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Hernando de Soto (conquistador)

Hernando de Soto, nĂ© en 1496 ou 1497[1] en EstrĂ©madure, Ă  Barcarrota ou Ă  Jerez de los Caballeros[Note 1] - [2], en Espagne, et mort le dans l’actuel Arkansas, est un conquistador et explorateur espagnol. Encore adolescent, il participe Ă  la conquĂȘte de l’AmĂ©rique centrale auprĂšs du premier gouverneur de Panama, Pedrarias DĂĄvila. Il se joint Ă  Francisco Pizarro au dĂ©but des annĂ©es 1530, lors de ses conquĂȘtes en AmĂ©rique du Sud[3].

Hernando de Soto
Image illustrative de l’article Hernando de Soto (conquistador)

Naissance 1496 ou 1497
Jerez de los Caballeros ou Barcarrota
Drapeau de l'Espagne Monarchie espagnole
DĂ©cĂšs
Village indien de Guachoya, rives du Mississippi
Drapeau de l'Empire espagnol Empire espagnol
Famille Isabel de Bobadilla (Ă©pouse)

DĂ©couvertes principales Floride, GĂ©orgie, Caroline du Sud, Caroline du Nord, Tennessee, Alabama, Mississippi, Arkansas et Texas actuels
Pour le compte de Castille
DerniÚre expédition 1539-1542
Hommage Comté de DeSoto (Floride)
Comté de Hernando (Floride)
Comté de DeSoto (Mississippi)
Hernando (Mississippi)
De Soto (Missouri)
Pont Hernando de Soto entre Memphis et West Memphis
Autres activités Gouverneur de Cuba

En 1539, de Soto entreprend la plus importante des premiĂšres expĂ©ditions coloniales espagnoles. Une vaste entreprise qui lui fait traverser tout le Sud-Est des États-Unis actuels, Ă  la recherche d’or et d’un passage vers la « mer du Sud » qui ouvre la voie vers la Chine[4], poursuivant ainsi les mĂȘmes objectifs que Juan Ponce de LeĂłn en 1513, de Lucas de AyllĂłn en 1526, et de PĂĄnfilo de NarvĂĄez en 1527.

De Soto meurt de fiĂšvre, en 1542, sur la rive occidentale du Mississippi, dans un village amĂ©rindien nommĂ© Guachoya[2] (proche de l’actuel McArthur dans l’Arkansas).

Jeunesse

Hernando de Soto est issu d’une famille d’hidalgos peu fortunĂ©s d’EstrĂ©madure[5], une rĂ©gion alors pauvre et aride que les jeunes gens cherchent Ă  fuir pour aller chercher fortune.

De Soto embarque pour le Nouveau Monde en 1514 avec le premier gouverneur de Panama, Pedrarias DĂĄvila. Ce dernier le fait capitaine car il se montre brave, d’une loyautĂ© sans faille et intelligent lors de la conquĂȘte du Panama[6]. Il est un fameux cavalier, combattant et tacticien, mais, du point de vue actuel, d’une extrĂȘme brutalitĂ©[5] - [2].

Conquistador

El Cuarto del Rescate Ă  Cajamarca (PĂ©rou).

En 1523, il accompagne Francisco HernĂĄndez de CĂłrdoba qui, par ordres de Pedrarias, part Ă  la conquĂȘte et exploration de l’AmĂ©rique centrale et plus particuliĂšrement du Panama, du Nicaragua et du Honduras. De Soto devient regidor de LeĂłn, Nicaragua, en 1528, puis mĂšne une expĂ©dition sur les cĂŽtes de la pĂ©ninsule du YucatĂĄn Ă  la recherche d’un passage entre l’Atlantique et le Pacifique. N’y parvenant pas, et sans moyens suffisants pour poursuivre ses explorations, de Soto, Ă  la mort du gouverneur DĂĄvila, se joint Ă  Francisco Pizarro lors de sa conquĂȘte du PĂ©rou en 1532[5] - [3].

