François Antoine
François Antoine, né vers 1694 à Paris et mort le à Dax, est un gentilhomme français, sous-lieutenant de la Capitainerie royale de Saint-Germain-en-Laye et porte-arquebuse de Louis XV[1].
François Antoine | ||
François Antoine abat la BĂȘte du GĂ©vaudan. Estampe coloriĂ©e, BnF, recueil MagnĂ© de Marolles, vers 1765. | ||
Naissance | Paris |
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DĂ©cĂšs | (Ă 77 ans) Dax |
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Allégeance | Royaume de France | |
Arme | Capitainerie Royale de Saint-Germain-en-Laye | |
Grade | Sous-lieutenant | |
Faits d'armes | Avoir tuĂ© l'une des possibles bĂȘtes du GĂ©vaudan | |
Il est passĂ© Ă la postĂ©ritĂ© pour avoir prĂ©tendument tuĂ©, le , la cĂ©lĂšbre BĂȘte du GĂ©vaudan. Ce fait d'armes est contestĂ© puisque les attaques reprirent quelques semaines aprĂšs son dĂ©part du GĂ©vaudan[2].
Biographie
Né vers 1695[3] - [4], François Antoine appartient à la noblesse au rang d'écuyer[5]. François est son prénom et Antoine son patronyme[4]. Aucun « nom de terre » n'est accolé à ce dernier, contrairement aux affirmations de nombreux auteurs qui le nomment « de Beauterne ». Il s'agit en fait d'un titre de courtoisie utilisé par son fils cadet né en 1748[n 1] : Robert-François Antoine, dit « de Beauterne »[7].
Ses parents, Jean-Marc Antoine (Saint-Germain-en-Laye, 1669 - Versailles, 1737) et Marie Cécile Le Maire (décédée en 1746)[8], passent un contrat de mariage à Paris le chez Guillaume Levesque, notaire exerçant rue Saint-Séverin[9].
L'acte de baptĂȘme de François Antoine n'a pas Ă©tĂ© dĂ©couvert. Cela laisse supposer qu'il est nĂ© Ă Paris, oĂč ses parents se sont mariĂ©s quelque deux ans auparavant et d'oĂč sa mĂšre, fille d'un banquier en Cour de Rome, est originaire. En effet, l'Ă©tat civil parisien antĂ©rieur Ă 1860 a Ă©tĂ© totalement dĂ©truit en mai 1871. Il n'a Ă©tĂ© rĂ©tabli qu'Ă raison d'un tiers mais aucun acte de naissance n'a Ă©tĂ© reconstituĂ© pour François Antoine[10].
Il Ă©pouse successivement[11] :
- Marie Catherine Guérin, fille du bùtonnier des avocats de Paris, par contrat de mariage passé le chez Pierre Desplasses, notaire parisien exerçant rue de Buci[12] ;
- Ălisabeth Longy[13], fille du receveur des octrois de ChĂąlons-en-Champagne, le en l'Ă©glise Saint-Pierre-aux-BĆufs de Paris. L'acte, transcrit sur les registres de la paroisse Saint-Louis de Versailles oĂč demeurent les parties[14], prĂ©cise que contrairement Ă la coutume, les fiançailles et le mariage ont Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ©s le mĂȘme jour, summo mane (= au petit matin, c'est-Ă -dire le plus discrĂštement possible), aprĂšs dispense de bans accordĂ©e la veille par l'archevĂȘque de Paris, Charles Gaspard Guillaume de Vintimille du Luc, pour Raisons a luy connĂŒes. La paroisse Saint-Pierre-aux-BĆufs Ă©tait l'une de celles qui recevaient, Ă Paris, les mariages clandestins non autorisĂ©s des parents. La fille aĂźnĂ©e du couple, Ălisabeth Marie Françoise, naĂźtra le 24 septembre 1744[15], soit quatre mois aprĂšs le mariage. Ce dernier gagnait donc Ă ĂȘtre cĂ©lĂ©brĂ© en catimini... Ălisabeth Longy dĂ©cĂšde Ă Versailles le (= 24 nivĂŽse an 8), veuve non remariĂ©e, ĂągĂ©e de 84 ans (donc nĂ©e vers 1716)[16].
Le pĂšre et le grand-pĂšre paternel de François Antoine sont porte-arquebuse du roi. Lui-mĂȘme entame sa carriĂšre en 1720 dans le rĂ©giment royal des dragons rĂ©guliers de Beaucourt. Par la suite, Louis XV le charge d'Ă©radiquer les loups du royaume. Le , il est fait sous-lieutenant des chasses de la Capitainerie royale de Saint-Germain-en-Laye. Il accompagne le roi Ă l'Ă©tranger et lui sauve plusieurs fois la vie. Jean-Baptiste Oudry lui offre une peinture figurant la chasse au loup Ă Versailles[17] - [18]. Il est fait chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis le .
