Factory
La Factory est l'atelier d'artiste situĂ© Ă New York, qu'a ouvert Andy Warhol le [1]. Le groupe The Velvet Underground s'y produit. Le lieu a servi Ă la production des Ćuvres pop art de Warhol.
Type |
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Localisation |
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Coordonnées |
40° 44âČ 50âł N, 73° 59âČ 02âł O |
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Un atelier et un lieu de socialisation
Une grande partie de lâĆuvre de Andy Warhol consiste Ă interroger la production dâimages. Images de stars, unes de journaux, symboles de lâAmĂ©rique.
Ainsi de la mĂȘme maniĂšre que la Factory a servi Ă produire Ă la chaĂźne les sĂ©rigraphies les plus chĂšres de lâhistoire de lâart, ce lieu a servi aussi Ă Warhol Ă produire du mythe, de lâimage sociale en quantitĂ© industrielle, et propulser dans la grande constellation des VIP quiconque mettrait les pieds chez lui.
La Factory, la « fabrique » donc, se devait dâĂȘtre ce loft des annĂ©es 1960/1970, cet endroit oĂč on entre anonyme et dâoĂč on sort « Superstar » (selon la terminologie de Warhol).
SituĂ© dâabord, en janvier 1964, au cinquiĂšme Ă©tage du 231 East sur la 47e rue[1] (« Silver Factory », car ses murs Ă©taient recouverts de peinture argentĂ©e) puis installĂ© en 1968 au sixiĂšme Ă©tage du 33 Union Square West[2] (dans le mĂȘme immeuble que la permanence du Parti communiste), cet atelier allait donc accueillir tout ce que Warhol et ses acolytes pourraient produire. Galerie dâexposition, studio de tournage, salle de projection, salle de concert, boĂźte de nuit, tous les Ă©vĂ©nements Ă©taient prĂ©textes Ă la rĂ©union du gratin de la jet set new-yorkaise qui venait sâencanailler allĂšgrement avec tous les paumĂ©s, dĂ©pressifs, toxicos dont Warhol aimait sâentourer dans des fĂȘtes gĂ©antes oĂč les classes sociales Ă©taient abolies, tout le monde logeait Ă la mĂȘme enseigne du super-star-system underground. De fait, la cĂ©lĂ©britĂ© importait peu, mĂȘme si de nombreuses figures du monde de lâart, des mĂ©dias ou du cinĂ©ma traĂźnaient dans les parages, de Salvador DalĂ Ă William Burroughs, de Dylan Ă De Niro. Ce qui importait, câĂ©tait dâĂȘtre une star, et pour ĂȘtre une star, il suffisait de le dire, et dâĂȘtre lĂ .
Toutes les Superstars warholiennes quâengendra la Factory avaient leur spĂ©cialitĂ©. Gerard Malanga Ă©tait poĂšte et photographe, Nico chanteuse, Ultra-violet plasticienne, etc., mais pour lâessentiel, cela nâĂ©tait que purement accessoire, puisque absolument pas nĂ©cessaire.
Superstars
- Paul America
De son vrai nom Paul Johnson (1945-1982). Une belle gueule remarquée dans une discothÚque qui électrise son entourage tant féminin que masculin. Sa prestation dans My Hustler en 1965 le transforme en icÎne gay. La drogue lui vaut de la prison à plusieurs reprises. Il meurt renversé par une voiture en 1982.
De son vrai nom John Holder Jr (1947-1985). Jackie Curtis est un caméléon qui apparaßt alternativement en homme ou en femme. Warhol qui le rencontre en 1967 dira : « Jackie Curtis n'est pas une drag queen. Jackie est un artiste, un pionnier sans frontiÚres ». De fait, il influencera des personnalités du Glam rock qui fréquentent à cette époque les clubs new-yorkais, comme David Bowie. PoÚte, acteur de films (Flesh, Women in Revolt), la grande passion de Jackie Curtis fut le théùtre en tant qu'acteur et écrivain. Meurt d'overdose en 1985.
Né en 1948, découvert à 18 ans par Andy Warhol qui est fasciné par son corps d'éphÚbe et le filme nu à plusieurs reprises, faisant de lui un sex-symbol du cinéma underground. Il devient un acteur confirmé : Paul Morrissey, Francis Ford Coppola, John Waters, Steven Soderberg, Serge Gainsbourg, Jacques Rivette, Catherine Breillat, Blake Edwards... font appel à lui. Il est nommé Chevalier dans l'ordre des Arts et des Lettres en 2012.
