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Canopus (essai nucléaire)

Canopus, ou opération Canopus, est le nom de code pour le premier test par la France d'une arme à fusion nucléaire, dite bombe H. Ce trentième essai nucléaire français fut effectué le au-dessus de l'atoll de Fangataufa, en Polynésie française.

Canopus
Puissance nucléaire Drapeau de la France France
Localisation Fangataufa
Drapeau de la Polynésie française Polynésie française
Date
Type d'arme nucléaire Bombe H
Puissance 2,6 Mt
Type d'essais Atmosphérique
Altitude du site 550 m

Historique

Fangataufa en 2001.

En 1966, la France a Ă©tĂ© en mesure d'utiliser la fusion d'isotopes de l'hydrogène pour doper la fission du plutonium. Robert Dautray, physicien nuclĂ©aire, est choisi par le CEA pour mener l'effort de dĂ©veloppement visant Ă  construire une arme Ă  deux Ă©tages (fission-fusion). La France n'a pas alors la capacitĂ© de produire les matĂ©riaux nĂ©cessaires pour les deux Ă©tapes du dispositif thermonuclĂ©aire. L'achat de 151 tonnes d'eau lourde Ă  la Norvège et de 168 tonnes supplĂ©mentaires provenant des États-Unis est nĂ©cessaire. Cette eau lourde est mise dans les rĂ©acteurs nuclĂ©aires Celestins I et II de l'usine de Marcoule en 1967 pour produire le tritium nĂ©cessaire pour le dispositif.

La France teste le nouveau dispositif dans le cadre d'une série de cinq tirs effectués en Polynésie française entre juillet et . Fangataufa est choisi comme l'emplacement de l'explosion en raison de son isolement, à l'écart de la base principale se situant à Moruroa.

Le général de Gaulle doit assister à ce premier tir d'une bombe H, mais à la suite des évènements politiques de Mai 68, il est remplacé par Robert Galley, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la Recherche scientifique et des Questions atomiques et spatiales du gouvernement Maurice Couve de Murville, qui commande le tir Canopus depuis la passerelle du navire amiral, le croiseur antiaérien De Grasse.

C'est également le seul essai français où les autorités font évacuer un territoire : tous les habitants de l'atoll de Tureia, situé à une centaine de kilomètres au nord de Fangataufa, sont invités à rejoindre Papeete sans que soient officiellement évoqués les risques de retombées radioactives[1]. Les îles concernées sont Mangareva, Pukarua, Reao, Tuamotu-Gambier et Tureia[2].

Caractéristiques

La bombe, d'une masse d'environ trois tonnes[3], est suspendue Ă  partir d'un grand ballon rempli d'hydrogène. Elle explose Ă  18 h 30 min 00.5 s GMT Ă  une altitude de 550 mètres, avec un rendement de 2,6 mĂ©gatonnes, ce qui en fait l'essai le plus puissant jamais rĂ©alisĂ© par la France.

Par la réussite de sa détonation, la France devient la cinquième nation thermonucléaire, après les États-Unis, l'Union soviétique, le Royaume-Uni et la République populaire de Chine. Charles de Gaulle déclare « C’est un magnifique succès pour l’indépendance et la sécurité de la France »[2].

Soutien de la Marine nationale française : la force Alfa (1966-1968)

En 1964-1966, la Marine nationale française mobilise plus de 100 bâtiments pour la construction des installations du Centre d'expĂ©rimentation du Pacifique (CEP) en PolynĂ©sie française, comprenant un quartier-gĂ©nĂ©ral Ă  Papeete, la BA 185 avancĂ©e Ă  Hao (460 km au nord-ouest de Moruroa), le polygone de tir atomique de Moruroa et le polygone de tir atomique de Fangataufa. Ă€ l'Ă©tĂ© 1965[4], la Marine nationale française crĂ©e le Groupe aĂ©ronaval du Pacifique (dit groupe Alfa puis force Alfa) de plus de 3 500 hommes, comprenant le porte-avions Foch et six autres bâtiments (les escorteurs d’escadre Forbin, La Bourdonnais et JaurĂ©guiberry, les pĂ©troliers La Seine et Aberwrach, le bâtiment de soutien Rhin). La force Alfa appareille le de Toulon et aborde la PolynĂ©sie française le afin de superviser les essais atmosphĂ©riques no 18 « AldĂ©baran », no 19 « TamourĂ© », no 20 « Ganymède » et no 21 « BĂ©telgeuse ». Durant la traversĂ©e, la France quitte le commandement intĂ©grĂ© de l'OTAN.

