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Guillaume Dustan

William BaranĂšs, plus connu sous son nom de plume Guillaume Dustan, nĂ© le Ă  Paris et mort dans la mĂȘme ville le [1] - [2], est un Ă©crivain, Ă©diteur et magistrat administratif français.

Guillaume Dustan
Guillaume Dustan en 2005.
Fonctions
Conseiller (d)
Tribunal administratif de Lille (d)
-
Conseiller (d)
Cour administrative d'appel de Douai
-
Conseiller (d)
Tribunal administratif de la Polynésie française (d)
-
Autres informations
Genre artistique
Distinction
Prix de Flore 1999
Prix Sade 2013 (posthume)
Archives conservées par
Vue de la sépulture.

Conseiller de tribunal administratif, il est en parallĂšle l'auteur d'une Ɠuvre littĂ©raire, pour l'essentiel autobiographique, en grande partie centrĂ©e sur les pratiques et les problĂ©matiques concernant l'homosexualitĂ©.

Biographie

L'Ă©narque

Fils d'une architecte d'intĂ©rieur et d'un psychiatre[3], Guillaume Dustan obtient les premiers prix de français et d'anglais au concours gĂ©nĂ©ral. ÉlĂšve au lycĂ©e Henri-IV, oĂč il effectue sa khĂągne, il dĂ©cide de ne pas passer le concours d'entrĂ©e de l’École normale supĂ©rieure[4]. Il suit alors le parcours classique Sciences Po-ENA (promotion 1991 Victor Hugo), avant de se lancer dans une carriĂšre juridique. Juge administratif, il dirige, en 1994 et 1995, avec Marie-Anne Frison-Roche, La Justice : l'obligation impossible, pour la collection « Valeurs » des Ă©ditions Autrement ainsi que De l'injuste au juste, aux Ă©ditions Dalloz. Il est conseiller au tribunal administratif de Versailles et rĂ©dige des articles pour les Ă©ditions Dalloz[4].

Vie sexuelle

Il expérimente la « drague » sur Minitel rose, les backrooms et les rapports avec des partenaires multiples. Il connaßt ses premiÚres expériences avec la drogue. En 1990, il apprend sa séropositivité[4] - [5].

Écriture et mĂ©diatisation

Le nom de plume « Guillaume Dustan » a été choisi en 1994 en référence à saint Dunstan de Cantorbéry dont la biographie avait été écrite dans La Sainte Lettre, revue confidentielle à laquelle participait William BaranÚs (Guillaume étant la traduction de William en français)[6].

En 1994, Ă  Paris, il rĂ©dige son premier roman, Dans ma chambre, qu'il corrige sur Ă©preuves Ă  Tahiti oĂč, entre-temps, il avait demandĂ© son affectation en tant que magistrat. Dans ma chambre est publiĂ© aux Ă©ditions POL en 1996. Judith Perrignon, journaliste Ă  LibĂ©ration, Ă©crit : « [Guillaume Dustan] laisse tomber la dĂ©froque de l'Ă©lite bourgeoise, troque ses prestigieux diplĂŽmes contre les tares d'une Ă©poque puritaine : il est pĂ©dĂ©, sĂ©ropositif, droguĂ© et le fait savoir[4]. »

En 1997, il quitte Tahiti, se met en disponibilitĂ© de son administration. Revenu en mĂ©tropole, il rĂ©dige un second rĂ©cit, Je sors ce soir, publiĂ© chez le mĂȘme Ă©diteur en 1997 ; c'est dans ce livre que le mot "sida" apparaĂźt pour la premiĂšre fois sous la plume de Guillaume Dustan. Jusque-lĂ  anonyme et cachĂ© derriĂšre son nom de plume, il commence alors Ă  apparaĂźtre Ă  visage dĂ©couvert dans les mĂ©dias, tout en Ă©vitant encore de rĂ©vĂ©ler son vĂ©ritable nom[7]. En 1998, toujours chez POL, il publie Plus fort que moi[8], dernier tome de ce qu'il considĂ©rait comme une trilogie « autopornographique ». La mĂȘme annĂ©e, il collabore au dixiĂšme numĂ©ro de la revue Écritures, consacrĂ©e Ă  Renaud Camus[9].

Il crĂ©e alors aux Éditions Balland la collection « Le Rayon gay », dans laquelle il publie, en 1999, pour la premiĂšre fois en France, Les Monologues du vagin. « Le Rayon gay » deviendra par la suite « Le Rayon ». Ce sera la premiĂšre collection entiĂšrement LGBT Ă©ditĂ©e en France[10].

Une cinquantaine de titres y seront publiés jusqu'à sa fermeture en 2003[11], dont trois titres de Guillaume Dustan : Nicolas Pages (1999, titre qui fait référence à l'écrivain et plasticien Nicolas Pages), Génie Divin (2001) et LXiR ou Dédramatison La Vi CotidiÚn (2002).

Il reçoit le prix de Flore, en 1999, pour son roman Nicolas Pages[12]. La mĂȘme annĂ©e, de Ă  , il dirige le magazine gay hebdo gratuit e-m@le rebaptisĂ© CQFG pour le compte de radio FG sur proposition d'Henri Maurel[13]. Pink TV lui consacre un reportage : « In bed with Guillaume Dustan[14] ».

Il fait quelques apparitions au cinĂ©ma[15], en 2001, dans le court-mĂ©trage Les ÉlĂ©phants de la planĂšte Mars, de Philippe Barassat, et en 2003, dans Process, de C.S. Leigh.

En 2001, il intĂšgre le jury du Prix Sade. La mĂȘme annĂ©e, il se prĂ©sente aux Ă©lections municipales, dans le 4e arrondissement de Paris[16].

Entre 2000 et 2004, il réalise une vingtaine de vidéos expérimentales[17], non commercialisées, et dont la distribution (restreinte) s'organisera aprÚs sa mort.

En 2003, il participe à la revue littéraire Bordel, dirigée par Frédéric Beigbeder et Stéphane Millon[18].

Ses apparitions mĂ©diatiques sont souvent remarquĂ©es : Guillaume Dustan se prĂ©sente sur les plateaux avec une perruque verte ou argentĂ©e, notamment Ă  deux reprises chez Thierry Ardisson, dans Tout le monde en parle[19], militant pour une « cohabitation pacifiste de l'homme et de la femme au sein d'un mĂȘme corps ».

GĂ©nie divin

GĂ©nie divin est un livre de Guillaume Dustan, paru chez Balland, dans la collection Le Rayon en 2001, puis dans le deuxiĂšme volume de ses Ɠuvres complĂštes chez P.O.L en 2021. Il y thĂ©orise la pratique du barebacking[20] comme dĂ©fense du libre arbitre et les politiques queer en tant que rĂ©sistances au capitalisme[21].

