Bataille de Nui Bop
La bataille de Nui Bop (3â4 janvier 1885) est une victoire française pendant la guerre franco-chinoise. L'affrontement a lieu pour repousser les forces chinoises de la tĂȘte de pont française Ă©tablie Ă ChĆ©, elle est le prĂ©liminaire de la campagne de Lang Son lancĂ©e en fĂ©vrier 1885[1] - [2] - [3] - [4] - [5] - [6].
Date | 3â4 janvier 1885 |
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Lieu | au sud de LáșĄng SÆĄn, nord ViĂȘt Nam |
Issue | Victoire française |
France | Empire de Chine |
Général de Négrier | Wang Debang |
2 000 hommes | 12 000 hommes |
19 tués 65 blessés | > 600 tués |
Batailles
CoordonnĂ©es | 21° 50âČ 53âł nord, 106° 45âČ 29âł est |
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Situation
AprĂšs les victoires françaises de Lam (6 octobre), KĂ©p (8 octobre) et ChĆ© (10 octobre et 11 octobre) , les Chinois se replient sur Dong Song, et de NĂ©grier renforce ses positions avancĂ©es Ă KĂ©p et Chu, menaçant la base-arriĂšre de lâarmĂ©e du Guangxi Ă LáșĄng SÆĄn. ChĆ© nâest quâĂ quelques kilomĂštres au sud-ouest de Dong Song, et le 16 dĂ©cembre 1884 un fort dĂ©tachement de Chinois a pris en embuscade deux compagnies de la LĂ©gion Ă©trangĂšre juste Ă lâest de ChĆ©, Ă Ha Ho. Les lĂ©gionnaires se sont battus pour sortir de lâencerclement chinois, mais ont subi un certain nombre de pertes et ont dĂ» abandonner leurs morts sur le champ de bataille. De NĂ©grier a immĂ©diatement envoyĂ© des renforts et a poursuivi les Chinois, mais les pillards se sont repliĂ©s sur Dong Song.
Lâaction de Ha Ho a Ă©tĂ© la premiĂšre indication quâun important mouvement Ă©tait en cours. Une semaine aprĂšs cet engagement, une force de 12.000 soldats chinois occupe la colline conique caractĂ©ristique de Nui Bop, dix-huit kilomĂštres Ă lâest de ChĆ©, et commence Ă Ă©tablir un grand camp fortifiĂ©. La force chinoise Ă©tait sous le commandement de Wang Debang, lâun des gĂ©nĂ©raux les plus compĂ©tents de lâarmĂ©e du Guangxi, qui avait vaincu une colonne française en juin 1884 Ă Bac Le.
Les soldats chinois affamĂ©s pillant tous les villages de la rĂ©gion pour se nourrir, la population tonkinoise les dĂ©testent et le 23 dĂ©cembre, les villageois de Lien Son se rendent au quartier gĂ©nĂ©ral français de ChĆ© pour alerter le lieutenant-colonel Donnier de la prĂ©sence dâune importante force chinoise autour de Nui Bop.
Les Français ne pouvaient pas laisser s'installer une armĂ©e de 12000 Chinois Ă Nui Bop, trop proche de leur base principale de ChĆ© et menaçant le flanc du corps expĂ©ditionnaire devant partir pour LáșĄng SÆĄn. BriĂšre de lâIsle renforça la garnison de ChĆ© Ă la fin de dĂ©cembre et, au dĂ©but de janvier 1885, de NĂ©grier reçut lâordre de prendre lâoffensive contre les Chinois.
La colonne de De NĂ©grier comprenait un bataillon dâinfanterie de marine sous le commandement du chef de bataillon Mahias, du bataillon de turcos de Mibielle et de deux compagnies de fusiliers tonkinois. La colonne comprenait Ă©galement les bataillons des 111e et 143e de ligne (Lieutenant-Colonel Herbinger) et les batteries de Jourdy et de SaxcĂ©.