Avec un groupe de cinquante hommes, de Soto suit le chemin inca de Cuzco, capitale de l'Empire inca, et devient le premier EuropĂ©en Ă  se lier d’amitiĂ© avec Atahualpa, le Sapa Inca. La conquĂȘte espagnole du PĂ©rou s’achĂšve par l’exĂ©cution d’Atahualpa par Pizarro, bien que l'Inca ait honorĂ© sa promesse de remplir d’or, pour les Espagnols, El Cuarto del Rescate (« la Salle de la Rançon »).

Retour en Espagne

De Soto rentre en Espagne, en 1536, riche : il a reçu une part importante des prises, lors de la conquĂȘte de l’Empire inca. Il est cĂ©lĂ©brĂ© comme le hĂ©ros de cette conquĂȘte et intĂšgre le prestigieux ordre de Santiago. Il Ă©pouse, en 1537, InĂ©s de Bobadilla, fille de Pedrarias DĂĄvila[5], qui appartient Ă  une famille noble et influente de Castille[7].

De Soto demande Ă  Charles Quint le poste de gouverneur du Guatemala, « avec permission de faire la dĂ©couverte de la mer du Sud », mais il se voit plutĂŽt confier le gouvernorat de Cuba et le titre d'Adelantado de Florida. On attend de lui qu’il colonise le continent nord-amĂ©ricain au nom de l’Espagne et ce, dans les quatre ans. En rĂ©compense, lui-mĂȘme et sa descendance obtiendraient un marquisat sur une large portion du territoire conquis.

FascinĂ© par les rĂ©cits de Cabeza de Vaca, rescapĂ© de l'expĂ©dition de PĂĄnfilo de NarvĂĄez en AmĂ©rique du Nord et qui vient de rentrer en Espagne, de Soto choisit 620 jeunes volontaires espagnols et portugais pour gouverner Cuba et conquĂ©rir l’AmĂ©rique septentrionale.

Le , de Soto et sa nouvelle flotte, composĂ©e de neuf navires, partent de San LĂșcar et arrivent quelques semaines plus tard Ă  Santiago de Cuba oĂč il est rejoint par d’autres navires que lui avait promis Charles Quint quelques mois auparavant[2].

Controverse sur le parcours suivi

Parcours de l'expédition 1539-1543

Le parcours exact de l’expĂ©dition de de Soto est sujet Ă  discussions et controverse parmi les historiens. Le plus communĂ©ment admis est celui dessinĂ© par la commission crĂ©Ă©e par le CongrĂšs des États-Unis et prĂ©sidĂ©e par l’anthropologue John R. Swanton et publiĂ© en 1939 dans The Final Report of the United States De Soto Expedition Commission (en français : « Rapport final de la commission chargĂ©e de l’étude de l’expĂ©dition menĂ©e par de Soto aux États-Unis »)[8]. Alors que la premiĂšre partie du parcours de l’expĂ©dition (jusqu’à la bataille de Mabila en Alabama) n’est, aujourd’hui, l’objet que de quelques discussions de dĂ©tails, la partie suivante est davantage contestĂ©e. Le parcours qu'a empruntĂ© de Soto, tel que dĂ©fini par le CongrĂšs, traverse les actuels États du Mississippi, de l'Arkansas et du Texas. D’autres croient qu'il a empruntĂ© une route plus septentrionale passant par les actuels États du Tennessee, du Kentucky et de l'Indiana depuis Mabila[9].

Des reconstitutions archĂ©ologiques et la tradition orale des peuples autochtones n’ont Ă©tĂ© considĂ©rĂ©es que tardivement. L’une des principales difficultĂ©s est que la plupart de ces lieux historiques ont Ă©tĂ© bĂątis au cours des 450 ans Ă©coulĂ©s. Le seul site clairement associĂ© Ă  l’expĂ©dition menĂ©e par de Soto est le Governor Martin Site dans le village des AmĂ©rindiens Apalaches d’Anhaica, situĂ© Ă  deux kilomĂštres Ă  l’est de l’actuel capitole de l'État de Floride Ă  Tallahassee. Il fut dĂ©couvert par l’archĂ©ologue B. Calvin Jones (en) en [10].

