cart de lâenquĂȘte. Pour HervĂ© Deguine, « censĂ©e Ă©tablir lâinnocence de lâarmĂ©e, la reconstitution organisĂ©e par Shahaf la ridiculise ». La chaĂźne amĂ©ricaine CBS, bĂ©nĂ©ficiant dâune exclusivitĂ© sur lâaffaire, produit un documentaire, jugĂ© accablant par le journal Haaretz qui titre : « LâarmĂ©e se tire une balle dans le pied. »[3].
Le , le gĂ©nĂ©ral Yom Tov Samia convoque une confĂ©rence de presse durant laquelle il essaie dâutiliser le travail de Shahaf et Duriel, mais Shaul Mofaz, chef dâĂ©tat major des armĂ©es, prend ses distances « en rĂ©vĂ©lant que lâĂ©quipe enquĂȘtant sur les circonstances de la mort de Mohamed al-Durah a Ă©tĂ© constituĂ©e Ă lâinitiative personnelle du gĂ©nĂ©ral Samia, et non sur requĂȘte officielle »[3].
Les contestations de Nahum Shahaf et Yossef Duriel sont en deux étapes : ils contestent d'abord l'origine des balles, affirmant que celles-ci ne provenaient pas des positions israéliennes. Puis dans un deuxiÚme temps, ils vont jusqu'à évoquer « une mise en scÚne des Palestiniens », c'est-à -dire qu'ils affirment que les Palestiniens auraient procédé à un montage avec figurants, fausses ambulances, etc. En particulier, ils affirment que le petit Mohammed al-Durah ne serait pas mort, mais serait un comédien qui aurait « joué une scÚne ». Chronologiquement, ceux qui reprennent et diffuseront les thÚses de Shahaf et Duriel sont :
- tout d'abord la Ména avec Stéphane Juffa ainsi que l'un de ses correspondants à Paris en 2002, Gérard Huber (son livre, Contrexpertise d'une mise en scÚne[15], paraßt en et sera pendant un certain temps librement téléchargeable sur son site web) ;
- puis Esther Schapira (en) et Luc Rosenzweig â qui est par la suite lui aussi un temps correspondant de la MĂ©na ;
- et enfin Philippe Karsenty Ă partir de 2002.
Tensions et polémiques naissent par la suite entre la Ména et certaines de ces personnes, certains accusant d'autres d'avoir repris un travail antérieur sans permission.
DĂšs la fin 2001, lâaffaire commence Ă apparaĂźtre en France, d'abord par l'intermĂ©diaire de Claude Lanzmann qui sâexprima Ă propos du preneur dâimages palestinien de Charles Enderlin (Talal Abou Rahma) dans le journal Le Monde en ces termes : « Ce qui me rĂ©volte personnellement dans cette histoire, c'est que cette mort a Ă©tĂ© filmĂ©e en direct par le cameraman arabe d'une chaĂźne française de tĂ©lĂ©vision »[16]. Ensuite, France 2 est soumise Ă des pressions pour quâelle diffuse le documentaire dâEsther Schapira (en) produit pour la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision allemande ARD, « Trois balles et un enfant mort »[17], dĂ©crit comme une « stupiditĂ© » par Haaretz[8], qui reprend lâessentiel des thĂšses de Shahaf et Duriel. Le , dans un climat de surexcitation, la Ligue de dĂ©fense juive organise une manifestation sous les fenĂȘtres de France 2, faisant suite Ă un « Prix Goebbels de la dĂ©sinformation »[18] attribuĂ© en mars Ă France 2 et Ă Charles Enderlin par cette Ligue. Charles Enderlin est obligĂ© par la suite de dĂ©mĂ©nager avec toute sa famille, en raison des lettres de menaces et des intimidations dont il est la cible[3].
Lors de l'audition, le , par la Commission de la Culture, de l'Ăducation et de la Communication du SĂ©nat de RĂ©my Pflimlin, dĂ©signĂ© pour la prĂ©sidence de France TĂ©lĂ©visions, le sĂ©nateur de Haute-Garonne, Jean-Pierre Plancade, membre du groupe dâamitiĂ© France-IsraĂ«l au SĂ©nat et de lâassociation France-IsraĂ«l, a demandĂ© quelles Ă©taient les intentions du futur prĂ©sident quant Ă l'affaire al-Durah. Richard Prasquier, le prĂ©sident alors du Conseil reprĂ©sentatif des institutions juives de France (CRIF), a rencontrĂ© Ă la mi- RĂ©my Pflimlin, pour demander, une fois de plus, lâouverture dâune enquĂȘte sur ce reportage[7].
