Élections législatives françaises de 1958
Les élections législatives françaises de 1958 ont lieu les et . Elles visent à choisir les députés de la Ire législature de la Cinquième République. À l’issue du scrutin, 579 parlementaires (avec trois sièges vacants) sont ainsi élus. Elles sont précédées d'un mois par le référendum du 28 septembre 1958, qui a posé une partie des fondements de la Cinquième République et se traduit par un vote beaucoup plus favorable au gaullisme que celui des législatives précédentes, 1951 et 1956, même si l'abstentionnisme est significatif chez une partie des jeunes[1].
Élections législatives françaises de 1958 | |||||
579 députés de l'Assemblée nationale (majorité absolue : 290 sièges) | |||||
---|---|---|---|---|---|
et | |||||
Corps électoral et résultats | |||||
Inscrits | 27 244 992 (1er tour) 25 090 237 (2d tour) | ||||
Votants au 1er tour | 21 026 542 | ||||
77,18 % 5,6 | |||||
Votants au 2d tour | 19 149 670 | ||||
76,32 % | |||||
Droite parlementaire – Michel Debré | |||||
Voix au 1er tour | 8 814 885 | ||||
43,10 % | |||||
Voix au 2e tour | 9 019 135 | ||||
50,00 % | |||||
Députés élus | 402 | 307 | |||
PCF – Maurice Thorez | |||||
Voix au 1er tour | 3 882 204 | ||||
18,90 % | 7 | ||||
Voix au 2e tour | 3 741 784 | ||||
20,70 % | |||||
Députés élus | 10 | 140 | |||
SFIO – Guy Mollet | |||||
Voix au 1er tour | 3 514 652 | ||||
17,20 % | 2,3 | ||||
Voix au 2e tour | 2 484 417 | ||||
13,80 % | |||||
Députés élus | 40 | 54 | |||
PRV – Félix Gaillard | |||||
Voix au 1er tour | 1 669 890 | ||||
8,40 % | 2,6 | ||||
Voix au 2e tour | 1 398 409 | ||||
7,70 % | |||||
Députés élus | 57 | 26 | |||
MRP – Pierre Pflimlin | |||||
Voix au 1er tour | 1 858 380 | ||||
9,10 % | 1,8 | ||||
Voix au 2e tour | 1 365 064 | ||||
7,50 % | |||||
Députés élus | 35 | 18 | |||
UFF – Pierre Poujade | |||||
Voix au 1er tour | 669 518 | ||||
3,38 % | 9,5 | ||||
Députés élus | 0 | 52 | |||
Représentation de l'assemblée | |||||
Gouvernement | |||||
Sortant | Élu | ||||
De Gaulle III Gaulliste (CNIP, MRP, dissidents PRV, RS, RDA) |
Debré Majorité présidentielle (UNR, CNIP, MRP, PRV, RDA) | ||||
Législature élue | |||||
Ire de la Ve République | |||||
Contexte et campagne
Le retour de Charles de Gaulle au pouvoir ne se fait pas sans opposition. De Gaulle est investi président du Conseil et obtient les pleins pouvoirs constituants en juin 1958. Il nomme aussitôt une commission chargée de rédiger une nouvelle Constitution, cherchant à instaurer un régime présidentiel. Pour parachever son projet constitutionnel, de Gaulle prépare un calendrier électoral chargé : référendum sur la Constitution de la Cinquième République le 28 septembre 1958, élections législatives anticipées les 23 et 30 novembre, élection présidentielle en décembre. Se forme alors un front d'opposition à de Gaulle, qui rassemble les partis de gauche et du centre, hostiles au nouveau régime présidentiel : le PCF, la SFIO (même si le chef du parti, Guy Mollet, soutient de Gaulle jusqu'en janvier 1959), l'UDSR, ainsi que les radicaux. Ce front est battu à toutes les consultations de cette fin d'année.
L'ordonnance n°58-1065 du 7 novembre 1958 promulgue un redécoupage des circonscriptions législatives dans le cadre du retour à un scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Les limites des circonscriptions ne dépendent plus des arrondissements.
Si de Gaulle donne des consignes pour que la liberté de vote en Algérie soit totale, Jacques Soustelle (en tant que ministre de l'Information) et les militaires présents en Algérie, sous la direction de Charles Lacheroy, s'efforcent d'obtenir l'élection de candidats favorables à l'Algérie française. Une intense propagande et des entraves répétées à la liberté d'expression des candidats « libéraux » ont lieu. Finalement, les 43 musulmans et 21 Européens élus sont tous favorables au maintien de l'Algérie à la France[2].
Mode de scrutin
Ces élections voient le retour du scrutin uninominal majoritaire à deux tours, qui était en vigueur sous la troisième République à l'exception de l'Algérie française ou un scrutin de liste majoritaire à un tour est appliqué.
En Algérie les 67 sièges sont repartis en 21 sièges de droit commun revenant aux députés d'origine européenne et 46 sièges de droit local revenant aux députés d'origine non européenne.
546 députés sont élus aux élections législatives de 1958 suivant cette répartition[3] :
- 465 pour la France métropolitaine
- 67 pour l'Algérie française
- 4 pour les départements des Oasis et de la Saoura
- 10 pour les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion.
Ne sont pas élus lors de cette élection les 33 députés des Territoires d'outre-mer élus précédemment, qui seront maintenus jusqu'au [4].
Candidats
Sociologie
En métropole 2809 candidats se présentent dont 2745 hommes et 64 femmes.
