Le TĂ©moin (film hongrois, 1969)
Le TĂ©moin (A tanĂș[1]) est un film hongrois rĂ©alisĂ© par PĂ©ter BacsĂł. Son scĂ©nario est Ă©crit par le rĂ©alisateur, en collaboration avec JĂĄnos Ujhelyi.
Titre original | A tanĂș |
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RĂ©alisation | PĂ©ter BacsĂł |
Scénario |
PĂ©ter BacsĂł JĂĄnos Ujhelyi |
Musique | György Vukån |
Acteurs principaux |
Ferenc KĂĄllai |
Sociétés de production | Mafilm Studio 1 |
Pays de production | Hongrie |
Genre | Comédie dramatique |
Durée |
103 minutes (censuré) 111 minutes (non censuré) |
Sortie | 1979 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Bien que terminĂ© aprĂšs de nombreuses interventions de la censure, le film a Ă©tĂ© interdit jusquâen 1979, quand il est devenu, aprĂšs sa distribution en salles, un film culte, parmi les plus populaires du cinĂ©ma hongrois, Ă©tant une satire du rĂ©gime communiste du dĂ©but des annĂ©es 1950. Il a connu le succĂšs en Occident aussi, aprĂšs avoir Ă©tĂ© prĂ©sentĂ© en 1981 au Festival de Cannes, dans la section Un certain regard. En 2019, aprĂšs des recherches minutieuses, on a retrouvĂ© la version non censurĂ©e du film et on lâa restaurĂ©e en la numĂ©risant. Celle-ci a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e la mĂȘme annĂ©e dans la section Cannes Classics.
Résumé détaillé
Lâaction du film a lieu au dĂ©but des annĂ©es 1950[2]. Son personnage principal, JĂłzsef PelikĂĄn, est un homme simple qui vit Ă la campagne, Ă©tant le gardien dâune digue au bord du Danube.
Au dĂ©but de lâaction, PelikĂĄn fait un contrĂŽle du digue, Ă pied, Ă vĂ©lo et en barque, avec son chien FickĂł. Il accoste Ă la hauteur du slogan« Vive notre grand et sage dirigeant ! » Ă©crit en grosses lettres sur la digue[3]. Le chien court tout de suite uriner sur le slogan, et PelikĂĄn lui crie : « Pas lĂ , FickĂł ! » Une femme se tenant sur la rive opposĂ©e lui annonce en criant quâil y a de la viande Ă la boucherie. PelikĂĄn y arrive en pĂ©dalant Ă perdre haleine juste au moment oĂč le boucher annonce aux gens qui forment une longue file dâattente, quâil nây a plus de viande, jusquâĂ la semaine suivante.
ArrivĂ© chez lui, oĂč il a huit enfants, PelikĂĄn leur dit quâil nây a pas dâautre solution, DezsĆ[4] doit mourir. Le soir, sept des enfants, vĂȘtus de leurs uniformes de pionniers se mettent Ă chanter un chant du mouvement ouvrier communiste, sous la direction de la fille aĂźnĂ©e de PelikĂĄn, pour couvrir les cris du cochon Ă©levĂ© en cachette dans la cave, que PelikĂĄn est en train de tuer. Juste aprĂšs quâil lâa tuĂ©, deux policiers arrivent, qui se renseignent si la famille a un cochon. Les enfants recommencent Ă chanter et les policiers sâen vont. La nuit, toute la famille travaille dans la cave Ă dĂ©biter le cochon, Ă faire des saucisses, etc.
Ă lâaube, PelikĂĄn rencontre une vieille connaissance, ZoltĂĄn DĂĄniel, son camarade du parti communiste devenu ministre, qui pĂȘche Ă la ligne au bord du fleuve. Il ressort de leur conversation que PelikĂĄn nâa plus de femme, qui lâa quittĂ© pour un timonier de barge roumain. Ils marchent sur la digue et le chien trouve un trou de sousliks, dangereux pour la sĂ»retĂ© de la digue par les terriers et les galeries quâils y creusent. Les deux hommes versent de lâeau dans le trou et tuent deux sousliks. Ils leur coupent la queue car, si les enfants portent les queues Ă lâautoritĂ© habilitĂ©e, ils reçoivent deux forints pour chacune. Pendant ce temps, un poisson a mordu Ă lâhameçon et il est en train dâemporter la canne. DĂĄniel court la rĂ©cupĂ©rer mais sâavance trop dans lâeau, la canne lui Ă©chappe et il perd pied, mais PelikĂĄn le secourt.
Chez lui, PelikĂĄn met DĂĄniel au lit pour quâil nâattrape pas froid. Les policiers reviennent, parce quâils ont reçu une dĂ©nonciation tout ce quâil y a de valable, disent-ils, parce que anonyme et tapĂ©e Ă la machine, comme quoi PelikĂĄn a tuĂ© un cochon, ce qui est interdit sans autorisation, et ils se mettent Ă perquisitionner. Le ministre sort de la chambre et les empĂȘche de continuer, en disant que PelikĂĄn est un camarade fiable, qui lâa sauvĂ© des membres du Parti des Croix flĂ©chĂ©es au pouvoir en 1944. Pour leur montrer oĂč il lâa cachĂ©, il ouvre la trappe de la cave. Toute la viande y est et DĂĄniel dit aux policiers de faire leur devoir, parce que la loi est valable pour tous, dâautant plus pour les communistes. Les policiers versent du pĂ©trole sur la viande, qui sera la preuve matĂ©rielle de la culpabilitĂ© de PelikĂĄn, ils lui mettent des menottes et lâemmĂšnent.