Née James L. Slattery (1944-1974). Actrice warholienne transgenre (Flesh et Women in Revolt) obsédée par Marilyn Monroe, qui est décédée en 1962. Amie de Jackie Curtis, elle rencontre Warhol en 1967. Elle s'essayera dans le cinéma indépendant mais meurt de leucémie à 29 ans à la suite d'injections d'hormones.
- Eric Emerson
Eric Emerson (1945-1975). Superstar à la bisexualité revendiquée et ravageuse. Danseur classique, acteur warholien dans plusieurs productions dont Chelsea Girls et Heat, puis chanteur du groupe glam The Magic Tramps. Trouvé mort dans une rue de Manhattan à cÎté de sa bicyclette.
- Andrea âWhipsâ Feldman
Andrea Feldman (1948-1972). Actrice warholienne (Trash, Heat (en) ) et de nature exhibitionniste. Se suicide en se jetant par la fenĂȘtre, tenant une canette de Coca (chargĂ©e en drogues diront certains) et un rosaire dans les mains, devant le parterre abusivement assemblĂ© de ses ex-boyfriends ! Ceci Ă trois semaines de la sortie de Heat oĂč elle tient un rĂŽle important. Le New-York Times salua sa prestation tout en la qualifiant de non-performance tant elle correspond au rĂŽle qu'elle y joue.
Née en 1952, elle est la fille d'Al Hansen (Fluxus) et la mÚre du chanteur Beck. Actrice warholienne, elle joue à 13 ans le rÎle principal de Prison : elle est la plus jeune des Superstars. Elle apparaßt dans Warhol's Restaurant, 10 Beautiful Girls et 10 More Beautiful Girls. Faisant partie de sérail artistique new-yorkais, elle formera des groupes musicaux (comme The Whippets avec Janet, la fille de Jack Kerouac) et sera cofondatrice du Troy Café à Los Angeles.
- 'Baby' Jane Holzer
Née Jane Brookenfeld en 1940. Fille d'un promoteur immobilier new-yorkais, actrice warholienne dans Soap Opera, Couch et Ciao! Manhattan. Mariée à un riche héritier, elle devient par la suite collectionneur d'art et productrice de films.
Beaucoup plus qu'une Superstar. Né en 1943, diplÎmé en Arts (School of Industrial Art et Wagner College), il est engagé en 1963 par Warhol comme assistant pour ses sérigraphies et devient son bras droit. C'est Gérard Malanga qui lui présente le Velvet Underground en décembre 1965, qu'il accompagne de sa danse du fouet lors des concerts. Cofondateur du magazine Interview en 1969. Il quitte la Factory en 1970 (certains diront viré par Paul Morrissey). PoÚte, acteur warholien, réalisateur, photographe, conservateur et archiviste, il est un témoin des années Factory.
- Mario Montez
Né René Rivera. Acteur warholien de 1963 à 1968 et icÎne gay.
De son vrai nom Billy Linich (1940-2016). Ancien coiffeur, serveur et décorateur de théùtre, il rencontre Andy Warhol en 1963 et ils restent trÚs amis aprÚs une courte liaison. Il est à l'origine du look argenté de la Silver Factory. Il y installe un laboratoire photographique dans les toilettes et y vit en tel reclus que croiser Billy Name devient un sujet de plaisanterie. On lui doit l'iconographie de la Factory (avec Stephen Shore et Nat Finkelstein). Il part en 1970 en laissant un mot sur la porte : « Andy, je ne suis plus là mais je vais bien »[3].
De son vrai nom Christa PÀffgen (1938-1988). ModÚle, actrice et chanteuse d'origine allemande. CélÚbre pour sa collaboration avec The Velvet Underground, elle fit une carriÚre solo (album Chelsea Girl, 1967). CélÚbre aussi pour ses nombreuses romances : Jim Morrison, Brian Jones, Lou Reed, John Cale, Iggy Pop, Alain Delon (avec qui elle eut un fils) et Philippe Garrel qui en fit l'actrice de plusieurs de ses films des années 1970 : La cicatrice intérieure, Le Berceau de cristal⊠Décédée à Ibiza en 1988.