Groupe de professions | Nombre de candidats | |||||
---|---|---|---|---|---|---|
Professions agricoles | 241 | |||||
Professions maritimes | 10 | |||||
Professions commerciales et industrielles | 507 | |||||
Salariés | 597 | |||||
Professions médicales | 220 | |||||
Professions judiciaires et libérales | 456 | |||||
Universitaires (en activité ou en retraite) | 295 | |||||
Fonctionnaires (en activité ou en retraite) | 193 | |||||
Militaires (en activité ou en retraite) | 36 | |||||
SNCF | 77 | |||||
PTT | 34 | |||||
Retraités, pensionnés | 30 | |||||
Propriétaires | 1 | |||||
Divers | 18 | |||||
Sans profession | 24 | |||||
Professions non indiquée | 70 | |||||
France, Ministère de l'intérieur. Les Elections législatives . Métropole., la Documentation française, (lire en ligne) |
Résultats
Au niveau national
Parti | 1er tour | 2d tour | Total | ||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Voix | % | Voix | % | Sièges | % | ||
Parti communiste français (PCF) | 3870184 | ||||||
Union pour la nouvelle République (UNR) | 3679960 | ||||||
Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) | 3171459 | ||||||
Centre national des indépendants et paysans (CNIP) | 2902790 | ||||||
Mouvement républicain populaire (MRP) | 2272643 | ||||||
Modérés | 1188330 | ||||||
Parti républicain, radical et radical-socialiste | 1177732 | ||||||
Radicaux centristes | 712734 | ||||||
Centre républicain | 413559 | ||||||
Union et fraternité française | 301371 | ||||||
Extrême droite | 225273 | ||||||
Union des forces démocratiques (UFD) | 184673 | ||||||
Divers gaullistes | 135626 | ||||||
Divers | 105201 | ||||||
Union démocratique et socialiste de la Résistance | 87244 | ||||||
Union des forces démocratiques diss. (UFD diss.) | 63588 | ||||||
Inscrits | 27244992 | ||||||
Votants | 21026542 | ||||||
Abstentions | |||||||
Blancs et nuls | 534175 | ||||||
Exprimés | 20492367 |
Partis politiques ou coalitions |
1er tour | 2d tour | |||
---|---|---|---|---|---|
Voix | % | Sièges | % | ||
Parti communiste français (PCF) | 3 882 204 | 19,02 | 10 | 1,8 | |
Union pour la nouvelle République (UNR) | 3 603 958 | 17,66 | 189 | 34,6 | |
Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) | 3 167 354 | 15,52 | 40 | 7,3 | |
Centre national des indépendants et paysans (CNIP) | 2 815 176 | 13,79 | 132 | 24,2 | |
Divers droite | 2 395 751 | 11,74 | 81 | 14,8 | |
Mouvement républicain populaire (MRP) | 1 858 380 | 9,11 | 57 | 10,4 | |
PRV, RGR & assimilés | 1 669 890 | 8,18 | 35 | 6,4 | |
Extrême droite | 669 518 | 3,28 | - | 0,0 | |
Union des forces démocratiques (UFD) | 347 298 | 1,7 | 2 | 0,4 | |
Composition de l'Assemblée
Il y a 1,4 % de femmes députées[5].
Groupe parlementaire | Députés | |||||
---|---|---|---|---|---|---|
Membres | Apparentés | Total | ||||
UNR | Union pour la nouvelle République | 199 | 7 | 206 | ||
IPAS | Indépendants et paysans d'action sociale | 107 | 10 | 117 | ||
FAEAS | Formation administrative des élus d'Algérie et du Sahara | 66 | 0 | 66 | ||
RPCD | Républicains populaires et du Centre démocratique | 49 | 15 | 64 | ||
PSRG | Socialiste | 43 | 4 | 47 | ||
FANI | Formation administrative des non-inscrits | 40 | 0 | 40 | ||
Total de députés membre de groupes | 540 | |||||
Isolés | 36 | |||||
Total des sièges pourvus | 576 | |||||
Analyse
Les résultats des élections législatives marquent un échec des opposants à de Gaulle. Non seulement la gauche et le centre perdent de nombreux députés, mais plusieurs grandes personnalités de l'opposition sont battues et perdent leur siège : Jacques Duclos (PCF), Jules Moch, Robert Lacoste et Gaston Defferre (SFIO), François Mitterrand (UDSR), Charles Hernu, Pierre Mendès France, Edgar Faure et Édouard Daladier (Parti radical). Le nouveau mode de scrutin, choisi par de Gaulle et Michel Debré, favorise grandement les députés qui soutiennent le changement de régime et le retour de de Gaulle au pouvoir, la coalition gaulliste obtenant 402 sièges pour 43,1 % des voix au 1er tour, alors que la SFIO et le PCF obtiennent 50 sièges pour 36,1% des voix, perdant 272 sièges par rapport à la législature précédente. En effet, les élections législatives de 1958 sont les premières à recourir au scrutin majoritaire uninominal à deux tours depuis 1936. La nouvelle Assemblée nationale est plus à droite que la chambre « Bleu horizon » de 1919. Seule l'Assemblée nationale de 1871 était aussi à droite[6].
Notes et références
- "Le comportement des électeurs français de 1958 à 1962, d'après une enquête par sondage" par Georges Dupeux, dans la Revue française de science politique, en 1964
- Serge Berstein, La France de l'expansion, La République gaullienne (1958-1969), .
- Ordonnance no 58-165 du 7 novembre 1958 portant loi organique relative à la composition et à la durée des pouvoirs de l'assemblée nationale
- Service des archives de l'Assemblée Nationale, Tables générales des documents et débats parlementaires, Paris, , 530 p. (lire en ligne)
- Magazine Le Monde 2 des 18-19 avril 2004, page 89.
- René Rémond, Notre Siècle, Livre de Poche, , p. 517.