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Yom tov sheni shel galouyot

Le yom tov sheni shel galouyot (hĂ©breu : Ś™Ś•Ś Ś˜Ś•Ś‘ Ś©Ś Ś™ Ś©Śœ Ś’ŚœŚ•Ś™Ś•ŚȘ « second jour fĂ©riĂ© des [communautĂ©s juives] exilĂ©es ») est un jour d’observance supplĂ©mentaire des fĂȘtes bibliques par les membres des communautĂ©s situĂ©es hors de la terre d’IsraĂ«l. Reproduisant le statut et les prescriptions du jour fĂ©riĂ© qu’il double, le second jour s’en distingue cependant par certains allĂšgements subtils.

Yom tov sheni shel galouyot
Image illustrative de l’article Yom tov sheni shel galouyot
Principales communautĂ©s de la diaspora juive dans l’AntiquitĂ©, auxquelles s’appliquait le second jour
Sources halakhiques
Textes dans la Loi juive relatifs Ă  cet article
Talmud de Babylone Beitza 4a-6a & Haguiga 8a-b
Talmud de JĂ©rusalem Erouvin 3:9, Pessahim 5:4, Yebamot 11:7 & Nazir 8:1
Sefer HaHinoukh mitzvot n° 298, 301 & 323
Mishné Torah Sefer Zmanim, Hilkhot shevitot yom tov 1:22-24 & Kiddoush Hahodesh 5:5-13
Choulhan Aroukh Orah Hayim chap. 490, 494:2, 496, 503, 513, 526, 662, 663, 666, 669 & Yore Dea 299

InstituĂ© par les rabbins au temps du SanhĂ©drin, le second jour continue d’ĂȘtre observĂ© par les juifs orthodoxes, y compris lors des dĂ©placements entre IsraĂ«l et le reste du monde. Il a en revanche Ă©tĂ© contestĂ© au XIXe siĂšcle par les mouvances progressistes du judaĂŻsme, qui l’ont pour la plupart aboli.

Yom tov sheni dans les sources juives

La tradition du second jour n’a pas de fondement biblique explicite mĂȘme si elle Ă©tait, selon des enseignements mĂ©diĂ©vaux Ă  visĂ©e apologĂ©tique, observĂ©e au temps des prophĂštes et de JosuĂ©[1].
Elle vise Ă  rĂ©pondre Ă  une situation rencontrĂ©e dans la pĂ©riode "post-exilique" oĂč le peuple juif, dispersĂ© Ă  travers le Levant, demeure tenu d’observer les temps fixĂ©s par la Torah. Or celle-ci se base sur un cycle lunaire ; chaque lunaison est proclamĂ©e sur une base d’observation directe de la conjonction lunaire en terre d’IsraĂ«l.

Au temps de la Mishna, la proclamation des lunaisons est placĂ©e sous l’autoritĂ© des Sages du SanhĂ©drin, qui communiquent avec la diaspora par des signaux lumineux propagĂ©s de poste en poste ; l’envoi d’un signal au trentiĂšme jour d’un mois signifie que ce mois Ă©tait dĂ©fectif (29 jours) tandis que l’absence de signal le dĂ©finit comme plein (trente jours)[2].
Les Samaritains perturbent ce systĂšme en Ă©mettant des signaux Ă  leur convenance et contraignent les Sages Ă  dĂ©pĂȘcher des messagers lors des mois critiques pour le cycle des fĂȘtes[3]. Cependant cette nouvelle mĂ©thode montre rapidement des limites.

Le second jour de Roch Hachana

D’une part, l’examen des tĂ©moins peut prendre tant de temps que la nĂ©omĂ©nie est dĂ©clarĂ©e au jour suivant, mĂȘme si tout IsraĂ«l voit la nouvelle lune[4].

Cette situation se serait, d’aprĂšs le Talmud de Babylone, produite lors du mois de tishrei, dont le premier jour, appelĂ© Yom Teroua dans la Torah et Roch Hachana dans la Mishna, Ă©tait saint. Quoique le mois d’eloul n’ait jamais Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© plein depuis le temps d’Ezra[5], le retard des Ă©missaires perturba les chantres lĂ©vites du Temple dans leur chant du jour (le psaume Ă  chanter diffĂšre selon les jours profanes et les jours saints), ce qui se rĂ©percuta sur le culte tout entier. Il fut par consĂ©quent dĂ©cidĂ© d’instituer un second jour saint pour Roch Hachana[6].

Il ne s’agit cependant pas encore du yom tov sheni shel galouyot : lorsque Rabbi Yehouda postula que les deux jours de Roch Hachana Ă©taient entachĂ©s de doute quant Ă  leur saintetĂ© et que cela permettait de prĂ©lever la dĂźme sur une corbeille de fruits ou d’établir des erouvei tehoumin (dispositif permettant de se dĂ©placer hors du domaine sabbatique) lors des deux jours, « les Sages ne furent pas d’accord avec lui[7] » car ils considĂ©raient les deux jours de Roch Hachana comme un long jour saint[6]. Le second jour de Roch Hachana est, de plus, contrairement au yom tov sheni shel galouyot, Ă©galement observĂ© en terre d’IsraĂ«l, selon le Talmud de Babylone[8].

Le second jour des diasporas

La seconde faiblesse du systĂšme des Ă©missaires rĂ©side dans l’éloignement des communautĂ©s. Le voyage peut prendre plus de dix jours pour certaines communautĂ©s. De plus, lorsque les Ă©missaires doivent annoncer la date de la fĂȘte de Souccot, ils ne peuvent se mettre en route le 1er tishrei, du fait de Roch Hachana, et doivent interrompre leur traversĂ©e le 10 tishrei, du fait de Yom Kippour.
En consĂ©quence, la fĂȘte de Souccot est cĂ©lĂ©brĂ©e au quinziĂšme jour du mois de tishrei, Ă  la date voulue par la Torah, ainsi qu’au seiziĂšme au cas (certes improbable) oĂč eloul serait un mois plein et que la date vĂ©ritable du 15 tishrei aurait lieu un jour plus tard qu’à la date considĂ©rĂ©e comme le quinze tishrei.
Il n’y a pas lieu d’envisager que la fĂȘte puisse avoir lieu un jour plus tĂŽt car, comme le mois de tammouz est toujours dĂ©fectif, le mois d’av est gĂ©nĂ©ralement plein. MĂȘme dans le cas exceptionnel oĂč il aurait Ă©tĂ© dĂ©clarĂ© dĂ©fectif, des Ă©missaires seraient spĂ©cialement diligentĂ©s pour annoncer ce phĂ©nomĂšne particulier et permettraient Ă  toutes les communautĂ©s de connaĂźtre la date de Souccot avant sa survenue. Le problĂšme du temps de voyage ne se poserait donc plus[9].

Ce second jour, impĂ©ratif Ă  Souccot, l’est moins Ă  Chemini Atzeret car la fĂȘte ayant lieu le 22 tishrei, les Ă©missaires sont dĂ©jĂ  arrivĂ©s dans les communautĂ©s les plus Ă©loignĂ©es. De mĂȘme, les Ă©missaires disposent de deux jours de voyage supplĂ©mentaires pour annoncer la date exacte de Pessa'h, laquelle permet Ă©galement de dĂ©terminer celle de Chavouot, fixĂ©e en fonction du lendemain de Pessa'h et non des lunaisons.
Rabbi Yohanan, jeune contemporain de la clĂŽture de la Mishna, institue cependant le deuxiĂšme jour pour Pessa'h afin d’en prĂ©server l’usage Ă  Souccot[10]. L’usage est Ă©tendu Ă  Chavouot[11] et l’ensemble des temps fixĂ©s par la Torah, Ă  l’exception de Yom Kippour car un jeĂ»ne absolu de deux jours aurait pu se rĂ©vĂ©ler nĂ©faste pour la santĂ©[12].

Préservez la coutume de vos pÚres

AprĂšs la clĂŽture de la Mishna, la situation se dĂ©grade pour les Juifs en terre d’IsraĂ«l et le pouvoir romain menace l’existence du SanhĂ©drin. Son prĂ©sident Hillel II dĂ©cide alors, vers 359 EC, d’établir un calendrier perpĂ©tuel basĂ© sur des calculs astronomiques et applicable en tout lieu. Lorsque les Sages de Babylonie lui demandent ce qu’il en est du second jour des fĂȘtes, rendu inutile par cette innovation, sa rĂ©ponse fait jurisprudence dans la Halakha[13] : « conservez la coutume de vos pĂšres en vos mains au cas oĂč des persĂ©cutions anti-juives surviendraient[6] » (si la science du calendrier venait Ă  se perdre parmi les Juifs et qu’ils n’observaient qu’un jour, ils risqueraient fort d’enfreindre des commandements majeurs du fait de leurs erreurs).

À partir de lĂ , les opinions divergent entre Sages de GalilĂ©e et de Babylone. Si tous acceptent le raisonnement de Rabbi Yehouda pour le yom tov sheni shel galouyot[6], le Talmud de JĂ©rusalem l’étend pour permettre d’effectuer une activitĂ© crĂ©atrice le second jour du fait des doutes concernant sa saintetĂ©[14] tandis que le Talmud de Babylone adopte systĂ©matiquement les attitudes et traditions les plus sĂ©vĂšres[11]. Il soumet ainsi les deux jours aux mĂȘmes restrictions[15] et interdit mĂȘme de cuisiner le premier jour pour le second[16]. Les Sages babyloniens imposent en outre aux Juifs de la terre d’IsraĂ«l de passage Ă  Babylone de se conformer aux coutumes du lieu, en vertu du marit ayin (principe des apparences) car les Juifs locaux, voyant les voyageurs agir diffĂ©remment, pourraient en ĂȘtre perturbĂ©s[17]. Ils auront Ă©galement Ă  cƓur de prĂ©ciser les points de convergence et de divergence entre le second jour des exilĂ©s et celui de Roch Hachana[6] - [15].

Observance du Yom tov sheni shel galouyot

Statut des seconds jours

Les dates exactes des jours fĂ©riĂ©s pouvant actuellement ĂȘtre connues par calcul, le yom tov sheni shel galouyot est considĂ©rĂ© comme un jour « pouvant ĂȘtre profane » (safek ’hol), rendu saint par les Sages[18] et totalement distinct en saintetĂ© du premier jour[6]. Comme il est nĂ© d’un doute, il n’enfreint pas la prohibition d’« ajouter aux paroles de la Torah, » bien que ce doute soit rĂ©solu de nos jours[19].

Les rabbins ont entourĂ© le second jour des exilĂ©s d’un soin jaloux, punissant quiconque le profane d’excommunication ou, au minimum, de flagellation[20] (en outre, le tĂ©moignage d’une telle personne n’est, selon certains, plus recevable devant un tribunal rabbinique[21]). Ils ont choisi d’imposer pour le second jour les mĂȘmes rĂ©jouissances et restrictions qu’au premier[22].

Ce second jour se distingue cependant du premier par quelques allĂšgements. Il est, par exemple, permis de cuire les Ɠufs apportĂ©s par un Gentil qui assure qu’ils sont frais du jour, ce qui n’est pas le cas du premier jour[23].
Son observance est Ă©galement moins contraignante que celle du second jour de Roch Hachana car, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, tout ce qui est interdit le second jour des exilĂ©s l’est Ă©galement le second jour de Roch Hachana alors que l’inverse n’est pas forcĂ©ment vrai[24]. Ainsi, il est, dans les deux cas, interdit de cuisiner, de cuire, d’abattre etc. le premier jour pour le second[25] mais il est permis au second jour des exilĂ©s (qui ne coĂŻncide pas avec le chabbat) de profiter d’un Ɠuf frais du jour, d’un fruit tombĂ© de l’arbre ou de tout autre aliment inutilisable le premier jour car n’ayant pas Ă©tĂ© prĂ©parĂ© Ă  cet usage[26]. Certains autorisent de mĂȘme la circoncision d’un enfant juif (qui n’a pas Ă©tĂ© faite au huitiĂšme jour de vie) le second jour des exilĂ©s mais non Ă  Roch Hachana[27] (la circoncision effectuĂ©e dans le cadre d’une conversion au judaĂŻsme ne repousse ni l’un ni l’autre[28]). Il est aussi permis Ă  un Juif de s’occuper d’un malade lĂ©ger lors du second jour des exilĂ©s, ce qui est interdit au premier jour et Ă  Roch Hachana[29] (en cas de maladie grave, la vie prime (en) en tout temps et en tout lieu[30]).
Cette rÚgle connaßt cependant une exception : du point de vue des devoirs à remplir envers un mort, tant le second jour des exilés que celui de Roch Hachana sont considérés par les rabbins comme un jour profane, par égard pour les défunts[31]

Rite et liturgie

Le second jour doit ĂȘtre observĂ© au lendemain des fĂȘtes prescrites par la Bible (Ă  l’exception de Yom Kippour - certains cas de jeĂ»nes, priĂšre et chĂŽmage pendant deux jours consĂ©cutifs sont rapportĂ©s[32], afin de mieux rappeler qu’ils ne reçurent aucune approbation[33]) par toute personne ne se trouvant pas dans un « lieu habitĂ© en terre d’IsraĂ«l » (yishouv) ; un yishouv est un lieu en terre d’IsraĂ«l Ă  dix jours de marche tout au plus de JĂ©rusalem, existant au temps du Talmud ou dans son voisinage immĂ©diat[34].

Du point de vue rituel et liturgique, les seconds jours de fĂȘte sont, Ă  quelques nuances prĂšs, identiques aux premiers.

Sur le plan rituel, cela se marque par l’interdiction :

  • de porter le deuil mĂȘme pour l’un des parents proches dont parle la Torah[35] (en rĂ©alisant par exemple des oraisons funĂšbres[36]),
  • d’effectuer des tĂąches proscrites ou ce qui y ressemble, comme le rachat du premier-nĂ©[37],
  • de contrarier le repos imposĂ© par les rabbins en ces jours (en cĂ©lĂ©brant par exemple des noces[38]),
  • de sortir du domaine sabbatique Ă  moins d’avoir confectionnĂ© un Ă©rouv tehoumin (deux erouvei tehoumin doivent ĂȘtre prĂ©parĂ©s dans une direction diffĂ©rente pour chaque jour[39])
  • de demander Ă  un Gentil de rĂ©aliser les tĂąches interdites aux Juifs en ce jour (il est cependant licite d’en jouir Ă  la sortie du yom tov sheni, aprĂšs avoir attendu le temps nĂ©cessaire Ă  accomplir cette tĂąche soi-mĂȘme[40]).

Cependant, il est autorisĂ© au second jour (ainsi qu’à Roch Hachana) de remplir les derniers devoirs envers les dĂ©funts, par Ă©gard pour eux. Il est ainsi permis de procĂ©der Ă  l’inhumation, au transport du corps, Ă  la confection du linceul et de la biĂšre, au creusement d’une fosse, Ă  la coiffure et Ă  la toilette post-mortem, pour autant que l’inhumation ne soit pas diffĂ©rĂ©e[41]. Cette dispense ne concerne cependant pas les enfants mort-nĂ©s avant un mois de vie rĂ©volu[42]. De plus, certains rites comme la dĂ©chirure de l’habit ne peuvent ĂȘtre pratiquĂ©s, mĂȘme par les proches[43].

Sur le plan liturgique,

Pessa'h

Les Juifs de la diaspora tiennent lors du second soir de Pessa'h le mĂȘme sĂ©der (rituel) que le premier soir ; ils sont tenus de manger le pain azyme et les herbes amĂšres, boire les quatre coupes et lire la Haggada[50]. L’interdiction de consommer ou possĂ©der du hametz ou tout autre aliment fermentĂ© demeure, en diaspora, en vigueur jusqu’au huitiĂšme jour (en rĂ©alitĂ© le yom tov sheni du septiĂšme jour de Pessa'h) bien qu’il soit profane du point de vue biblique[51]. Cette rigueur s’étend aux lĂ©gumineuses (pour ceux qui y sont soumis) mais non aux « mĂ©langes de hametz » (aliments comme les fruits secs dont on s’abstient de peur qu’ils n’aient Ă©tĂ© mĂ©langĂ©s par inadvertance avec du hametz)[52] ni au hametz dĂ©couvert dans les entrailles d’un poulet abattu pour ĂȘtre consommĂ©[53].

Le dĂ©but du dĂ©compte de l’omer Ă©tant fixĂ© par la Torah au « lendemain du chabbat » (c’est-Ă -dire, selon les rabbins, le 16 nissan), il ne peut ĂȘtre reportĂ© et est lu au soir du second sĂ©der[54]. En revanche, il est interdit aux Juifs de la diaspora de consommer tout produit de la nouvelle rĂ©colte non seulement le 16 mais aussi le 17 nissan, jusqu’à la veille du 18[55].

Souccot

Les prescriptions du premier jour de Souccot, à savoir la soukka et les quatre espÚces ont cours le second jour. Il est de coutume la veille du second jour de réciter la bénédiction shehehiyanou sur un fruit ou un nouvel habit afin de pouvoir la répéter sans annuler la précédente, prononcée sur la soukka[56].

Le second jour ayant le mĂȘme degrĂ© de saintetĂ© que le premier, il est interdit d’utiliser une branche de saule tombĂ©e lors du second jour de la fĂȘte pour rĂ©aliser la prescription des quatre espĂšces, mĂȘme si l’on n’en a pas d’autre[57]. Bien que la Loi exige du Juif qu’il rĂ©alise les prescriptions avec des espĂšces lui appartenant en propre et non empruntĂ©es, certains permettent de donner les quatre espĂšces Ă  un enfant, en utilisant le raisonnement de Rabbi Yehouda (« si ce jour est saint et le lendemain est profane, je t’offre ce loulav en cadeau ») car le pĂšre peut s’acquitter le lendemain de la prescription sur un loulav prĂȘtĂ© et, dans l’autre cas, la condition n’a pas Ă©tĂ© remplie et les quatre espĂšces lui appartiennent donc toujours en propre[58].

Les passages bibliques de la priĂšre du moussaf sont identiques Ă  ceux du premier jour (Nombres 29:12-13), ce qui entraĂźne un dĂ©calage entre les Juifs de la diaspora et ceux de la terre d’IsraĂ«l, qui lisent au second jour Nombres 29:17[59]. Ce dĂ©calage est comblĂ© de diverses façons par les diffĂ©rents rites. Il en est de mĂȘme pour les passages lus publiquement dans la Torah[60] et pour les hoshaanot[61].

Chemini Atseret

Bien que la prescription de la soukka ne soit plus cours en cours Ă  Chemini Atseret, on ne la dĂ©fait pas encore Ă  cause d’un doute Ă©mis Ă  l’époque du Talmud qu’il puisse s’agir du septiĂšme jour. On la dĂ©barrasse mais on ne range ni n’arrange rien pour le lendemain[62]. MalgrĂ© ce doute sur le jour, la priĂšre pour la pluie est substituĂ©e Ă  la priĂšre pour la rosĂ©e lors du moussaf du premier et non du second jour de Chemini Atseret[63].

Ce second jour de Chemini Atseret revĂȘt de plus un caractĂšre tout Ă  fait particulier en diaspora vu que c’est en ce jour et non lors du premier qu’on cĂ©lĂšbre Simhat Torah pour marquer la fin du cycle de lecture annuel de la Torah.

Le second jour en Israël

Le rĂ©tablissement rĂ©cent d’une prĂ©sence juive considĂ©rable en terre d’IsraĂ«l a remis au goĂ»t du jour plusieurs points de Loi juive, dĂ©jĂ  abordĂ©s au temps du Talmud ou ultĂ©rieurement, comme le statut des nouvelles villes en IsraĂ«l, celui des voyageurs vers ou hors d’IsraĂ«l ainsi celui des personnes effectuant des sĂ©jours temporaires de durĂ©e variable, parfois fort longue.

Statut des nouvelles villes

Une controverse rabbinique a eu lieu pour statuer s’il fallait ou non appliquer aux lieux de rĂ©sidence dans l’état d’IsraĂ«l les critĂšres Ă©tablis par MaĂŻmonide pour un lieu de rĂ©sidence en terre d’IsraĂ«l, au vu du prĂ©cĂ©dent de la ville de Bnei Brak Ă  l’époque du Talmud (les villes construites Ă  proximitĂ© d’anciens sites ou dont la superficie est de loin supĂ©rieure Ă  celle d’autrefois bĂ©nĂ©ficient du statut de ces sites[64]). La discussion a Ă©tĂ© tranchĂ©e en faveur de la premiĂšre opinion[65] bien que certains se soient imposĂ© d’observer le second jour dans les villes qui n’existaient pas au temps du Talmud ou qui n’étaient pas habitĂ©es par des Juifs[66].

Statut des voyageurs et résidents temporaires ou permanents

La rĂšgle gĂ©nĂ©rale en la matiĂšre est qu’une personne se rendant en un endroit oĂč les coutumes sont diffĂ©remment observĂ©es doit se conformer Ă  l’usage du lieu afin de ne pas gĂ©nĂ©rer de controverses. Elle peut cependant continuer Ă  observer ses propres coutumes lorsqu’elle se trouve dans un endroit inhabitĂ©, lorsqu’elle agit discrĂštement ou de toute autre maniĂšre qui n’entraĂźne pas de dispute[67], comme la constitution d’un quorum de dix orants israĂ©liens en diaspora et inversement[68].

La Loi juive prend Ă©galement en compte la volontĂ© de la personne de repartir dans son lieu d’origine ou, au contraire, de s’établir dans son lieu de destination. Outre les personnes ayant vĂ©ritablement l’intention de s’établir, sont, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, considĂ©rĂ©es comme « n’ayant pas l’intention de revenir » les personnes qui demeurent dans le pays de destination plus d’un mois[69] et celles qui partent en famille[70] (dans le cas d’IsraĂ«l, les familles qui Ă©migrent par crainte de persĂ©cutions sont considĂ©rĂ©es comme ayant l’intention de revenir[71]) ainsi que, selon certains, celles qui dĂ©mĂ©nagent dĂ©finitivement en laissant leur famille[72].

Par conséquent,

  • un Juif rĂ©sidant en terre d’IsraĂ«l (ressortissant ou non de l’état) qui se rend en un lieu habitĂ© de la diaspora ne peut effectuer de tĂąche proscrite lors du second jour de la fĂȘte, mĂȘme s’il a l’intention de revenir[31]. Lors de la fĂȘte de Pessa'h, s’il se trouve en compagnie de Juifs locaux, il participe au second sĂ©der (sans dire toutes les bĂ©nĂ©dictions)[73] et s’abstient de hametz jusqu’au huitiĂšme jour[74]. Cependant, il prie lors du second jour la priĂšre des jours profanes (et non des jours fĂ©riĂ©s)[70], met rapidement ses tefillin chez lui[75] et rĂ©cite la bĂ©nĂ©diction de havdala lors du premier jour car la priĂšre est une activitĂ© discrĂšte[70] - [76]. Il ne peut cependant effectuer aucune tĂąche, mĂȘme de façon discrĂšte[77] ni, contrairement aux Juifs de la diaspora, cuisiner dans la semaine mi-fĂ©riĂ©e pour le second jour, celui-ci Ă©tant pour lui profane[78].
    Ces lois ne doivent pas ĂȘtre observĂ©es tant que la personne originaire d’IsraĂ«l est en transit et ce mĂȘme si elle a l’intention de s’établir dans son lieu de destination. Cependant, une fois arrivĂ©e, si elle n’a pas l’intention de repartir, elle est considĂ©rĂ©e (indĂ©pendamment de sa nationalitĂ©) comme un Juif de la diaspora[31].
  • un Juif de la diaspora arrivant en terre d’IsraĂ«l avec l’intention d’y rester dĂ©finitivement acquiert le statut de rĂ©sident en terre d’IsraĂ«l et n’observe plus qu’un jour ; il continue Ă  observer les deux jours dans le cas contraire[70] et ce mĂȘme pour un sĂ©jour long[79] - [80] (il est cependant tenu, Ă  partir d’un sĂ©jour de douze mois, de participer aux charges et impĂŽts communautaires)[79]. Une personne qui alterne les rĂ©sidences alterne Ă©galement les coutumes en fonction de l’endroit oĂč elle se trouve[81] mais celle qui n’a qu’une rĂ©sidence secondaire occasionnelle se conforment aux normes du lieu de rĂ©sidence principal[82] (Ă  moins de se trouver systĂ©matiquement en IsraĂ«l ou Ă  l’étranger lors des fĂȘtes[83]).

Une opinion diffĂ©rente avait Ă©tĂ© Ă©mise par Tsvi Hirsh Ashkenazi qui fait dĂ©pendre l’observance du lieu (et prescrit donc Ă  toute personne se trouvant en terre d’IsraĂ«l lors des fĂȘtes de se conformer Ă  l’usage du lieu, qu’elle ait ou non l’intention de revenir) et considĂšre que les pratiques du second jour en terre d’IsraĂ«l tombent sous le coup de l’interdiction d’ajouter aux prescriptions de la Torah[84]. Bien qu’apparemment entĂ©rinĂ©e par le fondateur de la dynastie Loubavitch[85], cette opinion demeure minoritaire[86].

Par ailleurs, l’établissement des grandes lignes suivies par la majoritĂ© des dĂ©cisionnaires n’empĂȘche pas ceux-ci de diverger sur tel point de loi ou tel cas. Il en est notamment ainsi de l’étudiant venu passer quelques annĂ©es de son cursus talmudique en IsraĂ«l (certains estimant qu’il doit, s’il est financiĂšrement indĂ©pendant, observer les pratiques de la terre d’IsraĂ«l durant son sĂ©jour quand bien mĂȘme il compte repartir en diaspora car il pourrait trouver une Ă©pouse en IsraĂ«l et dĂ©cider de s’y Ă©tablir dĂ©finitivement[87] tandis que d’autres refusent la distinction entre cet Ă©tudiant cĂ©libataire et un homme mariĂ©, faisant tout dĂ©pendre de l’intention de revenir[88]) et de la coupe de vin qu’il faut[89] ou non[76] boire lors de la havdala.

Le second jour dans les traditions non-rabbiniques

Le yom tov sheni Ă©tant d’institution rabbinique, il est totalement ignorĂ© par le karaĂŻsme et samaritanisme qui ne se basent que sur la Bible hĂ©braĂŻque et ses six premiers Livres respectivement. Il Ă©tait Ă©galement inconnu des Beta IsraĂ«l d’Éthiopie, dĂ©positaires d’un judaĂŻsme prĂ©-rabbinique, avant l’arrivĂ©e d’émissaires de l’Alliance israĂ©lite universelle.