DĂ©roulement
Au lieu de prendre par la route normale Ă lâest de ChĆ© pour attaquer de front, de NĂ©grier dĂ©cide de passer par le sud en traversant le Luc Nam et de faire une marche de flanc pour venir sur la gauche chinoise. Pour dĂ©tourner lâattention de lâennemi pendant que la colonne principale le contournait, le commandant Diguet avec son bataillon de la LĂ©gion harcelait les Chinois cĂŽtĂ© est. [6]
3 janvier
Pour la colonne partie de ChƩ à 6 heures, le premier passage à gué est terminé dÚs 8 heures. Le deuxiÚme passage, à Dao Be, présentera plus de difficultés et la colonne ne sera regroupée que vers 16 heures. Pendant la traversée, Mahias, avec son avant-garde, s'est avancé vers Phong Cot et s'est accroché avec la défense chinoise sur la défensive.
La colonne française avance au contact en trois lignes. La premiĂšre ligne comprend le bataillon de Mahias, les tirailleurs tonkinois et la batterie de Jourdy. La deuxiĂšme ligne est formĂ©e par les bataillons du 111e et du 143e de ligne avec la batterie de SaxcĂ©. Le 3e bataillon de tirailleurs algĂ©riens de De Mibielle est en troisiĂšme ligne. Lâartillerie française sâinstalle sur une colline Ă droite de la route et ouvre le feu sur les Chinois. De NĂ©grier donne ses ordres pour lâattaque. Lâinfanterie de marine doit attaquer le bois frontalement, tandis que le bataillon du 143e devait occuper les collines Ă droite pour flanquer la position ennemie et repousser lâaile gauche chinoise dans la vallĂ©e de Phong Cot. Le bataillon du 111e et les tirailleurs algĂ©riens de De Mibielle restent en rĂ©serve prĂšs de lâartillerie.
Avec trois des quatre compagnies de son bataillon, Mahias s'empare du bois, tout en tenant sa quatriĂšme compagnie en rĂ©serve. Pendant ce temps, les tirailleurs tonkinois prennent position Ă sa droite en liaison avec le bataillon du 143e. Les ennemis se replient rapidement sur une petite colline derriĂšre le bois harcelĂ©s par la compagnie du capitaine Salles. Dans son Ă©lan, Salles, bien en-tĂȘte des trois autres compagnies de son bataillon, subit une fusillade venant des deux cĂŽtĂ©s de la vallĂ©e de Phong Cot, tenue par les forces chinoises. Pour dĂ©sengager la compagnie de Salles, lâartillerie change de cible pendant que le reste du bataillon de Mahias et le bataillon du 143e attaquaient des deux cĂŽtĂ©s pour repousser les ailes ennemies. Salles se retire dans le bois, et le bataillon dâinfanterie de marine reformĂ© consolide ses positions sur le terrain quâil avait gagnĂ©.
Pendant que l'avant-garde française délogeait les Chinois des collines autour de Phong Cot, le reste de la colonne de Négrier continuait de passer le Luc Nam. à la tombée de la nuit, toute la colonne française était en position au sud de Phong Cot.
Pour profiter de la dĂ©sorganisation des Chinois, juste avant minuit, de NĂ©grier ordonna Ă Herbinger dâavancer et dâoccuper le village de Phong Cot. La prise par les Français des collines voisines lâavait rendu intenable, et les Chinois lâavaient Ă©vacuĂ© sous le couvert de lâobscuritĂ©. Herbinger ne rencontra aucune rĂ©sistance et le bataillon du 111e de Faure s'installa dans le village. Faure plaça trois des quatre compagnies du bataillon Ă lâintĂ©rieur de Phong Cot et celle de Verdier en position avancĂ©e au-delĂ du village.
4 janvier
Ă lâaube du 4 janvier, les Chinois contre-attaquent furieusement pour tenter de reprendre Phong Cot, attaque soutenue par lâartillerie chinoise du fort de l'Ouest. En quelques minutes, les attaquants avaient encerclĂ© la compagnie de Verdier en position avancĂ©e et isolĂ©e. Un jeune soldat du nom de Meffret traversa prudemment les lignes chinoises et atteignit Phong Cot, oĂč il dĂ©livra le message de Verdier demandant de l'aide au lieutenant-colonel Herbinger.