Philippe Karsenty
En 2003, lâhomme d'affaires parisien et militant pro-israĂ©lien Philippe Karsenty rapporte en France un exemplaire du film de la Metula News Agency (MĂ©na, dirigĂ©e par StĂ©phane Juffa) et sâen sert en partie pour construire sa propre version, ce qui sera Ă lâorigine de tensions entre lâagence et lui[3] - [19]. Pour la MĂ©na et Karsenty, la scĂšne est une fiction crĂ©Ă©e de toutes piĂšces par les Palestiniens[5]. Karsenty bĂ©nĂ©ficie du soutien de lâĂ©crivaine amĂ©ricaine Nidra Poller, et il suscite lâattention des milieux nĂ©oconservateurs amĂ©ricains sur lâaffaire[3]. Un universitaire proche de Karsenty, Richard Landes (en), « spĂ©cialiste des peurs millĂ©naristes », exploite Ă son tour le film de la MĂ©na contre la volontĂ© de Shahaf[3].
France 2 affirme en retour que les images sont authentiques, que lâenfant est bien mort et que lâensemble de la bande filmĂ©e le prouve, mais que lâintensitĂ© dramatique de la scĂšne dâagonie interdit dĂ©ontologiquement sa diffusion complĂšte[20].
Le , la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris condamne Philippe Karsenty pour diffamation publique, bien que le procureur ait demandĂ© sa relaxe[21]. La 11e chambre de la Cour d'appel de Paris, prĂ©sidĂ©e par Laurence TrĂ©bucq, visionne en public les rushes de France 2 lors d'une audience relais du oĂč se prĂ©sente Charles Enderlin avec son avocate Me BĂ©nĂ©dicte Amblard et Alain LardiĂšre, directeur adjoint de lâinformation chargĂ© des reportages de France 2, pour l'interroger notamment sur leur durĂ©e controversĂ©e (timecode) de 18 minutes par rapport aux 27 minutes initiales[22] par l'appelant Philippe Karsenty assistĂ© de Me Patrick Maisonneuve. Ayant fait appel de sa condamnation de 2006, Philippe Karsenty est relaxĂ© par la Cour d'appel de Paris le , cour qui ne se prononce pas sur lâauthenticitĂ© des images mais estime que Philippe Karsenty est restĂ© dans les limites du droit Ă la critique[23].
C'est Philippe Karsenty qui commandite un rapport balistique, établi en 2008, dont il tirera un argument selon lequel les impacts de balles ne provenaient pas de tirs depuis la position israélienne: la « forme circulaire » des impacts sur le mur situé derriÚre Mohammed al-Durah et son pÚre, prouverait, selon Karsenty, que les tirs étaient perpendiculaires alors que les soldats israéliens se trouvaient en biais et auraient fait des trous ovales dans le mur[24].
François Bonnet de Mediapart rapporte une dĂ©claration de Karsenty Ă propos d'une « centaine de confĂ©rences [qu'il a donnĂ©es] dans le monde entier sur cette affaire ces trois derniĂšres annĂ©es »[7] puis il ajoute que Philippe Karsenty explique comment il fut l'artisan de la chute de David Martinon, conseiller de Nicolas Sarkozy opposĂ© aux thĂšses de Karsenty[7], et que « lâaffaire Al-Dura est bien le support dâune machine de guerre politique. Le , il est longuement interrogĂ© par le site amĂ©ricain ultraconservateur Frontpagemag.com (en) »[7]. La Cour de cassation casse et annule l'arrĂȘt de la cour d'appel de Paris du [25], Ă la suite d'un pourvoi formĂ© par France 2 et Charles Enderlin[26], au motif que cette cour d'appel ne pouvait ordonner Ă France 2 de montrer les rushes non diffusĂ©s[27]. L'audience a lieu le [21] - [24], et, aprĂšs deux reports, le , la cour d'appel de Paris condamne cette fois Philippe Karsenty pour diffamation, et porte Ă 7 000 euros les dommages et intĂ©rĂȘts versĂ©s Ă Charles Enderlin et Ă France 2[9].