Les derniĂšres thĂ©ories se basent sur les journaux personnels[11] de trois survivants de l’expĂ©dition menĂ©e par de Soto : son secrĂ©taire, Rodrigo Ranjel[12], le reprĂ©sentant du roi, Luys HernĂĄndez de Biedma[6], et un Portugais, dĂ©nommĂ© Chevalier d’Elvas[6]. À eux trois, ils dĂ©crivent la route suivie par de Soto depuis La Havane, d’oĂč ils embarquent, le golfe du Mexique, qu’ils longent, l’Atlantique, dont ils s’approchent lors de leur seconde annĂ©e de voyage, de hautes montagnes qu’ils traversent immĂ©diatement ensuite, et des douzaines d’autres descriptions gĂ©ographiques de leur voyage — dont de larges riviĂšres et des marĂ©cages — Ă  des moments donnĂ©s de leur parcours. Étant donnĂ© que la gĂ©ographie terrestre de cette rĂ©gion n’a pas changĂ© depuis l’époque, ces journaux personnels, analysĂ©s avec les moyens topographiques actuels, permettent de tracer sur une carte, de façon plus prĂ©cise, leur trajet[13]. À ces trois sources issues de participants Ă  l'expĂ©dition, s'ajoute le recueil de tĂ©moignages d'autres membres publiĂ© en 1605 par Inca Garcilaso de la Vega[5].

Année 1539 et début de 1540

Arrivée de Hernando de Soto en Floride[14].
Hernando de Soto Ă  Tampa Bay en 1539[15]

Le , l’expĂ©dition part de La Havane, le , elle longe les cĂŽtes de la Floride. Le , avec les neuf navires et 570 hommes et femmes[16] et 213 chevaux[17], de Soto arrive en un lieu qu’il baptise Espiritu Santo[18] (l’actuel Bradenton (Floride)[19] dans la baie de Tampa aux États-Unis)[20]. À bord, on trouve des prĂȘtres, des artisans, des ingĂ©nieurs, des fermiers, des marchands ; certains avec leur famille, certains venant de Cuba, la plupart d’Europe et, mĂȘme, quelques-uns d’Afrique. Peu d’entre eux ont dĂ©jĂ  voyagĂ© hors d’Espagne, voire hors de leurs villages.

Un jeune Espagnol nommĂ© Juan Ortiz, nĂ© Ă  SĂ©ville, qui Ă©tait venu en Floride Ă  la recherche de l’expĂ©dition de NarvĂĄez, disparue en 1528, et qui avait Ă©tĂ© capturĂ© par une tribu Calusa, est aperçu prĂšs du mouillage de l'expĂ©dition[5]. La fille du chef Hirrihigua de la tribu Calusa supplia qu’on lui sauve la vie, quand son pĂšre avait ordonnĂ© qu’Ortiz soit brulĂ© vif. Ortiz, qui a survĂ©cu aux tortures et Ă  la captivitĂ©, se joint trĂšs volontiers Ă  l’expĂ©dition[21].

Ortiz connaĂźt la rĂ©gion, sert d’interprĂšte et il Ă©tablit une nouvelle mĂ©thode pour guider l’expĂ©dition et communiquer avec les tribus qui parlent l'un ou l'autre des diffĂ©rents dialectes. Des guides des tribus Paracoxi (en) sont recrutĂ©s dans chacune des tribus, tout au long du parcours. Une chaĂźne de communication est Ă©tablie par un guide ayant vĂ©cu Ă  proximitĂ© d’une autre tribu, qui passe l’information Ă  un nouveau guide de cette rĂ©gion et ainsi de suite. Comme Ortiz refuse de se vĂȘtir et de se comporter comme un noble espagnol[6], les officiers de de Soto se mĂ©fient de ses conseils, mais Don Hernando se fie Ă  Ortiz, lui accordant de se vĂȘtir et de vivre comme ses amis des tribus Paracoxi. Un autre guide important de l’expĂ©dition est un jeune garçon indigĂšne, Perico, ou Pedro, originaire de l’actuel État de GĂ©orgie, et qui parle la langue de plusieurs des diffĂ©rentes tribus ou nations. Il est Ă  mĂȘme de communiquer avec Ortiz et il a rejoint l'expĂ©dition en 1540.