Parti prendre les eaux à Dax pour soigner ses rhumatismes, il y meurt le . Son acte de sépulture indique qu'il est ùgé de 77 ans (donc né vers 1694) et précise qu'il est enseveli dans la cathédrale[19].
Descendance
Jean François Antoine[3], fils aßné de François Antoine et capitaine aux chevau-légers de la maison du roi, succÚde à son pÚre en tant que « seul porte-arquebuse du roi. » C'est ensuite le fils cadet de François Antoine, Robert-François Antoine de Beauterne, qui hérite de l'office aprÚs son frÚre aßné[20].
Par la branche cadette des Antoine de Beauterne, la génération suivante est représentée par Norbert Antoine de Bauterne[3], devenu à son tour le porte-arquebuse de Napoléon Ier lorsque celui-ci rétablit l'office[21] au sein du service du grand veneur[22] de la cour impériale, dans la continuité des usages monarchiques de l'Ancien Régime[23].
Enfin, Robert-Augustin Antoine de Beauterne (1803-1846)[24], auteur d'ouvrages catholiques édifiants destinés aux adolescents[25], personnifie la sixiÚme génération de la famille Antoine[26].
La BĂȘte du GĂ©vaudan
En juin 1765, sous les ordres de Louis XV et de Ătienne-François de Choiseul, François Antoine succĂšde aux louvetiers normands D'Enneval pĂšre et fils pour tuer la BĂȘte du GĂ©vaudan[27]. « Le Roi vient de se dĂ©terminer Ă envoyer le sieur Antoine, son porte-arquebuse, avec six autres bons tireurs et de bons chiens, dans le GĂ©vaudan, pour y donner la chasse au monstre »[28]. Antoine reçoit l'ordre du roi le 8 juin et arrive au Malzieu le 22 du mĂȘme mois, accompagnĂ© de son fils Robert-François de Beauterne, jeune chevau-lĂ©ger de dix-sept ans[29].
Pour Antoine, la BĂȘte n'est rien d'autre qu'un loup. C'est ce qu'il Ă©crit dans l'une de ses nombreuses correspondances : les traces relevĂ©es n'offrent « aucune diffĂ©rence avec le pied d'un grand loup »[30]. Le porte-arquebuse ne parvient cependant pas immĂ©diatement Ă dĂ©busquer l'animal. Mis Ă mal par la gĂ©ographie du pays, il demande de nouveaux chiens en renfort[30]. Ă la mi-juillet, il s'installe avec ses gardes au Besset, paroisse de La Besseyre-Saint-Mary.
Le 9 aoĂ»t, la BĂȘte est dĂ©busquĂ©e prĂšs de ServiĂšres mais elle sâenfuit sans quâon puisse la tirer. Les chasseurs rebroussent chemin vers le Besset. Moins de trois heures plus tard, la BĂȘte vient tuer une vachĂšre Ă moins de 500 mĂštres des fenĂȘtres du chĂąteau[31]. Le 16 du mĂȘme mois, il fait incarcĂ©rer trois membres du clan Chastel Ă Saugues, aprĂšs une altercation avec ses propres gardes de la capitainerie royale.
Le 18 septembre, aprĂšs de long mois de traque et d'Ă©checs, il se rend prĂšs de Saint-Julien-des-Chazes en Auvergne, oĂč la BĂȘte n'y a jamais Ă©tĂ© signalĂ©e. Il voit un Ă©norme loup venir Ă lui et lui tire dans l'Ćil avec sa canardiĂšre, chargĂ©e de 5 coups de forte poudre, de 35 postes Ă loup et dâune balle de calibre. Ce coup le fait reculer de deux pas. Le loup tombe mais se relĂšve aussitĂŽt. Antoine, qui nâa pas eu le temps de recharger, tire son couteau de chasse et retourne sa canardiĂšre pour assommer lâanimal avec la crosse. Le garde-chasse Rinchard accourt et tire un coup de carabine. Le loup avance de quelques mĂštres et meurt[32]. Antoine en conclut qu'ils s'agit de la BĂȘte et la fait aussitĂŽt ouvrir par un chirurgien de Saugues. La dĂ©pouille arrive jusqu'Ă Versailles. Le Roi dĂ©clare la BĂȘte du GĂ©vaudan officiellement morte et autorise son porte-arquebuse Ă porter dans ses armes un loup mourant pour honorer son fait d'armes[33] - [n 2].