Visionnage de l'enregistrement original
Le vendredi , Ă la suite de nombreuses pressions, France 2 accepte de diffuser en cercle privĂ© la totalitĂ© de la cassette Ă trois journalistes : Daniel Leconte dâArte, Denis Jeambar, directeur de LâExpress et Luc Rosenzweig, ancien rĂ©dacteur en chef du Monde â les deux premiers ayant Ă©tĂ© auparavant approchĂ©s par Luc Rosenzweig qui leur avait prĂ©sentĂ© des Ă©lĂ©ments allant, selon lui, dans le sens dâun montage opĂ©rĂ© par les Palestiniens.
Luc Rosenzweig affirme que, lors du visionnage des rushes, « lâimage finale coupĂ©e par Charles Enderlin montrait lâenfant, supposĂ© mort, levant la jambe et tournant la tĂȘte en direction de la camĂ©ra ». Il ajoute Ă©galement que « dâautres scĂšnes montrant des manifestants blessĂ©s Ă©taient purement et simplement jouĂ©es, ce que reconnaissaient mĂȘme les reprĂ©sentants de France 2 assistant Ă la projection »[29] - [30].
Selon Guillaume Weill-Raynal, avocat et auteur de Contre-enquĂȘte sur le nouvel antisĂ©mitisme (2005), Denis Jeambar et Daniel Leconte ont jouĂ© un rĂŽle important dans le montage des « rumeurs » propagĂ©es par la suite par les opposants Ă Enderlin[31]. Dans un premier temps, ils Ă©crivent que les rushes montrent des « mises en scĂšne », pour se rĂ©tracter dans un second article du Figaro, dans lequel ils affirment avoir Ă©tĂ© « instrumentalisĂ©s » par Rosenzweig et la MĂ©na[30] - [13] - [32] - [33].
Le , le prĂ©sident du CRIF Richard Prasquier demande Ă France 2 de voir l'entiĂšretĂ© de ces rushes, mĂȘme ceux de l'agonie de Mohamed al-Durah qu'Enderlin avait coupĂ©s, considĂ©rant qu'elle « Ă©tait trop insupportable »[34] - [20]. Son prĂ©dĂ©cesseur, Roger Cukierman, avait formulĂ© la mĂȘme demande[35].
Poursuivi en justice par Charles Enderlin et France 2, Karsenty est condamné en premiÚre séance en 2006. Relaxé en appel, ce dernier est cependant cassé 4 ans plus tard[36].
Les blessures de Jamal al-Durah
Le , Ă la suite de lâextension de la polĂ©mique, et pour prouver la bonne foi de Charles Enderlin et de son cadreur, Arlette Chabot projette leur reportage tel quâil avait Ă©tĂ© diffusĂ© sur la chaĂźne ainsi quâun autre reportage tournĂ© au mĂȘme moment, mais sous un autre angle, par lâagence Associated Press. On montre aussi des images du cadavre de lâenfant Ă la morgue, ainsi que des images rĂ©centes du pĂšre de lâenfant montrant ses cicatrices. France 2 maintient sa position et porte plainte contre X pour diffamation[37].
Les images montrent les cicatrices de Jamal al-Durah, le pĂšre de Mohammed al-Durah, le jour de la mort de son fils. Ces images sont elles aussi contestĂ©es, et les promoteurs de la version dâune mise en scĂšne affirment que le pĂšre du petit Mohammed nâavait pas Ă©tĂ© blessĂ©. Pour rĂ©pondre Ă ces accusations, France 2 montre un autre reportage de la tĂ©lĂ©vision jordanienne, tournĂ© le Ă lâhĂŽpital militaire Al Hussein Ă Amman, montrant le prince Abdallah rendant visite au pĂšre du jeune Mohamed, transportĂ© en Jordanie pour y subir plusieurs opĂ©rations. De plus, France 2 demande au cadreur Talal Hassan Abu Rahma dâaller interviewer Jamal al-Durah Ă Gaza, oĂč il vit toujours. Montrant sa carte dâidentitĂ© pour bien se faire identifier, lâhomme montre que ses cicatrices correspondaient « exactement » Ă lâemplacement de ses blessures filmĂ©es sur son lit dâhĂŽpital quatre ans plus tĂŽt[38]. Mais, sur les blessures de Jamal al-Durah, le pĂšre de Mohammed al-Durah, la MĂ©na a une tout autre explication : ces cicatrices seraient les marques de « blessures par hache » datant de 1992 causĂ©es par des « miliciens palestiniens » qui auraient agressĂ© Jamal al-Durah, et soignĂ©es par un certain Dr Yehouda David ; et la MĂ©na livre sur son site une interview avec le docteur en question[39], dont les propos sont repris par Philippe Karsenty[40].