Dans la cellule de la prison, PelikĂĄn tombe sur GulyĂĄs, un policier de lâancien rĂ©gime, qui lâa passĂ© Ă tabac en 1944. Sur le moment, il a envie de se venger mais en fin de compte, il y renonce. Avec eux il y a aussi un Ă©vĂȘque dĂ©tenu, qui dit quâil va prier pour lui. PelikĂĄn demande ce quâil y aura Ă manger. LâĂ©vĂȘque le demande Ă dâautres dĂ©tenus par des signaux frappĂ©s dans le tuyau du chauffage central. Il y aura du tarhonya[5].
PelikĂĄn a une visite, sa fille aĂźnĂ©e, qui lui annonce que son avocat sera obligĂ© de lâaccuser et que la peine sera une amende ou la mort, selon que lâon voudra ou non donner un exemple par la condamnation. Ă la fin de lâentretien, PelikĂĄn dit a sa fille de prendre soin des enfants et de faire attention Ă la digue aussi.
PelikĂĄn est mis en libertĂ© par un ordre venu dâen haut. Il proteste, en disant quâil sâest quand mĂȘme rendu coupable en tuant le cochon, mais on lui rĂ©pond quâil nây a eu aucun cochon et aucun dĂ©lit. En quittant la prison, il demande quâon y amĂ©liore la nourriture, pour quâon ne puisse pas dire que sous le nouveau rĂ©gime on mange mal en prison.
En prenant une biĂšre au bistrot de son village, il aperçoit un individu dont on lui dit que câest lui qui lâa dĂ©noncĂ©, le mĂȘme qui a fait cela sous le rĂ©gime antĂ©rieur aussi, quand il Ă©tat croix-flĂ©chĂ©e. PelikĂĄn le menace de le battre sâil ne quitte pas le bistrot, et lâautre sâen va.
PelikĂĄn va voir le ministre en lui portant un canard pour lui exprimer sa reconnaissance, mais il nây est pas et Ă toutes ses questions, on lui rĂ©pond « Je ne sais pas ».
Une nuit, deux individus vĂȘtus dâimpermĂ©ables en cuir noir viennent le chercher dans une voiture noire. On peut dĂ©duire que ce sont des agents de lâĂVH, la police politique. Ils lui couvrent les yeux et lâemmĂšnent sans rĂ©pondre Ă aucune de ses questions. Ils arrivent dans un garage dâoĂč il doit monter un escalier lugubre. Ă un Ă©tage, il entre dans une piĂšce relativement luxueuse, oĂč il y a une table mise avec soin. Un individu Ă la mine souffreteuse, le camarade VirĂĄg[6], y entre Ă son tour, le salue cordialement, lui sert une boisson et lâinvite Ă dĂźner. Ils sont servis par une femme en uniforme militaire, qui apporte un porcelet rĂŽti. Seul PelikĂĄn mange. VirĂĄg dit quâil souffre de lâestomac et ne prend quâun mĂ©dicament. Il ne dit pratiquement rien Ă PelikĂĄn sauf quâon lui demandera quelque chose un jour et que « la situation internationale ne cesse de sâaccentuer ».
Un jour, quand PelikĂĄn rentre avec ses enfants aprĂšs leur avoir offert une glace, il trouve chez lui VirĂĄg avec deux individus que celui-ci lui prĂ©sente comme ses fils. AprĂšs une promenade sur la digue, PelikĂĄn les invite Ă partager un repas constituĂ© seulement de pommes de terre cuites dans la cendre, parce quâil nâa rien dâautre. Lâun des enfants va dans la piĂšce Ă cĂŽtĂ© et on entend comme un coup de feu. VirĂĄg se rĂ©fugie tout de suite sous la table et lâun de ses accompagnateurs tire une rafale de la mitraillette quâil avait cachĂ©e sous sa veste, en dĂ©truisant les bocaux de lĂ©gumes en saumure rangĂ©s sur le buffet. Ensuite il annonce quâil nâa plus de cartouches mais il a encore deux grenades quâil demande Ă utiliser. Cela nâarrive pas, car PelikĂĄn va chercher lâenfant et le punit de quelques taloches sur la tĂȘte, parce quâil a gonflĂ© et fait pĂ©ter un sachet en papier, selon une mauvaise habitude quâil a.
VirĂĄg dit Ă PelikĂĄn quâil mĂ©riterait un poste de responsabilitĂ©, mais celui-ci refuse, en motivant quâil nây est pas assez formĂ© idĂ©ologiquement. Lâautre lui rĂ©plique quâil suffit quâil aime le grand et sage dirigeant, ce que PelikĂĄn confirme.
PelikĂĄn est nommĂ© directeur de la piscine couverte de la capitale. Il sây prĂ©sente et remarque un grand groupe de gens rassemblĂ©s devant lâentrĂ©e. Ils ont leurs billets mais un employĂ© ne les laisse pas entrer. PelikĂĄn y entre et voit nager un seul individu et deux autres en impermĂ©ables en cuir qui marchent parallĂšlement avec lui sur les bords de la piscine. PelikĂĄn va Ă lâun d'eux, lui demande son billet, et dit Ă lâemployĂ© de faire entrer les gens. Celui Ă qui il a demandĂ© son billet, sort un pistolet. PelikĂĄn demande Ă celui de lâeau aussi sâil a son billet. Pendant ce temps, les gens entrent et se jettent dans la piscine. Celui dans lâeau crie effarĂ©, et ses gardes du corps se jettent Ă lâeau habillĂ©s pour lâen sortir.
PelikĂĄn se retrouve en prison, avec les mĂȘmes que la premiĂšre fois. Lâancien policier lui annonce que les dirigeants du pays se mettent les uns les autres en prison. LâĂ©vĂȘque demande ce quâil y aura Ă manger par le moyen de communication consacrĂ©. Il y aura encore du tarhonya. PelikĂĄn est de nouveau libĂ©rĂ© et emmenĂ© chez VirĂĄg. Il sâexcuse de ne pas avoir reconnu en maillot de bain le camarade gĂ©nĂ©ral BĂĄstya[7]. Il lâaurait reconnu sâil avait Ă©tĂ© en uniforme. VirĂĄg le console en lui disant que le camarade BĂĄstya lui a pardonnĂ© et que lâemployĂ© a Ă©tĂ© internĂ© dans un camp comme responsable de lâincident, aprĂšs avoir aussi avouĂ© que sa mĂšre avait Ă©tĂ© la maĂźtresse dâun koulak propriĂ©taire de moulin. On sert de nouveau un repas copieux Ă PelikĂĄn et VirĂĄg lui rappelle quâon lui demandera quelque chose un jour. PelikĂĄn ne lui demande que de le laisser retourner Ă sa digue, mais VirĂĄg lui annonce quâil est nommĂ© directeur du Parc anglais, comme sâappelait Ă ce moment-lĂ le parc dâattractions de Budapest. PelikĂĄn demande pourquoi le « Parc anglais », pourquoi pas le « Parc gai », Ă quoi VirĂĄg vante son attitude anti-impĂ©rialiste.
En tant que directeur, PelikĂĄn renomme le tunnel de lâhorreur du parc « le tunnel de lâesprit socialiste »[8]. Entre autres, Ă la place des figures effrayantes qui sây trouvaient, il fait mettre les portraits des dirigeants du pays, mais laisse les bruits sinistres et les cris lugubres traditionnels. Le gĂ©nĂ©ral vient inaugurer le nouveau parc et visite le tunnel. Il est accueilli par le portrait de Karl Marx, des slogans communistes, des sons effrayants et son propre portrait, Ă quoi il perd connaissance.
PelikĂĄn est de nouveau en prison, dans la mĂȘme compagnie. Il se plaint de toujours vouloir ĂȘtre sur la ligne[9] mais de toujours tomber Ă cĂŽtĂ©. LâĂ©vĂȘque lui dit de ne pas dĂ©sespĂ©rer, car la Hongrie ressuscitera. PelikĂĄn ne comprend pas ce que lâĂ©vĂȘque veut dire et celui-ci lui explique que cela signifie que PelikĂĄn aussi arrivera un jour Ă rĂ©flĂ©chir sur la marche du monde. Cette fois-ci il y aura Ă manger un plat de pommes de terres. Ă propos de cela, PelikĂĄn attire lâattention aux autres quâil y a tout de mĂȘme des progrĂšs sous le nouvel ordre socialiste.
PelikĂĄn dĂźne de nouveau chez VirĂĄg et rĂ©pĂšte sa demande dâĂȘtre laissĂ© sur sa digue, mais VirĂĄg lui dit que « la vie nâest pas un gĂąteau Ă la crĂšme ». Lui aussi est fatiguĂ© et insomniaque ces derniers temps. Et de nouveau il lui dit que trĂšs bientĂŽt on demandera quelque chose Ă PelikĂĄn, sans lui dire quoi.
PelikĂĄn est nommĂ© directeur de lâInstitut de recherche de lâoranger, qui a pour objectif sa culture en Hongrie. AprĂšs des mois dâefforts, une seule orange est mĂ»re et on organise la cĂ©lĂ©bration de la premiĂšre orange hongroise. Celle-ci est posĂ©e sur un guĂ©ridon, sous une cloche de verre couverte dâun napperon. La cĂ©rĂ©monie comporte un spectacle de danses traditionnelles. Une assistance de haut rang est prĂ©sente, dans laquelle BĂĄstya et VirĂĄg. Les enfants de PelikĂĄn sont lĂ aussi, en uniforme de pionniers. Le pĂšre enlĂšve le napperon et constate lâabsence de lâorange. Il dĂ©couvre quâelle a Ă©tĂ© mangĂ©e par lâenfant qui avait fait pĂ©ter le sachet en papier. PelikĂĄn va Ă VirĂĄg et lui demande ce quâil doit faire. Celui-ci sort un citron de sa poche. Ă la protestation de PelikĂĄn, il dit quâil « nâinitie pas de discussion ». Le citron est prĂ©sentĂ© Ă BĂĄstya qui le coupe et y goĂ»te en grimaçant. Il demande ce que câest et PelikĂĄn lui rĂ©pond que câest « lâorange nouvelle hongroise, un peu plus jaune, un peu plus acide, mais câest la nĂŽtre », Ă quoi le gĂ©nĂ©ral ne peut faire autre chose quâafficher un sourire forcĂ©.
Un spectacle dâopĂ©rette a lieu en lâhonneur de lâinstitut. PelikĂĄn dit Ă VirĂĄg quâil est mĂ©content dâavoir trompĂ© les gens, mais celui-ci rĂ©plique quâon nâa trompĂ© personne, car les masses ne mangent ni oranges ni citrons. En revanche, le rĂ©gime a assenĂ© un coup dur aux impĂ©rialistes en tenant la promesse que lâorange hongroise existerait.
La mĂȘme nuit, PelikĂĄn est de nouveau emmenĂ© chez VirĂĄg. Cette fois il nâest pas servi. VirĂĄg commence par sa formule « la situation internationale ne cesse de sâaccentuer » et il lui annonce quâon a arrĂȘtĂ© un nouveau groupe de malfaiteurs, celui de lâancien ministre DĂĄniel. PelikĂĄn rit, croyant que câest une plaisanterie mais VirĂĄg affirme que DĂĄniel est un espion, un traĂźtre, un mouchard de la police de lâancien rĂ©gime, et quâil a avouĂ© tout cela. PelikĂĄn doit ĂȘtre le principal tĂ©moin de lâaccusation Ă son procĂšs. Celui-ci dit quâil nâa rien remarquĂ© de suspect chez DĂĄniel, Ă quoi VirĂĄg rĂ©pond que « câest justement ce qui nâest pas suspect qui est suspect ». PelikĂĄn demande quâon renonce Ă lui comme tĂ©moin. VirĂĄg sort, puis il y a quatre individus Ă la mine menaçante qui entrent et qui lâentourent sans rien dire. VirĂĄg revient avec un plateau de sucreries et reproche aux quatre types dâimportuner PelikĂĄn. Ceux-ci sortent et VirĂĄg lui sert des sucreries.
Chez lui, PelikĂĄn ne peut pas dormir la nuit en rĂ©flĂ©chissant comment il est possible que DĂĄniel soit un traĂźtre et que ce qui nâest pas suspect soit suspect. Il allume une cigarette et finalement il sâendort, celle-ci Ă la bouche. La maison brĂ»le complĂštement. VirĂĄg vient et lui rĂ©pĂšte ses formules habituelles. Câest alors quâarrivent les pompiers, que PelikĂĄn a appelĂ© il y a longtemps. VirĂĄg demande Ă leur commandant pourquoi ils sont venus si tard et celui-ci rĂ©pond quâon leur a ordonnĂ© dâĂȘtre vigilants, de vĂ©rifier dâabord sâil sâagit rĂ©ellement dâincendie, ce qui exige du temps. VirĂĄg lui donne raison.
Une Ă©quipe de constructeurs vient, qui reconstruit rapidement la maison sous la direction de VirĂĄg, mais sans portes ni fenĂȘtres.
VirĂĄg emmĂšne PelikĂĄn chez un individu qui Ă©crit la dĂ©position de tĂ©moin quâil doit apprendre par cĆur. Lâindividu se comporte comme un Ă©crivain content de son Ćuvre. VirĂĄg apprĂ©cie ce quâil a Ă©crit mais PelikĂĄn proteste lorsquâil lit que DĂĄniel a jetĂ© dans le Danube des boĂźtes en mĂ©tal qui contenaient ses rapports dâespion et a plongĂ© sous lâeau pour y discuter avec des agents Ă©trangers au sujet de lâassassinat des dirigeants du pays. Il dit quâen fait DĂĄniel a jetĂ© Ă lâeau des sousliks morts et quâil est tombĂ© Ă lâeau Ă cause dâun poisson Ă©chappĂ©. VirĂĄg propose tout de mĂȘme un changement : que ces boĂźtes soient cousues dans des peaux de souslik, pour que la dĂ©position fasse plus authentique. LâĂ©crivain est dâaccord. Le gĂ©nĂ©ral vient et lit lui aussi la dĂ©position. Il est mĂ©content de ne pas ĂȘtre nommĂ© parmi ceux que les traĂźtres veulent assassiner. Lâauteur promet de faire la modification nĂ©cessaire. Le gĂ©nĂ©ral ne reconnaĂźt pas PelikĂĄn. Celui-ci lui rappelle toutes les occasions auxquelles il a eu affaire Ă lui, en ajoutant quâil ne veut pas tĂ©moigner. Le gĂ©nĂ©ral critique VirĂĄg, en disant quâils ont besoin de tĂ©moins bĂ©nĂ©voles.
VirĂĄg sâen va fĂąchĂ©, sans PelikĂĄn, qui se rend compte quâil lui a fait du tort et il le regrette. Il tient Ă monter en voiture avec VirĂĄg, qui ordonne dâĂȘtre emmenĂ© au cimetiĂšre. Au monument funĂ©raire constituĂ© de la statue grandeur nature dâun ouvrier, prĂ©parĂ© pour VirĂĄg avec lâinscription « Une vie pour le peuple », celui-ci prend son pistolet comme pour se suicider, en disant que lui et ceux comme lui sacrifient leur vie pour un ramassis de gens qui ne les mĂ©ritent pas. Il feint tout de mĂȘme de se laisser convaincre par PelikĂĄn de ne pas se tuer. Celui-ci lui demande de lâĂ©claircir. Il ne peut pas concevoir que DĂĄniel est coupable, puisquâil le connaĂźt et a vu de ses propres yeux autre chose que ce quâil doit dire en tant que tĂ©moin. VirĂĄg lui rĂ©plique que ce quâil voit, entend ou pense, et que DĂĄniel est ou non coupable, ne compte pas. Ce qui compte, câest la « vĂ©ritĂ© » affirmĂ©e par le rĂ©gime. Il peut prouver en cinq minutes, sâil le faut, que nâimporte qui, y compris lui-mĂȘme, est coupable. Il pourrait faire torturer PelikĂĄn de diverses maniĂšres, mais il a toujours cru que câĂ©tait un camarade fiable, qui accomplit bĂ©nĂ©volement et volontiers ce dont il est chargĂ©. Il est déçu de PelikĂĄn, plus que cela, le camarade BĂĄstya est déçu de lui, VirĂĄg. Alors PelikĂĄn promet dâĂȘtre prĂȘt Ă tout mais demande Ă voir DĂĄniel.
On permet Ă PelikĂĄn de parler seul Ă seul Ă DĂĄniel dans la cellule de celui-ci. PelikĂĄn veut entendre de sa bouche sâil est coupable ou non. DĂĄniel dit que ce nâest pas un hasard sâil est dans la situation oĂč il est, car on peut ĂȘtre coupable sans le savoir. PelikĂĄn rĂ©plique quâil nâa rien vu de ce quâil doit dire comme tĂ©moin, Ă quoi DĂĄniel dit que ce nâest pas cela qui est important mais que lui soit coupable.
VirĂĄg emmĂšne PelikĂĄn Ă BĂĄstya, qui est Ă la chasse. ArrivĂ©s dans la forĂȘt, les deux reçoivent des fusils et des vĂȘtements de chasseurs, mais ils sont pris pour du gibier, sans ĂȘtre atteints. Le gĂ©nĂ©ral reproche Ă VirĂĄg de le dĂ©ranger. Celui-ci lui rapporte que PelikĂĄn est tĂ©moin bĂ©nĂ©vole et que le procĂšs peut avoir lieu, ce que PelikĂĄn confirme.
PelikĂĄn est emmenĂ© Ă une camarade ayant la fonction de former les tĂ©moins. Elle procĂšde avec PelikĂĄn comme un metteur en scĂšne : elle lui demande de dire un poĂšme et des virelangues, en constatant quâil a un dĂ©faut de diction ; elle le fait lire sa dĂ©position et lâarrĂȘte souvent pour corriger son interprĂ©tation. PelikĂĄn nâarrive pas Ă mĂ©moriser sa dĂ©position et il est examinĂ© par un psychologue.
On permet Ă PelikĂĄn de voir ses enfants. Il y a une grande inondation, parce que le Danube a rompu les digues. JuchĂ© sur un saule avec ses enfants, il rĂ©pĂšte sa dĂ©position, un virelangue et des formules de VirĂĄg, pendant que sur lâeau passent des barques avec des gens qui essayent de sauver leurs biens. Un homme arrĂȘte sa barque prĂšs du saule et cherche Ă attirer son attention sur ce qui arrive. PelikĂĄn continue son monologue, que lâautre ne comprend pas, puis il se rend quand mĂȘme compte de la rĂ©alitĂ©.
Le jour du procĂšs, PelikĂĄn se prĂ©sente au tribunal. Il nâest pas rasĂ©, parce que lâeau a emportĂ© toutes ses affaires. VirĂĄg lui passe des papiers, et PelikĂĄn constate que ce nâest pas sa dĂ©position mais un verdict, Ă quoi VirĂĄg sâexcuse et lui passe sa dĂ©position. Ensuite VirĂĄg tĂ©lĂ©phone pour appeler un major, « pas pour une exĂ©cution, pour un rasage ». Câest le bourreau, qui rase PelikĂĄn en constatant : « Comme elle est bien insĂ©rĂ©e dans la chair, cette petite vertĂšbre ! » Lâancien policier GulyĂĄs entre dans la piĂšce, lui aussi Ă©tant tĂ©moin au mĂȘme procĂšs. PelikĂĄn est rĂ©voltĂ© mais VirĂĄg le console en lui disant que lui aussi a Ă©tĂ© passĂ© Ă tabac par le mĂȘme GulyĂĄs, mais « la situation internationale ne cesse de sâaccentuer », câest pourquoi ils nâont pas le droit de tenir compte des affronts personnels quâils ont subis.
Câest le tour de PelikĂĄn de tĂ©moigner. Il commence par rĂ©citer sa dĂ©position mais il sâembrouille, puis il demande comment cela se fait que le sbire GulyĂĄs est lĂ . Le juge lui demande sâil maintient sa dĂ©position. En voyant VirĂĄg hocher la tĂȘte avec vĂ©hĂ©mence pour quâil dise oui, PelikĂĄn lui demande sâil a un malaise, en ajoutant que GulyĂĄs a battu VirĂĄg aussi. Il demande ensuite que GulyĂĄs lui dise en face que DĂĄniel a Ă©tĂ© mouchard. GulyĂĄs confirme quâil a Ă©tĂ© informateur, et que PelikĂĄn aussi lâa Ă©tĂ©, tous les deux payĂ©s par lui-mĂȘme. PelikĂĄn se met Ă rire, en demandant qui encore a Ă©tĂ© mouchard : peut-ĂȘtre les camarades VirĂĄg et BĂĄstya aussi ? Ce dernier, dans une autre piĂšce, suit le dĂ©roulement du procĂšs, des Ă©couteurs aux oreilles. Il reçoit par tĂ©lĂ©phone lâordre de vĂ©rifier les dires de PelikĂĄn. Dans la salle dâaudience, PelikĂĄn rĂ©pond « non » Ă la question sâil maintient sa dĂ©position.
PelikĂĄn est condamnĂ© Ă mort. AprĂšs quelque temps en prison, la veille de son exĂ©cution, un gardien lui apporte son dernier repas, un bon plat et du vin. PelikĂĄn sert du vin au gardien aussi et se met Ă manger avec appĂ©tit. Le gardien le regarde avec concupiscence, en disant que câest le plat quâil recommande Ă tous les condamnĂ©s Ă mort, nâimporte leur appartenance politique. Certains ne peuvent pas manger et alors câest lui qui le mange. Puis le gardien sâexcuse de devoir le quitter, parce que le lendemain il a un sĂ©minaire dâenseignement idĂ©ologique et il nâa encore rien appris. Cela lui rappelle que PelikĂĄn est communiste et lui demande dâĂ©clairer sa lanterne au sujet de certaines notions. Il lui sert aussi du rhum. PelikĂĄn ne connaĂźt pas les notions en cause mais dit ce quâil peut, et le gardien prend consciencieusement des notes.
Ă lâaube, le gardien conduit PelikĂĄn dans la cour de la prison oĂč est dressĂ©e la potence, mais il nây a personne. Le gardien ne comprend pas ce qui se passe. Il se met Ă crier un nom, et PelikĂĄn le crie lui aussi, en apprenant que câest le nom du bourreau. Ă une fenĂȘtre, câest le directeur de la prison qui apparaĂźt, en leur reprochant de faire du bruit si tĂŽt, puis il descend en pyjama, un porte-documents sous le bras. Il demande Ă PelikĂĄn qui il est, celui-ci se prĂ©sente et dit que câest lui quâon doit pendre. Le directeur sort une liste, y trouve le nom de PelikĂĄn et lui annonce quâil sera rĂ©habilitĂ©[10]. PelikĂĄn ne connaĂźt pas le mot et dit quâil aimerait mieux ĂȘtre pendu, Ă quoi le directeur lui explique quâil est innocent. PelikĂĄn se renseigne sur le sort de DĂĄniel. Celui-ci a dĂ©jĂ Ă©tĂ© libĂ©rĂ© une semaine avant. Le gardien lui reproche avec dĂ©pit dâavoir mangĂ©, bu, en plus de ne pas ĂȘtre exĂ©cutĂ©, et lui ordonne de dĂ©guerpir.