Pourtant, les massacres reprennent en GĂ©vaudan aprĂšs le dĂ©part des chasseurs. LâIntendant de justice de Clermont-Ferrand rapporte dans une lettre les soupçons Ă l'encontre du porte-arquebuse du Roi : « On a dit que rien ne prouvait que le loup tuĂ© fĂ»t lâauteur de tous les maux »[34]. Pour Ollier, curĂ© de LorciĂšres, François Antoine « a trompĂ© et la Cour et les peuples en disant que c'est un loup ». BĂšs de la BessiĂšre, consul de Saint-ChĂ©ly-d'Apcher, dĂ©clare que « l'animal tuĂ© par Antoine n'Ă©tait pas la BĂȘte qui avait fait tant de dĂ©gĂąts ; Antoine tua trois loups dans la mĂȘme chasse et les conduisit Ă Paris en poste; mais sans doute il n'en montra qu'un pour mieux jouer son rĂŽle et faire croire que c'Ă©tait la fameuse BĂȘte. Peut-ĂȘtre cĂ©da-t-il les autres Ă des gens qui les portĂšrent çà et lĂ pour gagner de l'argent ».
MalgrĂ© le mĂ©contentement gĂ©nĂ©ral et la consternation des curĂ©s, François Antoine ne reviendra pas en GĂ©vaudan. Il soutiendra qu'il a bien tuĂ© la BĂȘte, bien que les actes de sĂ©pulture locaux de 1766 et 1767 contredisent ses affirmations.
Fiction
- Dans le tĂ©lĂ©film La BĂȘte du GĂ©vaudan de 1967, Guy TrĂ©jan tient le rĂŽle « D'Antoine de Beauterne ».
- Johan Leysen prĂȘte ses traits au personnage de « Beauterne » dans Le Pacte des loups de Christophe Gans sorti en 2001.
- Dans le tĂ©lĂ©film La BĂȘte du GĂ©vaudan de Patrick Volson de 2003, c'est Louis-Do de Lencquesaing qui incarne « De Beauterne ».
- En 2015, « Beauterne » est le personnage central de La MalbĂȘte, une bande dessinĂ©e d'AurĂ©lien Ducoudray et de Pierre-Yves Berhin [35].
Notes et références
Notes
- Selon l'historien Jean-Marc Moriceau, Robert-François Antoine de Beauterne est le « troisiÚme fils de François » et « gendarme de la garde du roi[6] ».
- [image] Blason des Beauterne avec l'adjonction du loup mourant.
Références
- Alain Bonnet, Chronologie et documentation raisonnées, 2008.
- Michel Louis, La BĂȘte du GĂ©vaudan, L'innocence des loups, 1992, Perrin (Tempus).
- BĂ©zard 1924, p. 174.
- Colin 1997, p. 51.
- Colin 1997, p. 50.
- Moriceau 2008, p. 12.
- Colin 1997, p. 49-50.
- Geneanet.
- Archives nationales. Vue 15/17.
- Le premier acte de naissance reconstitué au nom d'Antoine ne date que de 1734. Recherche faite par Thierry Couture le 9 mars 2019 sur le site Internet des Archives de Paris.
- Geneanet.
- Archives nationales. Minutier central. Vue 1/18.
- Geneanet..
- Archives départementales des Yvelines. Versailles, paroisse St Louis, BMS. Vues 14/66 et 42/66.
- Archives départementales des Yvelines. Versailles, paroisse St Louis, BMS. Vue 51/72.
- Archives départementales des Yvelines. Versailles, actes de décÚs. Vue 61/170.
- La Chasse au loup, J-B Oudry, 1746, Musée du Louvre.
- Notice des tableaux exposés dans les galeries du Musée impérial du Louvre..., Frédéric Villot, 1855.
- Archives départementales des Landes. Dax, paroisse Notre-Dame, BMS.Vue 92/374.
- Colin 1997, p. 49-51.
- Colin 1997, p. 51-52.
- Pierre Branda, Pierre-François Pinaud, Clémence Zacharie et Thierry Lentz (dir.), Quand Napoléon inventait la France : dictionnaire des institutions politiques, administratives et de cour du Consulat et de l'Empire, Paris, Tallandier, coll. « BibliothÚque napoléonienne », , 766 p. (ISBN 978-2-84734-410-3), p. 330.