Polémique sur le bareback

La mĂ©diatisation de Guillaume Dustan s'accroĂźt avec la polĂ©mique sur le bareback. Act Up-Paris s'oppose Ă  lui parce qu’il dĂ©fend les relations sexuelles non protĂ©gĂ©es entre adultes consentants (barebacking). Cela lui vaut d'ĂȘtre, Ă  partir de 2001, attaquĂ© violemment par Didier Lestrade, membre historique d’Act Up-Paris qui juge les positions de Dustan criminelles[22]. Mais aprĂšs la mort de Dustan, il Ă©crit[23] : « Pendant longtemps, j'ai cru qu'appartenir Ă  Act Up me dotait d'un outil ou d'une arme pour combattre Guillaume Dustan et Erik RĂ©mĂšs. En fait, j'ai dĂ©pensĂ© plus d'Ă©nergie Ă  me battre contre mes amis que contre mes ennemis[24] ».

Dustan avait affirmĂ©, chez Thierry Ardisson : « Moi, j’pense qu’on est responsable pour soi, pas pour les autres. Parce qu’à partir du moment oĂč on est responsable pour les autres, on s’occupe plus de soi, et il se passe plus rien, et voilĂ  ». DerriĂšre ces mots qui paraissent anodins, il y a un enjeu politique, et personne ne s’y est trompĂ©. « Il n’était pas question de laisser Dustan lutter sur un terrain politique », affirme Wilfried SalomĂ© dans Try to unDUSTANd[25] : « Les perruques chez Ardisson, ça passait. Les provocations culs, aussi. Écrivain gay, ok. Écrivain polĂ©mique, ok. Écrivain politique, non. » SalomĂ© poursuit : « Pour le faire taire, on lui a donc enlevĂ© son public. En crĂ©ant de toutes piĂšces une polĂ©mique sur le bareback. L'affaire a Ă©tĂ© rapidement pliĂ©e. Guillaume Dustan, sĂ©ropositif, Ă©tait un assassin, simplement parce qu'il prĂ©tendait refuser de baiser avec Kpote. »

Thomas Dreneau, dans LibĂ©ration, Ă©crit quant Ă  lui : « Étant porteur du virus du sida, Dustan ne veut absolument pas contaminer d’autres personnes ; il souhaite vivre sa sexualitĂ© sans cette culpabilitĂ© d’ĂȘtre un assassin en puissance, un danger pour les autres qu’il faut donc contrĂŽler, contraindre et rĂ©primer. En consĂ©quence, l’auteur rĂ©habilite moralement l’individualisme en tant que seul moyen pour l’homme de vivre heureux. L’altruisme dĂ©fendu par des philosophes comme Arthur Schopenhauer et Moritz Schlick, est, pour Dustan, non dĂ©pourvu de cette tentation de dominer l’autre, de dire ce qui est bien pour lui ».

Mais cela n’a pas suffi. « Dans le consensus mou en train de crĂ©er une nouvelle police du langage, Guillaume Dustan tient une position insupportable », Ă©crivent les auteurs de Une perruque et un stylo. LĂ©gender Dustan[26]. Wilfried SalomĂ© continue : « AprĂšs Nicolas Pages, GĂ©nie Divin et LXiR, Guillaume est devenu un Ă©crivain polĂ©mique. Un Ă©crivain politique et importun. S'Ă©tait-il imaginĂ© plus fort qu'il ne l'Ă©tait ? En tout cas Paris fut plus fort que lui ».

Retrait du milieu culturel

AprÚs la fin de sa collaboration avec Balland, Guillaume Dustan réintÚgre la magistrature. Nommé à Douai, il continue de publier mais se tient désormais éloigné du milieu littéraire et des médias[27] - [28] - [29]. Dans un texte paru dans Technikart, il évoque une vie « d'un ennui mortel[30] ».

En 2004, la revue Écritures lui consacre un numĂ©ro spĂ©cial intitulĂ© « Danger Dustan / Engagement », constituĂ© de textes inĂ©dits de l'auteur et d'articles critiques[31] - [32]. La mĂȘme annĂ©e, il publie Dernier roman chez Flammarion et, en 2005, Premier essai. Ces deux textes sont ignorĂ©s par les critiques littĂ©raires qui les jugent « illisibles »[27].

DécÚs et postérité

Immeuble oĂč meurt Guillaume Dustan.

Guillaume Dustan meurt Ă  39 ans, en 2005, au 18 rue des Feuillantines dans le 5e arrondissement de Paris, d'une intoxication mĂ©dicamenteuse involontaire[2] liĂ©e Ă  une consommation excessive de mĂ©dicaments pour contrer les effets secondaires du traitement anti-VIH et d'antidĂ©presseurs[33] ayant entraĂźnĂ© une embolie pulmonaire[34]. Il est enterrĂ© au cimetiĂšre du Montparnasse (division 29, petit cimetiĂšre). Comme Ă©pitaphe, sur sa tombe, on peut lire :

« J'ai toujours Ă©tĂ© pour tout ĂȘtre[35]. »

Il a Ă©tĂ© dit aprĂšs sa mort : « Écrivain maudit, sans penser Ă  l’étymologie de “maudit”. Celui qui dit mal, toujours
 »[36].

Des personnalitĂ©s lui rendent hommage. Thomas Clerc, universitaire, publie dans le journal LibĂ©ration un article intitulĂ© « Mon cƓur est mort (pour Guillaume Dustan) » dans lequel il dĂ©clare que « Guillaume Dustan Ă©tait l'un des Ă©crivains les plus forts de la littĂ©rature contemporaine, celle qui prend des risques parce qu'elle n'est pas formatĂ©e. » Il voit en Dustan un Ă©crivain qui « a posĂ© quelques jalons dĂ©cisifs pour saisir l'esprit d'une Ă©poque et qui restera donc dans les tĂȘtes comme les tubes qu'il aimait tant. Il a liĂ© le monde et la littĂ©rature parce qu'il ne faisait pas de diffĂ©rence entre l'art et la vie. Avec une sorte d'innocence superbe, il Ă©crivait pour aujourd'hui. Il est mort, mais ses textes dansent »[37].