De Soto s’engage Ă  l’intĂ©rieur des terres de Floride en direction du nord, explorant la cĂŽte ouest, et il subit quelques embuscades le long de sa route, de la part des autochtones. Son premier campement d’hiver, Ă  la fin d', est Ă  Anhaica, la capitale des Apalaches, le seul lieu oĂč des archĂ©ologues ont trouvĂ© des traces du passage de l'expĂ©dition. Comme la citĂ© est situĂ©e non loin de la mer, de Soto envoie un dĂ©tachement dans cette direction. Ces hommes reviennent en lui indiquant qu’ils ont trouvĂ© les traces d’un campement et des squelettes de chevaux. On prĂ©sume alors que ce sont les traces de l’expĂ©dition de NarvĂĄez, les hommes s'Ă©tant rĂ©fugiĂ©s sur la cĂŽte, mangeant leurs montures, pendant qu’ils construisaient une embarcation susceptible de les ramener Ă  Cuba[22].

Année 1540

Le [23], l'expĂ©dition quitte Anhaica ; ayant entendu parler de mines d’or « en direction du soleil levant », ils partent vers le nord-est Ă  travers les actuels États de GĂ©orgie et de Caroline du Sud, jusqu’à la ville actuelle de Colombia. Ils y sont accueillis par une femme qui gouverne la communautĂ©. Elle leur offre des perles, de la nourriture, des tissus et tout ce que les Espagnols peuvent dĂ©sirer. Cependant, il n’y a pas d’or.

Le [24], de Soto se dirige vers le nord, en direction des monts Appalaches de l’actuelle Caroline du Nord, oĂč il passe un mois, jusqu’au [6], laissant les chevaux paĂźtre sur une herbe grasse[6] et se reposer alors que ses hommes cherchent de l’or. Ils entrent ensuite sur le territoire de l’actuel Tennessee et du nord de la GĂ©orgie, oĂč ils restent jusqu’au [6], puis ils se dirigent vers le sud, en direction du golfe du Mexique, pour y trouver deux navires amenant des provisions depuis La Havane.

Hernando de Soto et ses hommes incendient Mavilla, illustration par Herb Roe.

Le [25], alors qu’ils traversent l’actuel État d'Alabama, ils se retrouvent devant une ville sommairement fortifiĂ©e, nommĂ©e Mavilla ou Mauvila[26] (sans doute proche de l’actuelle ville de Mobile). Un Indien converti les avise que la citĂ© est pleine de guerriers et d’armes. L’un de ses capitaines propose Ă  de Soto d’établir un campement Ă  l’extĂ©rieur de la citĂ©, mais de Soto refuse, il veut loger Ă  Mavilla. La tribu Choctaw de Mavilla, commandĂ©e par le chef Tascalusa, a prĂ©parĂ© une embuscade Ă  l’intĂ©rieur de l’enceinte de la ville. Les Espagnols sont piĂ©gĂ©s et doivent se battre avec ardeur pour s’échapper avant de parvenir Ă  rĂ©duire la citĂ© en cendres. La bataille dure neuf heures, dix-huit Espagnols sont tuĂ©s[6], cent cinquante des survivants sont blessĂ©s, dont vingt mourront de leurs blessures dans les semaines qui suivent, douze chevaux ont Ă©tĂ© tuĂ©s et soixante-dix blessĂ©s[6]. Parmi les guerriers choctaw, on compte Ă  peu prĂšs deux mille cinq cents morts[6] ou mille cent selon d'autres estimations[27].

Depuis son entrĂ©e en Floride, l'expĂ©dition a perdu 102 hommes, en plus d'une grande partie de ses biens et de ses chevaux lors de la bataille de Mavilla[6]. Ces Espagnols sont blessĂ©s, malades, entourĂ©s d’ennemis et Ă  court d’équipement. Craignant que cette situation ne soit connue en Espagne, si ses hommes atteignent les navires qui l’attendent dans la baie de Mobile, le [28], de Soto dĂ©cide que tous quittent Mavilla et il les conduit plus au nord, dans l’actuel État du Tennessee, oĂč ils passeront l’hiver[2].