Le groupe aérien embarqué du Foch comprend 24 avions (12 avions de sûreté Alizé, 8 avions d’assaut Étendard IV-M et 4 avions de reconnaissance Étendard IV-P) et 22 hélicoptères (10 HSS-1, 6 Alouette II et 6 Alouette III) et est chargé de surveiller et sécuriser la zone dite « dangereuse » (dispositif Phoebus). Après que sont repérés à plusieurs reprises dans la zone d'exclusion le bâtiment de recherches scientifiques USS Belmont (en) et le navire de contrôle de missiles et d'engins spatiaux USS Richfield (en), un sous-marin de nationalité inconnue et un avion ravitailleur (vraisemblablement d'observation et de recueil de prélèvements atomiques) KC-135 de l'USAF no 9164, le à 5 h 5, un Mirage IV no 9 largue sa bombe A AN-21 à chute libre no 2070 au large de Moruroa. Après deux autres tirs le et le , la force Alfa quitte la Polynésie française le .

La seconde Force Alfa quitte Toulon le pour arriver en PolynĂ©sie française le . Elle comprend le porte-avions Clemenceau et les mĂŞmes autres bâtiments que lors de la campagne de 1966 (les trois escorteurs d’escadre, les deux pĂ©troliers et le bâtiment de soutien). Ce groupe est complĂ©tĂ©, sur zone, par la Division des avisos du Pacifique, composĂ©e des Protet, Commandant Rivière, Amiral Charner, Doudart de LagrĂ©e et Enseigne de vaisseau Henry. Quant au groupe aĂ©rien, il est composĂ© d’AlizĂ©, d’Étendard IV-M et d’hĂ©licoptères HSS-1, Alouette II, Alouette III et Super Frelon. Le , l’essai no 30 « Canopus » d’une bombe H, exĂ©cutĂ© Ă  Fangataufa, libère 2,6 mĂ©gatonnes[5]. Plusieurs bâtiments amĂ©ricains et quelques chalutiers soviĂ©tiques sont aperçus lors de la campagne de tir. Avec la venue de la Force Alfa, l'ensemble du dispositif naval prĂ©sent autour des deux atolls a reprĂ©sentĂ© plus de 40 % du tonnage de la flotte française, soit 120 000 tonnes[6].

Notes et références

  1. Épisode Les dégâts nucléaires français en Polynésie de la série Rendez-vous avec X, d'une durée de 38 minutes. Diffusé pour la première fois du 13 h 20 au 14 h 00 sur la chaîne France Inter du réseau Radio France. Autres crédits : Patrick Pesnot. Visionner l'épisode en ligne, 28e minute.
  2. Pauline Rouquette, « Il y a 50 ans... Canopus explosait au-dessus de l'atoll de Fangataufa en Polynésie [Infographie] », sur francetvinfo.fr La 1ère, .
  3. Dominique Barralis, « À propos de l'armement nucléaire français », Revue Défense nationale,‎ , p. 5 (lire en ligne).
  4. Arrêté ministériel no 51 du 20 août 1965.
  5. Ben Cramer, Le nucléaire dans tous ses états, ALiAS, , p. 174.
  6. Bernard Dumortier et Anne Roudaud (éd.), Les Atolls de l'atome : Mururoa & Fangataufa, Rennes, Marines édition, , 191 p. (ISBN 978-2-915-37911-2) dont une version abrégée est à [lire en ligne].
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