- Ondine
De son vrai nom Robert Olivo (1937-1989). RencontrĂ© par Warhol dans une orgie en 1961 ou 1962, il devient un personnage central Ă la Factory entre 1963 et 1967. Acteur (son surnom vient de la piĂšce de Jean Giraudoux), il joua dans huit films entre 1964 et 1967 dont Chelsea Girls. Son Ă©toffe tient Ă son charisme et Ă son bagout, personnage en reprĂ©sentation permanente « mieux qu'une performance thĂ©Ăątrale car vraiment vĂ©cu » (Billy Name). En 1969, Ondine se range â travail, relation stable â et Warhol constate que « l'Ă©clat Ă©tait parti ». Il vĂ©cut par la suite comme guide et conteur de l'Ăšre Factory « Ă la dĂ©rive dans une mer dĂ©solĂ©e de visages incomprĂ©hensifs » (Mary Woronov). Il meurt de cirrhose en 1989.
- Brigid Polk
De son vrai nom Brigid Berlin (nĂ©e en 1939), elle est habituĂ©e jeune Ă frĂ©quenter les cĂ©lĂ©britĂ©s et le pouvoir : Clark Gable, Joan Crawford mais aussi Lyndon Johnson ou J. Edgar Hoover font partie des connaissances de ses parents. GavĂ©e de mĂ©dicaments, elle souffre de troubles obsessionnels compulsifs et d'embonpoint. Elle entre dans le cercle des intimes de Warhol en 1964 et dĂ©veloppe une activitĂ© artistique dĂ©bordante. Citons ses Tit paintings (peint avec ses seins), son Cock Book (oĂč chacun est invitĂ© Ă partager son interprĂ©tation du pĂ©nis) ou son travail sur les PolaroĂŻds. En 1975 elle devient employĂ©e au magazine Interview lancĂ© par Warhol. C'est une intime qui lui restera fidĂšle.
Née en 1943. Warhol est fasciné par sa facilité, son aura d'élue qui a tout, beauté et argent. Il en fait son alter ego. Une année passée à la Factory (1965-1966) l'érige en icÎne des sixties, la plus connue des Superstars dont elle devient l'archétype. Elle inspire Femme Fatale au Velvet Underground. Mannequin et actrice warholienne dans une quinzaine de films, elle part sur une dispute et se lie un temps à Bob Dylan, qui lui dédie Just Like A Woman. La suite est une longue descente dans la drogue. De retour dans le giron familial californien, elle meurt d'overdose en 1971 à 28 ans.
Valerie Solanas (1936-1988) peut-elle ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une Superstar ? Enfant abandonnĂ©e, clocharde qui paya ses Ă©tudes en se prostituant, elle fut actrice dans des films d'Andy Warhol et tenta de l'assassiner (elle lui tira dessus, il fut dĂ©clarĂ© cliniquement mort). Elle devint une icĂŽne fĂ©ministe radicale. DroguĂ©e borderline, elle mourut comme elle naquit : dans la misĂšre.
- Ingrid Superstar
Ingrid von Schefflin (d'autres orthographes existent), grande blonde osseuse trÚs énigmatique et un peu folle, est à l'origine du mot « Superstar »[4]. Actrice warholienne dans plusieurs films entre 1965 et 1967, date à laquelle elle quitte la Factory puis part à la dérive : drogue, prostitution, déchéance physique. Elle disparaßt en 1986, sortie acheter des cigarettes et jamais revenue.
- International Velvet
Née Susan Bottomly en 1950. Fille d'un procureur de Boston, c'est une autre beauté fatale, « pauvre petite fille riche », et actrice warholienne. Elle combla le départ d'Edie Sedgwick entre 1966 et 1967 puis prit le large vers Hawaï.
Née Isabelle Dufresne (1935-2014). Peintre française, elle part à New York. Elle rencontre Salvador Dalà et Andy Warhol qui en fait la premiÚre Superstar en 1964. Ses cheveux couleur lila lui donnent son surnom. Importante à la Factory jusqu'en 1967, elle y suit la scÚne artistique américaine des années soixante : Jasper Johns, Robert Rauschenberg et James Rosenquist. Se retire sur la CÎte d'Azur.
Surnom trouvé par Andy Warhol pour Janet Hoffmann (née en 1938), assidue à la Factory en 1967 et 1968. Actrice pour Warhol, elle se brouilla avec lui et tourna avec d'autres réalisateurs. Elle passa à l'écriture pour des publications comme le Village Voice et des livres, notamment sur la Factory. Devient peintre en Californie.
- Chuck Wein
Plus un agent qu'une Superstar, Chuck Wein (1940-2008) est diplĂŽmĂ© de Harvard en 1961. Il amĂšne Edie Sedgwick Ă la Factory en janvier 1965, et Warhol les invite Ă son exposition Ă la galerie Ileana Sonnabend Ă Paris la mĂȘme annĂ©e. Intensivement droguĂ© et fou d'occultisme, il part voyager Ă travers le Monde.
