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Volkssturm

« Volkssturm » (que l'on pourrait traduire par « Tempête du Peuple » ou « Bataillon du peuple »[note 1]) est le nom donné à la milice populaire allemande levée en 1944 et qui devait épauler la Wehrmacht dans la défense du territoire du Reich à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à la manière du Landsturm de l'armée prussienne de 1813 ou de 1914, de l'armée suisse, de la Home Guard britannique de 1940, des corps combattants des citoyens patriotiques du Japon en 1945.

Le projet d'une mobilisation militaire totale du peuple allemand remonte aux suggestions du général Heinz Guderian lors de l'été 1944 qui vit à la fois le débarquement de Normandie à l'Ouest et le début de l'opération Bagration à l'Est. L'idée était de susciter une levée d'armes populaire fanatisée dans la lignée du Landsturm de 1813 qui participa à la libération de la Prusse lors de l'occupation napoléonienne. Originellement, Guderian souhaitait que ces supplétifs libèrent l'armée d'active (la Heer) combattante des tâches secondaires : garde et surveillance, prévôté, défense passive voire tenue de « l'arrière »[1].

Cette mobilisation prĂ©voyait un appel sous les armes de tous les hommes valides de 16 Ă  60 ans dans des unitĂ©s rĂ©gionales qui Ă©pauleraient les forces armĂ©es « traditionnelles » dans la dĂ©fense locale.

Le Volkssturm fut conçu comme un programme d'encadrement du peuple allemand, aussi bien politique que militaire ; à ce titre, il jouait le rôle d'un catalyseur visant à fanatiser la résistance et ainsi à démoraliser les Alliés, en particulier occidentaux. Hitler craignait en effet que ne se reproduise la désastreuse situation intérieure de 1918, l'échec des offensives allemandes du printemps ayant entraîné l'effondrement du moral en Allemagne et le début des insurrections qui avaient amené l'effondrement de l'Empire (le « coup de poignard dans le dos »). Dans l'esprit de Bormann et d'autres membres du Parti, cette mobilisation avait aussi un caractère idéologique puisqu'elle devait symboliser la mobilisation totale de la race aryenne contre les hordes « ploutocrates » à l'Ouest et « judéo-bolchéviques » à l'Est.

Après l'attentat manqué du 20 juillet 1944, Hitler, de plus en plus méfiant à l'égard de l'Armée, décida de confier cette tâche au NSDAP — à la suite notamment des investigations de son bras droit, Martin Bormann.

Membres du Volkssturm munis de Panzerfaust.

Mobilisation populaire dans la tradition militaire allemande

Situation militaire Ă  l'automne 1944

Après la retraite générale de la Wehrmacht à l'été 1944, la situation des fronts se stabilise, essentiellement en raison des problèmes d'intendance et de ravitaillement rencontrés par les troupes alliées, tant à l'Est qu'à l'Ouest, du fait de l'étirement de leurs lignes de communication, mais aussi à cause du durcissement de la résistance allemande[2].

À la suite du complot du 20 juillet 1944 sont créés les officiers nationaux socialistes d'action psychologique, pour reprendre en main l'armée, dans un contexte de plus en plus marqué de décomposition de l'armée et d'un front de l'Est fragilisé par la préparation de l'offensive des Ardennes[3]. Au milieu du mois d'octobre 1944, la première ville allemande, Aix-la-Chapelle est conquise et à l'Est la Prusse-Orientale se trouve menacée.