Année 1541

En repartant vers le nord, l’expĂ©dition rencontre la tribu Chickasaw. De Soto leur demande 200 hommes comme porteurs. Ils refusent et, le [6], ils attaquent le camp espagnol pendant la nuit. Les Espagnols y perdent onze hommes, quinze chevaux[6] et la plus grande partie de leur Ă©quipement[5]. Selon les chroniqueurs qui l’accompagnent, Ă  ce moment, l’expĂ©dition aurait pu ĂȘtre anĂ©antie. Les Chickasaws, sans doute impressionnĂ©s par leur propre succĂšs, la laissent cependant partir. Le , aprĂšs avoir soignĂ© les blessĂ©s et rĂ©parĂ© quelque peu leur Ă©quipement, ils partent vers l’ouest.

DĂ©couverte du Mississippi
Le , de Soto dĂ©couvre le Mississippi (1847), toile de William Henry Powell (1824 – 1879).

Le , de Soto et sa troupe atteignent une riviĂšre large d’une demi-lieue[29], boueuse et dont le courant violent entraĂźne continuellement des troncs d’arbres[30]. Cette immense riviĂšre est trĂšs poissonneuse, pleine d’espĂšces inconnues en Espagne et les Espagnols la nomment alors Rio Grande ou Rio de Espiritu Santo. Ils viennent en fait de dĂ©couvrir le Mississippi. Il n’est pas certain qu’ils soient les premiers EuropĂ©ens Ă  dĂ©couvrir l'Old Man River, mais ils sont les premiers Ă  rapporter et Ă  documenter le fait.

De Soto n’est que peu intĂ©ressĂ© par cette dĂ©couverte, il y voit plutĂŽt un obstacle Ă  sa mission. Il a 400 hommes Ă  faire traverser sur cette immense riviĂšre dont les berges sont peuplĂ©es d’indigĂšnes hostiles. AprĂšs un mois consacrĂ© Ă  la fabrication de quatre barges[6], les Espagnols traversent enfin le Mississippi et continuent leur route en direction de l’ouest vers les actuels États d’Arkansas, d'Oklahoma et du Texas. Ils passent l’hiver Ă  Autiamque[6], sur les rives de la riviĂšre Arkansas. L’expĂ©dition, depuis son dĂ©part, a dĂ©jĂ  perdu 250 hommes et 150 chevaux[6].

AprĂšs un hiver rigoureux, l’expĂ©dition lĂšve le camp le [6]. Leur fidĂšle guide Juan Ortiz est mort durant l’hiver[5]. Il leur est de plus en plus difficile de trouver leur route, d’obtenir de la nourriture et de communiquer avec les indigĂšnes. L’expĂ©dition va jusqu’à la riviĂšre Caddo, oĂč elle se trouve confrontĂ©e Ă  la tribu des Tula, dont les Espagnols diront que ses guerriers sont les plus talentueux et les plus dangereux qu’ils aient rencontrĂ©s. L’affrontement se produit dans la rĂ©gion de l’actuel Caddo Gap (en Arkansas) (un monument y est d’ailleurs aujourd'hui Ă©rigĂ©). Les Espagnols dĂ©cident alors de s’en retourner vers le Mississippi[2].

Mort de Hernando de Soto
Portrait de Hernando de Soto[31].