Des Ă©crivains rĂ©agissent Ă©galement Ă  sa disparition. Michel Houellebecq Ă©crit : « la mort de Guillaume Dustan m'a beaucoup affectĂ© ; c'Ă©tait un ĂȘtre lumineux, extrĂȘme, il Ă©tait important par sa prĂ©sence autant que par ses livres[38]. » Erik RĂ©mĂšs rend quant Ă  lui hommage Ă  un « drĂŽle de personnage Ă  la fois terriblement attachant et, en mĂȘme temps, dĂ©testable. Un garçon trĂšs intelligent, violent, possessif, excessif, manipulateur. Un garçon de 40 ans qui paraissait encore parfois traverser une crise d’adolescent. Avec ses envies d’ĂȘtre aimĂ© et son cĂŽtĂ© insupportable. Enfant gĂątĂ©, bourgeois, puant. Provocateur, barebacker, cynique, libre-penseur. Un garçon qui n’avait pas sa langue dans sa poche et qui parlait et Ă©crivait, quitte Ă  choquer, rentrer dans le lard des conventions[39]. »

Dans une lettre posthume adressée à Dustan, Virginie Despentes écrit :

« C'est toi le meilleur d'entre nous. Et de loin. Tu ne ressemblais pas à un écrivain français. Tu étais beau, dangereux, drogué, séducteur, ta voix était à tomber par terre de sexy. Une drÎle de grimace remontait ta bouche d'un cÎté quand tu souriais et on ne savait pas trop si tu étais doux ou teigneux, fort ou désespéré. Tu étais excitant. Tes romans te ressemblent[40]. »

En 2007, la Fémis projette Enjoy (back to Ibiza), un film réalisé par Guillaume Dustan[41].

En 2008 parait en France le livre Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique de Paul B. Preciado qui rend un hommage posthume Ă  Guillaume Dustan, ami proche de l'auteur[42].

En 2012, des textes inĂ©dits de Guillaume Dustan paraissent dans la revue Monstre (no 4). La mĂȘme annĂ©e, POL Éditeur annonce la publication de ses ƒuvres complĂštes (en trois tomes) accompagnĂ©es d'inĂ©dits[43], dans une Ă©dition dirigĂ©e par Thomas Clerc. Le premier tome, ƒuvres I, paraĂźt en [44]. La mĂȘme annĂ©e, le jury du prix Sade lui dĂ©cerne un prix spĂ©cial, Ă  titre posthume[45].

En 2021, le deuxiĂšme des trois tomes de ses Ɠuvres paraĂźt aux Ă©ditions P.O.L.

Le samedi 2 octobre 2021, le Prix Sade cĂ©lĂšbre ses vingt ans ; lors de la remise du prix, un hommage est rendu Ă  Guillaume Dustan (jurĂ© du Prix Sade) Ă  l’occasion de la parution du volume ƒuvres II (P.O.L.)[46].

Guillaume Dustan est mentionnĂ© dans l'exposition EXPOSÉ - ES au Palais de TOKYO du 17 fĂ©vrier au 14 mai 2023[47].

Biographies

En 2018, Raffaël Enault publie une biographie de Guillaume Dustan, Dustan Superstar[48].

Colloques universitaires

En 2019, un colloque sur Guillaume Dustan, organisé par Raffaël Enault, se tient à Paris[49] avec la participation entre autres de Marie-Anne Frison-Roche, Julie Wolkenstein et Philippe Di Folco.

Le colloque, Les corps de Guillaume Dustan, organisé par Flavia Bujor, Thibaut Casagrande et Geoffrey Gilbert, se tient les 22 et 23 juin 2023, à Paris[50] avec la participation entre autres de Thomas Clerc et Nick Rees-Roberts (en).

  • RaffaĂ«l Enault lors du colloque de 2019.
    Raffaël Enault lors du colloque de 2019.
  • Discussion entre Philippe Joanny, Flavia Bujor et Thibaut Casagrande, lors du colloque de 2023.
    Discussion entre Philippe Joanny, Flavia Bujor et Thibaut Casagrande, lors du colloque de 2023.

Prix

Écriture

Influences et style

Guillaume Dustan reconnaßt plusieurs influences. Son style s'inspire incontestablement de la littérature anglo-saxonne, qu'il préfÚre au classicisme français, qu'il qualifie de « bourgeois ». Il écrit :

« Merde à la dictature du Vrai Roman, dans sa version de droite (classique avec un héros jeune et beau) ou de gauche (expérimental avec des chaises). La littérature bourgeoise française est tellement calquée sur les valeurs aristocratiques de distinction qu'elle a le plus grand mal à créer une littérature moderne[51]. »

Ses trois premiers romans (Dans ma Chambre, Je sors ce soir, Plus fort que moi) apparaissent dĂšs lors comme une « adaptation française » du style anglo-saxon, plus souple, plus oral, moins acadĂ©mique, plus dĂ©construit, plus subversif, avec tout ce que cela sous-tend en termes d'Ă©clatement de la phrase, de libertĂ©s dans la ponctuation, la syntaxe et mĂȘme les thĂ©matiques abordĂ©es (le corps, le sexe, la drogue, l'exploration du moi). Les influences les plus Ă©videntes sont incontestablement celles de Bret Easton Ellis et Dennis Cooper dont les Ɠuvres sont basĂ©es sur la description clinique des faits (notamment sexuels), ce que note Dustan :

« Bret Easton Ellis m'avait montré la voie avec son minimalisme stylistique et son absence de « psychologie » au sens traditionnel du terme (l'intériorité des personnages n'est montrée qu'à travers le récit de leur action), pour son esthétique filmique, et bien sûr pour le trash-gore inédit[52]. »

Anne-Marie Vanhove souligne aussi sa proximité avec Andy Warhol[53].

Guillaume Dustan avoue son admiration sans limite pour Marguerite Duras, dont il salue la capacitĂ© Ă  Ă©crire avec du « mauvais français », Ă  s'ĂȘtre libĂ©rĂ©e, Ă  utiliser un style oral, donnant ainsi l'impression que tout le monde peut ĂȘtre Ă©crivain. Il apprĂ©cie aussi en elle la figure militante, capable de prendre la plume Ă  un moment oĂč ĂȘtre une femme Ă©crivain et artiste Ă©tait loin d'ĂȘtre courant (et acceptĂ©). Il note d'ailleurs que « la littĂ©rature moderne (c'est-Ă -dire ayant Ă©chappĂ© au patriarcat autoritariste) en France date de Duras »[54], et cite abondamment La Vie matĂ©rielle, livre d'entretiens de cette derniĂšre, pour parler de sa « culture littĂ©raire » dans Nicolas Pages. Il Ă©voque aussi son goĂ»t pour les Ɠuvres d'HervĂ© Guibert, dont il admire la mise en scĂšne « gore-morbide » de soi et la capacitĂ© Ă  transcrire (au-delĂ  du pur acte sexuel) des relations amoureuses homosexuelles, et de Renaud Camus, dont il souligne « l'allĂ©gresse qui se dĂ©gageait encore Ă  l'Ă©poque [de ses Ă©crits pornographiques][55] ». Il publie d'ailleurs, en 1998, un texte-hommage Ă  Renaud Camus[56]. Guillaume Dustan s'inscrit lui-mĂȘme dans « le filon des Ă©crivains de l'extrĂȘme : Sade, Artaud, Bataille, Genet, Guibert »[55].