En , le Dr Yehouda David revient sur cette thĂšse lors d'une interview donnĂ©e Ă ActualitĂ© juive (no 1038, datĂ© du ). Dans cette interview conduite par une personne se faisant appeler « Daniel Vavinsky », prĂ©sentĂ© comme journaliste, le Dr David soutient que les blessures et cicatrices de Jamal al-Durah, pĂšre de Mohammed, ne rĂ©sultent pas de la fusillade de 2000 mais dâune intervention chirurgicale effectuĂ©e par lui-mĂȘme en 1994, qui avait consistĂ© Ă prĂ©lever des tendons sur le pied gauche pour les greffer sur les muscles de la main droite. Dans la mĂȘme interview, le Dr David Ă©voque Ă©galement le dossier mĂ©dical jordanien de Jamal al-Durah : « Je nâai pas vu ce dossier. Que Charles Enderlin le produise, je serais trĂšs intĂ©ressĂ© de le consulter (âŠ) Mais pour le moment, cela me paraĂźt assez mystĂ©rieux »[41].
Le , Charles Enderlin adresse un droit de rĂ©ponse Ă ActualitĂ© juive auquel est joint le certificat en arabe de lâhĂŽpital jordanien, un certificat en anglais Ă©tabli par le professeur RaphaĂ«l Walden, chirurgien Ă lâhĂŽpital Tel HaShomer de Tel-Aviv, au vu du dossier mĂ©dical jordanien, lui-mĂȘme Ă©tabli en anglais, ainsi quâune radio des lĂ©sions constatĂ©es dans la rĂ©gion pelvienne et aux os du bassin (correspondant Ă un tir de balle ayant pĂ©nĂ©trĂ© par le pli de l'aine et Ă©tant ressorti par la fesse, conforme aux cicatrices prĂ©sentĂ©es par Jamal al-Durah), blessures bien distinctes des cicatrices au pied et Ă la main Ă©voquĂ©es par le Dr David dans son interview. Charles Enderlin adresse Ă©galement copie de ce droit de rĂ©ponse Ă divers sites qui avaient relayĂ© lâinterview dâActualitĂ© juive, notamment au site Debriefing.org qui met en ligne, le , le texte complet de la lettre de Charles Enderlin ainsi que lâensemble des documents mĂ©dicaux[42]. Le , ActualitĂ© juive publie Ă©galement ce droit de rĂ©ponse, mais en supprimant de celui-ci la phrase « Ci-joint le rapport que vous voudrez bien reproduire », et sans publier les documents annexes, ni mentionner leur existence. Ce droit de rĂ©ponse est suivi dâune contre-rĂ©ponse ironique de « Daniel Vavinsky » : « sur le fond, Charles Enderlin ne rĂ©pond en rien (âŠ) quâil nâhĂ©site pas Ă nous transmettre tout Ă©lĂ©ment (âŠ) nous nous ferons un devoir dâen informer nos lecteurs »[43].
