Yves Rocher
Yves Rocher, né le à La Gacilly dans le Morbihan et mort le à Paris 10e, est un entrepreneur et homme politique français. Il crée en 1959 l'entreprise de cosmétiques Yves Rocher (qui devient le groupe Rocher) et en 1982 l'entreprise Françoise Saget. Mêlant activité économique et engagement politique, il est maire de La Gacilly de 1962 à 2008, conseiller général du Morbihan de 1982 à 2001 et conseiller régional de Bretagne de 1992 à 1998.
Conseiller régional de Bretagne | |
---|---|
- | |
Conseiller général du Morbihan Canton de La Gacilly | |
- | |
Maire de La Gacilly | |
- | |
Naissance | |
---|---|
Décès |
(Ă 79 ans) 10e arrondissement de Paris (France) |
SĂ©pulture |
Cimetière de La Gacilly (d) |
Nationalité | |
Activités | |
Période d'activité |
Ă partir de |
Enfant |
Distinction |
---|
Biographie
Enfance
Yves Rocher naît le 7 avril 1930 et grandit dans le village de La Gacilly, dans le Morbihan. Il passe son enfance aux côtés de son père Joseph, chapelier teinturier[1] - [2]. Il entre au lycée Saint-Sauveur à Redon, mais est contraint de quitter l’école en cours d’année en raison de problèmes de santé. Il se passionne pour les plantes, avec son cousin et parrain, Joseph-Pierre Ricaud, un médecin, qui lui fait découvrir leurs vertus médicinales[2].
Années 1950-1960
Son père meurt alors qu'il n'a que 14 ans[3]. Yves Rocher aide alors sa mère dans l’exploitation du commerce familial d’articles textiles. Yves Rocher aime raconter que c'est à cet âge qu'il rencontre une guérisseuse qui lui confie la recette d’une pommade hémostatique à base de Ficaire. Il décide de fabriquer artisanalement cette pommade dans le grenier familial. Comme il n'a pas les moyens d'acheter un magasin, il développe la vente par correspondance, proposant sa pommade anti-hémorroïdaire directement aux utilisateurs, par l'intermédiaire de petites annonces dans Ici Paris[4], avec quelques procès pour exercice illégal de pharmacie[5]. Peu après, il s'associe avec un pharmacien et se lance dans la fabrication artisanale de crèmes, onguents et tisanes[6].
Dans les années 1950, La Gacilly est un petit chef-lieu de canton rural, « située en dehors des grands courants d'échanges régionaux » et en déclin démographique : les perspectives de développement économique semblent limitées[7]. Yves Rocher souhaite redynamiser le tissu économique de sa commune en implantant de petites industries légères qui vendent leurs produits par correspondance, en prenant appui sur le service postal qui permet d'envoyer les produits facilement[7].
Il lance en 1959 son entreprise de produits cosmétiques. Elle confectionne et vend des produits de beauté et de soins par les plantes. Rocher saisit ainsi l'engouement de ses clients pour la nature, et ouvre la gamme de produits à des lotions, des savons, etc., juridiquement moins sensibles que la préparation initiale[1] - [5]. « L'image de la firme et de ses produits est très tôt associée à celle de la nature et des plantes »[7]. Son choix est de maintenir des prix bon marché[7], et de continuer à vendre ses produits hors pharmacie[8]. La société s'agrandit rapidement : en dix ans, le nombre de salariés est multiplié par dix, de 30 salariés en 1959 à 334 en 1969[7].
Yves Rocher mêle engagement politique et action économique : en tant qu'homme politique, il promet à ses électeurs emplois et développement économique, qu'il met en place avec son entreprise. Son activité d'entrepreneur lui apporte une légitimité politique : en 1963, il devient maire de La Gacilly[7].
1959 | 1969 | 1984 | années 1990 |
---|---|---|---|
30 | 334 | 1200 | environ 1800 |
En 1969, l'entreprise ouvre son premier magasin[4], développe différentes marques, réutilisant pour les dénommer des patronymes familiaux (Jouvance, Ricaud) puis ouvre des succursales à l'étranger[1].
Années 1970-1990
Dans les années 1970 et 1980, Yves Rocher étend son influence politique et économique à l'échelle du Morhiban et de la Bretagne. En 1982, il devient conseiller général du canton de La Gacilly, et implante deux usines dans les communes Les Fougerêts et Saint-Martin-sur-Oust, situées dans le canton[7].