Cependant, Dustan tente aussi de se dĂ©marquer de certains prĂ©dĂ©cesseurs en littĂ©rature gay : Genet en particulier, mais aussi Proust et mĂȘme HervĂ© Guibert, l’auteur du roman Les chiens. Il estime que leurs Ă©crits sont caractĂ©risĂ©s par une culpabilitĂ© sous-jacente. À propos de la sodomie, il Ă©crit ainsi : « Je voulais dire la vĂ©ritĂ©. Montrer que celui qui faisait ça Ă©tait quand mĂȘme un ĂȘtre humain. Pas un chien. Maintenant que j’y pense, quel titre atroce : Les chiens »[57].

« DerriĂšre le style et les thĂšmes qui se veulent provocateurs, l’auteur poursuit un but : la rĂ©habilitation de ces semblables, des hommes qu’il a aimĂ©s, sodomisĂ©s, cĂŽtoyĂ©s. DĂ©crire crĂ»ment, presque cliniquement des relations sexuelles entre hommes est une maniĂšre de les normaliser. Dustan reste un homme de loi et qualifie son Ă©criture de justicielle[58] comme le montre l'entretien qu'il avait accordĂ© Ă  Technikart en 1999 : « Mon Ă©criture avait pour justification de me faire du bien — la continuation de la psychanalyse — et de montrer que mes amis Ă©taient beaux. À l’époque, en 1993, ils n’avaient pas trop la cote. Ils Ă©taient pĂ©dĂ©s SM, droguĂ©s, sĂ©ropo. Ça me dĂ©truisait que ces gens ne soient pas vus comme je les voyais : comme des anges. Avec le deuxiĂšme livre, je me suis mis Ă  comprendre ce qu’il pouvait y avoir de vital dans la culture gay, dans laquelle j’étais immergĂ© mais qui n’avait pas de valeur Ă  mes yeux. De la mĂȘme maniĂšre que je n’avais pas de valeur Ă  mes propres yeux parce que (
) je voyais ça comme une sous-vie. Et puis je me suis rendu compte que c’était plutĂŽt une ‘sur-vie’ Il y a eu un renversement des valeurs »[59].

Dustan exprime une rĂ©pulsion toute particuliĂšre envers certains Ă©crivains, entre autres : Angelo Rinaldi (« une resucĂ©e de Proust en plus triste »), BorgĂšs (« inventeur de fables qui se mordent la queue ») ou encore Alain Robbe-Grillet (« un escroc ») et Claude Simon et Jean Rouaud (« Litanie, liturgie, lĂ©thargie
 », Ă©crit-il dans Nicolas Pages).

Parmi ses contemporains, Dustan fut rapprochĂ© de Christine Angot, son « alter-angot », selon une critique qui voyait chez les deux auteurs une mĂȘme pratique de mise Ă  nu frontale du moi autobiographique. La confrontation radicale entre la vie et l'Ă©criture serait alors un point de rapprochement entre les deux auteurs. Dans son Premier essai, Dustan parle d'ailleurs des « Ă©crivains des annĂ©es 90 », ceux dont il reconnaĂźt l'importance dans l'avĂšnement d'une nouvelle littĂ©rature et d'un nouveau style : Vincent Ravalec, Virginie Despentes ou encore Michel Houellebecq.

De l'autofiction

Angot, comme Dustan, ne peut envisager qu’une Ă©criture de soi qui ne soit pas de l’invention romanesque, mais qui ne soit pas non plus de l’autobiographie. Dans Quitter la ville elle expose son projet : « La rĂ©alitĂ© et la fiction ; au milieu, un mur. Être incapable d’inventer n’est pas de l’impuissance, c’est un principe ». Elle serait donc du cĂŽtĂ© de l’autobiographie, mais elle en dĂ©nonce toutes les impasses. La plupart de ses livres sont intitulĂ©s roman. Elle serait donc en principe pour l’autofiction[60]. Elle fait la mĂȘme connexion que Dustan entre Ă©criture du Je, autofiction et politique. La question politique est dĂšs lors prĂ©sente, associant enjeu politique et Ă©criture du Je. C’est ce qu’on a appelĂ© l’enje Dustan[61].

Dans Nicolas Pages, Dustan radicalise ses aspirations littéraires, et note :

« C'est qu'il n'y a pas trente-six solutions en littĂ©rature : soit on invente tout et on s'expose Ă  une relative pauvretĂ© de dĂ©tail (sauf Ă  rĂ©introduire des petites merdes vĂ©cues dans l'histoire inventĂ©e) ; soit on raconte sa vie et on s'expose Ă  une relative faiblesse dramatique (sauf Ă  faire des mutants en greffant des Ă©vĂ©nements et des personnages les uns sur les autres). En fait j'ai envie d'ĂȘtre beaucoup plus radical. En littĂ©rature, soit c'est soi, soit c'est du bidon[62]. »

DĂšs lors, l'Ɠuvre dustanienne est un « abandon de la grande fiction » au profit d'« une sorte de narration domestique »[62]. Écriture acharnĂ©e du corps, du sexe, de la drogue, de la danse, du mouvement et du moi, l'Ɠuvre de Dustan propose une autofiction intĂ©grale, sans — selon les dires de l'auteur — aucun ajout romanesque ou fictionnel : « Au dĂ©but, je pensais romancer, comme on dit. Changer des trucs. Mourir Ă  la fin. Et puis je n'ai pas voulu. »[63]. En outre, la psychanalyse et l'auto-psychanalyse Ă©maillent quasiment tous ses textes, de mĂȘme que les rapports de force entre hommes (sadomasochisme), la drogue (thĂ©orisation de la consommation et de l'exploitation corporelle et psychique de l'ecstasy en particulier), sur fond de rĂ©flexion politique.