Dans les semaines qui suivent, Jamal al-Durah dĂ©pose plainte en diffamation contre deux partisans de la thĂšse de la manipulation, dont Gil Mihaely, responsable, avec Ălisabeth Levy, du site Causeur, l'un des relais mĂ©diatiques des thĂšses de Karsenty et al.[7]. Sur commission rogatoire ordonnĂ©e par Nicolas Bot, juge d'instruction au tribunal de grande instance de Paris, « Daniel Vavinsky », auteur de lâinterview et du contre-droit de rĂ©ponse, est identifiĂ©, en , comme Ă©tant en rĂ©alitĂ© ClĂ©ment Weill-Raynal, rĂ©dacteur en chef adjoint Ă France 3, sociĂ©tĂ© du mĂȘme groupe (France TĂ©lĂ©visions) que France 2, chaĂźne de Charles Enderlin[44]. Le , ClĂ©ment Weill-Raynal est mis en examen pour diffamation et complicitĂ© de diffamation, ainsi que, quelques semaines plus tard, le Dr David et Serge Benattar, directeur de la publication d'ActualitĂ© juive[45].
Par ordonnance en date du [45], Serge Benattar, Clément Weill-Raynal et Yehouda David ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour diffamation et complicité de diffamation, à l'audience du . Serge Benattar était défendu par Me Aude Weill-Raynal. Clément Weill-Raynal était défendu par Me Gilles-William Goldnadel. Le Dr Yehouda David était défendu par Me Isabelle Wekstein, ainsi que par Me Alain Jakubowicz, seul avocat défendeur inscrit au barreau de Lyon (les autres étant du barreau de Paris), et président de la LICRA, depuis 2010. Jamal al-Durah, plaignant et partie civile, avait pour avocat Me Orly Rezlan.
Par jugement rendu le , la 17e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris a dĂ©clarĂ© les trois prĂ©venus coupables des dĂ©lits de diffamation et complicitĂ© de diffamation. Serge Benattar et ClĂ©ment Weill-Raynal ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă la peine de 1 000 euros d'amende, le docteur Yehouda David Ă une peine de 1 000 euros d'amende avec sursis. Les trois prĂ©venus ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă verser Ă Jamal al-Durah la somme de 5 000 euros de dommages-intĂ©rĂȘts, ainsi qu'Ă la somme de 5 000 euros au titre des frais de justice[46].
Par jugement rendu le , la cour d'appel de Paris a relaxĂ© le docteur Yehouda David, chirurgien israĂ©lien qui avait opĂ©rĂ© Jamal al-Durah[47]. ClĂ©ment Weill-Raynal restait condamnĂ© Ă 1 000 euros d'amende avec sursis, 1 000 euros de dommages-intĂ©rĂȘts et 6 000 euros de frais de justice.
Mais le , la Cour de cassation a annulĂ© cette condamnation[48]. La Cour estime que « le passage incriminĂ© (âŠ) ne dĂ©passe pas les limites admissibles de la libertĂ© d'expression sur le sujet d'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral constituĂ© par le dĂ©bat relatif Ă la couverture par la chaĂźne France 2 d'un Ă©vĂ©nement ayant eu un retentissement mondial, ainsi qu'Ă l'origine des blessures prĂ©sentĂ©es par M. Al-Dura ».
Le livre de Charles Enderlin : Un enfant est mort
En , un livre de Charles Enderlin sur toute l'affaire est publiĂ© : Un enfant est mort, dans lequel il rĂ©pond point par point Ă l'ensemble de l'argumentaire Ă©laborĂ© par Philippe Karsenty et tous ceux qui soutiennent la thĂšse d'une mise en scĂšne, qui ont construit « une grille de lecture qui ignore tout des rĂ©alitĂ©s du terrain et de ce que furent ces longs face-Ă -face entre Palestiniens et soldats israĂ©liens »[7]. Le journaliste François Bonnet juge que l'un des mĂ©rites du livre d'Enderlin est de « rĂ©futer un par un les Ă©lĂ©ments avancĂ©s par les tenants de la manipulation » et qu'il dĂ©monte une accusation devenue volumineuse au fil des ans, mais dont l'accumulation de ses composants ne rĂ©siste pas Ă une analyse mĂ©ticuleuse : les accusations de Karsenty et de Rosenzweig peuvent « au premier abord, [troubler] les gens de bonne foi. Philippe Karsenty peut remplir des amphithĂ©Ăątres acquis Ă sa cause vu son habiletĂ© et les matĂ©riaux disparates quâil a rassemblĂ©s [âŠ]. DĂ©monter un tel travail demande des jours de contre-enquĂȘte. Peu de journalistes lâont fait, ce qui explique leur incapacitĂ© Ă lâinterroger correctement lors dâentretiens. [âŠ] Mais accumulation ne fait pas vĂ©ritĂ©. Et chaque Ă©lĂ©ment pris sĂ©parĂ©ment se rĂ©vĂšle douteux voire faux. »[7]. François Bonnet demande cependant si « ce livre [arrive] trop tard pour donner un coup dâarrĂȘt Ă une campagne aussi puissante que nausĂ©abonde »[7]. De son cĂŽtĂ©, Rudy Reichstadt Ă©crit que « lâun des mĂ©rites du livre de Charles Enderlin est dâexaminer pour la premiĂšre fois mĂ©thodiquement la gĂ©nĂ©alogie de la thĂ©orie du complot et de faire la dĂ©monstration, convaincante, que la thĂšse de la mise en scĂšne rĂ©pond bien Ă cette qualification. »[49].