Chronologie du Volkssturm

Himmler annonce la création du Volkssturm à la radio berlinoise. Guderian, initiateur du projet, figure à l'extrême gauche de la photo. Entre les deux le général SS Hans Heinrich Lammers.
Prestation de serment d'une unité berlinoise.
  • 20 juillet 1944 : attentat contre Hitler.
  • : Heinrich Himmler est nommĂ© commandant en chef de l′Ersatzheer, Heinz Guderian Ă©tant nommĂ© Ă  la tĂŞte de l′OKH[note 2].
  • DĂ©but septembre : Hitler accepte l'idĂ©e de Guderian de crĂ©er un Landsturm sous l'autoritĂ© conjointe de l'ArmĂ©e et des SA. Martin Bormann suggère que le Parti National-socialiste — dont il est le dirigeant — prenne seul sous sa coupe une milice populaire, la Volkswehr (litt. ArmĂ©e populaire).
  • 25 septembre 1944 : publication du dĂ©cret de Hitler crĂ©ant le Volkssturm, sous la direction et la responsabilitĂ© des Gauleitern du Parti mais sous encadrement de la Wehrmacht.
  • 7 octobre 1944 : les premières unitĂ©s sont engagĂ©es sur le front de l'Est, Ă  Memel.
  • : commĂ©morant la victoire de Leipzig de 1813, Himmler annonce officiellement Ă  la radio berlinoise la crĂ©ation du Volkssturm. L'enrĂ´lement de masse commence Ă  la fin du mois.
  • 10 novembre 1944 : engagement des premières unitĂ©s sur le front de l'Ouest au cours de la bataille de Metz aux cĂ´tĂ©s de la 462e Volks-Grenadier-Division.
  • : prestation de serment de masse des unitĂ©s du Volkssturm sur tout le territoire du Reich : Ă  Berlin, la cĂ©rĂ©monie est prĂ©sidĂ©e par Goebbels, dans une cĂ©rĂ©monie filmĂ©e, mettant en scène 100 000 hommes, la plupart en habits civils, dotĂ©s d'armes spĂ©cialement confiĂ©es pour la cĂ©rĂ©monie, ce qui suscite des rĂ©actions amusĂ©es de la part des enfants et des soldats en permission[4].
  • 1er avril 1945 : encerclement de la Ruhr par les AmĂ©ricains : 300 000 Allemands capitulent le 18 dont de nombreux Volkssturmmänner.
  • : les Russes encerclent Berlin.
  • 9 mai 1945 : signature de l'acte de capitulation allemande.
  • juin 1945 : les AlliĂ©s occidentaux libèrent les membres du Volkssturm et des soldats ayant des compĂ©tences professionnelles prioritaires pour pallier le manque de main-d'Ĺ“uvre qualifiĂ©e nĂ©cessaire Ă  la reconstruction : 663 576 hommes sont ainsi renvoyĂ©s dans leurs foyers. Une faible fraction, les nazis les plus extrĂ©mistes, rejoint la Werwolf.

Chronologie de la bataille du Reich 1944-45

Membres du Volkssturm formés au maniement du Panzerfaust en mars 1945.

Front Ouest :

Front Est :

  • : OpĂ©ration Bagration , dĂ©but de l'offensive gĂ©nĂ©rale soviĂ©tique contre le Groupe d'armĂ©es Centre
  • : entrĂ©e des troupes soviĂ©tiques en Prusse-Orientale
  • : entrĂ©e des troupes soviĂ©tiques en Hongrie
  • : l'ArmĂ©e rouge isole le Groupe d'armĂ©es Nord en Courlande
  • : offensive gĂ©nĂ©rale soviĂ©tique en Prusse-Orientale : le Volkssturm participe massivement Ă  la dĂ©fense et essuie de lourdes pertes
  • : la progression soviĂ©tique borde l'Oder
  • : franchissement de l'Oder
  • : les Russes atteignent Berlin
  • : Berlin est entièrement entre les mains des SoviĂ©tiques, combats sporadiques qui dureront encore au-delĂ  du

Modalités de création

Constituée par un décret de Hitler signé le 26 septembre 1944, elle est le fruit d'un accord entre la SS, représentée par Himmler, le parti, représenté par Bormann, et l'armée, représentée par Keitel[5]. Dans ce décret, Hitler répartit les compétences : les Gauleitern sont chargés du commandement et de la mise en place de ces unités nouvellement constituées, et Himmler doit assurer la formation, l'organisation et l'équipement des unités du Volkssturm[6]. Ainsi ce dernier nomme Gottlob Berger, un haut responsable de la SS, chef d'état-major du Volkssturm ; avec ce dernier, Himmler évince Bormann de ce nouveau domaine de compétences[6].

Dans son discours du 18 octobre 1944, Himmler rĂ©quisitionne tous les hommes de 16 Ă  60 ans et en appelle aux femmes. Fort de millions de recrues potentielles, le Volkssturm est en rĂ©alitĂ© une armĂ©e de bric et de broc : des soldats inexpĂ©rimentĂ©s, dotĂ©s de Panzerfaust, prĂ©sentĂ©s comme une arme miracle, mais sans autre uniforme qu'un brassard[7]. ConfiĂ©e au Parti, cette initiative souffre dès le dĂ©part du discrĂ©dit qui frappe celui-ci depuis le dĂ©clenchement du conflit, mais plus encore de l'improvisation qui entoure sa crĂ©ation[8]. Exemple parmi d'autres des erreurs qui ont entourĂ© cette dernière levĂ©e, l'affiche qui annonce Ă  Stuttgart la mobilisation pour le Volkssturm reprend les mĂŞmes couleurs et le mĂŞme aspect que celles rendant publiques les exĂ©cutions capitales[9].

Au début du mois de novembre 1944, Himmler définit devant les Gauleitern, inquiets face à l'évolution de la situation militaire, sa conception de cette armée : fort de l'expérience de Varsovie, une ville en ruine constituant la meilleure des positions de défense, il octroie à la milice alors en formation un rôle clé dans la défense des villes du Reich[10]. Ainsi, avec Berger, il préconise, d'accord avec Heinz Guderian, l'organisation d'actions de guérilla[11].

De plus, durant cette période de mise en place, le Parti, c'est-à-dire la Chancellerie du parti dirigée par Martin Bormann, édicte de multiples règlements, jusqu'à l'absurde dans le contexte de l'urgence qu'imposait la situation militaire : ainsi on va jusqu'à concevoir des tampons, des papiers à en-tête, ou encore définir les grades et leurs insignes[10].

Organisation

Des membres de la Jeunesse hitlérienne servant au sein de la Flak à l'entraînement — 1943
Ces membres du Volkssturm recevant une instruction antichar sont revêtus de la tenue de travail et de corvée en toile écrue de l'Armée

Le personnel du Volkssturm fut réparti en quatre levées (« Aufgebote »), encadrées par les cadres du Parti nazi[7].

  • Les levĂ©es I et II Ă©taient constituĂ©es des hommes les plus aptes physiquement, embrigadĂ©s dans les unitĂ©s de dĂ©fense/combat locales de la taille d'un bataillon, les unitĂ©s de la levĂ©e I Ă©tant susceptibles de servir au niveau rĂ©gional du Gau et celles de la levĂ©e II au niveau local du Kreis.
  • La levĂ©e III Ă©tait constituĂ©e des jeunes de 16 Ă  20 ans, sous les auspices des Jeunesses hitlĂ©riennes et avait pour mission première de ramener les jeunes mobilisables par l'armĂ©e Ă  l'intĂ©rieur du Reich, loin des fronts, et d'assurer leur formation militaire de base en vue de la constitution des rĂ©serves de la Wehrmacht. MalgrĂ© l'image largement rĂ©pandue par la propagande du Reich — et reprise dans l'imagerie d'Épinal de la Seconde Guerre mondiale — la participation directe des Jeunesses hitlĂ©riennes aux combats resta relativement marginale Ă©tant essentiellement le fait d'unitĂ©s fanatisĂ©es sur le front de l'Est. Par contre, les Anglo-Saxons captureront sur le front de l'Ouest de nombreux jeunes volontaires de ces Jeunesses hitlĂ©riennes engagĂ©s comme servants de la Flak (dĂ©fense anti-aĂ©rienne, partie la Luftwaffe)[note 3] — y compris des Helferinnen, auxiliaires fĂ©minines.
  • La levĂ©e IV regroupait du personnel moins aptes physiquement en les cantonnant dans des missions de sĂ»retĂ© et de garde (usines, gares, camps du STO…), d'intendance (distributions de repas, etc.) ou administratives.