Dix ans plus tard, en 1992, il se présente aux élections régionales avec la promesse de créer plusieurs milliers d'emplois dans sa circonscription[7]. Pour Marie-France Turcotte et Anne Salmon, « le projet politique devient régional ». L'entreprise Yves Rocher s'implante dans les communes du Morbihan et d'Ille-et-Vilaine : Questembert, Ploërmel, Rieux, Sixt-sur-Aff, Guillac, Maure-de-Bretagne, Janzé et Saint-Marcel[7].
À la même période, la ville de La Gacilly est aménagée pour devenir plus touristique. Depuis les années 1960, elle cherche à se donner une image de « village authentique et riche de son passé ». La municipalité fait venir des artisans, installe des fleurs et crée des attractions touristiques, comme le musée végétal de la Fondation Yves Rocher[7], un jardin botanique comprenant une collection d'armoises et de sauges, un végétarium ou encore le lancement d'un festival photographique[1]. En quarante ans, La Gacilly passe de petite commune rurale à un pôle économique et touristique majeur en Bretagne[7].
En 1982, Yves Rocher fonde aux Fougerêts, dans le Morbihan, la société Françoise Saget, nommée après l'un de ses ancêtres, qui vend des produits textiles comme du linge de maison. La société fait partie du groupe Yves Rocher jusqu'en 2006, où elle est cédée au groupe Activa Capital[9] - [10]. En 2007, Françoise Saget et Linvosges opèrent un rapprochement, puis un nouveau rapprochement, avec Envie de Fraise est opéré en 2017. En 2016, Françoise Saget réalise un chiffre d'affaires de 100 M €[11]. Elle vend plus de 2 000 produits et a environ un million de clients en Europe, notamment en Suisse et en Belgique[10]. Elle se lance sur le marché allemand en modifiant le nom de l'entreprise, qui devient pour ce marché Franziska Sager[11]. Aujourd'hui, la société Françoise Saget fait partie du groupe MK Direct qui détient également Linvosges (fondée en 1923 à Gerardmer) et Envie de Fraise, spécialisé dans les vêtements de grossesse[12] - [13].
Yves Rocher entre en conflit contre la Banque Nationale de Paris, qu'il soupçonne d'avoir enjolivé les comptes dans une vente de société où elle était à la fois l'intermédiaire sur la transaction et un des actionnaires et des créanciers de la société vendue[14].
Ses trois enfants travaillent au sein du groupe Rocher. Yves Rocher confie la présidence de la société qu’il a créée à son fils aîné Didier en 1992 pour s'occuper, lui, du développement économique régional avec l'association Agir pour l'emploi dans le Morbihan. Daniel crée la marque Daniel Jouvance et Jacques suit les questions environnementales. Mais Yves Rocher doit revenir à la tête de son groupe à la suite de la mort accidentelle de son fils Didier, en 1994[15].
Engagement politique
Parallèlement à ses activités professionnelles, Yves Rocher s'engage en politique. Il devient le maire de La Gacilly en 1962, et le reste jusqu’en 2008 sous l'étiquette divers droite[16]. Il est également élu conseiller général du Morbihan pour le canton de La Gacilly, de 1982 à 2001, puis conseiller régional de 1992 à 1998, élu sur une liste Bouger le Morbihan[17]. Lors des élections régionales de 1992, Yves Rocher est à la tête d'une liste dissidente, en dehors du RPR et de l'UDF du Morbihan, avec le mot d'ordre « Des emplois pour la Bretagne centrale »[18]. Il se rapproche des élus socialistes du département, avant que ces derniers ne refusent finalement d'intégrer sa liste[18].
La Gacilly, ainsi que les villages alentour, bénéficient de l’activité économique créée par sa société[19], et des infrastructures mises en place sous son impulsion, avec Préoccupé par l'exode rural, il cherche à créer de l'emploi localement et un courant touristique[19].
Son cumul des fonctions publiques et privées, étant élu et dans le même temps principal acteur économique du territoire qu'il représente, lui vaut des critiques[20] - [21].