Le film se termine en montrant PelikĂĄn qui marche dĂ©routĂ© parmi la foule dâune rue de la capitale. Il sâarrĂȘte prĂšs dâun jeune homme qui lit son journal, et lui demande quel jour câest, quelle date, puis quel mois. Lâhomme lui fournit ces renseignements, et PelikĂĄn lui demande aussi quel est le niveau du Danube, Ă quoi lâhomme lui demande sâil ne lui faut pas sa fiancĂ©e aussi.
Fiche technique
- Titre original : A tanĂș
- Titre français : Le Témoin
- RĂ©alisation : PĂ©ter BacsĂł
- Scénario : Péter Bacsó, Jånos Ujhelyi
- Musique : György Vukån
- Direction artistique : LĂĄszlĂł BlahĂł
- DĂ©cors : TamĂĄs Vayer
- Costumes : Katalin JĂĄn
- Photographie : JĂĄnos Zsombolyai
- Son : KĂĄroly Peller
- Montage : SĂĄndor Boronkay
- Production : Ottó Föld, Lajos Gulyås
- Société de production : Mafilm Studio 1
- SociĂ©tĂ© de distribution : MOKĂP
- Pays de production : Hongrie
- Langue originale : hongrois
- Format : couleur â 2,35:1 â mono
- Genre : comédie dramatique
- Durée : 103 minutes (censuré), 111 minutes (non censuré)
- Dates de sortie :
Distribution
- Ferenc KĂĄllai : JĂłzsef PelikĂĄn, gardien de digue
- Lajos Ćze : ĂrpĂĄd VirĂĄg, chef de la police politique
- Béla Both : le général Båstya
- ZoltĂĄn FĂĄbri : ZoltĂĄn DĂĄniel, ami de PelikĂĄn
- Kåroly Bicskey : Elemér Gulyås, ancien policier
- György BĂĄlint : Ă©vĂȘque
- Lili Monori : Gizi, fille de PelikĂĄn
- Lajos Mezey : auteur de la déposition de Pelikån
- Georgette Metzradt : camarde Potocsni, formatrice de témoins
- LĂĄszlĂł VĂĄmos : psychologue
- PĂĄl BĂĄnĂł : juge
- Tibor Fehér : gardien de prison
- György GyĆrffy : directeur de la prison
- Ida Versényi : camarade Gogolåk, servante de Viråg
Production
Le film a Ă©tĂ© tournĂ© en 1969. Son tournage a Ă©tĂ© possible grĂące au contexte politique de lâĂ©poque, caractĂ©risĂ© par une certaine libĂ©ralisation, quand les autoritĂ©s permettaient de critiquer le rĂ©gime dâinspiration stalinienne du dĂ©but des annĂ©es 1950[11]. Le plus haut dirigeant du pays lui-mĂȘme, JĂĄnos KĂĄdĂĄr, avait Ă©tĂ© emprisonnĂ© entre 1951 et 1953[12]. Cependant, le film allait au-delĂ de ce que le rĂ©gime acceptait. Son tournage a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© une fois et repris seulement aprĂšs quâon avait imposĂ© Ă lâĂ©quipe un consultant idĂ©ologique. Il a Ă©tĂ© terminĂ© aprĂšs beaucoup de discussions avec la censure, et interdit tout de mĂȘme, malgrĂ© les Ă©chos de presse favorables dĂ©jĂ parus au cours du tournage[13], par exemple dans la revue Film SzĂnhĂĄz Muzsika[14].
Le texte du chant du mouvement ouvrier communiste chantĂ© par les enfants de PelikĂĄn a Ă©tĂ© Ă©crit en 1949 par PĂ©ter BacsĂł mĂȘme, pour le film Les Pionniers, rĂ©alisĂ© avec un autre futur rĂ©alisateur important, KĂĄroly Makk, quand ils Ă©taient Ă©tudiants Ă lâĂcole supĂ©rieure dâart dramatique et cinĂ©matographique. MalgrĂ© cela, leur film a tout de suite Ă©tĂ© interdit et confisquĂ©. Dans une interview, PĂ©ter BacsĂł dĂ©clarait « JĂłzsef PelikĂĄn câest moi », ayant cru Ă cette Ă©poque-lĂ en lâutopie socialiste et ayant Ă©tĂ© un militant de la cause[15].
Dans Le Témoin il y a aussi trois metteurs en scÚne qui jouent, Béla Both (le général), Låszló Våmos (le psychologue) et Ida Versényi (camarade Gogolåk), ainsi que le réalisateur de cinéma Zoltån Fåbri (Zoltån Dåniel)[14].
Autour du film
Vie ultérieure du film
MalgrĂ© son interdiction, le film a pu ĂȘtre vu en dehors des cinĂ©mas, comme un privilĂšge accordĂ© Ă certains membres du parti communiste ou des jeunesses communistes[16]. Sa premiĂšre prĂ©sentation publique a eu lieu en 1977, une seule fois, Ă lâoccasion dâune revue des films comiques du rĂ©alisateur. Il nâa Ă©tĂ© distribuĂ© en salles quâen 1979[15].
En 1981, le film a été présent au Festival de Cannes, hors concours, dans la section Un certain regard[13].