Les membres du Volkssturm ont donc pour la plupart déjà un emploi, soit dans l'industrie de guerre, soit dans d'autres organismes de défense ou l'administration publique civile ou para-militaire (RAD, RLB, etc.). Leur mobilisation devient effective lorsque leur secteur est attaqué après une phase de pré-alerte. Leurs « uniformes » sont, de ce fait, souvent composés d'effets civils constitués principalement de bleus de travail, salopettes ou uniformes de leurs organismes d'origine… ou des vêtements les plus chauds ou les plus usagés. Certaines unités « privilégiées » recevront de vieux uniformes de prise (tchèques, hollandais, polonais) ou dépareillés de l'armée.

Les combattants de cette milice ne sont rémunérés que s'ils participent activement aux combats.

Équipement, armement et insignes

Afin de mettre les membres du Volkssturm sous la protection des conventions internationales en vigueur à l'époque, notamment en matière de protection des prisonniers de guerre, et de leur éviter les rigueurs des lois de la guerre exposant les civils en arme à de graves mesures de représailles, il fut décidé, faute d'uniformes, de les doter d'un système simplifié de grades propre à cette organisation et de brassards attestant de leur appartenance aux forces armées[note 4].
Mal armés, ces soldats de fortune, trop jeunes ou trop âgés, sont équipés, pour les plus heureux d'entre eux, de Panzerfaust, certains — notent des témoins — n'ont même pas pu disposer d'armes à feu[12].

Les photos 1 et 2 de la galerie présentent le modèle initial de l' Ärmelband (brassard) qui existait en deux versions : blanche avec texte noir ou jaune avec texte vert. Le sujet de la photo 2 est un membre de la Hitlerjugend saxonne (insigne triangulaire de bras : Sachsen) équipé d'effets de surplus de la Luftwaffe (indiquant probablement un ancien Flakhelfer) et est armé d'un MP 40. L'image 3 présente le modèle final que l'on rencontre le plus fréquemment sur les documents d'époque et l'image 4, les Spiegeln (insignes de col) des grades du Volkssturm. Le simple homme de troupe ne porte aucun insigne.

  • 1. Un homme âgĂ© porte le brassard  Deutscher Volkssturm sur son manteau.
    1. Un homme âgé porte le brassard Deutscher Volkssturm sur son manteau.
  • 2. Un adolescent de 16 ans du  Volkssturm de Prusse-Orientale. Plus tĂ´t dans le conflit, son arme automatique Ă  courte portĂ©e Ă©tait gĂ©nĂ©ralement attribuĂ©e Ă  un soldat aguerri, voire aux cadres.
    2. Un adolescent de 16 ans du Volkssturm de Prusse-Orientale. Plus tĂ´t dans le conflit, son arme automatique Ă  courte portĂ©e Ă©tait gĂ©nĂ©ralement attribuĂ©e Ă  un soldat aguerri, voire aux cadres.
  • 3. Brassard  Deutscher Volkssturm / Wehrmacht.
    3. Brassard Deutscher Volkssturm / Wehrmacht.
  • 4. Grades du  Volkssturm :  GruppenfĂĽhrer (1),  ZugfĂĽhrer (2),  KompaniefĂĽhrer (3),  BataillonsfĂĽhrer (4).
    4. Grades du Volkssturm : GruppenfĂĽhrer (1), ZugfĂĽhrer (2), KompaniefĂĽhrer (3), BataillonsfĂĽhrer (4).