Mort
Yves Rocher meurt le à l'hôpital Lariboisière de Paris, d'un accident vasculaire cérébral[3]. Ses obsèques religieuses ont lieu à La Gacilly le en présence d'environ 3000 personnes. Il est inhumé dans le cimetière du village[19].
Il a été décrit comme un précurseur[1] en raison de son intérêt pour la nature et de ses positions écologiques dès la création de la société. Il s’est attaché à garder une activité de culture des plantes, avec 55 hectares de champs biologiques appartenant au groupe, sur son village natal de La Gacilly[22].
Son petit-fils Bris est nommé directeur général du groupe en 2006, et hérite de la présidence de l’entreprise familiale à sa mort en 2009[23]. En 2013, le groupe emploie plus de 15 000 salariés[4].
Notoriété et distinctions
Yves Rocher est promu commandeur de la Légion d'honneur en , après avoir été nommé officier en 1992[24].
En 1977, le mensuel Armor Magazine le désigne « Breton de l'année »[25]. Il est en outre récompensé par un ordre de l'Hermine (associatif)[25].
Publications
Notes et références
- Nicole Vulser, « Yves Rocher », Le Monde,‎ (lire en ligne)
- « Yves Rocher. Disparition d'un pionnier », Le Journal des entreprises,‎ (lire en ligne)
- « Yves Rocher : la mort d'un pionnier », Paris Match,,‎ (lire en ligne)
- Frédéric Thérin, « Saga. Yves Rocher, la beauté pour tous », L'Express,‎ (lire en ligne)
- Maïté Turonnet, « Un rocher dans un jardin », Libération,‎ (lire en ligne)
- Gabriel Milési, Les dynasties du pouvoir de l'argent, Michel de Maule, , p. 97.
- Marie-France B. Turcotte et Anne Salmon, Responsabilité sociale et environnementale de l'entreprise, PUQ, (ISBN 978-2-7605-3568-8, lire en ligne), p. 89-92
- « La mort d'Yves Rocher à 79 ans dont 50 de cosmétique végétale », France Info,‎ (lire en ligne)
- « Activa Capital acquiert Françoise Saget », Fusacq,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Activa Capital
- Ségolène Mahias, « Morbihan. Cap sur l'Allemagne pour Françoise Saget », Le Journal des entreprises,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Flore Fauconnier, « MK Direct rachète le site de vêtements de grossesse Envie de Fraise », LSA Textile connecté,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Le Figaro.fr avec AFP, « Grossesse : Envie de Fraise rachetée par le propriétaire de Françoise Saget », Le Figaro,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Sophie Lécluse, « Les petits secrets de la famille Yves Rocher », Capital,‎ (lire en ligne)
- « Yves Rocher devrait reprendre la direction de son entreprise de cosmétologie « verte » », Le Monde,‎ (lire en ligne)
- « Le créateur des cosmétiques Yves Rocher est mort », Le Parisien,‎ (lire en ligne)
- « L’élection des présidents des conseils régionaux Bretagne », Le Monde,‎ (lire en ligne)
- Thierry Bonenfant, « Chapitre 4 : Bretagne. Des campagnes électorales éclatées: », dans Chroniques électorales, Presses de Sciences Po, (ISBN 978-2-7246-0616-4, DOI 10.3917/scpo.ysmal.1992.01.0095, lire en ligne), p. 95–113
- Christine Baucherel., « Yves Rocher laisse une empreinte « indélébile » », Ouest-France,‎ (lire en ligne)
- « L'Ouest en mémoire (Ina) - Yves Rocher à La Gacilly 1977 (vidéo) », Institut national de l'audiovisuel,‎ (lire en ligne)
- « La Gacilly, fief breton du géant de la beauté », Le Point,‎ (lire en ligne)
- Benoist Simmat, « Les fleurs bio se ramassent à la pelle », Libération,‎ (lire en ligne)
- « Héritier malgré lui », Le Point,‎ (lire en ligne)
- « Tout savoir sur Yves Rocher, fondateur du groupe Yves Rocher », sur Libre Service Actualités (consulté le )
- Philippe Argouarch, « L'industriel breton Yves Rocher est décédé », Agence Bretagne Presse,‎ (lire en ligne)
Crédits
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Fondation Yves Rocher » (voir la liste des auteurs).
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative Ă la musique :
- (en) Muziekweb
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :