Tronçonneuse
Une tronçonneuse, aussi appelée scie mécanique ou encore scie à chaîne (Québec), est une scie motorisée et portable de taille et de puissance variables.
Son emploi est commun dans l'agriculture générale ou spécialisée — sylviculture, sylvopastoralisme, agroforesterie, pré-verger, arboriculture, castanéiculture… —, en bûcheronnage, en espaces verts — par les élagueurs —, en jardinage — par les particuliers.
Son utilisation est essentiellement l'abattage d'arbres, l'Ă©lagage, la taille des haies, la coupe de bois de chauffage, et d'autres travaux d'entretien des espaces verts.
Description et fonctionnement
Les tronçonneuses sont constituées d'un moteur, d'une lame ou guide-chaîne et d'une chaîne de tronçonneuse. Le moteur est généralement un petit moteur à deux temps ; certains modèles, pour des petites puissances, utilisent un moteur électrique se raccordant au courant domestique, voire un moteur rotatif pneumatique comme la quasiturbine[1]. On trouve maintenant aussi des tronçonneuses électriques fonctionnant avec des batteries rechargeables.
La chaîne est un assemblage de maillons de métal rivetés, similaire à une chaîne de vélo, mais dont les maillons sont dotés d'instruments de coupe. Généralement, chaque maillon de coupe comporte une "dent" à deux parties : une arête tranchante servant de lame, la « gouge », de forme carrée ou demi-ronde et affûtée selon des angles bien précis, et un limiteur de profondeur, le « rabot ».
Généralement les tronçonneuses n'ont qu'une dent tous les deux maillons, le moteur entraînant la lame à vitesse assez rapide pour produire une coupe efficace sur du bois tendre.
- Détail d'une lame de tronçonneuse.
- Tronçonnage d'un arbre.
- DĂ©coupe d'un tronc.
- Élagage d'un pin.
Histoire
Pour couper du bois
Il y a des débats sur l'origine des tronçonneuses, mais deux importants contributeurs sont Joseph Buford Cox et Andreas Stihl. Ce dernier a développé et breveté une tronçonneuse en 1925 et une tronçonneuse à gasoil en 1929, puis une société pour la production en masse de ces produits. La première tronçonneuse à essence fut commercialisée en 1927 par un autre inventeur allemand, Emil Lerp[2]. Sa femme donne le nom « Dolmar » à son entreprise, qui fait aujourd'hui partie du groupe Makita et produit encore toutes ses tronçonneuses thermiques en Allemagne.
Depuis leur introduction, les tronçonneuses sont devenues un outil primordial de la coupe des arbres. Cependant, évolution technologique aidant, les bûcherons de résineux sont remplacés par des équipements motorisés (abatteuses) qui effectuent un ensemble d'opération (abattage, élagage et débitage) plus rapidement que l'homme. Les feuillus sont encore généralement abattus manuellement, à la tronçonneuse, car leur forme bien plus irrégulière que celle des résineux se prête mal à la mécanisation.
Avant l'invention de la tronçonneuse, il était difficile pour les entreprises de coupe d'abattre les arbres plus rapidement que leur repousse. L'apparition de tronçonneuses légères et efficaces a définitivement modifié cette situation, ce qui constitue un évènement marquant, tant sur le plan écologique que sur le plan politique[3].
Les principaux fabricants sont Stihl, Poulan, Dolmar, Jonsered, Husqvarna, McCulloch, PPK, Solo, Partner, Echo, Makita…
Les tronçonneuses électriques sont moins bruyantes et plus simples d'utilisation que les tronçonneuses thermiques, mais ont moins de puissances et sont limitées par leur fil d'alimentation[4].
Depuis peu des tronçonneuses électriques « professionnelles »[5] (de 2 à 5 kg) apparaissent (Dolmar, Stihl et Pellenc), équipées de batterie, moins bruyantes, moins polluantes pour l'utilisateur, plus faciles à faire démarrer et à entretenir. Au moins un fabricant propose en 2012 une station de charge photovoltaïque adaptée. Pour un des modèles, la batterie est portée comme un sac à dos. En 2012, ces matériels semblent plus adaptés aux petits travaux et chantiers urbains[5].