Dans une rĂ©ponse Ă un article du journaliste Alain Gresh du Monde diplomatique, Charles Enderlin Ă©crit que l'une des personnes qui l'attaque en justice lui a proposĂ© de sauvegarder sa situation professionnelle s'il accepte de « lĂącher » son cadreur palestinien Talal Abu Rahme[50] : « Un de mes accusateurs, mâa proposĂ© le marchĂ© suivant : âTu peux encore tâen sortir en lĂąchant Talal. Je peux tâaider dans un scĂ©nario dont tu pourrais sortir meurtri, mais pas mort. Si tu choisis de persĂ©vĂ©rer dans lâerreur, je continuerai Ă faire en sorte que tu en crĂšves, professionnellement sâentend" [âŠ] »
Controverses
En Israël
Lâaffaire nâa pas fait lâobjet de dĂ©bats en IsraĂ«l, oĂč des reportages sont revenus sur cette affaire sans mettre en avant la thĂšse dâune manipulation. LâarmĂ©e israĂ©lienne a admis dans un premier temps sa probable implication dans la mort de lâenfant, avant de soutenir que Mohamed al-Durah avait tout aussi bien pu ĂȘtre tuĂ© par des tirs palestiniens (voir ci-dessus). Peu de temps aprĂšs ces Ă©vĂ©nements, lâarmĂ©e israĂ©lienne a procĂ©dĂ© Ă la dĂ©molition du mur devant lequel se trouvaient le pĂšre et son enfant, ce qui, selon Bernie Schechter, un expert en balistique israĂ©lien « Ă©limine 95 % des Ă©lĂ©ments matĂ©riels nĂ©cessaires Ă une preuve »[13], les impacts des balles se trouvant sur ce mur. Cette dĂ©molition est interprĂ©tĂ©e diffĂ©remment par les deux parties : ceux qui soutiennent la thĂšse dâune manipulation affirment que la position occupĂ©e par le pĂšre et lâenfant les mettait hors de portĂ©e des tirs des soldats israĂ©liens, et que, la reconstitution des Ă©vĂ©nements est devenue dĂ©licate du fait que les structures en place sur le carrefour de Netzarim ont Ă©tĂ© rasĂ©es par lâarmĂ©e israĂ©lienne. Ils affirment Ă©galement que les images diffusĂ©es par France 2 nâappuient ni lâidĂ©e de la mort de lâenfant, ni une responsabilitĂ© israĂ©lienne dans cette affaire.
Le soutien de Charles Enderlin Ă lâintĂ©gritĂ© de son preneur dâimages palestinien reste indĂ©fectible pendant toute lâaffaire. Selon le journaliste, « lâimage [filmĂ©e par Talal Abou Rahmah] correspondait Ă la rĂ©alitĂ© de la situation non seulement Ă Gaza, mais aussi en Cisjordanie. LâarmĂ©e israĂ©lienne ripostait au soulĂšvement palestinien par lâutilisation massive de tirs Ă balles rĂ©elles. »[51]. Cependant, en IsraĂ«l, lâopinion contraire Ă la version d'Enderlin est parfois mentionnĂ©e[52].