Sur la photo 6, des membres du Volkssturm apparaissent coiffés de casques de l'ancienne armée tchécoslovaque et armés d'une MG 34. Le personnage à l'avant-plan de la photo 7 est un membre de la police des chemins de fer (voir l'insigne caractéristique de la Polizei sur le képi). L'uniforme est bleu-noir avec liseré (col, revers, képi) en principe vert, couleur d'arme des forces de police. Photo 8 : prestation de serment de membres du Volkssturm : le personnage au centre appartient probablement à une unité paramilitaire nationale-socialiste (voir les insignes sur la manche gauche et la couleur particulière du col avec liseré). Photo 9 : ces membres de la milice fêtant la Noël 1944 appartiennent manifestement pour la plupart à une ou diverses organisations paramilitaires ; l'insigne de col du personnage à l'avant-plan semble dénoter son appartenance à la SA ou à un organisme affilié (NSKK, NSFK).

  • 5. Des hommes de la  Volkssturm en octobre 1944.
    5. Des hommes de la Volkssturm en .
  • 6. DĂ©but avril 1945, deux  hommes du Volkssturm Ă©quipĂ©s de casques tchèques durant les combats en SilĂ©sie.
    6. Début , deux hommes du Volkssturm équipés de casques tchèques durant les combats en Silésie.
  • 7. Octobre 1944, des hommes âgĂ©s lors d'une formation organisĂ©e par le Volkssturm. Ă€ droite, un pompier dans son uniforme ; ces combattants sont faiblement dotĂ©s d'un vieux fusil austro-hongrois Steyr-Mannlicher Gewehr 95.
    7. , des hommes âgés lors d'une formation organisée par le Volkssturm. À droite, un pompier dans son uniforme ; ces combattants sont faiblement dotés d'un vieux fusil austro-hongrois Steyr-Mannlicher Gewehr 95[1].
  • 8. Des membres du Volkssturm Ă©quipĂ©s de Panzerfaust et de Panzerschreck en novembre 1944 en Prusse-Orientale.
    8. Des membres du Volkssturm équipés de Panzerfaust et de Panzerschreck en en Prusse-Orientale.
  • 9. Des membres du Volkssturm de Prusse-Orientale fĂŞtent NoĂ«l dans leur bunker.
    9. Des membres du Volkssturm de Prusse-Orientale fêtent Noël dans leur bunker.
Membres du Volkssturm armés de fusils Carcano italiens

L'armement distribué aux membres du Volkssturm est en partie le même que celui utilisé par la Wehrmacht, à savoir le Mauser 98K, le Mauser K43, le pistolet-mitrailleur MP 40 et dans une moindre mesure le fusil d'assaut Sturmgewehr 44, arsenal complété d'armes à faible coût spécialement fabriquées pour équiper le Volkssturm tel le pistolet-mitrailleur MP 3008, le Volkpistole, le Gustloff Volksturmgewehr ou encore le Volksgewehr. De nombreuses armes de prises furent également distribuées notamment des fusils italiens, néerlandais, tchèques ou polonais ; des films d'époque montrent des membres du Volkssturm armés de fusil-mitrailleur Lewis pris à l'armée hollandaise en 1940 et de fusils Carcano italiens pris en 1943. Bien entendu, les armes antichar, tels les Panzerfäuste, furent très largement distribuées mais le Volkssturm ne disposait par contre d'aucune artillerie.

  • Volkssturmman Ă©quipĂ© d'un antique Mannlicher 1895 ou d'un modèle hollandais dont les garnitures semblent avoir Ă©tĂ© retirĂ©es.
    Volkssturmman équipé d'un antique Mannlicher 1895 ou d'un modèle hollandais dont les garnitures semblent avoir été retirées.
  • Mitrailleuse de bord de bombardier reconvertie en fusil-mitrailleur.
    Mitrailleuse de bord de bombardier reconvertie en fusil-mitrailleur.

« Deux » Volkssturm

Des membres du Volkssturm occupent un bunker dans le secteur du Mosselland sur le front de l'Ouest

Compte tenu du contexte politico-militaire de la Seconde Guerre mondiale, « deux » Volkssturm peuvent ĂŞtre dĂ©signĂ©s en rĂ©fĂ©rence Ă  la situation sur les deux principaux fronts allemands. Certains dirigeants allemands couvant secrètement l'espoir d'une rupture du front uni des AlliĂ©s. Les pertes essuyĂ©es montrent l'ampleur de l'engagement de ces soldats de fortune : en effet, 175 000 hommes sont morts au sein de cette armĂ©e[9], essentiellement issus de la LevĂ©e 1[13].

