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Guerre franco-chinoise

La guerre franco-chinoise oppose la France de la Troisième République à la Chine de la dynastie Qing entre septembre 1881 et juin 1885. Elle résulte des efforts français en vue de prendre le contrôle du fleuve Rouge qui relie Hanoï à la province du Yunnan en Chine.

Guerre franco-chinoise
Description de cette image, également commentée ci-après
Batailles de la campagne de 1884-1885.
Informations générales
Date de
à
Lieu Chine, Taïwan et Viêt Nam
Issue Victoire française
Traité de Tianjin :
La Chine abandonne sa suzeraineté sur l'Annam (actuel Viêt Nam), que la France achève de coloniser.
Forces en présence
15 000 - 20 000 hommes25 000 - 35 000 hommes
Pertes
2 100 morts ou blessés10 000 morts
inconnu blessés[1]

Batailles

Cet épisode militaire s'inscrit dans le contexte de la lente mise sous tutelle de la Chine par les puissances européennes pendant la deuxième moitié du XIXe siècle. C'est un enjeu majeur de la politique coloniale française qui souhaitait acquérir des positions fortes dans le Sud de la Chine.

La victoire française permet la reconnaissance de son protectorat sur l'Annam et le Tonkin, s'ajoutant à la Cochinchine déjà occupée dix ans plus tôt et au Cambodge, conduisant ainsi à la création de l'Indochine française.

Les origines de la guerre

La conquête française de l’Indochine

Les origines de la conquête française dans la péninsule indochinoise remontent aux implantations françaises sous Louis XVI en 1785[2]. Elle est véritablement lancée par Napoléon III sous le Second Empire et systématisée par Jules Ferry sous la Troisième République. Des premières tentatives d'occupation eurent lieu dans le delta du Mékong. La France depuis 1860 s'était lancée dans une politique active de colonisation en Extrême-Orient. Dès l'année 1862, un premier traité de Saigon signé avec l'empereur d'Annam reconnaissait la souveraineté des Français sur les provinces du Sud, qui formèrent la colonie de Cochinchine.

Le déclenchement du conflit

Drapeau des Pavillons noirs, capturé par l'armée française au Tonkin en 1885 (令 lìng) Musée de l'Armée (Paris).

Bien qu'un deuxième traité de Saigon signé en 1874 ouvrît le fleuve Rouge à la libre circulation, les Pavillons Noirs harcelaient les navires de commerce français au début des années 1880. Cette milice levée par Liu Yongfu (un Chinois zhuang originaire du Guangxi, (Kouang-Si dans la graphie française de l'époque) gênait fortement le commerce français.

Aussi, le gouvernement français, en la personne de Jauréguiberry, ministre de la Marine, envoya un petit corps expéditionnaire au Tonkin pour éliminer les Pavillons Noirs de la vallée du fleuve Rouge. La cour de l'empereur Qing vit l'arrivée de cette armée européenne comme une menace pour ses frontières, émit une protestation et se prépara à la guerre.

La prise du Tonkin

Le capitaine de vaisseau Henri Rivière, commandant trois canonnières et sept cents hommes, prit la citadelle d’Hanoï, capitale du Tonkin, le , comme l'avait fait Francis Garnier en 1873. Le , il prit Nam Định, mais la faiblesse des effectifs dont il disposait entraîna la répétition des événements de 1873[3].

En mai 1883, les Pavillons Noirs encerclèrent Hanoï. Rivière fit une sortie le 16 puis une autre le 19, au cours de laquelle il fut tué. La mort de Rivière déchaîna les bellicistes de la Chambre des députés à Paris. Jules Ferry confia alors les deux divisions navales d'Extrême-Orient au contre-amiral Courbet qui arriva le à l'improviste devant Thuân-an, le port de Hué, qu'il bombarda.

La prise de Bắc Ninh le interprétée par l'imagerie d'Épinal.