Le , le gouvernement israĂ©lien publie un rapport commandĂ© par le ministĂšre de la DĂ©fense (en) Ă un organisme anonyme mis Ă part sa direction contestĂ©e[53], qui affirme que la scĂšne diffusĂ©e par France 2 ne corrobore pas l'affirmation du commentaire oral du reportage d'Enderlin, selon laquelle l'enfant Ă©tait mort[54] - [55]. Ce rapport a Ă©tĂ© l'objet de critiques[56], y compris celles Ă©manant de la communautĂ© juive[57], la commission nâayant notamment pas entendu Charles Enderlin, son cadreur ou les mĂ©decins jordaniens ayant soignĂ© Jamal al-Dura[58].
Dans les territoires palestiniens
La mort du garçon diffusĂ©e dans les territoires palestiniens a provoquĂ© des Ă©vĂ©nements sanglants : deux rĂ©servistes de lâarmĂ©e israĂ©lienne, alors habillĂ©s en civil, ont Ă©tĂ© lynchĂ©s par une foule en colĂšre, le , dans le commissariat de Ramallah[59] - [60] - [61].
Le jour de la mort de Mohammed Al-Durah, lâONG israĂ©lienne BâTselem nota que 15 autres civils palestiniens furent tuĂ©s, dont un garçon de 12 ans, Samir Sudki Tabanjeh, et trois mineurs. Aucune de ces morts ne suscita de controverse[62].
En Allemagne
L'affaire Al-Durah est suivie en Allemagne par les enquĂȘtes controversĂ©es d'Esther Schapira (en) (voir supra), qui rĂ©alise deux documentaires[63] et publie un livre[64]. Elle met directement en cause Charles Enderlin.
Points de vue du CRIF et de Pierre-André Taguieff
Le CRIF a officiellement demandĂ© au chef de lâĂtat, Nicolas Sarkozy, la constitution dâune commission dâenquĂȘte, par la voix de Richard Prasquier, son prĂ©sident, dans une confĂ©rence de presse du [65]. En , Ă la suite de la publication du livre de Charles Enderlin, Un enfant est mort, Richard Prasquier proteste et rĂ©itĂšre sa demande[66].
En , Ă la suite de lâarrĂȘt de la Cour de cassation renvoyant lâaffaire devant la cour d'appel de Paris, Richard Prasquier redemande « que toute la vĂ©ritĂ© soit faite, en faisant travailler ensemble un petit groupe d'experts techniques indĂ©pendants sur les documents qui restent Ă notre disposition en utilisant les moyens modernes d'investigation »[67]. Cette demande provoque une polĂ©mique avec l'ancien prĂ©sident du CRIF, ThĂ©o Klein[68]. En 2013, Richard Prasquier redemande « Ă lâĂtat français de prendre ses responsabilitĂ©s » car on ne peut lutter contre lâantisĂ©mitisme si on ne sâattaque pas Ă la propagande[69].
Selon Pierre-AndrĂ© Taguieff, « Ă©rigĂ© en enfant martyr, "le petit Mohammed" est aussitĂŽt devenu la figure emblĂ©matique de lâIntifada al-Aqsa : les images du prĂ©tendu meurtre du jeune Palestinien par lâarmĂ©e israĂ©lienne, rĂ©activant le stĂ©rĂ©otype du « Juif tueur dâenfants », ont Ă©tĂ© diffusĂ©es Ă de nombreuses reprises sur la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision de lâAutoritĂ© palestinienne, dĂ©sireuse dâinstrumentaliser lâindignation pour mobiliser ses troupes dans sa guerre non conventionnelle contre IsraĂ«l. »[10] - [70].
Taguieff n'est ni le premier ni le seul à parler d'une accusation de meurtre rituel : quelques publications anglophones ont également parlé de blood libel avant lui[71] - [72] et aprÚs lui[73].
