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Grands Bancs de Terre-Neuve

Les Grands Bancs de Terre-Neuve[1], ou Grands Bancs, sont un ensemble de plateaux sous-marins au sud-est de Terre-Neuve, au bord du plateau continental nord-amĂ©ricain. Leur superficie totale est de 282 500 km2. Ils sont peu profonds (25 Ă  100 mĂštres, 200 mĂštres au maximum), et le courant du Labrador s'y mĂ©lange avec le Gulf Stream. Ces conditions crĂ©ent la plus importante zone halieutique du monde.

Grands Bancs
Situation des Grands Bancs et des courants marins
GĂ©ographie
Pays
Localisation
Coordonnées
45° 14â€Č 13″ N, 50° 59â€Č 21″ O
Baigné par
GĂ©ologie
Type
Banc océanique (en)
Carte

Description

Morphologie

Les Grands Bancs de Terre-Neuve se composent d’un groupe de bancs submergĂ©s dont le Grand Banc, le Banc de la Baleine, le Banc Ă  Vert et le Banc de Saint-Pierre. Les bancs sont situĂ©s Ă  un maximum de 200 mĂštres de profondeur et la plupart se trouvent entre 51 et 100 mĂštres de profondeur. La pente continentale est trĂšs escarpĂ©e le long des portions sud et est des bancs et les profondeurs peuvent dĂ©passer 1 000 mĂštres sur des distances relativement courtes. La pente situĂ©e au nord, au nord-est et Ă  l’ouest (du Banc de Saint-Pierre) est beaucoup plus graduelle. Le Grand Banc est creusĂ© en profondeur par des canyons sous-marins le long des zones sud et sud-est et son nez et sa queue s’étendent au-delĂ  de la zone Ă©conomique exclusive (ZEE) des 200 milles marins canadiens.

Conditions propices Ă  la vie animale

Les courants marins sont soulevĂ©s le long des talus du plateau continental ramenant Ă  la surface les nutriments du fond de l'ocĂ©an. Le phytoplancton peut ainsi se dĂ©velopper en grande quantitĂ©. Ce dernier sert de nourriture au zooplancton qui alimente ensuite la chaĂźne des animaux supĂ©rieurs. On retrouve en grandes quantitĂ©s de nombreuses espĂšces de poissons dont l'aiglefin, le capelan et surtout la morue de l'Atlantique, qui ont rendu les Grands Bancs cĂ©lĂšbres. En profondeur se trouvent toutes sortes de crustacĂ©s — comme le homard — et de mollusques, comme les pĂ©toncles.

On retrouve de grandes colonies d'oiseaux de mer, dont les fous de bassan, des puffins et des macareux qui s'y alimentent aux cÎtés de mammifÚres comme les phoques du Groenland, les dauphins et les baleines.

Conditions météorologiques

L'humiditĂ© qui s'Ă©vapore dans la masse d'air au-dessus de l'eau chaude du Gulf Stream se condense rapidement lorsqu'elle rencontre l'air froid qui se dĂ©place avec le courant du Labrador. Les Grands Bancs sont donc une zone propice au brouillard et au passage de tempĂȘtes, dont des ouragans en transformation extratropicale.

Histoire

DĂ©couverte

Plusieurs navigateurs, dont des Basques, des Bretons, des Portugais et des Normands semblent avoir connu l'existence des Grands Bancs au XVe siÚcle avant la découverte officielle de l'Amérique. Certains textes parlent de Bacalao, la terre des morues, probablement Terre-Neuve. Jean Cabot est le premier à avoir officiellement pris possession de la zone pour le roi d'Angleterre en 1497 ; ce qui répandit le secret dans toute l'Europe.

  • ReprĂ©sentations anciennes des Grands Bancs et des cĂŽtes de Terre-Neuve XVIIe-XVIIIe
  • Le grand banc de Terre Neuve. Carte-plan dressĂ©e en 1678 par  Georges Boissaye du Bocage (1626-1696).
    Le grand banc de Terre Neuve. Carte-plan dressée en 1678 par Georges Boissaye du Bocage (1626-1696).
  • Partie orientale du Canada ou de la Nouvelle France oĂč sont les provinces ou pays de Saguenay, Canada, Acadie etc. les peuples ou nations des Etechemins, Iroquois, Attiquameches etc., avec la Nouvelle Angleterre, la Nouvelle-Écosse, la Nouvelle Yorck et la Virginie, les isles de Terre Neuve, de cap Breton etc., le Grand Banc etc. / dressĂ©e sur les mĂ©moires les plus nouveaux par le P. Coronelli
    Partie orientale du Canada ou de la Nouvelle France oĂč sont les provinces ou pays de Saguenay, Canada, Acadie etc. les peuples ou nations des Etechemins, Iroquois, Attiquameches etc., avec la Nouvelle Angleterre, la Nouvelle-Écosse, la Nouvelle Yorck et la Virginie, les isles de Terre Neuve, de cap Breton etc., le Grand Banc etc. / dressĂ©e sur les mĂ©moires les plus nouveaux par le P. Coronelli
  • Carte des cĂŽtes mĂ©ridionales de l'isle de Terre Neuve comprenant les Isles Royale et de Sable avec la partie du Grand Banc, oĂč se fait la pĂȘche de la morue / dressĂ©e par Philippe Buache et comparĂ©e avec le plan de la carte de Mr. Popple en l'an 1733 ; Desbrulins sculp.
    Carte des cĂŽtes mĂ©ridionales de l'isle de Terre Neuve comprenant les Isles Royale et de Sable avec la partie du Grand Banc, oĂč se fait la pĂȘche de la morue / dressĂ©e par Philippe Buache et comparĂ©e avec le plan de la carte de Mr. Popple en l'an 1733 ; Desbrulins sculp.