Le , par le traité de Hué, l'empereur d’Annam acceptait de placer l'Annam et le Tonkin sous protectorat français. La Chine rejeta le traité et envahit la province du Tonkin. Bien qu'aucun des deux pays n'eût formellement déclaré la guerre, les opérations militaires commencèrent à l'automne 1883. Lors de la campagne de Bac Ninh, les forces françaises s'emparèrent des citadelles de Sơn Tây, Bắc Ninh sur le fleuve Rouge. Le 1er régiment étranger fut assiégé pendant quatre mois ( - ) par les Pavillons Noirs dans la citadelle de Tuyên Quang.

La guerre

Le cuirassé à coque en fer de 2e classe Bayard, navire amiral de l'escadre française.

Le , la Chine acceptait la convention de Tianjin (Tien-Tsin) puis, le 9 juin, le traité de Hué, qui assurait le protectorat français sur l'Annam et le Tonkin, ce protectorat s'organisait avec la création de l'escadre d'Extrême-Orient et du Corps du Tonkin.

Cependant, le , des forces chinoises attaquèrent par surprise une colonne française à Bac-Lé. Cette colonne avait été envoyée pour occuper le pays, en accord avec le traité de Hué. Cela mena à une prolongation de la guerre, surtout quand il apparut que les Chinois n'avaient nullement l'intention de payer l'indemnité de guerre.

Bien que les commandants des forces terrestres et navales françaises aient fortement sollicité une attaque directe de Pékin, la capitale des Qing, le président du Conseil Jules Ferry restreignit les opérations à la péninsule indochinoise et au sud de la mer de Chine méridionale, craignant qu'une telle agression provoque une réaction des autres puissances européennes, et particulièrement du Royaume-Uni et de l'Empire russe. La marine nationale mit sur pied l'escadre d'Extrême-Orient pour la durée de ce conflit. Les Britanniques vont s'opposer à la conquête par les Français de l’île de Hainan. Sur ce point, l’île de Hainan ne sera finalement pas conquise par les Français, qui vont donc reculer.

La bataille de Fuzhou (août 1884)

Tableau représentant la bataille navale de Fuzhou.

La marine française, sous le commandement du vice-amiral Amédée Courbet, bloqua les ports de Keelung et Tamsui sur l'île de Formose, avant de tenter un débarquement contre les troupes impériales (auquel Joseph Joffre, futur maréchal de France, participa en tant que capitaine du génie) qui échoue le .

La bataille de Fuzhou se place au cœur des opérations effectuées sous le commandement de l'amiral Courbet sur la rivière Min entre le 23 et le [4]. Elle vit la destruction en une demi-heure de la marine chinoise ancrée dans cette rade, récemment construite sous la supervision d'un Français, Prosper Giquel. Courbet bombarda ensuite l'arsenal de Fuzhou, écrasa les batteries de la passe Mengam et détruisit les forts de la passe Kimpaï. Cette victoire, la dernière victoire navale française du XIXe siècle, se fit au prix de seulement dix tués et quarante-neuf blessés. Le 1er octobre 1884, Courbet revint une deuxième fois devant Keelung et enleva la ville, puis le , il occupa les îles Pescadores (ou Penghu, rebaptisées « îles des pêcheurs »), chapelet d'îles qui commande le détroit de Fou-Kien entre Formose et le continent.

Au Tonkin, la mousson mettait fin aux offensives françaises, permettant aux Chinois d'avancer dans le delta. Ils firent le siège de la forteresse de Tuyên Quang, qui fut défendue par un bataillon de la Légion étrangère pendant trente-six jours. Cette bataille est toujours célébrée dans la marche officielle de la Légion.

La bataille du col de Zhennan et la retraite de Lạng Sơn (février 1885)

La conquête de Lạng Sơn en février 1885.