En 2018, le film a Ă©tĂ© numĂ©risĂ© et redistribuĂ© dans les cinĂ©mas[17], et en 2019 on a retrouvĂ© sa version non censurĂ©e, quâon a restaurĂ©e Ă son tour et prĂ©sentĂ©e dans la section Cannes Classics. La censure avait imposĂ© non seulement des coupures mais aussi des ajouts, par exemple une scĂšne finale oĂč PelikĂĄn et VirĂĄg devenu un mortel ordinaire se rencontrent sur le marchepied dâun tramway bondĂ©. VirĂĄg dit que les gens le regretteront, Ă quoi PelikĂĄn rĂ©plique quâil ne le pense pas. Cette scĂšne Ă©tait destinĂ©e Ă montrer que le temps de la dictature Ă©tait passĂ©. La version initiale, non censurĂ©e, a Ă©tĂ© restaurĂ©e sans cette scĂšne[15].
Postérité
PĂ©ter BacsĂł a publiĂ© en 1980 un roman sous le mĂȘme titre que le film, sur la base de son scĂ©nario[18].
Le mĂȘme rĂ©alisateur, avec le mĂȘme acteur principal dans le rĂŽle de PelikĂĄn, a rĂ©alisĂ© en 1994 une suite du film, Megint tanĂș (TĂ©moin de nouveau), oĂč lâhonnĂȘte et naĂŻf PelikĂĄn subit les tentatives de manipulation de divers groupes de pouvoir en conflit, dans les conditions de lâinstauration de la dĂ©mocratie et des dĂ©buts de lâĂ©conomie capitaliste. Ce film nâa pas eu le mĂȘme succĂšs que Le TĂ©moin[19].
Il existe aussi une adaptation du film au théùtre, mise en scÚne en 2012[20].
Analyse
Film et réalité
Le film reflĂšte en gĂ©nĂ©ral les rĂ©alitĂ©s sociales, politiques et Ă©conomiques du dĂ©but des annĂ©es 1950, mais sâinspire aussi de faits et personnes concrets de lâĂ©poque.
Dans les annĂ©es 1950, une grande partie des produits alimentaires destinĂ©s Ă la population des villes provenait de ce que les producteurs individuels devaient vendre obligatoirement Ă lâĂtat pour des prix dĂ©risoires. Câest pour cela que lâabattage dâanimaux propriĂ©tĂ© des individus Ă©tait lĂ©gal si seulement il Ă©tait autorisĂ© par les autoritĂ©s, aprĂšs que les propriĂ©taires avaient remis les quotas de produits auxquels ils Ă©taient obligĂ©s. Les abattages illĂ©gaux Ă©taient frĂ©quents[21].
La nomination de PelikĂĄn Ă des postes ne correspondant pas Ă sa formation sâinspire du fait que le rĂ©gime Ă©loignait de leurs postes les professionnels formĂ©s sous le rĂ©gime antĂ©rieur et les remplaçait par des gens choisis selon le critĂšre de leur origine ouvriĂšre ou paysanne pauvre[22].
Le parc dâattractions de Budapest sâappelait effectivement Angolpark (Parc anglais) en 1950. Câest alors quâil a Ă©tĂ© Ă©tatisĂ© et renommĂ© VidĂĄmpark (Parc gai), nom quâil a gardĂ© jusquâen 2013[23].
Ă lâĂ©poque il y a eu effectivement des tentatives de cultiver des agrumes en Hongrie, Ă lâindication de la direction du parti communiste, avec du matĂ©riau fourni par lâUnion soviĂ©tique[24].
Le procĂšs de ZoltĂĄn DĂĄniel Ă©voque celui du ministre des affaires Ă©trangĂšres LĂĄszlĂł Rajk, de 1949, basĂ© sur des accusations inventĂ©es, une parodie de procĂšs sur le modĂšle de ceux de lâĂ©poque de Joseph Staline en URSS, avant lequel on lâavait convaincu dâavouer ce dont il Ă©tait accusĂ©[25].
Lâannulation de lâexĂ©cution et la libĂ©ration de PelikĂĄn et de DĂĄniel Ă©voquent le fait quâen 1953, aprĂšs la mort de Staline, une pĂ©riode de relative libĂ©ralisation a suivi, lorsquâon a libĂ©rĂ© un certain nombre de dĂ©tenus politiques Ă la suite de lâamnistie dĂ©crĂ©tĂ©e par un nouveau gouvernement, celui dâImre Nagy[26].
La figure de VirĂĄg sâinspire du chef de la police politique GĂĄbor PĂ©ter, et celle du gĂ©nĂ©ral BĂĄstya du gĂ©nĂ©ral dâarmĂ©e MihĂĄly Farkas, ministre de la dĂ©fense. En effet, il avait lâhabitude de rĂ©server la piscine dâune facultĂ© pour lui tout seul[15].
Accueil
Le TĂ©moin est lâun des films culte du cinĂ©ma hongrois. Ă sa sortie en 1979, il a tenu lâaffiche pendant plusieurs mois. Il a Ă©tĂ© tellement populaire, que pendant longtemps, certaines de ses phrases ont circulĂ© en tant que citations cĂ©lĂšbres, par exemple « La vie nâest pas un gĂąteau Ă la crĂšme », « La situation sâaccentue », « Je nâinitie pas de discussion », « Câest justement ce qui nâest pas suspect qui est suspect », « Elle est un peu plus jaune, un peu plus acide, mais câest la nĂŽtre »[15]. Ă partir de 1989 paraĂźt le journal Magyar Narancs (LâOrange hongroise) dont le nom est une allusion au film[27].
PrĂ©sentĂ© Ă Cannes en 1981, le film, a eu un succĂšs tel, quâil a Ă©tĂ© achetĂ© en 32 pays[13].