La France, l'Espagne, le Portugal et Angleterre envoyĂšrent leurs flottes de pĂȘche, les Terre-neuvas, et se disputĂšrent sa possession[2]. La ressource Ă©tait tellement abondante et importante pour l'Ă©conomie qu'elle fut l'un des moteurs principaux du dĂ©veloppement du Canada et de la Nouvelle-Angleterre durant les siĂšcles suivants.

ÉvĂ©nements historiques

L'ouragan de Terre-Neuve de septembre 1775, aussi connu comme « ouragan de l'IndĂ©pendance » pour les AmĂ©ricains (Independence Hurricane), passa sur les Grands Bancs. Les autoritĂ©s estimĂšrent Ă  plus de 4 000 le nombre de victimes, ce qui le place au 8e rang des ouragans atlantiques les plus meurtriers.

Le séisme majeur du 18 novembre 1929 eut comme épicentre la partie sud-ouest des Grands Bancs. Il causa un glissement de terrain au fond de la mer qui coupa le cùble transatlantique de télégraphie et créa un raz-de-marée qui déferla sur la cÎte sud de Terre-Neuve et Est du Cap Breton. Vingt-sept personnes perdirent la vie sur la péninsule de Burin à Terre-Neuve.

SurpĂȘche

DĂ©limitation de la ZEE

Les dĂ©veloppements technologiques dans le domaine de la pĂȘche comme l'usage du chalut, des navires-usines et du sonar ont menĂ© Ă  une surpĂȘche des Grands Bancs durant la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle. Pour contrer un sĂ©rieux dĂ©clin dans les stocks de morues, le Canada a Ă©tabli une zone Ă©conomique exclusive (ZEE) de 200 milles marins (370 km) autour de ses cĂŽtes durant les annĂ©es 1970, afin de restreindre les prises par les autres pays. La ZEE couvre la presque totalitĂ© des Grands Bancs exceptĂ© l'extrĂ©mitĂ© Est du Bonnet flamand et sud des bancs. Les États-Unis et la France conservent cependant un droit de pĂȘche depuis le TraitĂ© de Paris de 1763.

Cette zone a Ă©tĂ© fortement contestĂ©e par les autres pays de l'Organisation des pĂȘches de l'Atlantique nord-ouest (OPANO) mais trĂšs bien vue par les pĂȘcheurs canadiens. La zone a finalement Ă©tĂ© reconnue durant les annĂ©es 1980 mais cela n'a pas empĂȘchĂ© les stocks de poissons de dĂ©cliner car les pĂȘcheurs Ă©trangers ont augmentĂ© leurs prises sur les extrĂ©mitĂ©s des Grands Bancs, non couverts par le ZEE, et ont Ă©tĂ© remplacĂ©s par une flotte plus importante du Canada Ă  l'intĂ©rieur de ceux-ci. À la fin des annĂ©es 1980, la diminution de la quantitĂ© de poissons pris devenait de plus en plus notable.

En plus de la surpĂȘche, les scientifiques dĂ©montrĂšrent que les conditions climatiques avaient changĂ© et contribuaient Ă  la baisse des stocks. La morue atlantique Ă©tait devenue une espĂšce en danger. Le gouvernement fĂ©dĂ©ral canadien dut avec rĂ©ticence agir et dĂ©clarer un moratoire sur la pĂȘche Ă  la morue en 1992, un arrĂȘt total des prises de morue. Ceci eut un impact dĂ©vastateur sur l'Ă©conomie de Terre-Neuve. Les pĂȘcheurs se voyaient privĂ©s d'une grande partie de leurs prises et les usines de transformation du poisson fermĂšrent ou diminuĂšrent radicalement leurs opĂ©rations. Le gouvernement dut apporter des mesures de soutien aux communautĂ©s de pĂȘche sur toute l'Ăźle et plusieurs terre-neuviens s'exilĂšrent dans le reste du Canada.