Sur le front de l'Ouest

Les Volkssturmänner du front de l'Ouest firent dans l'ensemble preuve de moins de mordant que leurs camarades de l'Ostfront. Leur mission Ă©tait Ă©galement quelque peu diffĂ©rente puisque le Volkssturm dut aussi fournir des Ă©quipages aux positions du Westwall, libĂ©rant ainsi des unitĂ©s de forteresse de la Wehrmacht qui purent ainsi ĂŞtre rĂ©affectĂ©es aux Volksgrenadieredivisionen, les « divisions populaires » d'infanterie aux effectifs allĂ©gĂ©s. Il dut aussi contribuer Ă  la construction de positions complĂ©mentaires et Ă  l'Ă©rection d'obstacles antichars. Ainsi, au cours du siège de Metz par la IIIe ArmĂ©e amĂ©ricaine, un bataillon de Volkssturmmänner, comptant environ 400 hommes, fut intĂ©grĂ© au dispositif dĂ©fensif de la ville. Compte tenu de l’urgence de la situation, les dĂ©cisions furent prises très rapidement. Le dĂ©cret du appelant la levĂ©e en masse des hommes de 16 Ă  60 ans entra en vigueur le , dans les territoires annexĂ©s par le Reich. Dans le CdZ-Gebiet Lothringen, l’institution du Deutscher Volkssturm fut applicable deux jours plus tard, soit le . Le SA-GruppenfĂĽhrer Caspary reçut pour mission de lever immĂ©diatement 12 bataillons dans le gau Westmark. PlacĂ© sous l’autoritĂ© de Vollrath LĂĽbbe, ces bataillons devaient notamment renforcer la 462e Volks-Grenadier-Division engagĂ©e depuis septembre dans la bataille de Metz. L’incorporation du Volkssturm Metz eut lieu Ă  la Bayern-Kasern de Metz, Ă  partir du [14]. Ce bataillon se composait essentiellement d’anciens fonctionnaires de police et de vĂ©tĂ©rans de 14-18 âgĂ©s de plus de 45 ans, mais aussi de jeunes de la Hitlerjugend (Jeunesse hitlĂ©rienne) âgĂ©s de moins de 18 ans, et de rĂ©fractaires de l’armĂ©e allemande. La capacitĂ© de combat de ce bataillon ayant Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e par le commandement allemand comme nulle et sa fidĂ©litĂ© très rĂ©duite, les hommes du Volkssturm Metz furent placĂ©s sous l’autoritĂ© d’un Major de l’Ordnungspolizei et relĂ©guĂ©s Ă  des tâches de maintien de l’ordre et de dĂ©fense passive[15]. Les servants de batteries de la Flak en particulier furent ainsi remplacĂ©s Ă  Metz par des membres de la Jeunesse hitlĂ©rienne et des Volkssturmmänner[16].

Mais si la motivation des Volkssturmmanner sur le front de l'Ouest fut plutôt tiède, leur résistance fut loin d'être purement symbolique, comme le relate John Russell dans son ouvrage No Triumphant Procession (cfr Bibliographie) retraçant les opérations anglo-canadiennes dans le Nord de l'Allemagne.