En 2012, les membres de lâAcadĂ©mie hongroise des arts ont Ă©lu le film parmi les 53 meilleurs films hongrois de tous les temps[28].
Critiques
Selon lâhistorien et critique de cinĂ©ma Jean-Pierre Jeancolas, Le TĂ©moin aborde la dure pĂ©riode stalinienne des annĂ©es cinquante avec « un humour dĂ©vastateur. (...) FilmĂ© richement, dans un format (...) qui accentue le ridicule des cĂ©rĂ©monies, nourri de gags (...), conduit avec finesse par Ferenc KĂĄllai qui fait de PelikĂĄn un faux ahuri quâon a comparĂ© Ă Ć vejk, le film de BacsĂł est Ă la fois une grande comĂ©die et un grand film politique »[29].
La critique Juliana Brandt voit en PelikĂĄn un homme simple, modeste et naĂŻf. Il sâest approchĂ© des communistes quand ils Ă©taient persĂ©cutĂ©s et pense que le rĂ©gime communiste crĂ©era une sociĂ©tĂ© juste. Il fait consciencieusement son devoir dans un domaine qui correspond Ă son niveau dâintelligence et dâinstruction, dont il est conscient, et il nâaspire pas Ă davantage, mais il ne peut pas vivre tranquille dans les conditions du rĂ©gime. Dâabord il se confronte seulement Ă la difficultĂ© de nourrir sa famille dans ces conditions, mais par la suite aux absurditĂ©s du rĂ©gime aussi, dont quelques-unes sont criminelles. Il fait des efforts sincĂšres pour se conformer Ă ces exigences aberrantes mais finalement sa conscience morale ne le laisse pas contribuer Ă la condamnation sans raison dâun homme. Le film rappelle Ă la critique certains Ă©lĂ©ments du roman picaresque, oĂč un antihĂ©ros cherche Ă survivre au service de plusieurs maĂźtres, en relevant ainsi leur nature vĂ©ritable. Ă travers ses Ă©checs, il dĂ©voile les dĂ©fauts du monde[30].
Selon le critique Gergely BikĂĄcs, le film est en mĂȘme temps satirique, comique et dramatique, mĂȘme tragique. Les sources du comique sont les situations absurdes et les caricatures que constituent les figures du rĂ©gime. Aux yeux du spectateur des annĂ©es 2000, le personnage de PelikĂĄn peut paraĂźtre contestable, puisquâil lui manque la ruse de lâhomme simple, Ă la diffĂ©rence du soldat Ć vejk de Jaroslav HaĆĄek, qui feint seulement la naĂŻvetĂ©. Ainsi, PelikĂĄn peut mener Ă la conclusion que la dictature communiste se basait sur des naĂŻfs comme lui. Le mĂȘme critique pense que la figure le mieux rĂ©alisĂ©e est celle de VirĂĄg, une caricature par son regard, ses paroles, ses gestes, sa soif de pouvoir et en mĂȘme temps sa servilitĂ© envers son supĂ©rieur[19].
Le critique TamĂĄs Koltai regrette que ceux qui nâĂ©taient pas des adultes avant 1990 ne peuvent pas comprendre beaucoup de choses du film : ni la situation gĂ©nĂ©rale, ni ce quâĂ©tait une parodie de procĂšs ni ce quâĂ©tait lâorange hongroise ni les citations cĂ©lĂšbres[27].
Notes et références
- Le titre hongrois est Ă©crit sans accent sur le -u final dans le gĂ©nĂ©rique du film, alors que lâorthographe hongroise correcte est depuis 1954 tanĂș avec un accent.
- Section dâaprĂšs le contenu dâimage et textuel du film non censurĂ©.
- Il sâagit de MĂĄtyĂĄs RĂĄkosi. LâĂ©poque se caractĂ©risait par le culte de sa personnalitĂ©, Ă lâinstar de celui de Joseph Staline Ă la mĂȘme Ă©poque, en Union soviĂ©tique.
- Prénom masculin correspondant à Désiré.
- Une espĂšce de pĂątes, utilisĂ©s dâhabitude en accompagnement, mais sans rien dâautre en prison.
- Nom signifiant « fleur ».
- Nom signifiant « bastion ».
- En hongrois, le tunnel de lâhorreur sâappelle littĂ©ralement « voie ferrĂ©e des esprits », le nom donnĂ© par PelikĂĄn Ă©tant littĂ©ralement « voie ferrĂ©e de lâesprit socialiste ».
- Formule consacré sous les régimes communistes signifiant « suivre la ligne idéologique du parti communiste ».
- Dans les pays communistes, la rĂ©habilitation consistait en lâannulation de la condamnation de prisonniers politiques.
- Romsics 2010, chap. VII. 5. KultĂșra, mƱvelĆdĂ©s, szĂłrakozĂĄs (Culture et divertissement).
- Romsics 2010, chap. V. 1. A pĂĄrtĂĄllam (Le parti-Ătat).
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Sources
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Liens externes
- (en) « âThe Witnessâ. Directed by PĂ©ter BacsĂł 1969. World Premier of the 4K Restored Original Uncensored Version » [« âLe TĂ©moinâ. RĂ©alisĂ© par PĂ©ter BacsĂł en 1969. PremiĂšre mondiale de la version originale non censurĂ©e, restaurĂ©e en 4K »], Hungarian National Film Fund (consultĂ© le )
- (hu) « A tanĂș » [« Le TĂ©moin »] (version intĂ©grale, non censurĂ©e du film)
- Ressources relatives Ă l'audiovisuel :
- Allociné
- CinémathÚque québécoise
- (en) AllMovie
- (en) British Film Institute
- (pl) Filmweb.pl
- (en) IMDb
- (en) LUMIERE
- (de) OFDb
- (en) Rotten Tomatoes
- (mul) The Movie Database