De son vrai nom Haroldo Danhakl (1946-2015), d'origine portoricaine et transgenre. Elle est la Holly de Walk on the Wild Side de Lou Reed (qui commence ainsi : Holly came from Miami F.L.AâŠ). Actrice remarquĂ©e dans Flesh, elle poursuit une carriĂšre au cinĂ©ma, au thĂ©Ăątre, au cabaret et Ă la tĂ©lĂ©vision. ExilĂ©e Ă Hollywood.
Née en 1943. Elle danse lors des exhibitions Exploding Plastic Inevitable à la Factory. Actrice warholienne, elle tourne dans plusieurs films entre 1965 et 1967 dont Chelsea Girls. Elle poursuit sa carriÚre en jouant dans de nombreux films culte de la série B américaine. Mary Woronow est actrice et écrivain.
- Citons aussi Lois Waldon, Geraldine Smith, David Perlman, Dorothy Dean, Jane Forth, Pat Hartley, le modĂšle amĂ©ricain Ivy Nicholson, qui se mariera avec le rĂ©alisateur John Palmer Ă la suite de leur rencontre lors d'un tournage d'un film de Warhol, mĂšre de PĂ©nĂ©lope Palmer, Geri Miller, Naomi LevineâŠ
à partir de l'attentat de Valerie Solanas contre lui en 1968, Warhol réduit son accessibilité. L'Úre des Superstars prend fin.
RĂ©sidents et visiteurs
Ont fréquenté la Factory : Anita Pallenberg, Stephen Shore, Taylor Mead, The Velvet Underground (Lou Reed, Sterling Morrison, Moe Tucker et John Cale), Freddie Herko, Brian Jones, Mick Jagger, Paul Morrissey, Dennis Hopper, Truman Capote, Fernando Arrabal, Penny Arcade, Bobby Driscoll, Herbert Muschamp, John Giorno, Henry Geldzahler, Jack Smith et bien d'autres encore.
Anecdotes
L'histoire de la Factory fourmille d'anecdotes qui assoient son mythe.
- Il ne faut pas se fier Ă l'image de fĂȘte perpĂ©tuelle que dĂ©gage la Factory ; jour et nuit, c'Ă©tait un lieu de travail intensif. « Ce n'Ă©tait pas appelĂ© The Factory pour rien. C'Ă©tait une chaĂźne d'assemblage de sĂ©rigraphies. Pendant qu'une personne fabriquait une sĂ©rigraphie, une autre pouvait filmer un bout d'essais. Tous les jours il y avait quelque chose de neuf » (John Cale).
- The Couch - Canapé mythique de la Silver Factory, trouvé dans la 47e rue par Billy Name, et sur lequel s'avachissent les nombreux protagonistes des party données alors. Sera utilisé dans les films Couch et Blow job. Il sera volé dans la rue lors du déménagement de la Factory en 1968.
- C'est Andy Warhol qui est l'auteur de la citation célÚbre promettant « Dans le futur, chacun aura droit à 15 minutes de célébrité mondiale » (« In the future, everyone will be world-famous for 15 minutes. »).
- Nombres d'habituĂ©s de la Factory apparaissent dans la scĂšne de fĂȘte du film Macadam Cowboy, tournĂ©e fin juin 1968 alors que Warhol Ă©tait hospitalisĂ© Ă la suite de son agression par Valerie Solanas.
- Ă 17 ans, le photographe Stephen Shore rencontre Warhol, qui lui permet de prendre des photographies de la Silver Factory, ce qu'il fait pendant trois ans. Autres photographes : Billy Name et Nat Finkelstein.
Notes et références
- (en) Andy Warhol and his superstars - 1964
- (en) Andy Warhol and his superstars - 1968
- (en) Andy Warhol Chronology - 1970 - 1974
- « A friend of mine named Ingrid from New Jersey came up with a new last name, just right for her new, loosely defined show-business career. She called herself "Ingrid Superstar". I'm positive Ingrid invented that word. At least, I invite anyone with "superstar" clippings that predate Ingrid's to show them to me. The more parties we went to, the more they wrote her name in the papers, Ingrid Superstar, and "superstar" was starting its media run. Ingrid called me a few weeks ago. She's operating a sewing machine now. But her name is still going. It seems incredible, doesn't it? » â Andy Warhol, The Philosophy of Andy Warhol