Chez Dustan, l'autofiction prend la forme d'une Ă©criture performative, oĂč la vie dĂ©bouche vers l'Ă©criture, et non le contraire. Lors d'une interview accordĂ©e Ă  Fluctuat.net, il dĂ©clare :

« La question est de savoir pourquoi les gens écrivent. Pourquoi est-ce qu'on raconte des histoires, je ne sais pas moi. Je n'ai pas envie d'écrire des histoires. J'ai essayé et ça ne marchait pas. Et à un moment j'ai trouvé que j'avais une vie assez bizarre pour écrire dessus. J'ai été trÚs influencé, d'abord marqué, puis influencé par la lecture des gens qui utilisaient le « Je ». Et qui racontaient leurs choses. Leurs choses à eux. »

Mais à la question « Pourquoi aurait-on envie de raconter sa vie ? », Dustan répond :

« C'est plutĂŽt l'inverse qui est surprenant. Il est Ă©tonnant que ce soit surprenant de demander pourquoi on a envie de raconter sa vie. J'ai plutĂŽt l'impression que c'est ça qui est normal, en tout cas ce qui se comprend le plus facilement, non ? Ce qui est Ă©tonnant, n’est-ce pas l’inverse, c'est-Ă -dire qu’il y ait des gens qui passent autant de temps Ă  raconter des histoires qui ne parlent pas d’eux. »

C’est lĂ  que commence son projet politique. « Il a mis une perruque pour dire qu’il rĂ©unissait l’homme et la femme en lui. Et il a pris son stylo pour s’engager dans son projet, littĂ©raire et politique tout Ă  la fois. Qu’il appelle comment ? Pas seulement autobiographie, ni autographie, ni Ă©gologie, ni mĂȘme autofiction, quoique, il hĂ©site, il varie, il se contredit, il cherche. Mais il ne transige pas. Il l’a toujours proclamĂ©, Je est le seul chemin, virtuel sans doute, mais d’autant plus nĂ©cessaire, d’autant plus rĂ©el, d’autant plus pĂ©rilleux, pour sa rĂ©volution qu’il va alors nommer d’un nĂ©ologisme Ă©nigmatique : autobiopornographie, ou souvent plus simplement autopornographie. »[64]

En , donc aprĂšs Nicolas Pages et GĂ©nie divin, Laurent Galiana interroge Dustan[65] :

« – À un moment, vous Ă©crivez « Je me demande si je suis douĂ© pour la science-fiction », vous n’ĂȘtes plus dans l’auto-fiction ?

– Le terme d’auto-fiction, je le rĂ©cuse : c’est peut-ĂȘtre valable pour Marie Darrieussecq, qui mĂ©taphorise des trucs vĂ©cus comme dans Naissance des fantĂŽmes. D’autres, comme Angot ou moi, on fait de l’autobiographie, de l’auto-arrangement, de l’auto-crucifixion, puis de l’auto-dĂ©crucifixion. Mes trois premiers livres Ă©taient autobiopornographiques. Raconter sa vie avant d’avoir 70 ans, ça ne se fait pas, c’est mal vu. Le journal intime est acceptĂ© mais ce n’est pas ce qu’on fait. Alors, appelons ça crĂ©er un genre, une forme. »

L'auto(bio)pornographie

D'un point de vue thĂ©matique, l'Ɠuvre dustanienne se prĂ©sente, dans un premier temps, comme une sorte « d'OdyssĂ©e du sexe » :

« L'idĂ©e Ă©tait d'Ă©crire une sorte d'OdyssĂ©e, une histoire de ma vie sexuelle qui Ă©tait aussi une dĂ©couverte, un voyage dans les contrĂ©es sauvages et inconnues du sexe, peuplĂ©es de monstres divers. Ma « vie sexuelle ». Un truc en fait assez peu explorĂ© par la littĂ©rature, alors que dans la vie de chacun il y a des transformations incroyables, profondes, dans le rapport Ă  ces choses-lĂ  au cours de la vie ou de pĂ©riodes suffisamment longues de la vie. Encore une fois l'idĂ©e Ă©tait de donner de l'importance Ă  des choses dont on ne parle pas et qui sont pourtant de l'essence mĂȘme de la dĂ©finition de soi[66]. »

La trilogie dite « autopornographique » (néologisme créé par Dustan dans Génie divin) publiée chez P.O.L. explore alors trois « dimensions sexuelles » : celle de la sexualité quotidienne et domestique d'un homosexuel parisien des années 1980-1990 (Dans ma chambre), celle du « milieu » gay (Je sors ce soir) et celle du sadomasochisme (Plus fort que moi).

L'autopornographie serait ainsi une autofiction du « moi sexuel », dont l'exposition crue apparaßt comme une ultime provocation, et l'urgence de l'écriture un des moteurs :

« Il était hors de question d'écrire sur ma vie honteuse, ma vie de rat. Impossible. Si j'ai pu écrire mon premier livre, c'est parce que je pensais que j'allais mourir. Dans un testament on est libre. On déshérite. J'ai déshérité mon pÚre et tous les flics. J'ai dit que je me droguais et que je me faisais mettre. Les deux grands trucs politiquement incorrects[67]. »

Dans cette perspective, la sexualité, chez Dustan, se présente comme une libération. L'auteur plaide pour une sexualité sans protection entre adultes consentants (barebacking) en évoquant la liberté de chaque individu de se mettre en danger et de se débarrasser de l'autorité moralisante :

« Nous rĂ©clamons les religions de la jouissance. Nous le sommes : raves, backrooms, saunas, c'est cela la politique nouvelle. La nouvelle pornographie. La nouvelle vie. L'extrĂȘme. Pas le couvre-feu dix-neuviĂšmiste. Pas le backlash. Le feu. La libĂ©ration[68]. »

C’est son enjeu Ă  la fois politique et littĂ©raire. Mais dans Nicolas Pages il rĂ©cuse fortement et ironiquement l’expression « littĂ©rature homosexuelle »[69].

Nicolas Pages

Ce roman a Ă©tĂ© couronnĂ© en 1999 par le prix de Flore. AprĂšs une premiĂšre page rappelant sa trilogie autobiopornographique, le livre est construit, « magnifiquement construit, entre deux trains, entre deux ratages
 Avec l’inclusion de textes fondateurs sur la littĂ©rature, l’écriture. Une rĂ©flexion sur le roman dans le roman, en abyme », Ă©crit Colette Piquet[70].

À l’aller vers LiĂšge, oĂč le hĂ©ros rencontre Nicolas Pages, il se trompe de wagon, change avant Bruxelles, tombe sur un vieux hideux tout maigre en tenue de cycliste, sa carte de crĂ©dit ne marche pas. Pourtant une histoire d’amour s’engage avec Nicolas Pages. Lors du second voyage vers Lausanne, il part avec retard vers la gare et rate son train.

