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Affaire des évadés fiscaux

L'affaire des évadés fiscaux est une affaire financière dans laquelle l'informaticien Hervé Falciani, ex-employé de la banque HSBC, fournit à l'administration fiscale une liste de comptes bancaires non déclarés, en lien avec des soupçons de fraude fiscale.

Transmission d'une liste d'évadés fiscaux

En 2008, Hervé Falciani, un informaticien travaillant chez HSBC, à Genève, en Suisse, obtient une liste de 8 993 évadés fiscaux français en Suisse[1].

Selon des accusations de ses détracteurs, niées par l’intéressé, il a commencé par tenter de vendre le fichier au Liban[2].

Le , il entre en contact avec Philippe G., commandant de police à la direction centrale de la Police judiciaire (DCPJ). Jean-Patrick M., employé de la direction nationale d'enquêtes fiscales (DNEF), devient le contact de la « source ». Son supérieur est François Jean-Louis, secrétaire général de la DNEF. Le nom de code d'Hervé est Ruben[1].

Hervé Falciani fournit d'abord une liste de sept noms, dans le but de prouver sa crédibilité. Puis le , la totalité du fichier est fournie. L'opération « Chocolat », c'est-à-dire le recrutement par les services fiscaux français de Falciani, est un succès.

Hervé Falciani indique qu'il « comptait donner [les preuves] à la justice française ». Il précise que c'est lui qui a « alerté » et demandé au procureur de la République Éric de Montgolfier « qu'il s'intéresse à ces informations. Et non pas qu'il les retransmette sans rien faire à la Suisse, comme celle-ci le demandait »[3] - [Note 1].

Action des autorités françaises contre les supposés évadés fiscaux

Le , Hervé Falciani fuit la Suisse pour le sud de la France. Le , son nouveau domicile est perquisitionné par la police française. Le fichier est officiellement transmis le par le procureur Éric de Montgolfier, qui le transmet à son tour au ministère de l'Économie et des Finances. Il ignore que l'administration fiscale possédait un fichier depuis sept mois. Un fichier officiel est créé sous le nom d'Evafisc.

2 846 personnes physiques sont inculpées, 86 sociétés. 4 200 personnes répondent à la proposition du gouvernement de régulariser volontairement leur situation fiscale auprès de la cellule de régularisation de Bercy[1].

Cette action aurait permis à la France de récupérer 1,2 milliard d'euros[1].

L’avocat Avi Bitton a obtenu la première relaxe par le tribunal correctionnel de Paris d’un chef d’entreprise qui apparaissait sur la liste dite Falciani des supposés évadés fiscaux[4]. L’avocat a ensuite fait condamner l’État à rembourser au suspect innocenté les sommes saisies par l’administration fiscale[5].

Action de la justice suisse et des supposés évadés fiscaux contre les autorités françaises

La justice suisse, qui n'accepte pas la manière dont la justice et le fisc français se sont approprié les informations des clients de HSBC, demande le à obtenir une copie des fichiers, que les autorités françaises lui communiquent le [1]. Le ministère public suisse analyse la copie et affirme en que « des données ont été modifiées », accusant donc les autorités françaises d'avoir modifié les listes initiales.

En , le juge d'instruction parisien René Cros est saisi par l'avocat des supposés évadés fiscaux d'une information judiciaire, « pour faux et usage de faux en écritures publiques commis par une personne dépositaire de l'autorité publique, et tentative d'escroquerie au jugement »[1].

Arrestation en Espagne, puis collaboration avec le fisc espagnol

Le , Hervé Falciani est arrêté en Espagne à Barcelone, sur la base d'un avis de recherche des autorités suisses, qui demandent une extradition vers la Suisse[6]. Les autorités espagnoles décident en de libérer Hervé Falciani, qui est assigné à résidence sous protection[7], puis collabore avec le fisc espagnol, ce qui permet (selon les autorités espagnoles) de récupérer 250 millions d'euros auprès de 659 fraudeurs, dont notamment Emilio Botín[8].

Hervé Falciani transmet une nouvelle liste de noms, en liaison avec l'affaire Gürtel[9]. Lors d'une audience publique, le , le parquet espagnol s'oppose à l'extradition d'Hervé Falciani vers la Suisse , affirmant que ses actes « ne sont pas passibles de poursuites en Espagne », « le secret bancaire y ayant été aboli en 1977 » et que les informations fournies auraient révélé une fraude fiscale portant sur 200 milliards d'euros dans toute l'Europe[10].

Hervé Falciani, interviewé sur France 2 dans le magazine Cash investigation diffusé le , confirme son intention de revenir en France[11].

Publication des noms

Challenges a fourni dès une liste de 86 contribuables apparaissant sur cette liste et faisant l'objet de poursuites. On comptait notamment Nina Ricci, Arlette Ricci, Jean-Claude Guidicelli, Simon Benharrous. Le , le journal Le Monde a publié d'autres noms, dont Christian Karembeu, les frères Christian et François Picart, Alain Afflelou, Cédric Klapisch, Gérard Miller, Michel Tubiana, et Richard Prasquier.

Arlette Ricci, héritière des parfums Nina Ricci, est condamnée le à trois ans de prison dont un ferme et un million d'euros d'amende, pour fraude fiscale, blanchiment de fraude fiscale et organisation frauduleuse d'insolvabilité pour échapper à l'impôt[12].

SwissLeaks

En février 2015, le quotidien Le Monde commence la publication d'une série d'articles consacrés aux révélations, baptisées SwissLeaks, sur l'évasion fiscale et le blanchiment à grande échelle mis en œuvre au sein de la filiale suisse de la banque HSBC[13].

L’ampleur de la fraude a coûté la fin de sa carrière à Roland Veillepeau, patron de la Direction nationale des enquêtes fiscales et responsable de l’opération « chocolat ». Il est contraint à un départ à la retraite en 2014[14].

Nouvelle arrestation en Espagne

Le , Hervé Falciani est arrêté à nouveau par la police espagnole dans les rues de Madrid alors qu'il se rend à une conférence. La police espagnole précise qu'« il était visé depuis le 19 mars par un mandat d'arrêt international pour son extradition, émis par les autorités suisses, pour qu'il purge une condamnation à une peine de prison ferme de cinq ans »[15]. Cependant, en septembre, Madrid annonce qu'elle ne souhaite pas extrader Falciani vers la Suisse[16].

Notes et références

Notes

  1. Hervé Falciani à la Commission d'enquête sur le rôle des banques, travaux parlementaires, 16 juillet 2013, « Comment ça s'est passé en détail ? Moi, une fois sur France, je me fais fort de récupérer les informations. Je ne suis pas sorti de Suisse avec les informations, avec les preuves que je comptais donner à la justice française, mais je les ai récupérées sur France, ces preuves. Les ayant chez moi, lorsque la commission rogatoire s'exécute, sont saisies à mon domicile, ces informations, que j'avais donc récupérées et validées à nouveau. Donc ces scellés sont effectués par la gendarmerie nationale, sont transmises directement au parquet (questionneur : par les services secrets ?) Non non, directement par la série de la commission rogatoire internationale demandée par la Suisse. Donc c'est sous la tutelle de la Suisse que ces informations sont récupérées et transmises à la justice française. Et finissent, atterrissent dans les mains de la justice française. Et c'est là où moi je vais alerter le procureur, Monsieur Éric de Montgolfier, sur l'intérêt pour la préservation de nos intérêts fondamentaux qu'il fallait qu'il s'intéresse à ces informations. Et non pas qu'il les retransmette sans rien faire à la Suisse, comme celle-ci le demandait. Et donc c'est aussi et essentiellement par son action que ces preuves là finiront dans les mains de la justice française. »

Références

  1. « La liste des évadés fiscaux d'HSBC en Suisse aurait été falsifiée », Le Monde, 23 juillet 2012.
  2. Gokan Gunes, « Affaire Falciani: la mystérieuse semaine au Liban », L'Express, (lire en ligne, consulté le ).
  3. « Commission d'enquête sur le rôle des banques, travaux parlementaires, 16/07/2013, à 35 min 00 s » (consulté le )
  4. « Fraude fiscale : une première relaxe dans le dossier Falciani », sur LEFIGARO, (consulté le )
  5. « Affaire Falciani : un faux coupable récupère un million d'euros », sur lejdd.fr (consulté le )
  6. « Arrestation de l'ex informaticien azuréen de la HSBC, Hervé Falciani », Nice-Matin, 24 juillet 2012.
  7. « Fraude fiscale : Hervé Falciani est sorti de prison », L'Express, 18 décembre 2012.
  8. « Évasion fiscale : le parquet espagnol s'oppose à l'extradition de Falciani, ex-employé de HSBC », Le Monde, 16 avril 2013.
  9. (es) « La lista Falciani conduce hasta Gürtel », El Pais, 25 mars 2013.
  10. « Espagne : le procureur opposé à l'extradition en Suisse d'Hervé Falciani », AFP, 15 avril 2013.
  11. « Cash investigation : ces milliards de l'évasion fiscale » (consulté le )
  12. « Affaire HSBC : prison ferme pour Arlette Ricci », lemonde.fr, 13 avril 2015.
  13. « SwissLeaks » : toutes les personnalités et les pays concernés, Le Monde
  14. Fabrice Lhomme et Gérard Davet, « Swissleaks : « En France, la lutte contre la fraude fiscale internationale est inopérante » », sur lemonde.fr,
  15. AFP, « Suisse – Le lanceur d'alerte de la HSBC arrêté en Espagne », La Tribune de Genève, (lire en ligne, consulté le ).
  16. ats, « Espagne – Madrid ne veut pas extrader Hervé Falciani », La Tribune de Genève, (lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Scandales de l'évasion fiscale et blanchiment d’argent via paradis fiscaux :

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