Le , l’expĂ©dition arrive sur la rive ouest du Mississippi, dans le village indien de Guachoya (proche de l’actuel McArthur en Arkansas)[32]. De Soto envoie des dĂ©tachements explorer les alentours et ramener des vivres, mais il est bientĂŽt pris de fiĂšvres. Le , il rĂ©unit ses capitaines et, afin d’éviter toute division aprĂšs sa mort qu’il sent proche, il leur fait prĂȘter serment Ă  son capitaine gĂ©nĂ©ral, Luis de Mosoco de Alvarado[6]. Il meurt le lendemain, [6]. Comme de Soto a propagĂ© parmi les indigĂšnes la rumeur voulant que les chrĂ©tiens soient immortels (afin d’obtenir leur allĂ©geance sans combat), ses hommes taisent sa mort. Ils enveloppent son corps dans des draps lestĂ©s et l’immergent nuitamment au milieu du Mississippi (les Indiens cependant se rendront compte de la ruse)[32] - [Note 2].

Retour de l’expĂ©dition vers Mexico

Pendant trois annĂ©es, l’expĂ©dition a explorĂ© La Florida sans y trouver les trĂ©sors escomptĂ©s ni mĂȘme un site hospitalier afin d’y Ă©tablir une colonie. Elle a perdu la moitiĂ© de ses hommes, la plupart de ses chevaux (qui apportaient aux Espagnols un grand avantage militaire), les survivants ne sont plus vĂȘtus que de peaux de bĂȘtes, beaucoup sont blessĂ©s et leur santĂ© est atteinte. Donc, d’un large consensus, il est dĂ©cidĂ© de mettre un terme Ă  l’expĂ©dition et de trouver un chemin qui les ramĂšnera chez eux, soit en descendant le Mississippi, soit par voie de terre Ă  travers le Texas jusqu’en Nouvelle-Espagne[6].

Ils dĂ©cident que la construction de bateaux serait trop longue et la navigation dans le golfe du Mexique trop pĂ©rilleuse car ils n’ont avec eux aucun marin ni instrument de navigation. Aussi prennent-ils la route vers le sud-ouest et se retrouvent-ils dans une contrĂ©e aride, faisant partie de l’actuel Texas. Les indigĂšnes y vivent dispersĂ©s, en quĂȘte de nourriture, ce qui cause un sĂ©rieux problĂšme Ă  l’expĂ©dition, car il n’y a aucun village Ă  piller, aucune nourriture suffisante et leur troupe est trop importante pour vivre des maigres ressources de ce lieu. Ils se voient donc contraints de faire marche arriĂšre vers les rĂ©gions plus civilisĂ©es le long du Mississippi, oĂč ils commencent Ă  construire des embarcations[2].

Ils utilisent tout le fer qu’ils possĂšdent, y compris les mors des chevaux et les chaĂźnes de leurs esclaves, pour fabriquer les clous nĂ©cessaires Ă  la construction des bateaux. L’hiver passe, puis le printemps, mais en juillet ils sont prĂȘts Ă  descendre le Mississippi jusqu’à la cĂŽte. Le pĂ©riple leur prend deux semaines, ils rencontrent sur leur chemin des tribus hostiles, il n’est pas rare qu’ils soient poursuivis par des canoĂ«s et qu’ils reçoivent des flĂšches — les Espagnols n’ont alors plus aucune arme offensive efficace depuis leurs bateaux, leurs arbalĂštes ne fonctionnent plus depuis dĂ©jĂ  longtemps, ils ne peuvent compter que sur la protection de leurs armures et de leur matelas pour arrĂȘter les flĂšches. Environ onze d’entre eux sont tuĂ©s sur ce trajet et plusieurs autres y sont blessĂ©s[6].

Parvenus Ă  l’embouchure du Mississippi, les bateaux voguent prĂšs des cĂŽtes du golfe du Mexique, dirigĂ©s vers le sud et vers l’ouest. AprĂšs 50 jours de navigation, ils atteignent enfin le fleuve RĂ­o PĂĄnuco puis la ville espagnole de PĂĄnuco. Ils s'y reposent durant un mois, durant lequel de nombreux membres, rĂ©flĂ©chissant Ă  ce qu’ils ont accompli, se montrent mĂ©contents, prĂ©tendent qu’ils ont quittĂ© trop tĂŽt La Florida sans y avoir fondĂ© une colonie, ce qui mĂšnera Ă  des bagarres et mĂȘme Ă  quelques morts. Cependant, aprĂšs leur arrivĂ©e Ă  Mexico, le vice-roi don Antonio de Mendoza offre de conduire une nouvelle expĂ©dition en La Florida, mais peu se portent alors volontaires[2].