« J'ai dit Bonjour Monsieur, vingt minutes pour la Gare de Lyon, c'est faisable ? Il a dit Ça va ĂȘtre dur, J'ai dit Eh ben on va voir. Ça a bloquĂ© rue du Quatre-Septembre. À moins cinq on Ă©tait Ă  la Bastille. Je l'ai payĂ© d'avance pour pouvoir courir dĂšs qu'on serait arrivĂ©s. Gare de Lyon, en haut ou en bas ? C'est quoi le mieux pour les TGV ? Ben ça dĂ©pend, mais Ă  mon avis, en haut. Il m'a laissĂ© en haut Ă  moins une. Je me suis retrouvĂ© sur le quai Ă  l'heure pile. Bizarrement les portiĂšres Ă©taient fermĂ©es. J'ai appuyĂ© sur le bouton. Rien. Et puis le train s'est mis Ă  bouger. Merde. J'ai tapĂ© sur la vitre, je sais c'est ridicule. Laissez-moi monter, j'ai gueulĂ©. Ça n'a pas marchĂ©, Nicolas Pages. »

Entre ces deux moments du rĂ©cit, ces deux ratages, un patchwork cousu de son aventure avec Nicolas Pages racontĂ©e au jour le jour, du rĂ©cit de sa grande histoire d’amour avec Nelson, appelĂ© tendrement Lapin, de son quotidien dans le milieu gay, de son travail littĂ©raire, de ses pensĂ©es du moment, du texte de ses projets et articles, et mĂȘme du journal tenu par sa grand-mĂšre avant sa mort, respectant scrupuleusement la graphie de celle-ci (les fautes d'orthographe et de syntaxe, les ratures, etc.)[70].

Les derniĂšres phrases du livre ouvrent vers un aprĂšs :

« Et puis Nicolas Pages est au Japon. Il faut que je lui e-maile. Nelson est Ă  Santiago. Il doit me faxer ses T4. Les autres sont Ă  Paris. Nous sommes lĂ . Ce n’est pas fini. Et puis j’ai la tĂȘte pleine de travail[71] »

Dans Nicolas Pages, le projet politique et littéraire de l'auteur se précise, comme il le dit en interview :

« – Je trouve que le plus important dans la vie, c’est le renforcement des liens sentimentaux. C’est ce que j’attends de la vie maintenant : que ça devienne de plus en plus puissamment amoureux.

– Comment y parvenir ?

– En dĂ©truisant l’ordre social. Je veux dĂ©truire leur sale ordre. Quand j’étais jeune, je pensais qu’il n’y avait pas de problĂšme. Que c’était moi qui avais un problĂšme. Maintenant, je pense que c’est profondĂ©ment liĂ© Ă  l’organisation sociale et au discours dominant, qui est un mensonge. Aujourd’hui, notre sensibilitĂ© est rĂ©primĂ©e. Les gens n’écoutent pas leur corps et leur esprit, ils Ă©coutent la voix du MaĂźtre, du PĂšre. C’est de ça qu’il faut sortir[72] »

Littérature expérimentale

Par la suite, dans Génie divin ou Premier essai, la construction des romans de Dustan est le plus souvent une mise en perspective, d'apparence anarchique, de textes hétéroclites (récit, journal, articles, citations, courts essais) qui s'accompagne de variations dans la police des caractÚres (utilisation de l'italique, du gras, du souligné, changements fréquents de police). L'auteur assume cette déconstruction :

« Ces livres, ça, que ce soit Nicolas Pages ou celui-ci ou le prochain, grosso modo c'est à la va comme je te pousse. Mais c'est aussi ça qui m'intéresse comme projet littéraire, c'est : j'ai pas fait spécialement d'effort, c'est comme ça. Il y a certains passages oui vraiment écrit, là je me suis vraiment fait chier, j'ai réécrit. Pour le reste, on est dans l'ordre de l'entretien, de la vaticination, du délire. Là j'ai vraiment la flemme de corriger, et puis mes livres ont été annoncés comme novateur formellement[73]. »

RĂ©ception de l'Ɠuvre

On peut distinguer, selon David Vrydaghs[27], « trois moments dans la trajectoire de Guillaume Dustan ». Dans un premier temps, de 1996 à 1999, il est lentement propulsé sur le devant de la scÚne littéraire, ce qui fait de lui un écrivain culte dans le milieu homosexuel. Dans ma chambre est comparé à Tricks, de Renaud Camus, Guillaume Dustan fait quelques apparitions télévisuelles, notamment dans Le Cercle de minuit. Un écho médiatique commence à se former.

AprĂšs cette « phase d’émergence », interviendrait « une phase intermĂ©diaire, de 1999 Ă  2001, oĂč Dustan cherche Ă  constituer une position collective dans la niche oĂč il travaille depuis ses dĂ©buts, comme Ă  percer en littĂ©rature au moyen de textes formellement plus ambitieux, et proches, Ă  bien des Ă©gards, de l’essai. » De fait, dans Nicolas Pages ou GĂ©nie divin, il fait de ses Ɠuvres des laboratoires d'expĂ©rimentations stylistiques remarquĂ©es par la critique. On note un « passage progressif au genre de l'essai, qui voit donc Dustan abandonner la littĂ©rature homosexuelle grĂące Ă  laquelle il s'Ă©tait fait un nom pour une production Ă  la fois littĂ©raire et politique, situĂ©e Ă  l'intersection de la littĂ©rature et du champ intellectuel ». C’est Ă©galement Ă  cette Ă©poque qu’il commence Ă  intervenir rĂ©guliĂšrement dans l'espace public. Élargissant le lectorat homosexuel de ses premiers Ă©crits, il est invitĂ© dans des Ă©missions « grand public ». Le prix de Flore encourage sa mĂ©diatisation mais Guillaume Dustan regrette de n'avoir pas la visibilitĂ© et la reconnaissance qu'il pense mĂ©riter[74].

David Vrydaghs constate alors que cette phase est suivie par une autre, qu'il qualifie de « phase de dĂ©classement, de 2001 Ă  sa mort en 2005, pendant laquelle Dustan n’est plus lu. [
] Le dĂ©classement de Guillaume Dustan, effectif Ă  partir de GĂ©nie Divin, ne fait que se confirmer par la suite. AprĂšs avoir Ă©tĂ© remerciĂ© par Balland, Dustan quitte Paris pour Douai, puis Lille, oĂč il Ă©crit encore deux textes, Dernier roman et Premier essai, publiĂ©s chez Flammarion mais boudĂ©s par la critique au point, par exemple, que Jean Birnbaum, journaliste au Monde, ignore l’existence du dernier livre de Dustan dans sa notice nĂ©crologique. Quant aux critiques qui connaissent ces deux livres, ils les jugent “illisibles” ».

ƒuvres

Romans et récits

ƒuvres rĂ©unies

Vidéographie

La filmographie complÚte, incluant les vidéos non distribuées, est disponible dans le Premier essai de Guillaume Dustan, Paris, Flammarion, 2005, p. 151-154. La distribution des vidéos est assurée par Le Peuple qui manque[77].

  • Enjoy (Back to Ibiza), projetĂ© le par PLP Ă  La FĂ©mis, 2001.
  • Poub(elle), 2002.
  • Squat, 2002.
  • Nietzsche, 2002.

Audiographie

  • O fantasma (Dustan lit et dit), disque audio, dans Écritures, no 14 « Danger Dustan/Engagement », 2004.