Herbinger, sous-estimant le danger, n'envoya de Phong Cot qu'une seule section du bataillon du 111e. Heureusement pour Verdier, il y avait dâautres officiers sur le terrain qui pouvaient mieux apprĂ©cier la gravitĂ© de la situation. Le capitaine Tailland, dont la compagnie dâinfanterie de marine Ă©tait postĂ©e sur une colline Ă lâouest de Phong Cot, pouvait voir que la compagnie de Verdier serait anĂ©antie Ă moins dâĂȘtre immĂ©diatement secourue. Sans attendre les ordres, il part Ă la rescousse avec sa troupe. Ă ce moment, les hommes de Verdier Ă©taient si pressĂ©s par les Chinois que leur capitaine leur ordonna de charger pour se dĂ©gager. Bien que Verdier ait Ă©tĂ© blessĂ© alors quâil menait l'assaut, son attaque audacieuse prit les Chinois complĂštement par surprise. Pendant qu'ils se replient et se regroupent, les marsouins de Tailland arrivent sur le flanc gauche de Verdier et sâalignent aux cĂŽtĂ©s des hommes de Verdier. Les deux compagnies françaises reprennent leur souffle, se reforment, contre-attaquent et repoussent les Chinois.
Les Chinois nâont pas tentĂ© de reprendre lâoffensive. De NĂ©grier sâavança vers les hauteurs occupĂ©es par lâinfanterie de marine et repĂ©ra les positions chinoises. La principale ligne de dĂ©fense chinoise consistait en une tranchĂ©e entre Phong Cot et la riviĂšre Siou Nien, qui protĂ©geait la route qui allait de Lien Son Ă Cao Say. Cette tranchĂ©e Ă©tait flanquĂ©e des deux cĂŽtĂ©s de deux forts sur un terrain surĂ©levĂ© (fort ouest et fort est). DerriĂšre la riviĂšre Siou Nien, sur les pentes infĂ©rieures du massif de Nui Bop, se trouvaient plusieurs forts chinois.
Dans la matinĂ©e du 4 janvier, de NĂ©grier lance plusieurs attaques pour repousser lâennemi de toutes ses positions. Le premier objectif français Ă©tait un fort sur une colline derriĂšre le village de Tay Toun, non loin des positions de l'infanterie de marine. Le bataillon de Mahias attaque et prend ce fort sans difficultĂ©. Ă sa droite, le bataillon du 111e , profitant de la confusion dans les rangs chinois causĂ©e par la contre-attaque de Verdier, avance sur les principales positions chinoises. Le bataillon charge Ă la baĂŻonnette, chassant ses dĂ©fenseurs avec la mĂȘme facilitĂ©. La section du lieutenant de Colomb se dirige alors vers une redoute chinoise dĂ©fendue par plusieurs centaines dâhommes. Sâil avait tentĂ© de prendre cette position, il aurait sans doute essuyĂ© de lourdes pertes. Mais comme la riviĂšre Ă©tait trop profonde Ă cet endroit pour la traverser, la section doit arrĂȘter son avance.
Pendant ce temps, le bataillon du 143e et les tirailleurs algĂ©riens reçurent lâordre de tourner la gauche ennemie. Lâartillerie française prend sous son feu le flanc des positions ennemies, puisque ces positions faisaient face au sud vers Chu. A 11h15, tout le camp retranchĂ© Ă©tait entre les mains des Français qui s'emparent de deux batteries dâartillerie Krupp abandonnĂ©es et de grandes quantitĂ©s de fusils, de vĂȘtements, de tentes et de nourriture. Plusieurs drapeaux chinois ont Ă©galement Ă©tĂ© pris, ainsi quâun certain nombre de mules et de chevaux.
Bilan
Les pertes françaises ont Ă©tĂ© relativement modĂ©rĂ©es : 19 morts et 63 blessĂ©s. Les Chinois ont abandonnĂ© 600 cadavres dans leur retraite, et leurs pertes totales ont dĂ» ĂȘtre bien plus Ă©levĂ©es. Un certain nombre de soldats chinois ont Ă©tĂ© faits prisonniers par les Français Ă Nui Bop et interrogĂ©s par la suite sur leur connaissance de lâordre de bataille de lâarmĂ©e du Guangxi. Ces hommes ont Ă©tĂ© libĂ©rĂ©s Ă la fin de la guerre avec un petit pĂ©cule.