Des 700 expĂ©ditionnaires partis avec de Soto, seuls un peu plus de 300 survĂ©curent qui, la plupart, resteront dans le Nouveau Monde, s’installant au Mexique, au PĂ©rou, Ă  Cuba et dans d’autres colonies espagnoles[6].

Conséquences

Monument Barcarrota, en Espagne (province de Badajoz).

Le périple du conquistador de Soto en Floride, de son point de vue et de celui de ses hommes, est un funeste désastre[5]. Ils ne rapportent ni or ni richesses et ils ne fondent aucune colonie. La réputation de cette expédition particuliÚre, à l'époque, est plus proche de celle d'un Don Quichotte que de celle de Cortés. Néanmoins, elle a une série de conséquences importantes en Amérique du Nord[6].

D’une part, l’expĂ©dition laisse sa marque sur les lieux de son passage. Quelques chevaux qui se sont Ă©chappĂ©s ou qui ont Ă©tĂ© volĂ©s contribuent Ă  l’établissement des premiĂšres populations de mustangs dans l’ouest de l’AmĂ©rique du Nord[5]. Et les porcs qu’elle y a amenĂ©s prolifĂšrent au sud. De Soto et sa troupe ont provoquĂ© des rĂ©actions agressives et hostiles, qui prĂ©valent ensuite entre les IndigĂšnes et les EuropĂ©ens. Il est arrivĂ© Ă  l’expĂ©dition de rencontrer des tribus hostiles, mais les Espagnols ont Ă©tĂ© plus souvent encore Ă  l'origine des combats.

Plus dĂ©vastatrices que de sanglantes batailles sont les germes de maladies que les expĂ©ditionnaires et plus particuliĂšrement les porcs emportĂ©s apportent avec eux, sans d'abord le savoir : des germes qui n'existaient pas auparavant en AmĂ©rique, venant d'Europe, plus peuplĂ©e, et contre lesquels les EuropĂ©ens sont immunisĂ©s de façon naturelle (par sĂ©lection naturelle sĂ©culaire), contrairement aux autochtones d'AmĂ©rique Ă  la diversitĂ© gĂ©nĂ©tique plus pauvre et de nature peu rĂ©sistante aux Ă©pidĂ©mies d'origine virale. Certaines rĂ©gions que les expĂ©ditionnaires ont traversĂ©es en deviennent ainsi dĂ©peuplĂ©es. Nombre d’indigĂšnes fuient les rĂ©gions, alors traditionnellement peuplĂ©es, frappĂ©es par les maladies, pour se rĂ©fugier sur les collines ou mĂȘme dans les marais avoisinants. La structure sociale de ces populations, Ă  cette Ă©poque, change fondamentalement. Ceci n'est pas spĂ©cifique Ă  l'expĂ©dition qu'a menĂ©e de Soto, mais caractĂ©rise les effets Ă©pidĂ©miques possibles des tout premiers contacts entre membres de populations jusqu'alors totalement isolĂ©es l'une de l'autre, d'un isolement tant gĂ©nĂ©tique que gĂ©ographique[5] - [2].

D’autre part, les notes de l’expĂ©dition contribuent pour beaucoup Ă  l’amĂ©lioration de la connaissance gĂ©ographique, biologique et ethnique de la rĂ©gion par les EuropĂ©ens. Leurs descriptions des IndigĂšnes d’AmĂ©rique du Nord sont les premiĂšres et uniques sources de connaissance des nations prĂ©colombiennes, comme celles des Creeks, des SĂ©minoles, des Cherokees et de beaucoup d’autres[6].

L’expĂ©dition amĂšne Ă©galement la Couronne d’Espagne Ă  reconsidĂ©rer son attitude vis-Ă -vis de ses colonies au nord du Mexique. Elle revendique dĂšs lors de larges territoires d’AmĂ©rique du Nord pour les Espagnols, crĂ©ant des missions principalement en Floride et sur la cĂŽte du Pacifique[2].