Photographie

  • Mon beau gars l'est, Guillaume Dustan (sodomie Ă©lectrique), photographies d'HervĂ© Joseph Lebrun, - , Pause-Lecture, 61 rue Quincampoix, 75004 Paris, 2000.

Ouvrages juridiques

  • Ouvrages juridiques, alors juge administratif, sous son vrai nom de William BaranĂšs :
    • La Justice. L'obligation impossible, dir. avec Marie-Anne Frison-Roche, Éditions Autrement, coll. « Valeurs », 1994 (ISBN 2-02-033776-2).
    • De l'injuste au juste, dir. avec Marie-Anne Frison-Roche, Droz, coll. « ThĂšmes et commentaires », 1996 (ISBN 2-247-02624-9).
    • Trad. avec Olivier Simsek (prĂ©f. Jean Carbonnier) de Renato Treves, Sociologie du droit, Paris, Presses universitaires de France, 1995 (ISBN 2-13-046399-1).
  • Dans certaines bibliographies, l'Ɠuvre LXiR est rĂ©fĂ©rencĂ©e sous le titre BĂȘte de somme / La Loi[78].

Voir aussi

Biographie

  • RaffaĂ«l Enault, Dustan Superstar. Biographie, Paris, Robert Laffont, 2018.
  • Collectif, revue Écritures, no 14 spĂ©cial « Danger Dustan/Engagement », 2004.
  • Collectif, Une perruque et un stylo lĂ©gender Dustan, dir. Anne-Marie Ringenbach, Paris, Cahiers de l'UnebĂ©vue, L'unebĂ©vue Ă©diteur, 2015, 226 p.

Articles

  • Thierry Ardisson, Cyril Drouet et Joseph Vebret, « Guillaume Dustan : agitateur gay », Dictionnaire des provocateurs, Plon, 2010.
  • Jean Birnbaum, « Portrait de Guillaume Dustan en moraliste », Le Monde des livres, [79].
  • Patrick Besson, « Une Ă©gofiction de Dustan », Avons-nous lu ? PrĂ©cis incendiaire de littĂ©rature contemporaine, Fayard, 2013.
  • BĂ©nĂ©dicte Boisseron, « Post-coca et post-coĂŻtum : la jouissance du logos chez Guillaume Dustan et Seinfeld », L'Esprit crĂ©ateur, volume XLIII, no 2, Ă©tĂ© 2003.
  • Ahmed Haderbache, « Sexe, drogue, sĂ©ropositivitĂ© : un leitmotiv de la fĂȘte chez Guillaume Dustan », Écrire, traduire et reprĂ©senter la fĂȘte, UniversitĂ© de Valence, 2001[80].
  • Ahmed Haderbache, « Dustan et les mĂ©dias : repenser son discours sans rĂ©inventer son histoire », sĂ©minaire, EHESS, 2008[81].
  • (en) Daniel Hendrickson et Marc Siegel, « The Ghetto Novels of Guillaume Dustan », Paroles gelĂ©es, no 16, 1998[82].
  • Pierre Jourde, « Guillaume Dustan », Le Jourde et Naulleau. PrĂ©cis de LittĂ©rature du XXIe siĂšcle, Mot et Cie, 2004.
  • David Vrydaghs, « Personne n'a dit que Guillaume Dustan Ă©tait un intellectuel, ou les raisons d'un Ă©chec », @nalyses, [83].

Fictions

  • Guillaume Dustan a inspirĂ© l'un des personnages principaux du roman La Meilleure Part des hommes de Tristan Garcia.
  • En 2011, FrĂ©dĂ©ric Huet raconte la relation qu'il a entretenue avec l'auteur, dans un rĂ©cit intitulĂ© Guillaume Dustan[84].

Émissions

  • Dustan Remix, Ă©mission Atelier de crĂ©ation radiophonique, France Culture, [85].
  • Guillaume Dustan (1965-2005) : « Parce que je suis : libre », Ă©mission Toute une vie, France Culture, [86].