La guerre du flétan

La pĂȘche aux autres poissons demeura, en particulier celle au flĂ©tan. Une compĂ©tition entre les flottes Ă©trangĂšres et canadiennes pour cette ressource limitĂ©e mena Ă  un incident en 1994. Cette annĂ©e-lĂ , le Canada et l'OPANO avaient enregistrĂ© cinquante violations du traitĂ© sur la ZEE. Le nouveau ministre fĂ©dĂ©ral des pĂȘches, Brian Tobin, confia le mandat Ă  son ministĂšre et Ă  celui des Affaires extĂ©rieures d'entreprendre des discussions musclĂ©es avec les reprĂ©sentants de l'Union europĂ©enne pour qu'ils ramĂšnent leurs membres Ă  l'ordre. À l'hiver 1995, il ordonna Ă  PĂȘches et OcĂ©ans de saisir tout navire en contravention. Le 9 mars, un navire de patrouille aidĂ© par la Garde cĂŽtiĂšre canadienne et la Marine arraisonnĂšrent le bateau espagnol Estai qui venait de s'enfuir de la ZEE.

Le filet que l’Estai avait larguĂ© durant la poursuite fut rĂ©cupĂ©rĂ© et remorquĂ© Ă  Terre-Neuve. Devant la presse, le ministre montra le filet dont les mailles Ă©taient illĂ©galement petites. L’Estai fut saisi ce qui crĂ©a un incident diplomatique. Le gouvernement espagnol et l'Union europĂ©enne voulurent que le cas soit jugĂ© devant la Cour internationale de justice de La Haye en argumentant que le Canada avait saisi illĂ©galement le navire dans les eaux internationales mais le tribunal refusa.

Les ressources naturelles et leur exploitation

Le Canada continue les recherches hydrographiques, géologiques et océanographiques sur toute la cÎte Est canadienne. Le but visé est d'étendre la ZEE à tout le plateau continental sous les auspices de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer.

En plus de suivre les conditions des ressources de pĂȘches, on a dĂ©couvert des rĂ©serves de pĂ©trole dans la rĂ©gion ce qui a transformĂ© grandement l'Ă©conomie de Terre-Neuve. Les champs pĂ©trolifĂšres de Hibernia, Terra Nova et White Rose ont amenĂ© une activitĂ© dans la construction de plates-formes de forage, le service au secteur pĂ©trolier et des redevances Ă  la province qui en font maintenant une Ă©conomie en expansion. Le dĂ©fi est cependant de taille dans une zone oĂč les tempĂȘtes et les icebergs sont frĂ©quents. En particulier, une plate-forme de forage, l'Ocean Ranger, a coulĂ© lors d'une tempĂȘte violente le .

Culture populaire

  • On retrouve des descriptions du travail des pĂȘcheurs des Grands Bancs dans le roman Capitaines courageux, une histoire du banc de Terre-Neuve de Rudyard Kipling paru en 1897 ;
  • Le livre de Sebastian Junger, The Perfect Storm (1997) relate la perte d'un bateau de pĂȘche durant la TempĂȘte de l'Halloween 1991 sur les Grands Bancs et a Ă©tĂ© mis Ă  l'Ă©cran en 2000 ;
  • La sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e en 6 Ă©pisodes Entre terre et mer crĂ©Ă©e en 1997 par France 2 dĂ©crit assez bien le mode de vie des pĂȘcheurs normands et bretons et de leurs familles qui restaient seules au pays attendant le retour de leurs maris, frĂšres ou fils qui partaient sur les grands bancs pour pĂȘcher la morue 8 mois durant ;
  • Dans son livre biographique Le grand mĂ©tier, Jean Recher, capitaine yportais de chalutier, raconte dans le dĂ©tail la vie rude de ces "marins-pĂȘcheurs"[3].

Notes et références

  1. « Toponyme officiel », Ressources Naturelles Canada (consulté le )
  2. (en) A. J. M. Silva, « The fable of the cod and the promised sea. About portuguese traditions of bacalhau : Heritages and Memories from the Sea », Proceedings of the 1st International Conference of the UNESCO Chair in Intangible Heritage and Traditional Know-How: Linking Heritage, UniversitĂ© d'Evora, Évora, Barata, F. T et Rocha, J. M.,‎ , p. 130-143 (lire en ligne [PDF])
  3. Jean Recher, Le grand mĂ©tier : Journal d'un capitaine de pĂȘche de FĂ©camp, Paris, Éditions Pocket, coll. « Pocket », , 640 p. (ISBN 978-2-266-09460-3 et 2-266-09460-2).
  • Ken Drinkwater et Allyn Clarke, « Grands Bancs de Terre-Neuve », L'EncyclopĂ©die canadienne,‎ (lire en ligne)
  • Pierre de Morsier, « Les bancs de Terre-Neuve », Annales de GĂ©ographie, t. 44, no 252,‎ , p. 642-645 (lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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