RĂ©actions aux thĂšses de Taguieff
Dans un dĂ©bat organisĂ© par la revue Le Meilleur des mondes, Rudy Reichstadt rĂ©pond Ă l'analyse de Pierre-AndrĂ© Taguieff. Selon lui, deux mythes s'affrontent : « Le premier discours accuse lâarmĂ©e israĂ©lienne dâavoir commis dĂ©libĂ©rĂ©ment un infanticide. Le second cherche Ă la disculper par tous les moyens, quitte Ă retourner lâaccusation infamante contre ceux qui ont commencĂ© Ă la propager, voire Ă nier purement et simplement la mort du jeune Palestinien. » Il estime que « si le premier discours est classiquement diabolisateur, le second use sans vergogne de structures propres Ă la pensĂ©e du complot dont les IsraĂ©liens sont pourtant, par une singuliĂšre ironie, les victimes privilĂ©giĂ©es. » Il vise en particulier les trois thĂšses dĂ©fendues par ceux qui contestent la version officielle et dont il souligne l'exclusion mutuelle : « Mohammed Al-Dura nâest pas mort » ; « dâailleurs, ce nâĂ©tait pas Mohammed Al-Dura » ; « de toute façon, ce sont les Palestiniens qui lâont tuĂ© »[74].
Le grand reporter GĂ©rard Grizbec de son cĂŽtĂ© rĂ©pond aux attaques portĂ©es Ă l'encontre des journalistes. Sur la question de la diffusion gratuite des images, il explique qu'en IsraĂ«l « il existe un accord dâĂ©change gratuit dâimages entre les grandes chaĂźnes internationales, y compris avec les chaĂźnes israĂ©liennes 2 et 10 [et que la] situation existait dĂ©jĂ lorsque lâon a ouvert [les bureaux israĂ©liens de France 2] en 1991. » Il accuse Ă©galement Pierre-AndrĂ© Taguieff de s'ĂȘtre fait « le perroquet de tous les dĂ©lires que lâon a entendus depuis 8 ans pour essayer de nier la rĂ©alitĂ© »[11], et de rĂ©pĂ©ter dans son article des « mensonges », tel celui concernant le cadreur palestinien de France 2, qui, contrairement Ă ce qu'affirme Taguieff (et Reichstadt dans un premier temps[75]), n'a jamais appartenu au Fatah - tout au plus est-ce un « patriote palestinien », selon Enderlin[76].
Notes et références
Notes
- Parfois transcrit en al-Dura ou al-Doura ou al-Durrah, avec ou sans tiret.
Références
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- Targuieff, La nouvelle propagande, op. cit., chap. VI.
Annexes
Bibliographie
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- Charles Enderlin, Un enfant est mort : Netzarim, 30 septembre 2000, Paris, Don Quichotte Ă©ditions, (ISBN 9782359490268)
- GĂ©rard Huber, Contre-expertise d'une mise en scĂšne, Ă©d. RaphaĂ«l, coll. EnquĂȘte, 237 p. 2003. (ISBN 978-2877810661)
- Entretien avec Philippe Karsenty, MĂ©dias, no 26, automne 2010
- Pierre-André Taguieff, La Nouvelle propagande antijuive. Du symbole al-Dura aux rumeurs de Gaza, Paris, PUF, 2010 (Voir aussi ci-dessus, notes 11 et 51)
- Guillaume Weill-Raynal, Les nouveaux désinformateurs, Paris, A. Colin, , 223 p. (ISBN 9782200350956)
- Guillaume Weill-Raynal, Pour en finir avec lâaffaire Al Dura, Paris, Ă©ditions du Cygne, , 102 p. (ISBN 978-2-84924-335-0)
- Guillaume Weill-Raynal, L'affaire Al-Doura / Enderlin ne repose sur rien, la preuve en 2 images
- Esther Schapira et Georg Hafner : L'enfant, la mort et la vérité, éditions Valensin, 2015. 226 pages (ISBN 978-2-37426-000-6)
Liens externes
- [vidéo] Rushes de France 2 du 30 septembre 2000, sur Vimeo, séquence al-Durah entre 1:17:06 et 1:18:09.
- [vidéo] Le reportage diffusé sur France 2 le
- [audio] L'affaire Al Dura, Rendez-vous avec X, diffusé sur France Inter le
- [vidéo] Vidéos filmées pendant et aprÚs les événements (Fr2, ATPN, TF1)
- [vidĂ©o] Esther Schapira, Lâenfant, la mort et la vĂ©ritĂ© - documentaire sur lâaffaire al Dura, , sur Vimeo, sous-titres français.
- JĂ©rĂŽme Bourdon, « Le rĂ©cit impossible. Le conflit israĂ©lo-palestinien et les mĂ©dias », Academia,â (lire en ligne [PDF])