Exposition

Articles connexes

  • CatĂ©gorie:ƒuvre de Guillaume Dustan

Liens externes

Notes et références

Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Génie divin » (voir la liste des auteurs).
  1. (fr) « Guillaume Dustan (1965-2005) », sur BnF Data,
  2. (fr) « La disparition de Guillaume Dustan », sur TĂȘtu.com, .
  3. « Guillaume Dustan, Ă©crivain et Ă©diteur gay », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  4. Judith Perrignon, « Le passage du gay », LibĂ©ration,‎ (lire en ligne)
  5. « Dans l'intimité de Guillaume Dustan », Vice, .
  6. Raffaël Enault, Dustan Superstar. Biographie, Paris, Robert Laffont, 2018, p. 154.
  7. Guillaume Dustan, c'est qui ?, TĂȘtu no 18, .
  8. « Je danse donc je suis », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  9. Guillaume Dustan, « Tribu(t) », Écritures, no 10, 1998.
  10. Romain Charbon, « Guillaume Dustan, le sulfureux fantĂŽme qui continue de hanter la littĂ©rature », Vanity Fair,‎ (lire en ligne)
  11. (fr) « Le Rayon ne tourne plus rond », sur 360°.ch, .
  12. Arthur Vacher, « Guillaume Dustan, les mots pour le queer », LibĂ©ration,‎ (lire en ligne)
  13. Guillaume Dustan, Génie Divin, Balland, coll. « Le Rayon », 2001, p. 101.
  14. In bed with Guillaume Dustan, YouTube, consulté le .
  15. (fr) « Guillaume Dustan », sur UniFrance.org (consulté le ).
  16. Séverine Pierron, « Cartographie : bazar à l'hÎtel de ville », Technikart, .
  17. Guillaume Dustan, Premier Essai, Paris, Flammarion, 2005, p. 151-154.
  18. Guillaume Dustan, « Bons baisers du réel », Bordel, no 3, Flammarion, 2003.
  19. Cf. vidéos, dans la partie « liens externes » de l'article.
  20. Mathieu Lindon, « Dustan sans protection », sur Libération, (consulté le )
  21. Kira Ribeiro, « Des féministes et des virus | Approches féministes sur le VIH/sida », (consulté le )
  22. Albert Le Dorze, La politisation de l'ordre sexuel, L'Harmattan, 2009, pages 203-206.
  23. in : (en) Didier Lestrade, The end, Paris, Denoël, coll. « Denoël impacts », , 384 p. (ISBN 978-2-207-25424-0, OCLC 54512772).
  24. Éric RĂ©mĂšs tĂ©moigne (cf. : https://www.youtube.com/watch?v=9NA_Ky35NVM), et aussi accompagnĂ© de Dustan (https://www.youtube.com/watch?v=D0thoFdnHcA).
  25. Try to unDUSTANd est publié sur le site de la revue ArÚs.
  26. Anne-Marie Ringenbach, Mayette Viltard, in : Une perruque et un stylo légender Dustan, Unebévue éditeur, p. 9-11.
  27. (fr) David Vrydaghs, « Personne n’a dit que Guillaume Dustan Ă©tait un intellectuel, ou les raisons d’un Ă©chec », sur Revue-@nalyses.org, .
  28. TĂȘtu, .
  29. Bande à part, Libération, .
  30. Guillaume Dustan, « Retraßtre », Technikart, .
  31. « Danger Dustan / Engagement », nombreux textes inĂ©dits de l'auteur, collectif, Écritures, no 14, Ă©d. La CinquiĂšme Couche, 2004.
  32. (fr) « Écritures # 14 », sur La cinquiĂšme couche (consultĂ© le ).
  33. Thierry Ardisson, Cyril Drouet et Joseph Vebret, « Guillaume Dustan : agitateur gay », Dictionnaire des provocateurs, Plon, 2010.
  34. Thomas Clerc, prĂ©face aux ƒuvres de Guillaume Dustan, P.O.L, 2013, p. 11
  35. (fr) « DUSTAN Guillaume (William BaranÚs : 1965-2005) », sur CimetiÚres de France et d'ailleurs (consulté le ).
  36. Anne-Marie Ringenbach, Mayette Viltard, in Une perruque et un stylo. Légender Dustan, Unebévue éditeur, p. 9-11.
  37. Thomas Clerc, « Mon cƓur est mort (pour Guillaume Dustan) », LibĂ©ration, .
  38. Michel Houellebecq, Interventions 2, Flammarion, 2009.
  39. « Erik RémÚs régit à la mort de Guillaume Dustan », gayromandie.ch, .
  40. Virginie Despentes, « Cher Guillaume », Le Monde des livres, .
  41. « Enjoy (back to Ibiza) – Vix World » (consultĂ© le )
  42. Friction Magazine, « Spectres de Dustan : 10 ans aprĂšs sa mort, souvenirs d’un poĂšte disparu », sur friction-magazine.fr
  43. Thomas Clerc, « Oublier Dustan ? », Monstre, no 4, 2012.
  44. ƒuvres I sur le site des Ă©ditions P.O.L, consultĂ© le .
  45. « Le prix Sade 2013 à
 Pornographia », Le Nouvel Observateur, .
  46. Thomas Faidherbe, « Le Prix Sade 2021 dĂ©voile ses laurĂ©ats », Livres Hebdo,‎ (lire en ligne).
  47. « Guillaume Dustan - Palais de Tokyo », sur palaisdetokyo.com (consulté le ).
  48. Dustan superstar | Lisez! (lire en ligne).
  49. « Colloque Guillaume Dustan (28 mai 2019) », sur SoundCloud (consulté le ).
  50. « Les corps de Guillaume Dustan - THALIM UMR CNRS », sur www.thalim.cnrs.fr (consulté le )
  51. Guillaume Dustan, Nicolas Pages [1999], J'ai Lu, coll. « Nouvelle Génération », 2003, p. 377 ; 385.
  52. Ibid., p. 395.
  53. Anne-Marie Vanhove « Dit que si aux nerfs Dustan-Warhol » in Une perruque et un stylo légender Dustan, op. cit., p. 47-77
  54. Nicolas Pages, p. 377.
  55. Ibid., p. 382.
  56. Guillaume Dustan, « Tribu(t) », Écritures, no 10, 1998.
  57. Guillaume Dustan, Nicolas PagĂšs, J'ai lu, , p. 394.
  58. Nausica Zaballos. "Cacher cette perruque que je ne saurais voir.
  59. Patrick Williams, « Penser ses plaies. », TechniKart, no 35,‎ .
  60. Mais elle remarque : « Si ce “je” est celui du miroir, je ne fais pas d'autofiction. Si on reconnaĂźt que ce “je” peut s'Ă©laborer dans l'imaginaire, alors oui, je fais de l'autofiction ». Le mot autofiction a Ă©tĂ© inventĂ© pour rĂ©soudre la double impasse de l’autobiographie et de la fiction romanesque.
  61. Colette Piquet, « L’enje Dustan », in Une perruque et un stylo lĂ©gender Dustan, op. cit., p. 13-45.
  62. Nicolas Pages, p. 384.
  63. Ibid., p. 397.
  64. Colette Piquet, « L’enje Dustan », op. cit., p. 13-45
  65. Sur le site E-llico, .
  66. Nicolas Pages, p. 406.
  67. Ibid., p. 394.
  68. Guillaume Dustan, GĂ©nie Divin [2001], J'ai lu, 2003, p. 336.
  69. Nicolas Pages, op. cit., p. 369 et seq.
  70. Colette Piquet, op. cit. p. 13-45.
  71. Désir, désir, ajoute C. Piquet.
  72. Cité par Colette Piquet, op. cit.
  73. Guillaume Dustan, LXiR, Balland, coll. « Le Rayon », 2002, p. 49-50.
  74. Dans Quitter la ville (Stock, 2000, p. 111), Christine Angot raconte que Guillaume Dustan lui a reproché de lui avoir volé sa rentrée littéraire, en 1999 et déclarant souffrir du manque de reconnaissance qui recouvrait ses livres.
  75. « Editions P.O.L - Oeuvres I - Guillaume Dustan », sur www.pol-editeur.com (consulté le )
  76. « Editions P.O.L - Oeuvres II - Guillaume Dustan », sur www.pol-editeur.com (consulté le )
  77. (fr) « Guillaume Dustan », sur Le Peuple qui manque (consulté le ).
  78. (fr) Nicolas Brulebois, « Le Rayon : Guillaume Dustan éditeur », E, P & LA, .
  79. Jean Birnbaum, « Portrait de Guillaume Dustan en moraliste », Le Monde des livres, .
  80. (fr) Ahmed Haderbache, « Sexe, drogue, sĂ©ropositivitĂ© : un leitmotiv de la fĂȘte chez Guillaume Dustan », sur Google Livres (consultĂ© le ).
  81. Ahmed Haderbache, « Dustan et les médias : Repenser son discours sans réinventer son histoire ».
  82. (en) Daniel Hendrickson et Marc Siegel, « The Ghetto Novels of Guillaume Dustan », sur Escholarship.org (consulté le ).
  83. (fr) David Vrydaghs, « Personne n'a dit que Guillaume Dustan était un intellectuel, ou les raisons d'un échec », sur Revue-@nalyses.org, .
  84. David Hershen, Une histoire du Rock / Guillaume Dustan, France Culture, .
  85. (fr) « Dustan Remix », sur franceculture.fr, .
  86. « Guillaume Dustan (1965-2005) : « parce que je suis libre » », sur franceculture.fr, .
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