- Charles-Ăloi Vial, Les chasses impĂ©riales de NapolĂ©on Ier (thĂšse), Ăcole des chartes, 2011, prĂ©sentation en ligne.
- Catalogue général de la BnF, notice de personne, lire en ligne.
- (en) Frank Paul Bowman, French Romanticism : Intertextual and Interdisciplinary Readings, Baltimore / Londres, Johns Hopkins University Press, coll. « Parallax : re-visions of Culture and Society », , XII-243 p. (ISBN 0-8018-3884-3), p. 37.
- Colin 1997, p. ?.
- Michel Louis, La BĂȘte du GĂ©vaudan, 1992 et 2003, Perrin.
- L'intermédiaire no 1733, vol.XCIII.
- Jean-Marc Moriceau, Histoire du méchant loup : la question des attaques sur l'homme en France, XVe-XXe siÚcle, Paris, Pluriel, coll. « Pluriel », , 634 p. (ISBN 978-2-8185-0505-2).
- Félix BuffiÚre, Ce tant rude Gévaudan [détail des éditions], tome II, p. 1162.
- Lettre du 9/08/1765, Archives départementales du Puy-de-DÎme.
- François Fabre, La bĂȘte du GĂ©vaudan, Ă©dition complĂ©tĂ©e par Jean Richard, Ă©dition De BorĂ©e, 2006, chapitre XII.
- Mazel et Garcin 2008, p. 132.
- LâAnnĂ©e LittĂ©raire, octobre 1765.
- Nouvelle sĂ©rie 2015 : La MalbĂȘte sur le site de l'Ă©diteur.
Voir aussi
Bibliographie
- Yvonne BĂ©zard, « Les porte-arquebuses du Roi », Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, Versailles, Librairie LĂ©on Bernard,â , p. 142-174 (lire en ligne).
- Serge Colin, « Autour de la BĂȘte du GĂ©vaudan : le vĂ©ritable Ă©tat-civil du porte-arquebuse du roi », Bulletin historique de la SociĂ©tĂ© acadĂ©mique du Puy-en-Velay et de la Haute-Loire, t. LXXIII,â , p. 45-52.
- Serge Colin, « Les traqueurs de la BĂȘte du GĂ©vaudan : lĂ©gende, errements, rĂ©alitĂ© », Revue du GĂ©vaudan, des Causses et des CĂ©vennes, Mende, SociĂ©tĂ© des lettres, sciences et arts de la LozĂšre, no 23,â 1er semestre 2007, p. 117-133 (ISSN 0484-8691).
- Sylvain GagniĂšre, « La BĂȘte du GĂ©vaudan Ă©tait bien un loup », Revue du GĂ©vaudan, des Causses et des CĂ©vennes, Mende, SociĂ©tĂ© des lettres, sciences et arts de la LozĂšre, no 6 (nouvelle sĂ©rie),â , p. 142-146.
- Ăric Mazel et Pierre-Yves Garcin (photographies de Didier Daarwin), La bĂȘte du GĂ©vaudan Ă travers 250 ans d'images, Marseille, Gaussen, coll. « Les musĂ©es de l'imaginaire », , 141 p. (ISBN 978-2-35698-003-8).
- Jean-Marc Moriceau, La bĂȘte du GĂ©vaudan : 1764-1767, Paris, Larousse, coll. « L'histoire comme un roman », , 284 p. (ISBN 978-2-03-584173-5).
- Edmond Du Fornel Du Roure de Paulin (baron), « La BĂȘte du GĂ©vaudan dans les armoiries de la famille Antoine », Bulletin historique et scientifique de l'Auvergne, Clermont-Ferrand, AcadĂ©mie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, 2e,â , p. 292-295 (lire en ligne)TirĂ© Ă part : Edmond Du Fornel Du Roure de Paulin (baron), La BĂȘte du GĂ©vaudan dans les armoiries de la famille Antoine : communication faite Ă l'AcadĂ©mie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, le 2 aoĂ»t 1906, Clermont-Ferrand, Louis Bellet, imprimeur-libraire, , 8 p. (lire en ligne).
- Bernard Velay, « La BĂȘte du GĂ©vaudan « mise en scĂšne » dans le blason de la famille Antoine grĂące Ă une augmentation d'armoiries », Revue du GĂ©vaudan, des Causses et des CĂ©vennes, SociĂ©tĂ© des lettres, sciences et arts de la LozĂšre, no 32 « Actes du colloque sur la BĂȘte du GĂ©vaudan »,â 2e semestre 2011, p. 103-116.
Articles connexes
Liens externes
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