Ordre du jour
Le 5 janvier 1885, le gĂ©nĂ©ral BriĂšre de lâIsle signe lâordre du jour suivant pour commĂ©morer la victoire de Nui Bop :
Deux brillants succĂšs pour le corps expĂ©ditionnaire ouvrent l'annĂ©e 1885. Le 3 janvier, aprĂšs une marche habilement dĂ©robĂ©e aux yeux de l'ennemi, le gĂ©nĂ©ral de NĂ©grier tombait, Ă quatre heures du soir, sur un cantonnement de 6,000 rĂ©guliers et, malgrĂ© leur vive rĂ©sistance, les mettait, en moins de deux heures, en pleine dĂ©route sans que l'obscuritĂ© de nuit lui permit de poursuivre ce premier succĂšs. Nos troupes couchaient sur les positions enlevĂ©es. Le lendemain, avant le jour, les Chinois, au nombre de 12,000, recommençaient la lutte par un vigoureux retour offensif. RepoussĂ©s, poursuivis et enfin rejetĂ©s sur Nui-Bop, ils Ă©taient en pleine dĂ©route avant midi. Le centre de rĂ©sistance de Nui-Bop, dĂ©fendu par huit forts solidement organisĂ©s, est entre nos mains, avec deux batteries Krupp, ainsi que tout le matĂ©riel de l'ennemi: tentes, vivres, munitions, armes et Ă©tendards. Les cadavres de 600 rĂ©guliers chinois tuĂ©s ont Ă©tĂ© abandonnĂ©s par les fuyards. De notre cĂŽtĂ©, MM. Verdier, capitaine au 111e, Simoni, lieutenant au mĂȘme corps, Larribe, sous-lieutenant d'infanterie de marine, sont blessĂ©s sans gravitĂ©. Parmi nos braves soldats, 19 tuĂ©s et 63 blessĂ©s[7].
Notes et références
- Harmant 1892, p. 113â137.
- Lecomte 1895, p. 155â176.
- Lung Chang, p. 332
- Maury 1888, p. 129â132.
- Thomazi 1931, p. 243.
- Thomazi 1934, p. 104â105.
- Lecomte, Lang-Son, 175
Sources et bibliographie
- En français
- Maurice Loir, L'escadre de l'amiral Courbet, Paris,
- Maurice Rollet de l'Isle, Au Tonkin et dans les mers de Chine, Paris, (lire en ligne)
- Huard, La guerre du Tonkin, Paris,
- A. Maury, Mes campagnes au Tong-King, Lyon, Vitte et Perrussel, , 323 p.
- Ernest Picard-Destelan, Annam et Tonkin : Notes de voyage d'un marin, Paris,
- J. Harmant, La vérité sur la retraite de Lang-Son, Paris,
- J. Lecomte, La vie militaire au Tonkin, Paris,
- J. Lecomte, Lang-Son : combats, retraite et négociations, Paris,
- Ămile Duboc, Trente cinq mois de campagne en Chine, au Tonkin, Paris,
- Auguste Thomazi, Histoire militaire de l'Indochine français, Hanoï,
- Auguste Thomazi, La conquĂȘte de l'Indochine, Paris,
- G. Dreyfus, Lettres du Tonkin, 1884â1886, Paris,
- S. Ferrero, Formose, vue par un marin français du XIXe siÚcle, Paris,
- En anglais
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Battle of NĂși Bop » (voir la liste des auteurs).
- (en) James F. Roche et L. L. Cowen, The French at Foochow, Celestial Empire, , totales49 (lire en ligne)
- (en) J. Rawlinson, China's Struggle for Naval Development, 1839â1895, Harvard, 1967
- (en) R. Wright, The Chinese Steam Navy, 1862â1945, Londres, 2001
- En chinois
- Lung Chang [éŸç« ], Yueh-nan yu Chung-fa chan-cheng [è¶ćèäžæłæ°ç, Vietnam and the Sino-French War] (Taipei, 1993)