Risques liés à l'utilisation d'une tronçonneuse
Accidents
L'utilisation de la tronçonneuse n'est pas sans danger. Ainsi l'indice de fréquence des accidents (nombre d'accidents avec arrêt de travail pour 1 000 salariés) en exploitation forestière en France a diminué depuis la fin des années 1990 mais reste élevé : 154 contre 39 pour l'ensemble du secteur agricole, en 2004, selon la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA).
En 2017, on estime que plus de 300 accidents graves surviennent chaque année avec une tronçonneuse en France. Plus de 80 % sont liés à la chaîne de coupe, mais des explosions ou des départs d'incendie de l'engin ont également lieu[6]. En Belgique, on estime que quarante à cinquante accidents ont lieu par an[7].
Équipements de protection individuelle
En règle générale, toute personne utilisant une tronçonneuse devrait porter les équipements de protection individuelle (EPI), à savoir :
- pantalon de sécurité anti-coupure[8] ;
- chaussures ou bottes de sécurité anti-coupure, anti-dérapantes et anti-perforation ;
- casque forestier complet, avec visière pour éviter les projections et protection auditive.
En plus de ces EPI de base, on ne peut que conseiller le port de :
- gants de travail ;
- veste de couleur vive.
Les protections EPI sont constituées de fibres résistantes tressées en couches alternées. Leur but est ainsi de bloquer la lame dès qu'elle entre en contact avec le vêtement. Quatre classes de vêtements sont retenues, correspondant à une vitesse de lame : la classe 0 protège contre les lames allant jusqu'à 16 m/s, la classe 1 jusqu'à 20 m/s, la classe 2 jusqu'à 24 m/s et la classe 3 jusqu'à 28 m/s[9].
Règlementation
Les vêtements de protection pour les utilisateurs de scies à chaîne tenues à la main doivent répondre à la norme européenne EN 381 et porter le logo EN 381 avec une tronçonneuse. Il est à noter que dans de nombreux pays (France, Suisse, etc.) le port des équipements de protection individuelle est obligatoire pour les bûcherons salariés.
La norme prescrit également 4 classes correspondant à la vitesse de la chaîne avec laquelle les tests ont été effectués. Toutes les classes ne sont pas forcément utilisées dans chaque partie de la norme.
- Classe 0 : 16 m/s
- Classe 1 : 20 m/s
- Classe 2 : 24 m/s
- Classe 3 : 28 m/s
La norme est divisée en plusieurs parties, chaque partie étant spécifique à une partie du corps :
- EN 381-5 : Équipements de protection individuelle - protège-jambes ;
- EN 381-7 : Exigences relatives à la tronçonneuse des gants de protection ;
- EN 381-9 : Exigences pour les scies à chaîne ;
- EN 381-11 : Règles pour la partie supérieure du corps.
Le service Prévention des risques professionnels de la Mutualité sociale agricole organise souvent des journées de formation et de prévention pour limiter les risques.
Permis
Une certification européenne sur quatre niveaux est mise en place. Le premier niveau, ECC1, est celui de certification minimum en ce qui concerne l'entretien et l'utilisation de l'outil. Il est souvent appelé « permis tronçonneuse », il est valable à vie et dans l'Union européenne. Le niveau ECC2 vise l'abattage des arbres de petit diamètre, le niveau ECC3 les arbres de gros diamètre, et le niveau ECC4 les coupes complexes, notamment les arbres déracinés ou encroués[10] - [11].
En France, à partir du , le permis tronçonneuse, une formation coûtant environ 250 €, devient obligatoire pour les professionnels ou les pompiers, mais reste optionnel pour les particuliers[12].
En Belgique, le permis tronçonneuse est obligatoire en Flandre à partir de septembre 2019, et certaines entreprises wallonnes l'exigent également[7].