Sur le front de l'Est

Engagée aussi sur le front de l'Est, la Volkssturm est utilisée dans les dernières batailles, à Königsberg, à Breslau et à Berlin, mais ces unités essuient des pertes importantes, entre soldats mis hors de combat et déserteurs, dans des combats acharnés[17]. Les éléments de la Volkssturm se battent avec ardeur, comme l'ensemble des unités qui y sont engagées, galvanisées par les sentiments anticommunistes et sur le comportement des soldats de l'Armée rouge envers les civils[17].
Dans les combats dans les villes investies par l'Armée rouge, qui émaillent les opérations sur ce front, les unités du Volkssturm se révèlent d'une efficacité redoutable, avec leur armement léger et leur connaissance du théâtre sur lequel elles se battent[18].
Mais la Volkssturm n'est pas active dans les provinces de l'Est seulement sur le plan militaire : en effet, des unités participent, dans diverses mesures et à divers degrés, au sort des Juifs alors en route vers l'Ouest: dans certaines localités, les commandants, souvent d'anciens officiers allemands ayant participé à la Grande Guerre, s'opposent au passage des Juifs dans l'agglomération, voire à leur extermination, effectuée une fois cet obstacle écarté[19], dans d'autres, sur ordre des unités encadrant les déportés, les membres du Volkssturm sont réquisitionnés pour creuser les fosses communes dans lesquelles des Juifs exterminés à la mitrailleuse doivent être ensevelis[20].
La défense du port de Memel constitue le premier engagement d'unités du Volkssturm sur le front oriental; au prix de lourdes pertes, ces unités, composées de civils munis d'un brassard, parvinrent à repousser des poussées soviétiques peu importantes en direction de la ville[21].

Bataille de Berlin

La moitiĂ© des 80 000 dĂ©fenseurs de Berlin proviennent du Volkssturm. Ils sont d'abord utilisĂ©s pour crĂ©er le rĂ©seau dĂ©fensif de la forteresse de Berlin avant d'affronter directement les SoviĂ©tiques. Leur commandant en chef est Joseph Goebbels, alors commissaire Ă  la dĂ©fense de Berlin. Les Hitlerjugend furent parmi les plus combatifs. Leur plus haut fait d'armes est la dĂ©fense des ponts de Pickelsdorf dans la zone ouest de Berlin. Sur les 5 000 jeunes dĂ©fenseurs de la zone, 4 500 meurent au cours des combats. Leur sacrifice retarde l'encerclement de Berlin de deux jours.

Bataille de Berlin : le Generalleutnant Reymann inspecte une tranchée tenue par des membres du Volkssturm

Werwolf

Le SS-Brigadeführer Hans-Adolf Prützmann, le chef supposé du Werwolf

Le Werwolf — qui signifie loup-garou en allemand — est une organisation clandestine de résistance armée que les dirigeants nazis tentèrent de mettre en place toujours dans cette idée de mobilisation populaire totale pour combattre à outrance les ennemis du Reich. La paternité de l'organisation a été attribuée au Generalmajor Reinhard Gehlen — chef du service de renseignement de l'OKW, le haut-commandement de la Wehrmacht, sur le front de l'Est — qui l'aurait activée le 27 février 1945 dans l'éventualité où l'Allemagne tomberait sous occupation soviétique totale. De nombreuses caches d'armes sont constituées afin de continuer le combat une fois les Alliés établis dans la zone. Un livret est donné à tous les membres de la Gestapo afin de leur enseigner des techniques de guérilla. Il est entre autres recommandé de poser des câbles pour décapiter des conducteurs de jeep qui conduisent bien souvent pare-brise baissé, de fabriquer des explosifs improvisés avec des clous, d'incendier du matériel dans les lieux de dépôt. Quelques centaines de meurtres auront lieu du fait des activités du Werwolf.

Son existence réelle en tant que «corps constitué» reste toutefois sujette à caution même si des faits de sabotage et de guérilla dans les zones occupées avant et après le ont bien eu lieu, entraînant l'exécution sommaire de leurs auteurs. Ses membres devaient être recrutés dans la population civile, en particulier parmi les membres de la Jeunesse hitlérienne et parmi les membres fanatiques du Parti nazi encadrés et formés par des SS. Si l'implication des forces armées dans ses activités et ses rangs n'a toutefois jamais été établie, il semble cependant que celle de cadres du Volkssturm issus du Parti et ayant dès lors reçu une formation militaire l'ait été de manière plus nette par les services de renseignements militaires alliés chargés de son démantèlement.