Un corps expéditionnaire français composé de deux brigades marcha vers le haut Tonkin et conquit Lạng Sơn en février 1885. Une des deux brigades quitta la ville pour venir en aide aux assiégés de Tuyên Quang. Le commandant de la brigade restante cherchant à contrer l'offensive des Chinois, lança une attaque de l'autre côté de la frontière et fut défait à la bataille du col de Zhennan (ou bataille de Bang Bo). Se retirant sur Lạng-Sơn, les Français stoppèrent une contre-attaque à la bataille de Kỳ Lừa. Cependant, son commandant, le général de Négrier étant blessé dans l'action, son remplaçant ordonna, peut-être sous l'effet de la panique, que Lạng-Sơn soit rapidement abandonnée le .

La brigade fuit en désordre vers le delta du fleuve Rouge, abandonnant l'essentiel des gains réalisés durant la campagne de 1885.

La chute du gouvernement Ferry

Ce revers militaire conduit le commandant du corps expéditionnaire, Louis Brière de l'Isle, à croire que le delta lui-même était menacé. Ses rapports alarmistes à Paris entraînèrent la chute du ministère Ferry le , sous d'effroyables huées politiciennes.

Dans les jours suivants, Brière de l'Isle réalisa que la situation était moins compromise qu'il ne le pensait. Cependant, le nouveau gouvernement s'efforça de mettre fin aux opérations.

La défaite, que les Français appelèrent l'affaire du Tonkin, fut un scandale politique majeur pour les partisans de l'expansion coloniale. Ce ne fut que dans les années 1890 que le parti colonial reprit l'ascendant dans l'opinion[5].

L’Indochine française

Malgré cette retraite, les opérations terrestres virent le succès des Français au Tonkin, tandis que les victoires navales de la France forcèrent la Chine à reconnaître sa défaite.

Le traité de paix, d'amitié et de commerce, ou traité de Tianjin, mettant fin à la guerre fut signé le [6], la Chine reconnaissant le traité de Hué et abandonnant sa suzeraineté sur l'Annam et le Tonkin.

La France était déjà présente en Cochinchine et au Cambodge. Avec l’Annam (et le Laos), elle contrôle tout l’Est de la péninsule indochinoise. En 1887 est créée l'Indochine française, réunissant le Cambodge et les trois entités issues du territoire vietnamien.

Littérature

Pierre Loti embarque au mois de sur L’Atalante pour participer à la campagne du Tonkin. Il publie le récit, heure par heure, de la prise de Hué dans Trois Journées de guerre en Annam, texte qui paraît dans les colonnes du Figaro. Il écrira également l'épitaphe de l'amiral Courbet, mort le en rade de Ma-Kung.

Notes et références

  1. Clodfelter, p. 238–239
  2. Édouard Guillon, op. cit. p. 15 et suivantes.
  3. Étienne Taillemite, Dictionnaire des marins français, Éditions maritimes et d'outre-mer, sub verbo Henri Rivière.
  4. Compte rendu des opérations dans la rivière Min.
  5. Charles-Robert Ageron, France coloniale ou parti colonial, Paris, 1978.
  6. Patrice Morlat, Indochine années vingt : le balcon de la France sur le Pacifique, Indes savantes, , p. 124

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Rémi Monaque, Une histoire de la marine de guerre française, Paris, éditions Perrin, , 526 p. (ISBN 978-2-262-03715-4).
  • Jean Meyer et Martine Acerra, Histoire de la marine française : des origines à nos jours, Rennes, éditions Ouest-France, , 427 p. (ISBN 2-7373-1129-2).
  • Michel Vergé-Franceschi (dir.), Dictionnaire d'Histoire maritime, éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », .
  • Guy Le Moing, Les 600 plus grandes batailles navales de l'Histoire, Rennes, Marines Éditions, , 620 p. (ISBN 978-2-35743-077-8).
  • Édouard Guillon, Le conflit franco-chinois (la guerre et les traités) d'après les documents officiels, A. Gratier, 1885 Gallica.
  • Pierre Loti, Trois Journées de guerre en Annam (recueil d'articles parus dans Le Figaro en 1883), éditions du Sonneur, 2006, 104 p. (ISBN 2-916136-04-5).

Liens externes

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