Au Canada, la formation en abattage manuel, qui comprend l'utilisation de la tronçonneuse, est obligatoire pour les travailleurs[13]. Celle-ci, d'une durée de seize heures, n'est pas requise pour une utilisation ponctuelle, comme le tronçonnage du bois de chauffage ou l'abattage d'un arbre isolé[14].
Entretien
Une tronçonneuse possède habituellement deux sources de lubrification. Comme la plupart des moteurs à deux temps, le carburant essence utilisé est mélangé à 2,25 à 2,5 % d'huile pour la lubrification du groupe mobile embiellage et piston. Un second réservoir contient une autre huile spécifiquement conçue pour la lubrification du guide et de la chaîne ; cette huile est généralement appelée « huile de chaîne ». Le contenu de ce réservoir est connecté à une pompe à vis (à débit réglable ou pas) qui injecte l'huile de chaîne dans le tuyau de distribution connecté au guide. À titre de précaution, il est souvent rempli en même temps que le réservoir de carburant Si la tronçonneuse fonctionne sans huile de chaîne, ou bien si l'huile utilisée n'est pas appropriée, la chaîne a un fort risque de se briser. Les précautions habituelles sont à prendre avec le carburant ; il faut notamment éviter de remplir d'essence une tronçonneuse à la lame brûlante.
En présence de certaines essences de bois, notamment les résineux, l'opérateur doit dégager manuellement les sorties d'huile, qui sont bouchées par les particules qui collent aux trous laissant s'écouler l'huile. Les particules de bois peuvent également boucher le filtre à air. Dans ce cas, il doit être dégagé à la main, mais en opération normale, ce problème ne survient guère. Plusieurs opérateurs le frottent avec de l'essence pure, car l'huile favorise l'adhérence des particules. Le meilleur moyen de nettoyer le filtre à air est la soufflette d'air comprimé.
La chaîne doit être bien affûtée — le terme aiguiser étant plutôt destiné aux lames comme celles des couteaux — pour assurer une coupe aisée. Une tronçonneuse coupe le bois sans qu'il soit nécessaire de forcer. On peut utiliser une lime ronde, trapèze, trapèze double ou triangle montée sur un guide, ou recourir à une affûteuse électrique spécialement conçue à cet effet. Dans ce cas, il faut démonter la chaîne. Le guide assure que les gouges soient affûtées selon le meilleur angle. Un affûtage à la main peut donner un meilleur résultat s'il est bien réalisé, mais les affûteuses électriques sont plus rapides, surtout lorsque la chaîne est abîmée ou salie. Lorsqu'elles sont composées de carbures, les dents requièrent une technique d'aiguisage nécessitant l'intervention d'un spécialiste, sinon, les chaînes classiques peuvent être affûtées par leurs utilisateurs. Il ne faut pas hésiter à changer une chaîne trop usée, ou abîmée, ou qui a trop chauffé. Une chaîne qui casse en fonctionnement est un danger majeur. En même temps que l'affûtage, il peut être nécessaire de rectifier le guide chaîne.
Élément de sécurité essentiel, un bon affûtage permet aussi de scier plus rapidement, d'économiser le moteur, la chaîne, et le guide chaîne. En cas de travaux intensifs, on peut utiliser successivement plusieurs chaînes préalablement aiguisées et qui ne seront ré-aiguisées qu'à la fin des travaux, évitant ainsi d'interrompre le travail. À chaque affûtage, le guide chaîne est alors retourné horizontalement afin d'obtenir une usure plus régulière. Le guide chaîne doit être changé s'il présente une trop forte usure de sa gorge — les maillons de la chaîne ne rentrent alors plus complètement dans la gorge — ou une usure très dissymétrique des deux bords de la gorge — ne pas hésiter à s'adresser à un réparateur professionnel. En utilisation normale, le guide chaîne est conservé très longtemps. Son remplacement sur une grosse tronçonneuse peut être coûteux.
