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Albert Frère

Albert Frère (né le à Fontaine-l'Évêque et mort le à Gerpinnes (Hainaut)) est un baron et homme d'affaires milliardaire belge. Il est alors considéré comme la personne la plus riche de Belgique.

Albert Frère
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Titre de noblesse
Baron
Ă  partir de
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  92 ans)
Gerpinnes
Nom de naissance
Albert Pol Oscar Ghislain Frère
Nationalité
Domicile
Activité
Magnat des affaires
Père
Oscar Frère (d)
Enfants
Gérald Frère
Ségolène Frère (d)
Charles-Albert Frère (d)
Blason d'Albert Frère

Biographie

Albert Frère est souvent prĂ©sentĂ© comme le fils d'un marchand de clous (notamment dans sa rĂ©gion d'origine)[1]. Après le dĂ©cès de son père, Ă  la suite d'une pneumonie, sa mère est veuve Ă  40 ans avec trois enfants en bas âge : GĂ©rard 10 ans, Marie-AndrĂ©e 8 ans et Albert 4 ans[2]. Ainsi, très tĂ´t ils doivent aider leur mère Ă©paulĂ©e de leur oncle LĂ©once dans la gestion des Établissements Frère-Bourgeois, fabricant de clous, chaines et articles de ferronnerie. ConquĂ©rir un mythe national — PĂ©trofina — pour cet homme nĂ© dans un petit village wallon, sans diplĂ´me, toujours rejetĂ© par l'establishment malgrĂ© sa richesse, a Ă©tĂ© un but ultime.

Parcours d'investisseur

Dès la fin des annĂ©es 1940, Albert Frère construit les bases de sa fortune sur le commerce de l'acier, puis sur la sidĂ©rurgie et particulièrement sur sa SociĂ©tĂ© carolorĂ©gienne de laminage, CARLAM. Albert Frère vend notamment de l'acier dans les pays communistes après la guerre de CorĂ©e (1953), profitant des prix Ă©levĂ©s et de la pĂ©nurie, selon son biographe JosĂ©-Alain Fralon[3]. Ceci fait rapidement de lui un membre Ă©minent du patronat de Belgique[4]. Il fait, dès l'âge de 30 ans, l'acquisition d'entreprises actives dans la sidĂ©rurgie wallonne, en particulier dans la rĂ©gion de Charleroi[5].

En 1975, Albert Frère est le roi du bassin sidĂ©rurgique de Charleroi, mais la conjoncture se retourne : effondrement des prix, hausse brutale du coĂ»t des matières premières, des salaires, de l'Ă©nergie[6] - [7]. La crise de la sidĂ©rurgie dĂ©bute, l'État belge intervient et les deux bassins de Liège et Charleroi sont quasiment nationalisĂ©s (notamment Cockerill). En 1979, l'État injecte 1,5 milliard de francs belges pour sauver la sidĂ©rurgie de Charleroi et dĂ©bourse 735 millions pour ne prendre qu'une participation minoritaire de 49 % dans le capital de Frère-Bourgeois commerciale, la sociĂ©tĂ© de nĂ©goce qui empoche toutes les commissions sur les ventes d'acier, que les prix soient hauts ou bas. En 1982, Albert Frère dĂ©cide de quitter le navire de la sidĂ©rurgie, du moins la production, mais pas sa vache Ă  lait, la commercialisation exclusive de l'acier wallon. Alors que la sidĂ©rurgie perd des milliards, Albert Frère continue Ă  faire des bĂ©nĂ©fices en touchant ses commissions. L'État veut nationaliser la commercialisation, Albert Frère la lui cède pour 1,125 milliard de francs belges[8].

Après l’acier, il réinvestit alors le capital libéré en s'intéressant à la banque, l’assurance, l’énergie et les médias. Il crée en 1981, avec l'aide du financier canadien Paul Desmarais, la holding suisse Pargesa, profitant des nationalisations du Gouvernement socialiste de Pierre Mauroy en France[9].