Le second jour dans les traditions libérales

Apparu au XIXe siĂšcle dans les suites de la Haskala, le judaĂŻsme rĂ©formĂ© se fonde, contrairement au judaĂŻsme traditionnel, sur une vision hĂ©gĂ©lienne de l’histoire, et s’arroge l'autoritĂ© d'abroger de la pratique juive ce qui lui semble incompatible avec les besoins de Juifs imbibĂ©s de libĂ©ralisme et dĂ©sireux de s’intĂ©grer Ă  la nation allemande.

Le second jour des fĂȘtes est considĂ©rĂ© comme un hĂ©ritage pesant du passĂ©, fondĂ© sur une initiative humaine pĂ©rimĂ©e et inadĂ©quate pour un moderne (de fait, le Talmud de JĂ©rusalem suggĂšre que le second jour a Ă©tĂ© instaurĂ© en diaspora pour « rĂ©tribuer » les Juifs de n’avoir pas observĂ© le premier jour en terre d’IsraĂ«l[90]). Le synode de Breslau, tenu en 1846, se conclut par un abandon de la pratique du second jour des exilĂ©s (mais non de celui de Roch Hachana) ; il est dĂ©cidĂ© ultĂ©rieurement de conserver un second jour dans la liturgie si tel est le dĂ©sir de la congrĂ©gation ou d’une partie mĂȘme minoritaire de ses membres mais le chĂŽmage Ă  observer est, lui, dĂ©finitivement annulĂ©[91].

Le second jour demeure inobservĂ© Ă  ce jour dans les congrĂ©gations rĂ©formĂ©es. Les congrĂ©gations dites conservatrices l’observent en rĂ©ponse Ă  la demande des fidĂšles[13].