Culture
Le film de guerre Le Dernier Train du Katanga, sorti en 1968, comprend de nombreuses scènes de torture, lors desquelles la tronçonneuse est utilisée[15]. Par la suite, l'engin apparaît dans les films The Wizard of Gore, La Dernière Maison sur la gauche, Scarface, mais c'est surtout le film Massacre à la tronçonneuse, qui s'est rendu extrêmement célèbre, et va associer les films d'horreur aux tronçonneuses[15], parmi lesquels on cite Evil Dead ou l'Armée des morts. Les tronçonneuses apparaissent aussi dans des jeux vidéo tels que Resident Evil, Doom, Grand Theft Auto, Silent Hill, Killing Floor ou encore Left 4 Dead 2.
Dans Warhammer 40,000, les tronçonneuses sont des armes assez répandues dans l'Imperium et aussi parmi ses ennemis, mais modifiées de manière à être prises en main comme une épée.
Dans Gears of War, le fusil d'assaut Lanzor possède une tronçonneuse en guise de baïonnette.
De façon plus marginale, la tronçonneuse a aussi été utilisée en musique par des groupes tels que Jackyl (hard rock) ou Gloomy Grim (black metal). Des magiciens aiment couper en deux leurs collègues avec une vraie tronçonneuse, la plupart du temps le tour de magie est préparé, sans aucun problème de santé.
Sculpture sur bois
Certains passionnés se servent d'une tronçonneuse afin de sculpter des arbres abattus[16] - [17] - [18].
Notes et références
- 2006 Quasiturbine Chainsaw - YouTube [vidéo]
- « ORIGINE ET HISTOIRE DE LA TRONÇONNEUSE », sur lambin.fr, (consulté le ).
- (en) John R. McNeill, Something New Under the Sun - An Environmental History of the Twentieth-Century World, New York : Norton, 2000), chap. 10. (fr) Traduction française : Du nouveau sous le soleil : Une histoire de l'environnement mondial au XXe siècle, Seyssel : Champ Vallon, 2010
- Erwan Seznec, « Bien choisir sa tronçonneuse », sur quechoisir.org (consulté le ).
- Sebulke J. [2012]. Mûres pour le marché professionnel. La Forêt 65(2) : 19-21 (3 p., 1 fig., 1 tab.).
- Didier Deniel, « Tronçonneuses. Bientôt un permis ? », sur letelegramme.fr, (consulté le ).
- Thomas Deschamps, « Des formations et un nouveau permis pour réduire le nombre d'accidents de tronçonneuses », sur RTBF.be, (consulté le ).
- Classes et normes pour les pantalons anti-coupure
- Pierre Peeters, « Tronçonner en toute sécurité grâce aux EPI », sur lafranceagricole.fr, (consulté le ).
- p.marchaison, « Formation : Le Permis Tronçonneuse », sur cfpf.org, (consulté le ).
- C. Le Gall, « PERMIS TRONÇONNEUSE Vous n’allez pas y couper ! », sur lafranceagricole.fr, (consulté le ).
- Jonathan Landais, « Le permis tronçonneuse bientôt obligatoire pour les particuliers ? », sur francebleu.fr, (consulté le ).
- « Formation en abattage manuel », sur csst.qc.ca (consulté le ).
- MARC-ANDRÉ CÔTÉ, « RESPECTEZ-VOUS LA NOUVELLE RÉGLEMENTATION SUR L’UTILISATION D’UNE SCIE À CHAÎNE? », sur foretprivee.ca, (consulté le ).
- Pierre Sauveton, « LA TRONÇONNEUSE EST UNE ICÔNE DE LA POP CULTURE COMME LES AUTRES », sur rockyrama.com.
- Germain Treille, « Un Mayennais fait des sculptures à la tronçonneuse », sur francebleu.fr, (consulté le ).
- Delphine Cros, « Sculpture sur bois avec une tronçonneuse ... impressionnant [VIDEO] », sur France 3 Centre Val-de-Loire, (consulté le ).
- « Il réalise des sculptures à la tronçonneuse », sur ouest-france.fr, (consulté le ).