En 1982, Albert Frère dĂ©bourse 2,6 milliards de francs belges pour acquĂ©rir 35 % du capital du Groupe Bruxelles Lambert (GBL). Cette entrĂ©e dans le milieu feutrĂ© de l'establishment bruxellois est une nouvelle revanche pour Albert Frère, le commerçant self-made man carolo mĂ©prisĂ© par les Ă©lites bruxelloises qui rĂ©gnaient sur les charbonnages du pays noir. Il va prendre progressivement le contrĂ´le de GBL grâce au soutien de diffĂ©rents alliĂ©s, dont Paul Desmarais qui deviendra son plus fidèle partenaire en affaires. Via GBL, il hĂ©rite de participations qui vont s'avĂ©rer dĂ©terminantes dans la suite de son aventure : Tractebel, BBL, CLT et la plus belle d'entre toutes Ă  ses yeux, Petrofina.

Le roi du CAC 40

À la fin des années 1990, Albert Frère se retire progressivement du paysage économique belge. Fait baron par le roi Albert II en 1994, il prend 50% du grand cru de Saint-Emilion, le Château Cheval Blanc en 1998 avec Bernard Arnault[10].

C'est dans le secteur des mĂ©dias qu'Albert Frère rĂ©alise l'une de ses meilleures affaires. Le rachat de GBL en 1982 lui a permis d'acquĂ©rir une participation dans la CLT (Compagnie luxembourgeoise de tĂ©lĂ©diffusion), maison-mère de RTL. En , Frère noue une alliance avec la CLT et UFA, le pĂ´le audiovisuel du gĂ©ant allemand de l'Ă©dition Bertelsmann. Quatre ans plus tard, la CLT-UFA s'allie Ă  son tour au pĂ´le tĂ©lĂ©visĂ© du groupe anglais Pearson pour donner naissance Ă  RTL Group, le premier groupe audiovisuel d'Europe. GBL en dĂ©tient 30 %, qu'Albert Frère Ă©change en 2001 contre 25,1 % dans Bertelsmann. Le , il revend sa participation Ă  la famille Mohn, actionnaire familial de Bertelsmann pour 4,5 milliards d'euros, enregistrant au passage une plus-value de 2,4 milliards d'euros[11].

En 2002, la CNP d'Albert Frère et la holding Ackermans & van Haaren s'entendent pour acquérir chacun 50 % des actions de la société GIB (Groupe GIB)[12].

GBL est en 2005 détenteur de participations dans la compagnie pétrolière Total (à hauteur de 4 %, via ses participations premières dans Petrofina), dans le groupe financier et industriel Suez (à hauteur de 7,2 % ; 8,3 % en 2006), dans le groupe de matériaux Imerys (à hauteur de 30,7 %) et dans le cimentier Lafarge (21,1 %), dans lequel sa participation monte sensiblement depuis la fin de 2005[13]. Fin 2005, il rachète le groupe de restauration Flo à Jean-Paul Bucher, mais cède Quick en 2007 à la Caisse des dépôts et consignations[14].

La fusion de Gaz de France et de Suez

Son ami et protégé Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Économie, promet en 2004 qu'il n’y aura pas de privatisation de Gaz de France, mais plus de trois ans plus tard, GDF fusionne avec Suez, et l’État français devient minoritaire[15]. En 2008 Frère est pressenti pour être vice-président de GDF Suez[16].

Dernières années

Une nouvelle ère s'ouvre dans l'histoire d'Albert Frère, plutôt que de posséder des positions de contrôle dans de grandes entreprises belges, il détient de petites participations dans des groupes de taille européenne, voire mondiale. Cela lui permet de profiter de la tendance à la globalisation de l'économie, mais c'est au prix d'une perte d'influence[11].

Il quitte en la direction de GBL[17]. Il est également proche de milliardaires français comme Bernard Arnault, ainsi qu'Alain Minc avec qui il téléphone tous les samedis[18].

La presse annonce le le rachat de Looping Group, groupe de loisirs et de vacances à ancrage régional, par la société d'investissement belge Ergon Capital Partners qui appartient au Groupe Bruxelles Lambert[19] - [20]. Il gère onze parcs de loisirs répartis dans cinq pays européens. Ils sont de type parc d'attractions, aquarium public, parc miniature ou parc aquatique[21].