Notes et références

  1. R' HaĂŻ Gaon in Otzar Hagueonim sur TB Roch Hachana 21a & Beitza 4b.
  2. Mishna Roch Hachana 2:2-4, TB RH 22b & Rachi ad loc.
  3. Mishna RH 1:3
  4. Mishna RH 3:1
  5. TB RH 19b
  6. T.B. Beitza 4b et Rachi ad loc., s.v. meƛi'in
  7. Mishna Erouvin 3:7-8
  8. T.B. Beitza 3b
  9. Cf. T.B. Roch Hachana 20b & Rachi ad loc.
  10. T.B. Roch Hachana 21a
  11. T.B. Pessahim 52a
  12. T.J. Roch Hachana 1:4
  13. Wigoder 1993
  14. T.J. Pessahim 5:4, Yebamot 11:7 & Nazir 8:1 ; voir aussi T.B. Roch Hachana 23a
  15. T.B. Beitza 6a
  16. T.B. Beitza 17a
  17. T.B. Pessahim 51a-b & Yebamot 13b
  18. cf. T.B. Roch Hachana 24a
  19. Shiltei HaGuibborim sur T.B. R.H., ch. 4
  20. Choulhan Aroukh Orah Hayim 496:1
  21. Mishné Torah, Hilkhot Edout 10:3
  22. cf. C.A. O.H. 496:2
  23. Rem"a s.v. C.A. O.H. 513:6
  24. Cf. Mishna Beroura 503:4 & Biour Halakha ad loc.
  25. C.A. O.H. 503:1
  26. C.A. O.H. 513:5
  27. C.A. Yore Dea 366:8
  28. Ritva sur Yebamot 46b
  29. C.A. O.H. 496:2
  30. cf. C.A. O.H. 248:4 & C.A. Y.D. 336:1
  31. C.A. O.H. 496:3
  32. T.B. Roch Hachana 21a ; Tour Orah Hayim 624
  33. Tour, loc. cit. ; cf. note du Hatam Sofer sur C.A. O.H. 624
  34. Mishné Torah, Hilkhot Kiddoush Hahodesh 5:9-12
  35. Weill 1948, chapitre CLII (548) ; cf. C.A. O.H. 548:2 & Y.D. 399:2
  36. Mishné Torah, Hilkhot Yom tov 1:22
  37. Guiv'at Shaoul n° 53
  38. Teshouvot Gueonei Mizrah ouMaarav n°85
  39. C.A. O.H. 416:1
  40. C.A. O.H. 515:1
  41. Weill 1948, chapitre CXL-14 (496) ; cf. C.A. O.H. 526:4
  42. C.A. O.H. 526:9-10
  43. C.A. O.H. 526:11
  44. cf. Tour O.H. 639
  45. C.A. O.H., chap. 661 & 662 mais voir ibid. 490:5
  46. cf. C.A. O.H. 490:1
  47. Rashba, Responsa, n°61
  48. Mishné Torah, Hilkhot Hanoucca 3:7
  49. cf. Tossafot sur T.B. Soukka 44b
  50. cf. Rem"a sur C.A. O.H. 481:2
  51. Tour O.H. 448
  52. Rem"a sur C.A. O.H. 467:8
  53. C.A. O.H. 467:10
  54. C.A. O.H. 489:1
  55. C.A. O.H. 489:10 & Y.D. 293:5
  56. C.A. O.H. 661:1 & 669:1
  57. Maguen Avraham 655
  58. Bikkourei Yaakov 658:18
  59. Cf. Rachi sur TB Soukka 55a
  60. C.A. O.H. 662:3
  61. Tour O.H. 662
  62. Rem"a sur C.A. O.H. 667:1 ; voir cependant Maguen Avraham 667:3 qui énumÚre des cas autorisés
  63. C.A. O.H. 114:1
  64. Hazon Ish Orah Hayim 132:1
  65. Avnei Nezer Orah Hayim 392:9 ; cf. (en) R' A. Enkin, « Deux jours de yom tov dans l’état d’IsraĂ«l ?! », (consultĂ© le )
  66. H.I. O.H. 132:2-3
  67. C.A. O.H. 468:4
  68. Avkat Rokhel, n° 26 ; mais voir (he) R' Ovadia Yossef (d’aprĂšs le), « RĂšgles du yom tov sheni shel galouyot », qui l’interdit pour les IsraĂ©liens
  69. A.H. O.H. 496:5
  70. R' David ibn Zimra, Responsa, tome 4, n°73
  71. Pri Hadash O.H. 468:4
  72. M.A. 494:7 , M.B. 494:13
  73. Hayye Adam 23:4
  74. Aroukh Hashoulhan Orah Hayim 496:5
  75. Pri Hadash O.H. 496, C.A.H. O.H. 496:8, Hayye Adam 23:4, Ye'have Daat 3:35
  76. Iggerot Moshe Orah Hayim tome 3, n°72
  77. Sheïlat Yaabetz tome 1, n° 168 ; Avnei Nezer O.H. 539
  78. Hagaot Rabbi Akiva Eiger Ă  C.A. O.H. 493:3
  79. Zera Avraham Orah Hayim 12:2 ; Avnei kodesh n°38
  80. I.M O.H. tome 4, n° 108
  81. R' Yom Tov Tzahalon, Responsa n° 52
  82. Mishpatei Tzedek, n° 44
  83. (he) R' Ovadia Yossef (d’aprĂšs le), « Qui est appelĂ© enfant de la terre d’IsraĂ«l et qui est appelĂ© enfants de l’étranger », sur Halakha yomit, (consultĂ© le )
  84. Hakham Tsvi, n° 167
  85. cf. C.A.H. O.H. 496:11
  86. D. Saelman, « Yom Tov Sheni » (consulté le ) (pp. 23-28)
  87. Halakhot ktanot, tome 1, n° 4
  88. Guinat Vradim O.H. 4:15
  89. Leket Hakema'h Orah Hayim, Hilkhot Shabbat, s.v. Haya noheg ; (he) R' Ovadia Yossef (d’aprĂšs le), « RĂšgles du 'yom tov sheni shel galouyot - suite », sur Halakha yomit, (consultĂ© le )
  90. T.J. Erouvin 3:9 (21c)
  91. Jewish Encyclopedia 1906

Annexes

Bibliographie

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  • Ernest Weill, Choul'hĂąne Aroukh abrĂ©gĂ©, Strasbourg, Les Amis de la Tradition juive,
  • Kitsour Choulhan Aroukh, abrĂ©gĂ© du Choulhane 'Aroukh, accompagnĂ© de Yossef Da'at, vol. II, pp. 506, 523, 814-815, 880-881 & 896-900, Ă©d. Colbo, Paris, 1996/2009
  • (he) Encyclopedia Talmudit, Yom tov sheni shel galouyot, Bar Ilan's Responsa Project,
  • Geoffrey Wigoder (dir.) (trad. de l'anglais), Dictionnaire encyclopĂ©dique du judaĂŻsme, Paris, Éditions du Cerf, , 1771 p. (ISBN 2-204-04541-1), « FĂȘtes, deuxiĂšme jour des », p. 407-408
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