Hernando de Soto dans la poésie

Dans le recueil de poésie Les Trophées (1893) de José Maria de Hérédia, l'aventure de Hernando de Soto est narrée dans ce sonnet :

À l'ombre de la voĂ»te en fleur des catalpas
Et des tulipiers noirs qu'étoile un blanc pétale,
Il ne repose point dans la terre fatale ;
La Floride conquise a manqué sous ses pas.

Un vil tombeau messied à de pareils trépas.
Linceul du Conquérant de l'Inde Occidentale,
Tout le Meschacébé par-dessus lui s'étale.
Le Peau Rouge et l'ours gris ne le troubleront pas.

Il dort au lit profond creusé par les eaux vierges.
Qu'importe un monument funéraire, des cierges,
Le psaume et la chapelle ardente et l'ex-voto ?

Puisque le vent du Nord, parmi les cypriĂšres,
Pleure et chante Ă  jamais d'Ă©ternelles priĂšres
Sur le Grand Fleuve oĂč gĂźt Hernando de Soto.

— JosĂ© Maria de HĂ©rĂ©dia, Les TrophĂ©es, Le Tombeau du ConquĂ©rant

Notes et références

Notes

  1. Les sources sont contradictoires. Dans son testament, de Soto exprima le souhait que ses restes soient inhumĂ©s avec ceux de sa mĂšre, en la chapelle la ConcepciĂłn de la paroisse de San Miguel Ă  Jerez de los Caballeros, en Espagne. Ce document semble indiquer qu’il s’agit en fait de sa ville natale.
  2. Deux localités revendiquent la sépulture du conquistador de Soto, dans leur lac respectif : Lake Providence (Louisiane) et Lake Village (Arkansas) dans le lac Chicot.

Références

  1. (en) « Hernando de Soto », EncyclopÊdia Britannica, édition en ligne.
  2. Hudson 1997.
  3. Duncan 1997.
  4. Gallagher 2000.
  5. Jean-Michel Sallmann, L'Amérique du Nord : de Bluefish à Sitting Bull, Belin, coll. « Mondes anciens », (ISBN 2410015867), chap. 5 (« Les difficultés de l'Espagne en Amérique du Nord »), p. 99-113.
  6. Hakluyt 1609.
  7. Vega 2003.
  8. Swanton 1939.
  9. (en) « Spanish Conquest of Native America », FloridaHistory.com (consulté le ).
  10. (en) « Hernando de Soto State Archaeological Site », Tallahassee Trust for Historic Preservation, Inc. (consulté le ).
  11. Clayton, Knight et Moore 1993.
  12. Oviedo y Valdés 2003.
  13. (en) « Hernando De Soto's Trail according to the National Park Service », FloridaHistory.com (consulté le ).
  14. Landing of De Soto in Florida, 1855 (OCLC 69979490).
  15. Smillie et Eastman 1853.
  16. (en + es) « Hernando de Soto », The Library of Congress (consultĂ© le ).
  17. Hakluyt 1609, p. 122.
  18. Vue satellite du lieu de dĂ©barquement de l’expĂ©dition.
  19. (en) « De Soto National Memorial », National Park Service (consulté le ).
  20. (es) Garcilaso de la Vega. Madrid. 1723., « La Florida del Inca. Historia del adelantado, Hernando de Soto
 », The Library of Congress (ouvrage en ligne) (consultĂ© le ).
  21. Hakluyt 1609, p. 125.
  22. Hakluyt 1609, p. 135.
  23. Hakluyt 1609, p. 136.
  24. Hakluyt 1609, p. 145.
  25. Hakluyt 1609, p. 156.
  26. Curren 1992.
  27. Pictet 1988.
  28. Hakluyt 1609, p. 160.
  29. La legua castellana ou « lieue de Castille » mesurait 4,19 km.
  30. Hakluyt 1609, p. 167.
  31. Buttre 1877.
  32. Hudson 1997, p. 349-52, « Death of de Soto ».

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

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Liens externes

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