Il meurt Ă  92 ans Ă  Gerpinnes le des suites d'un cancer du poumon[22].

Investissements culturels

Très influent dans le milieu de la finance parisienne, Frère, qui se partage entre Paris et Gerpinnes, cultive aussi un goût éclectique pour les œuvres d’art et les grands crus (voir le Château Cheval Blanc)[23].

Famille

Albert Frère a Ă©tĂ© mariĂ© deux fois : de son union avec Nelly Depoplimont, il a eu GĂ©rald (lui-mĂŞme père de CĂ©dric). De son deuxième mariage, avec Christine Hennuy, il a eu SĂ©golène (), femme d'Ian Gallienne, administratrice de GBL, et crĂ©atrice de la marque de vĂŞtements pour enfants CdeC en partenariat avec CordĂ©lia de Castellane, et Charles-Albert, dĂ©cĂ©dĂ© en 1999 dans un accident de voiture, Ă  l'âge de 19 ans, en mĂ©moire de qui a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e la fondation caritative portant son nom[24].

Actionnariat (avril 2009)

Actionnariat du Groupe Frère en 2009.
Le Groupe Dassault détient 1,38 % de la CNP (source comptes annuels publiés à la Banque Nationale de Belgique).

Participations (mai 2009)

Frère-Bourgeois, point de départ des sociétés, est devenue, en 2009 une société holding. Elle détient 53 % de la holding ERBE, 18,9 % de la société d'investissement CNP, et 10,5 % de la holding Agesca Nederland. Ce nom de société, Frère-Bourgeois, est issu des parents d'Albert Frère, Madeleine Bourgeois étant sa mère[25] - [26] - [27] - [28].

Participations d'Albert Frère.

Fonctions et mandats sociaux

Albert Frère a été :

Fortune

En 2007, la fortune d'Albert Frère Ă©tait estimĂ©e Ă  3,1 milliards d'euros. Frère est alors le seul Belge prĂ©sent dans la liste des personnalitĂ©s les plus riches du monde, Ă©tablie par le magazine Forbes[29]. En 2018, Forbes le classe 281e personne la plus riche du monde avec une fortune Ă©valuĂ©e Ă  6,2 milliards d'euros (5,8 milliards d'euros Ă  la date de son dĂ©cès)[30]. Il est considĂ©rĂ© Ă  sa mort comme la personne la plus riche de Belgique[31] - [32].

Distinctions

DĂ©corations

Titre nobiliaire

Albert Frère est anobli par le roi Albert II de Belgique, qui lui concède la noblesse héréditaire et le titre personnel de baron en 1995. En 2018, il bénéficie d'une nouvelle faveur nobiliaire octroyée par le Roi Philippe : il obtient une extension de son titre de baron à tous ses descendants[34].

Sa devise est Amat victoria curam (« La victoire aime qu’on s’occupe d’elle »), tirée du chant d'hyménée de Catulle (62, 16) :

Non facilis nobis, aequales, palma parata est ;
Aspicite, innuptae secum ut meditata requirunt.
…
Nos alio mentes, alio divisimus aures ;
Iure igitur vincemur ; amat victoria curam.

(Traduction : La palme de la victoire qui s'offre à nous, compagnons, ne s'obtiendra pas facilement ; regardez bien combien ces filles vierges se fixent en leurs pensées (…) Quant à nous, nous tournons nos esprits d'un côté et nos oreilles de l'autre, c'est donc à juste titre que nous sommes vaincus : car la victoire aime qu'on s'occupe d'elle).