Si le Werwolf — ultime avatar des projets de mobilisation populaire des dirigeants nazis initiateurs du Volkssturm — fut finalement éradiqué dès 1946 dans les zones d'occupation française, britannique et américaine dans l'ouest de l'Allemagne, des rumeurs font état de son activité dans la zone soviétique jusqu'au début des années 1950[note 5], mais elles sont d'autant plus invérifiables que tout acte de résistance, voire de simple dissidence anti-stalinienne, était considéré par la justice soviétique puis est-allemande comme une « menée contre-révolutionnaire des nostalgiques du nazisme »[22].

Les membres des Jeunesses hitlériennes comptaient parmi les éléments les plus fanatiques du Volkssturm même si leur engagement au combat resta marginal.

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

Bibliographie en français.
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  • Magazine Batailles, no 7 - Berlin: les dernières heures du Reich, ; no 33 - articles Allemagne 1945 la forteresse assiĂ©gĂ©e et Le siège de Königsberg Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article ;
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Voir aussi

Articles connexes

Notes et références

Notes

  1. Littéralement, le mot allemand « Volkssturm » se décompose en « Volk » (Peuple) et « Sturm » (tempête, orage ou assaut). « Sturm » est cependant à prendre dans son acception figurée militante et combattante, difficilement traduisible, à laquelle il est également fait allusion dans le nom du mouvement culturel « Sturm und Drang », dans le « Landsturm » de 1813, mobilisation contre l'occupation napoléonienne qui aboutira à la renaissance de l'armée prussienne et dans « Sturmabteilung » en abrégé « SA », la milice paramilitaire du « NSDAP »
  2. « Oberkommando der Heer » : Haut Commandement de l'Armée de Terre.
  3. Au sein de laquelle ils servent déjà depuis 1943 et ne faisant donc pas partie du Volkssturm
  4. Cette mesure visait plus particulièrement le front de l'Ouest, les soldats réguliers capturés sur le front de l'Est n'étant guère traités avec égards et dans le respect des conventions par les Soviétiques, pas plus que les prisonniers russes ne le furent par les Allemands
  5. source en français sur le sujet, en particulier sur la situation dans la zone soviétique

Références.

  1. Yann Mahé et Laurent Tirone, Wehrmacht 46 : l'arsenal du Reich, vol. 1 : Heer & Panzerwaffe, Aix-en-Provence, Caraktère, , 160 p. (ISBN 978-2-916403-12-0), p. 10
  2. Philippe Masson 1994, p. 426
  3. Pierre Ayçoberry, La société allemande sous le IIIe Reich, p. 366.
  4. Ian Kershaw 2012, p. 200-201
  5. Peter Longerich 2010, p. 685
  6. Peter Longerich 2010, p. 686
  7. Pierre Ayçoberry 1998, p. 367
  8. Pierre Ayçoberry, la société allemande sous le IIIe Reich, p. 378.
  9. Pierre Ayçoberry 1998, p. 385
  10. Ian Kershaw 2012, p. 196
  11. Peter Longerich 2010, p. 687
  12. R.J. Evans, Le IIIe Reich, p. 785
  13. P. Masson, Histoire de l'armée allemande, p. 430
  14. Article « Levée en masse », in1944-1945, Les années Liberté, Le Républicain Lorrain, Metz, 1994 (p. 35).
  15. « Levée en masse », Op. cité, p. 35.
  16. Colloque sur le thème : août 1942 : l’incorporation de force des Alsaciens et des Mosellans dans les armées allemandes (Colmar, 15-17 octobre 2002).
  17. Pierre Ayçoberry, la société allemande sous le IIIe Reich, p. 368
  18. P. Masson, Histoire de l'armée allemande, p. 455
  19. D. Blatmann, Les Marches de la mort, p. 134-135
  20. D. Blatmann, Les Marches de la mort, p. 136
  21. Ian Kershaw, La Fin, p. 152
  22. Emmanuel Droit, Vers un homme nouveau ? L’éducation socialiste en RDA (1949-1989), coll. « Histoire », Presses universitaires de Rennes 2009, 354 pp.
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