Notes et références

  1. Ceci ayant été confirmé par son biographe José-Alain Fralon Fralon1997
  2. Fralon1997, p. 25.
  3. Les Barons de la Bourse - Albert Frère, ZoneBourse.
  4. Kurgan-Van Hentenryk, G. (1998). Le patronat en Belgique (1880-1960) ; Histoire, économie et société, p. 189-211.
  5. Belgique-Albert Frère quitte ses holdings GBL et Pargesa, Challenges, .
  6. « La mutation douloureuse de la sidérurgie du bassin de Charleroi », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. « Dernière chance pour les aciéries de Charleroi : s'associer avec l'ARBED ? », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. Delvaux et J-F.M 2018, p. 4.
  9. Biographie ABC Bourse, ABC Bourse.
  10. « L'homme d'affaires belge Albert Frère est mort à 92 ans », sur capital.fr, (consulté le ).
  11. Delvaux et J-F.M 2018, p. 5.
  12. Frère aura sa part du gâteau GIB, Le Soir .
  13. De la fabrique de Charleroi au sommet du CAC 40, JDN.
  14. « Rachat du groupe Quick par la Caisse des dépôts », sur senat.fr, .
  15. « GDF-Suez, hold-up sur le service public », sur France Inter, (consulté le ).
  16. « Albert Frère actionnaire et bientôt vice-président de GDF Suez », sur capital.fr, (consulté le ).
  17. « Albert Frère renonce à la direction de son holding GBL », sur Les Échos, (consulté le ).
  18. Marie Bordet, « L’incroyable vie de monsieur Frère », sur Le Point, (consulté le )
  19. (nl) « Attractiepark Hellendoorn krijgt Belgische eigenaar », sur nu.nl, (consulté le ).
  20. Anthony Bondain, « Le groupe de parcs de loisirs Looping racheté par Ergon », sur boursier.com, (consulté le ).
  21. « Albert Frère se lance dans les parcs d'attractions », sur L'Écho, (consulté le ).
  22. Avis nécrologiques parus dans le journal La Libre Belgique du , page 52.
  23. Jacques Dupont, « Saint-émilion », sur Le Point, .
  24. (nl) « Fondation Charles-Albert Frère: de vertrouwelingen van Albert Frère », (consulté le ).
  25. José-Alain Fralon, « Albert Frère : de la ferraille à la télévision », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  26. José-Alain Fralon, « Albert Frère, le bulldozer de la finance », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  27. Jean-Pierre Stroobants, « L’homme d’affaires belge Albert Frère est mort », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  28. « Albert Frère : le roi des poupées russes ! », Le Revenu,‎ (lire en ligne).
  29. Mais qui est Albert Frère?, JDN.
  30. (en) « #281 Albert Frere », sur forbes.com, (consulté le ).
  31. Jean-Pierre Stroobants, « L’homme d’affaires belge Albert Frère est mort », Le Monde,‎ (lire en ligne).
  32. « Belgique : l'homme d'affaires Albert Frère est mort », Le Point,‎ (lire en ligne).
  33. Nomination par arrêté royal, publication du , etaamb.be.
  34. Maus de Rolley et de Troostembergh 2021, p. 331

Voir aussi

Bibliographie

  • RenĂ© De Preter, Les 200 familles les plus riches : L'argent et le pouvoir dans le monde des holdings et des millionnaires, Anvers, Éditions EPO, .
  • Francis Groff, Albert Frère, le pouvoir et la discrĂ©tion, Éditions Labor, coll. « La Noria », , 167 p. (ISBN 978-2804010454).
  • Nazanine Ravai, La RĂ©publique des vanitĂ©s. Petits et grands secrets du capitalisme français, Grasset, , 350 p. (ISBN 978-2246530312).
  • [Fralon1997] Albert Frère : Le fils du marchand de clous, Fayard, , 350 p. (ISBN 978-2213597713) - 1998 Ă©d. Lefrancq (2e Ă©dition lĂ©gèrement modifiĂ©e)
  • Ginette Kurgan-van Hentenryk et Erik Buyst, 100 grands patrons du XXe siècle en Belgique, Bruxelles, Alain Renier Ă©diteur, , 287 p., p. 102-105 et 250.
  • Catherine Le Gall, Denis Robert, Les PrĂ©dateurs, Cherche Midi, 2018 (ISBN 978-2-7491-5593-7).
  • Bertrand Maus de Rolley et Baron Jean-Claude de Troostembergh, État prĂ©sent de la noblesse belge - Annuaire de 2021, t. 5 : Dor - Ga, Bruxelles, État prĂ©sent des familles ASBL, , 366 p.

Article de presse

  • B. Delvaux et J.-F. M., « Albert Frère voulait surtout faire des affaires », Le Soir,‎ , p. 4-5 (lire en ligne).

Article connexe

Liens externes

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